Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 11 septembre 2019, n° 18/00364

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. com., 11 sept. 2019, n° 18/00364
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 18/00364
Décision précédente : Tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, 10 janvier 2018, N° 2016011193
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 11 Septembre 2019

N° RG 18/00364 – N° Portalis DBVU-V-B7C-E565

FK

Arrêt rendu le onze Septembre deux mille dix neuf

Sur APPEL d’une décision rendue le 11 janvier 2018 par le Tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND (RG n°2016011193)

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. François RIFFAUD, Président

M. François KHEITMI, Conseiller

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société TRANSPORTS D FRERES

SAS immatriculée au RCS de CLERMONT-FERRAND sous le […]

[…]

[…]

R e p r é s e n t a n t : M e A n n e – c l a i r e A L I B E R T – A N D A N S O N , a v o c a t a u b a r r e a u d e CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

La société TRANSPORTS A B – TPN

SARL immatriculée au RCS d’Aurillac sous le […]

[…]

[…]

Représentant : la SELARL POLE AVOCATS, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉE

DEBATS : A l’audience publique du 12 Juin 2019 Monsieur KHEITMI a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 11 Septembre 2019.

ARRET :

Prononcé publiquement le 11 Septembre 2019, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. François KHEITMI pour M. François RIFFAUD, Président empêché, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure – demandes et moyens des parties :

La SARL TRANSPORTS A B (la société B) et la SAS TRANSPORTS D FRERES (la société D) ont engagé au cours de l’année 2014 des discussions, pour envisager de regrouper leurs activités en créant une société commune. Ces deux sociétés ont conclu le 14 juillet 2014 un protocole d’accord en vue de leur rapprochement.

Des dissensions se sont ensuite élevées entre les deux gérants, MM. A B et C D, et les deux sociétés sont convenues d’organiser leur rupture définitive. Elles ont conclu le 17 juin 2015 un protocole de sortie.

L’article 6 de ce protocole de sortie traitait de la répartition du matériel, et notamment des véhicules qui avaient été donnés en location par la société B à la société D. Il était prévu qu’afin de permettre à la société preneuse de se rééquiper, les locations en cours seraient maintenues provisoirement, selon les conditions en vigueur jusqu’alors, la société preneuse ayant notamment l’obligation de continuer à assurer l’entretien courant. Le loyer serait facturé jour par jour, au prorata du mois ; les véhicules loués devaient être restitués entre le 15 et le 30 septembre 2015.

Les véhicules ont tous été restitués pendant la période convenue, en présence d’huissiers de justice requis par la société propriétaire, et qui ont dressé cinq procès-verbaux de constatations, mentionnant l’état du matériel.

La société B, estimant que la société D avait laissé impayée une partie des loyers et qu’elle n’avait pas rempli son obligation d’entretien, lui a adressé le 31 octobre 2015 une lettre recommandée la mettant en demeure de payer la somme de 51 614,73 euros, puis l’a fait assigner en référé devant le président du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, en paiement d’une provision sur les seuls loyers. Cette juridiction a rejeté les demandes de la société B par une ordonnance du 5 avril 2016, au motif d’une contestation sérieuse.

La société B a ensuite envoyé à la société D une nouvelle mise en demeure, portant sur une somme réduite à 39 952,64 euros, pour les loyers ; et le 9 mai 2016, la société D lui a payé à ce titre une somme de 25 101,60 euros.

Le 12 octobre 2016, la société B a fait assigner la société D devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, en paiement d’une somme principale de 66 466,17 euros, au titre du solde des loyers (pour 14 852,04 euros) et des frais de remise en état du matériel loué (pour 51 614,73 euros).

Le tribunal de commerce, suivant jugement du 11 janvier 2018, a condamné la société D à payer à la société B les sommes de 14 852,04 et de 51 614,73 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, et capitalisation des intérêts. Le tribunal a condamné en outre la société D à payer à la société demanderesse une somme de 520 euros à titre d''indemnité forfaitaire', et celle de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Suivant une déclaration faite au greffe de la cour le 13 février 2018, la société D a interjeté de ce jugement, en toutes ses dispositions qui prononçaient condamnation à son encontre.

La société appelante demande à la cour de réformer le jugement, et de débouter la société B de toutes ses demandes.

Sur les loyers : elle affirme avoir soldé sa dette, en versant à la société B une somme de 25 101,60 euros, et critique les factures émises par cette société, en ce qu’elles comportent le loyer afférent où jour de la restitution de chacun des véhicules, alors que les restitutions ont eu lieu en début de journée, de sorte que le loyer n’était pas dû pour les journées considérées, et que d’ailleurs l’un des véhicules concernés n’était pas utilisable. Sur les frais de remise en état : la société D déclare qu’elle a rempli son obligation d’entretien du matériel loué, et que la société B ne saurait fonder sa demande sur des constats établis lors des restitutions, ces constats ayant été dressés sans la présence de l’un de ses représentants, et sans d’ailleurs qu’un état du matériel ait été fait en début de location. Elle relève que les huissiers n’avaient pas les moyens techniques nécessaires pour vérifier certains prétendus défauts d’entretien (tels que l’usure des pneus), et que la société B ne justifie pas avoir réellement supporté les frais de remise en état dont elle demande réparation.

La société B conclut à la confirmation du jugement. Sur les loyers : elle revendique le droit au loyer pour le jour de la restitution, et conteste l’impossibilité de faire usage de l’un des camions. Sur les frais de remise en état : elle expose que le gérant de la société preneuse a été invité par les huissiers à assister à la restitution des véhicules, mais qu’il s’y est refusé ; que la société D n’avait formulé aucune critique sur l’état du matériel au moment où elle en avait pris possession, en début de bail, et que ce matériel était alors en parfait état. Elle produit des factures qu’elle a elle-même établies en début de bail, et d’autres pièces parmi lesquelles l’attestation d’un technicien ayant assisté l’huissier lors de ses opérations, et constaté l’usure des pneumatiques à la date de restitution de certains véhicules.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 2 mai 2019.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations des parties, à leurs dernières conclusions déposées avant la clôture le 3 et le 23 avril 2019.

Motifs de la décision :

Sur les loyers :

La société B demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, alors que les premiers juges ont fait droit à une partie de la défense de la société D, en retenant le bien fondé partiel d’une facture d’avoir émise par cette société, et comportant en particulier, en compensation de la dette de loyers, le montant du loyer décompté pour le jour de restitution de chacun des véhicules loués (pièce n° 3 produite par la société D).

La société B admet ainsi le bien fondé de la facture d’avoir sur ce point, à l’encontre de sa propre argumentation, qui tend à inclure le jour de restitution dans la période de facturation du loyer ; il convient par suite de confirmer le jugement, en ce qu’il a prononcé la réduction des loyers pour ce

motif.

Dans la facture d’avoir susdite, la société D demandait en outre à voir exclure de sa dette le loyer d’un camion BS-997-YC, et d’une partie du loyer d’un véhicule CE-866-BE, aux motifs que le camion était 'inutilisable', et que l’autre véhicule s’était trouvé 'en réparation’ pendant 4 jours, sur les 21 jours facturés.

Cependant et comme l’a justement énoncé le tribunal de commerce, il appartenait à la société D de formuler en temps utile toutes protestations sur le défaut de fonctionnement du matériel loué, ou sur l’impossibilité d’en faire usage ; elle ne justifie ni même ne prétend avoir formulé de réclamation concernant les dits véhicules, et elle ne rapporte d’ailleurs aucune preuve, dans le cadre de la présente instance, qu’elle ait été privée de l’usage de ces véhicules pendant tout ou partie de la période couverte par la facturation.

C’est donc à bon droit que le tribunal de commerce a énoncé, par le jugement déféré, que seule devait être prise en compte, sur la facture d’avoir émise par la société D, la partie afférente aux loyers du jour de restitution de chaque véhicule, pour une somme de 699,20 euros.

La société B produit les factures de loyers concernées, portant pour la première sur le mois d’août 2015, et pour les 7 autres sur le mois de septembre 2015 ; le montant total facturé s’établit à 39 953,64 euros taxe comprise ; en l’absence d’autre contestation motivée de la part de la société D, compte tenu du paiement de la somme de 25 101,60 euros qu’elle a déjà effectué, et de la réduction qu’il convient d’opérer au titre du dernier jour de location, le solde de loyer qu’elle reste devoir s’établit à 39 953,64 – 25 101,60 – 699,20 = 14 152,84 euros. Le jugement sera confirmé, en ce qu’il a condamné la société D à payer la dite somme de ce premier chef.

Sur les frais de remise en état :

Les dispositions transitoires du protocole de sortie du 30 juin 2015 obligeaient la société D à 'continuer d’assumer les opérations d’entretien courant', et à 'entretenir les matériels pendant cette période transitoire comme les siens', sauf les contrôles techniques et sanitaires qui étaient à la charge de la société B. La société D devait signaler à la société bailleresse 'tous problèmes (pannes …)' dans les 48 heures.

La société B produit, au soutien de sa demande en paiement d’une somme de 51 614,73 euros pour les frais de remise en état des véhicules, une série de 6 factures qu’elle a elle-même établies, du 20 août au 26 octobre 2015, au nom de la société D. Ces factures portent soit sur un état d’usure des pneumatiques supérieur à 50 % (facture n° F15.0080 de 4 820,83 euros, pour les véhicules CB 433, DL 894, CD 904 et BQ 527, et facture n° F15.0111 datée du 26 octobre 2015, portant la somme de 10 623,86 euros et ne mentionnant pas les véhicules concernés), soit sur des opérations d’entretien de groupes frigorifiques non effectuées pendant la période de location (facture n° F15.0109 datée du 26 octobre 2015, pour 4 405,20 euros), soit encore sur des opérations d’entretien ou de remise en état des tracteurs, non effectuées pendant la location (factures n° F15.0108 et n° F15.0110 datées du 26 octobre 2015, pour 13 926 et 16 158,84 euros). Une sixième et dernière facture n° 15.0112 du 26 octobre 2015, émise pour 1 680 euros, porte sur la non restitution de deux boîtiers informatiques VEHCO.

Sur cette dernière facture : la société D déclare que deux boîtiers embarqués n’ont en effet pas été retirés par la société B, et qu’il restent à sa disposition auprès du chef d’atelier de la société D. Il appartenait cependant à celle-ci de restituer les dits boîtiers en même temps que les véhicules, et il est désormais trop tard pour proposer utilement leur restitution, près de quatre années après le terme du 30 septembre 2015. La demande de la société B au titre de cette facture est bien fondée.

S’agissant des autres factures, relatives aux frais de remise en état proprement dits : les constats d’huissier que la société B produit aux débats, pour justifier de l’état du matériel au moment de sa restitution, constituent des preuves recevables, et la société D ne saurait en contester la pertinence au motif qu’ils ont été dressés en l’absence d’un de ses représentants : les huissiers de justice auteurs des cinq constats ont mentionné, dans chacun de leurs procès-verbaux, que le dirigeant de la société D, sans s’opposer à sa présence dans les locaux de l’entreprise et au déroulement de ses opérations, a fait connaître qu’il ne souhaitait pas y être présent. La société D, qui s’est elle-même refusée par la personne de son dirigeant à être représentée lors des restitutions comme il le lui était proposé, ne peut se plaindre du caractère non contradictoire des constatations, qui n’est résulté que de son seul refus.

La société D ne saurait davantage se prévaloir de l’absence de constatation de l’état du matériel en début de location, pour affirmer qu’il était déjà en mauvais état lorsqu’elle l’a reçu : elle est présumée l’avoir reçu en bon état de réparations locatives, sauf preuve contraire (article 1731 du code civil) ; la preuve contraire n’est pas établie par l’attestation du mécanicien responsable de l’atelier de la société D, M. E F, qui affirme que le matériel provenant de la société B était 'dans un état lamentable’ au moment de son arrivée : cette attestation très générale ne précise pas les véhicules concernés, elle émane d’un salarié de la société appelante, et elle est d’ailleurs contredite par une attestation d’un ancien responsable technique de la société adverse, M. G X, qui déclare au contraire que l’ensemble du matériel roulant de la société B était 'en parfait état’ pendant le temps que M. X a exercé ses fonctions dans cette société, du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2014 (pièce n° 18 produite par la société D). Ce témoin précise que lors de l’intégration des deux sociétés en septembre 2014, l’état d’usure global des véhicules de la société B était de 40 %, et qu’il restait donc un potentiel d’utilisation de 60 %.

La société D produit aussi des attestations de MM. H I et J K, professionnels d’entreprises extérieures à la société D et travaillant avec celle-ci, qui témoignent du parfait état d’entretien des véhicules de cette société. Ces témoignages ne portent cependant que sur le matériel 'de la société D', ils n’établissent donc pas que cette société ait entretenu avec le même soin celui de la société B.

Il convient d’examiner chacune des factures en cause.

La facture n° F15.0109, relative à des opérations d’entretien des groupes frigorifiques, non réalisées par la société D, mentionne dans la colonne ' Quantité ' : 1, et par ailleurs un prix unitaire de 3 671 euros hors taxe, soit 4 405,20 euros taxe comprise. À cette facture est annexée un 'tableau entretien groupes frigorifiques transmis par G. D', comportant une liste de 11 numéros d’immatriculation, avec au regard de chacun de ces numéros un 'chiffrage', de 315 ou de 521 euros hors taxe, avec un total de 3 671 euros hors taxe porté sur la facture (pièce n° 20-1 produite par la société B).

L’un des constats d’huissier, établi le 15 septembre 2015, fait état d’un défaut de contrôle d’entretien du groupe frigorifique des remorques immatriculées CF-997-NF et AB-782-AP (figurant sur le tableau susdit, annexé à la dit facture) ; l’huissier a constaté que, pour chacune de ces deux remorques, le carnet d’entretien était vide, que la date du dernier entretien du groupe frigorifique n’était pas indiquée, et que d’après un autocollant apposé sur la carrosserie, le dernier contrôle du hayon était valable jusqu’en novembre 2014. La société B produit un autre constat dressé le même jour 15 septembre 2015, qui atteste du dépassement de la date limite de visite, ou du défaut d’information dans le carnet d’entretien, pour les remorques frigorifiques immatriculées AB-759-HR, AP-439-PW, BE-805-YW, Y, et Z.

La société D déclare qu’elle établit des fiches informatisées pour l’entretien, suppléant les mentions du carnet d’entretien : il lui appartenait cependant de produire ces fiches aux débats. Les

tableaux qu’elle présente (pièces N° 11 et 12), intitulés ' tableau récapitulatif de l’entretien effectué par la société D’ et 'extrait du fichier atelier novembre 2015", ne mentionnent aucune action réalisée sur les 7 remorques objet des constats susdits ; seule l’une des factures de travaux que produit aussi la société appelante (pièces n° 13, 14 et 15) fait état d’une 'demande de duplicata attestation CEMAFROID', facturée en janvier 2015 sur la remorque immatriculée AB-759-HR, indication qui n’empêche que l’huissier a constaté le défaut d’entretien de cette même remorque.

La société D ne formule d’ailleurs aucune contestation précise sur le coût unitaire indiqué dans la dite facture, au titre des frais d’entretien de chacun des groupes frigorifiques ; il convient d’admettre le bien fondé de cette facture, qui constitue une preuve du préjudice en cause, mais dans la limite des 7 remorques ayant fait l’objet de constats, dès lors que la société B ne rapporte pas la preuve d’un défaut d’entretien des 4 autres remorques mentionnées dans le tableau annexe. Le montant facturé sera réduit à (315 x 6) + 521 = 2 411 euros hors taxe, soit 2 883,56 euros taxe comprise.

La société B produit, jointe à la facture n° F15.0080 qu’elle a elle-même établie, deux factures de la société BESTDRIVE du 31 juillet et 30 août 2015, portant sur la fourniture et la pose de pneus sur les véhicules immatriculés CB-433-JM et DL-894-DX, et sur un ' montage au troisième essieu’ et une 'jante arrière extérieure gauche’ pour les véhicules immatriculés BQ-527-ZF et CD-904-KD. La facture établie par la société B porte sur la ' refacturation de 50 % du montant’ du coût des pneumatiques comportant un état d’usure supérieur à 50 %. Cependant, aucun des constats d’huissiers que présente la société B ne porte sur la restitution de l’un de ces quatre véhicules, de sorte que la cour n’est pas en mesure de vérifier que les frais en cause concernent du matériel objet de la location ; de plus, il n’apparaît pas de cohérence entre le montant hors taxe de la facture en cause (4 017,36 euros) et les factures annexes de la société BESTDRIVE : le montant facturé par la société B ne correspond pas à 50 % de ceux que lui a facturés la première de ces sociétés. La demande afférente à cette facture n’apparaît pas fondée, elle sera rejetée.

La facture n° F15.0111, établie par la société B pour la somme de 10 623,86 euros, porte elle aussi sur la 'restitution de véhicules avec état d’usure pneumatiques supérieur à 50 %' ; à cette facture sont joints un décompte, intitulé 'Transports A B', comportant des séries de pneus soit neufs soit rechapés de différentes marques et modèles, indiquant d’abord la valeur totale de ces pneus (' coût total du parc à 100 %'), portée pour 52 354,80 euros, puis les 15 % de cette valeur : 7 853,22 euros ; cette dernière somme a été reportée sur la facture, augmentée de 1 000 euros, pour le coût de l’évaluation du parc de pneumatiques, réalisé par la société BESTDRIVE. Le montant facturé a donc été fixé à 7 853,22 + 1 000 = 8 853,22 euros hors taxe, soit 10 623,86 euros avec la TVA à 20 %.

Les constats d’huissier produits par la société B laissent d’ailleurs apparaître : un pneu lisse sur la remorque immatriculée Y ; une bande de roulement visible sur un pneu de la remorque immatriculée BS-997-YC (constat du 15 septembre 2015, pièce n° 5) ; la présence, sur des pneumatiques des 7 tracteurs restitués le 18 septembre 2015, de dégradations ou d’une usure supérieure à 50 % (pièce n° 6) ; l’usure supérieure à 50 % de tous les pneus de l’un des deux tracteurs restitués le 25 septembre 2015 (pièce n° 7) ; l’usure anormale des pneumatiques de deux remorques restituées le 28 septembre 2015, et l’usure supérieure à la moitié pour un tracteur restitué le 1er octobre 2015 (pièces n° 8 et 9).

Ces constats établissent la réalité de l’usure anormale des pneumatiques concernés, et la société D est mal venue à contester la capacité de l’officier ministériel à apprécier le caractère anormal de cette usure, puisque l’huissier s’est adjoint un technicien en la personne de M. L M, de la société BESTDRIVE, qui l’a assisté lors de ses opérations.

La société B produit aussi une attestation de M. N O, prestataire de services en entretien de pneumatiques, et qui confirme que cette société a sollicité ses services pour évaluer son parc de pneumatiques à la fin de l’année 2015, le 'potentiel de gomme restant’ étant alors de 35 %

(pièce n° 21).

Au vu de l’ensemble de ces éléments, et notamment des constats d’huissiers dressés avec l’assistance d’un technicien qualifié, qui révèlent une usure anormale sur un grand nombre de pneumatiques des véhicules restitués, et de la fixation du préjudice consécutif, faite sur la base d’une évaluation donnée par un autre technicien (avec application du taux de 15 % correspondant entre la différence entre les 35 % de 'potentiel de gomme restant’ et les 50 % admissibles), évaluation non contestée de manière argumentée par la société D, la demande faite au titre de la facture n° F15.0111 apparaît bien fondée, et il convient d’y faire droit.

La facture n° F15.0108 porte sur des ' travaux d’entretien des tracteurs non effectués durant la période de location', facturés 13 926 euros taxe comprise. À cette facture est joint un ' tableau entretien tracteurs routiers transmis par G. D', comportant une liste de 10 tracteurs (ayant fait l’objet des restitutions des 18 et 25 septembre 2015), et une liste d’opérations d’entretien transmise par la société D, opérations dont les dates s’échelonnent, selon le tableau, entre le 20 janvier et le 6 mars 2015. La société B précise que les chiffrages ont été réalisés par la société SOVECA.

La société D conteste cette facture, en affirmant notamment qu’elle a effectué l’entretien courant du matériel pendant qu’elle en avait l’usage. Il lui appartient cependant de rapporter elle-même la preuve, au-delà de ses affirmations, qu’elle a rempli cette obligation qui lui incombait en vertu du protocole de sortie (article 1315 du code civil, devenu article 1153 du même code). Elle n’établit pas cette preuve, pour la période écoulée; et elle ne conteste pas les dates d’entretien portées sur le tableau, qu’elle a transmis elle-même à la société B.

Cette dernière société est donc bien fondée à demander réparation de ce chef, la société D ne contestant pas que les frais facturés sont conformes aux coûts habituels en la matière (la société B peut avoir réalisé les opérations d’entretien elle-même, sans être tenue de produire des factures d’entreprises tierces, ou de justifier de paiements faits à de telles entreprises). Il sera fait droit à la demande présentée au titre de cette facture.

La facture n° F15.0110, émise pour la somme de 16 158,84 euros, concerne la ' remise en état d’usage des tracteurs et semi-remorques’ ; elle contient au verso le détail des frais facturés, visant diverses anomalies constatées soit sur des tracteurs (dommages sur des pare-brises, absence de bouchons de lave-glace ou d’un extincteur, ou 'remise en état’ sans autre précision), soit sur des semi-remorques, et précise le numéro d’immatriculation de chacun des véhicules concernés, et le devis établi par une tierce entreprise pour chacun des travaux de remise en état (notamment les devis de SORHOFROID pour la réfection de 8 semi-remorques). La plupart des devis sont joints à la facture (pièce n° 24 produite par la société B).

La réalité même des désordres indiqués ressort des constats d’huissier : ainsi pour les semi-remorques immatriculées AB-782-AP (plusieurs enfoncements visibles sur la caisse), AB-789-RH (enfoncement et éraflure sur la caisse, défaut de fonctionnement du groupe frigorifique), AP-439-PW (éraflures sur la caisse, détérioration de la télécommande du hayon élévateur), BE-805-YW (éraflure sur le côté gauche, trace de choc sur la porte arrière droite), Y (dégradation de la bâche du toit, arrachement ou absence des tampons arrière), BS-997-YC (absence d’un tampon, enfoncement de l’optique gauche, fissuration du montant de la porte de droite) : constat du 15 septembre 2015, pièce n° 5 de la société B ; et pour les tracteurs DAF CG-701-DM (traces de choc sur la pare-brise), et SCANIA CS-372-RW (neuf trace de choc sur le pare-brise : constat du 18 septembre 2015, pièce n° 6.

Ces éléments de preuve précis et concordants établissent les dommages visés sur la facture n° F15.0110, ainsi que le montant de ces dommages, résultant de manquements de la société D à son obligation d’entretenir le matériel donné à bail, et à celle de répondre des

dégradations survenues pendant le bail, édictée à l’article 1732 du code civil. La société B est bien fondée à demander réparation pour le montant indiqué sur la dite facture.

La demande de la société B, au titre des factures de remise en état du matériel, est donc bien fondée dans la limite de 1 680 + 2 883,56 + 10 623,86 + 13 926 + 16 158,84 = 45 272,26 euros. Le jugement sera réformé sur ce point, et confirmé en ses autres dispositions, y compris sur la capitalisation des intérêts et sur l’indemnité forfaitaire, prononcées l’une et l’autre conformément au droit (article 1343-2 du code civil, et L. 441-6 du code de commerce, pris dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement).

Il n’est pas contraire à l’équité de laisser à chacune des parties la charge des frais d’instance irrépétibles qu’elle a exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la cour ;

Réforme le jugement déféré, en ce qu’il a condamné la SARL TRANSPORTS D FRERES à payer à la SARL TRANSPORTS A B une somme de 51 614,63 euros au titre des factures d’entretien du matériel donné à bail ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la SARL TRANSPORTS D FRERES à payer à la SARL TRANSPORTS A B une somme de 45 272,26 euros au titre des factures d’entretien ou de remise en état du matériel donné à bail ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Rejette le surplus des demandes ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu’elle a exposés en cause d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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