Cour d'appel de Rouen, Ch. civile et commerciale, 21 mai 2015, n° 14/02942

  • Conteneur·
  • Sociétés·
  • Entreposage·
  • Commissionnaire de transport·
  • Fret·
  • Chargeur·
  • Surestaries·
  • Connaissement·
  • Demande·
  • Contrepartie

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. civ. et com., 21 mai 2015, n° 14/02942
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 14/02942
Décision précédente : Tribunal de commerce de Le Havre, 15 mai 2014, N° 12-5932
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

R.G : 14/02942

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 21 MAI 2015

DÉCISION DÉFÉRÉE :

12-5932…

TRIBUNAL DE COMMERCE DU HAVRE du 16 Mai 2014

APPELANTE :

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Valérie GRAY, avocat au barreau de ROUEN, postulant

assistée de Me Chistophe NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEES :

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Yannick ENAULT de la SELARL YANNICK ENAULT-CHRISTIAN HENRY, avocat au barreau de ROUEN

assistée de Me Alix PIOT, avocat au barreau de BORDEAUX, plaidant

XXX

XXX

XXX

représentée et assistée de Me Fabrice LEMARIE de la SELARL MARGUET LEMARIE, avocat au barreau du HAVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :

Monsieur FARINA, Président

Madame AUBLIN-MICHEL, Conseiller

Madame BERTOUX, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme LAKE, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 19 Mars 2015, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 Mai 2015

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 21 Mai 2015, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur FARINA, Président et par Mme LAKE, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

En août 2011 la société Charlatte Reservoirs spécialisée dans la conception et la fabrication de réservoirs hydrauliques et industriels a vendu à la société Al Barih située en Irak trois cuves sur pied et leurs accessoires pour une valeur de 311.715 € .

Elle a confié à la société Necotrans Aata l’organisation du transport maritime du Havre au port de Umm Qasr en Irak.

La société Necotrans a chargé la société Mediterranean Shipping Company (MSC) du transport maritime suivant confirmation de réservation de fret du 24/08/2011.

Selon connaissement du 30/09/2011 la société MSC a pris en charge à bord du navire MSC Fado trois conteneurs dans lesquels étaient réparties les cuves ; ces conteneurs ont été déchargés au port d’Umm Qasr sans réserve les 11 et 15 novembre 2011.

Les marchandises n’ont jamais été réclamées par leur destinataire en dépit de deux mises en demeure de les retirer adressées les 27/01 et 26/06/2012 par la société MSC à la société Charlatte Réservoirs.

Par acte d’huissier du 8/11/2012 la société MSC a fait assigner les sociétés Necotrans et Charlatte Reservoirs devant le tribunal de commerce du Havre en paiement des frais d’immobilisation et d’entreposage.

Par acte d’huissier du 21/11/2012 la société Necotrans a appelé en garantie la société Charlatte Réservoirs et par acte d’huissier du 3/12/2012 celle-ci a appelé en garantie la première.

Par jugement en date du 21/12/2012 les trois procédures ont été jointes.

Par jugement du 16/05/2014 le tribunal a :

— reçu la société MSC en son action contre la société Necotrans l’a déclarée partiellement fondée ;

— reçu la société MSC en son action contre la société Charlatte Réservoirs l’a déclarée partiellement fondée ;

— condamné solidairement les sociétés Necotrans et Charlatte Réservoirs à payer à la société MSC la somme de 78816 USD concernant les surestaries arrêtées au 28/02/2014 ou sa contrevaleur en euros à la date du jugement;

— condamné solidairement les sociétés Necotrans et Charlatte Réservoirs à payer à la société MSC la somme de 12390 USD concernant les frais de gardiennage arrêtés au 28/02/2014 ou sa contrevaleur en euros au jour du jugement ;

— donné acte à la société MSC de ce qu’elle justifiera auprès des sociétés Necotrans et Charlatte Réservoirs de la date à laquelle les conteneurs seront retirés du terminal portuaire de façon à lui permettre d’établir les décomptes finaux des frais de surestaries et de gardiennage ;

— dit sans objet les appels en garantie ;

— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement ;

— débouté les parties de leurs autres et plus amples demandes ;

— condamné solidairement les sociétés Necotrans et Charlatte Réservoirs aux entiers dépens.

Pour statuer comme il l’a fait le tribunal a considéré que la société Charlatte Réservoirs chargeur était tenue légalement de payer le fret et les frais accessoires notamment de surestaries et d’entreposage au port ; que la société Necotrans commissionnaire de transport n’était libérée de ses obligations que par la livraison et qu’elle s’était contractuellement engagée à l’égard de la société MSC à régler le fret et les frais annexes.

Les sociétés Necotrans et Charlatte Réservoirs ont respectivement relevé appel de ce jugement les 18 et 24/06/2014.

La jonction des deux instances a été ordonnée le 2/09/2014.

Dans ses dernières conclusions expressément visées en date du 9/03/2015 la société Necotrans demande à la Cour de:

— infirmer le jugement dont appel,

à titre principal :

— déclarer irrecevable l’action de la société MSC à son encontre ;

— en tout état de cause dire et juger que l’action principale de MSC a été valablement dirigée contre Charlatte Réservoirs partie au contrat de transport

— déclarer mal fondée l’action de MSC à son encontre et la débouter de ses demandes

— la condamner à lui payer une somme de 15000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

à titre subsidiaire :

— condamner la société Charlatte Réservoirs à la relever et garantir de toute condamnation en principal frais et intérêts,

— la condamner au paiement d’une indemnité de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— en tout état de cause :

— débouter la société Charlatte Réservoirs de son appel en garantie à son encontre

la condamner au paiement d’une indemnité de 10000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et en tous les dépens dont distraction au profit des avocats de la cause.

Dans ses dernières écritures expressément visées en date du 24/02/2015 la société Charlatte Réservoirs conclut à l’infirmation partielle du jugement et demande à la Cour de :

— dire et juger irrecevable l’action de la société MSC à son encontre,

— débouter la société MSC de ses demandes,

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société MSC de sa demande relative aux frais d’entreposage et en paiement des valeurs résiduelles des conteneurs en cas de confiscation par l’autorité irakienne ;

en tout état de cause :

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Necotrans de son recours en garantie à son encontre et de ses autres demandes ;

— débouter les parties de leurs demandes en paiement d’indemnités de procédure

— condamner la partie succombantes au paiement d’une indemnité de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses dernières conclusions expressément visées en date du 9/03/2015 la société MSC demande à la Cour de réformer pour partie le jugement entrepris et de :

— condamner solidairement les sociétés Charlatte Réservoirs et Necotrans ou l’une plutôt que l’autre à lui payer la somme de 115680 USD au titre des frais d’immobilisation échus au 19/03/2015 majorée des intérêts légaux à compter du 26/06/2012 ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt à intervenir;

— les condamner solidairement ou l’une plutôt que l’autre à lui payer les frais d’immobilisation à échoir à compter du 20/03/2015 jusqu’au retour des conteneurs vides à raison de 32 USD par jour et par conteneur ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt à intervenir ;

— les condamner solidairement ou l’une plutôt que l’autre à lui payer la somme de 51225 USD au titre des frais d’entreposage échus au 19/03/2015 majorée des intérêts légaux à compter du 26/06/2012 ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt à intervenir ;

— les condamner solidairement ou l’une plutôt que l’autre à lui payer les frais d’entreposage à échoir à compter du 20/03/2015 jusqu’au retour des conteneurs vides à raison de 14 USD par jour et par conteneur ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt à intervenir ;

— lui donner acte de ce qu’elle justifiera auprès de Charlatte et Necotrans de la date à laquelle les conteneurs seront restitués et des frais réels d’entreposage des conteneurs lorsque le montant définitif de ceux-ci sera liquidé par le manutentionnaire et les autorités portuaires locales ;

— surseoir à statuer sur la demande de dondamnation à payer les valeurs résiduelles des trois conteneurs évaluées à 7030 USD 5948 USD soit au total 19226 USD ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt à intervenir, jusqu’au jour où soit les conteneurs lui seront restitués vides soit jusqu’au jour où ils seront confisqués par les autorités irakiennes ;

— condamner solidairement les sociétés Charlatte Réservoirs et Necotrans ou l’une plutôt que l’autre à lui verser une indemnité de 15000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La clôture de l’instruction est intervenue le 12/03/2015.

SUR CE

Sur la demande de la société MSC à l’encontre de la société Necotrans

*sur la recevabilité de la demande

Au soutien de son appel la société Necotrans expose en substance que la société MSC ne prouve pas que les conteneurs seraient toujours en souffrance au port de destination en Irak ;

Que la société MSC ne démontre pas qu’elle ait eu connaissance de ses conditions générales figurant au verso du connaissement et qu’elle les aurait acceptées ; que le listing de transports ne permet pas d’établir cette preuve ;

Que même à supposer que les conditions générales de la société MSC lui soient opposables, seul le merchant est tenu de payer les surestaries et les frais d’entreposage ; qu’elle ne peut être considérée comme le merchant puisqu’elle n’est ni l’expéditeur ni le destinataire ni le porteur du connaissement ni le réceptionnaire de la marchandise ; que seule la société Charlatte Réservoirs a cette qualité en tant que chargeur au connaissement qu’elle a reçu en original;

Qu’en sa qualité de commissionnaire de transports elle ne répond pas de l’immobilisation des conteneurs à destination en cas de défaillance du destinataire .

La société MSC réplique que son action à l’encontre de la société Necotrans est recevable ; que celle-ci a agi en son nom personnel en qualité de commissionnaire de transport et qu’elle endosse à son égard la qualité de chargeur et les obligations en découlant ; que si la Cour devait considérer que la société Charlatte était le chargeur alors elle devrait attribuer à la société Necotrans la qualité de mandataire auquel s’appliquent les règles du mandat .

Il est constant en l’espèce que la société Necotrans commissionnaire de transport a confié le transport maritime de la marchandise à la société MSC qui a acheminé celle-ci à bon port à Umm Qasr le 10/11/2011.

Il résulte de l’attestation de l’agent maritime en Irak versée par la société MSC que ses trois conteneurs étaient toujours sur le terminal portuaire le 22/01/2015 et que les frais divers liés à leur immobilisation courent toujours.

La société MSC qui n’est pas liée à la société Charlatte Réservoirs dispose d’un recours contractuel contre la société Necotrans indépendamment des relations contractuelles entre cette dernière et la première.

Il y a lieu dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré la demande recevable.

*sur son bien fondé

L’appelante fait valoir que le régime de responsabilité du commissionnaire est prévu par les articles L 132-4 à L 132-6 du code de commerce ; que celui-ci répond de son propre fait et du fait des voituriers et autres intermédiaires auxquels il a eu recours ;

Qu’aucune faute n’est prouvée à son encontre dans la mesure où elle a parfaitement rempli sa mission en acheminant les marchandises en temps et en heure en bon état ; qu’elle n’est pas responsable vis-à-vis du transporteur de la défaillance du destinataire irakien avec lequel elle n’a aucun lien de droit ;

Que sa mission s’est achevée lorsque le donneur d’ordre est intervenu pour régler les problèmes de livraison alors qu’elle n’avait aucun moyen de contrainte à prendre livraison sur le destinataire, et que la société Charlatte est entrée en contact avec la société MSC pour pallier la défaillance de l’acheteur et a indiqué ne pas s’opposer à la destruction des marchandises ;

Que par ailleurs le commissionnaire de transport n’est pas responsable des frais supplémentaires engagés pour la marchandise en cas de défaillance du destinataire ; que le contrat type de commission de transport régi par l’article L 1432-12 du code des transports prévoit qu’en cas de défaillance du destinataire empêchant la livraison tous les frais supplémentaires engagés pour le compte de la marchandise restent à la charge du donneur d’ordre ;

Que contrairement à ce qu’a retenu le tribunal son engagement dans sa note de réservation de payer le fret et tous les frais annexes au titre de cette expédition en vue d’obtenir la mention fret prépayé sur le connaissement n’implique pas l’obligation de régler les frais d’immobilisation qui seraient dus à destination et qui ne lui sont pas imputables ;

La société MSC fait valoir en réponse que les marchandises transportées demeurent toujours en souffrance au port d’Umm Qasr sous la garde des autorités irakiennes ;

Que les règles relatives à la responsabilité du commissionnaire sont indifférentes dans les rapports de ce dernier avec ses substitués ; que l’article L 132-4 du code de commerce sur la responsabilité du commissionnaire pour perte avarie ou retard vis-à-vis du commettant ne s’applique pas à l’égard du substitué ; qu’en effet la société Necotrans a pris des engagements à son égard dont le terme était la restitution des conteneurs vides après prise en charge de la marchandise par le destinataire ; qu’il n’y a donc pas lieu de prouver une faute imputable au commissionnaire ;

Que ses conditions générales sont connues et opposables à la société Necotrans puisqu’elles reprennent les dispositions de l’article 41 du décret du 31/12/1966 qui fait supporter le paiement du fret par le chargeur dont lesdits frais sont les accessoires et suivent le régime ; que d’ailleurs la société Necotrans s’est engagée par écrit à lui payer le fret maritime et ses accessoires sans aucune réserve ; que l’acceptation des conditions générales peut être tacite et résulter des relations d’affaire antérieures qui en l’espèce sont établies ;

L’article L 132-1 du code de commerce dispose que le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social pour le compte d’un commettant.

L’article L 132-6 du code de commerce énonce que le

commissionnaire est garant des faits du commissionnaire intermédiaire auquel il adresse les marchandises.

Il est constant que le commissionnaire de transport est tenu d’une obligation de résultat qui s’achève avec la remise physique de la marchandise au destinataire ou à son représentant qui l’accepte ( Cass com 11/06/2003) ;

Le texte précité édicte une présomption de responsabilité à l’encontre du commissionnaire dont le contrat n’a pas pris fin avec le refus de prendre livraison opposé par le destinataire, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’interpréter la lettre selon laquelle la société Necotrans s’est engagée le 29/09/2011 à prendre en charge le fret et tous les frais annexes.

La société Necotrans engage par conséquent sa responsabilité contractuelle à l’égard du transporteur maritime.

Il convient dès lors, confirmant le jugement entrepris de ce chef de faire droit à la demande en paiement de la société MSC dirigée contre la société Necotrans en son principe et de dire que le quantum de la créance sera déterminé ci- après.

Sur la demande de la société MSC à l’encontre de la société Charlatte Réservoirs

*sur la recevabilité de la demande

La société Necotrans estime que l’action engagée par la société MSC à l’encontre de la société Charlatte Réservoirs sur le fondement du contrat de transport est recevable, peu important qu’un commissionnaire de transport soit intervenu ;

La société MSC expose que la société Charlatte s’est immiscée dans l’organisation du transport pour remédier aux problèmes de livraison de sorte que son action à l’encontre de cette dernière est recevable ; que si la société Charlatte est considérée par la Cour comme le chargeur elle doit être soumise aux règles du mandat à son égard ;

La société Charlatte Réservoirs réplique que l’action directe du transporteur MSC à son encontre est irrecevable dès lors que celle-ci a eu recours à un commissionnaire de transport la société Necotrans, laquelle a contracté en son nom personnel ; que le fait que la société Necotrans ait porté son client comme expéditeur sur le document de transport ne lui fait pas perdre la qualité de commissionnaire ;

Qu’il ne s’agit nullement d’un contrat de mandat mais bien d’un contrat de commission ;

Que la mission de Necotrans n’a pas pris fin en cours de contrat parce qu’elle a tenté d’intervenir à la demande de celle-ci auprès de l’acquéreur des marchandises ;

Que les conditions générales de vente de la société MSC lui sont inopposables ;

La société MSC a contracté avec la société Necotrans qui a agi à titre personnel et elle ne dispose d’aucune action directe à l’encontre de la société Charlatte ( Cass com 14/01/2004) seule liée au commissionnaire de transport.

Il y a lieu par conséquent de réformer le jugement critiqué sur ce point et de déclarer la demande irrecevable.

Sur le montant de la créance de la société MSC

Au soutien de son appel la société Necotrans expose que la société MSC ne justifie pas que les surestaries auraient été calculés sur la base d’un tarif qu’elle aurait accepté ;

Que la société MSC n’établit pas qu’elle se serait vue réclamer des frais d’entreposage ni qu’elle les aurait réglés ; que la facture adverse produite concerne des frais afférents à des conteneurs d’un autre navire (MSC Normandie) ; que la demande en paiement de ce chef doit être écartée ;

La société Charlatte Réservoirs fait valoir quant à elle que la demande d’indemnisation de la confiscation éventuelle des containeurs doit être écartée en ce qu’elle concerne un préjudice futur et non un dommage direct et certain.

La société MSC fait observer en réponse que sa créance est justifiée et se décompose en :

— frais d’immobilisation échus de ses trois conteneurs à raison de 16 USD par jour à compter du 16e jour puis 32 USD par jour et par conteneur à compter du 27e jour soit 115680 USD au 19/03/2015 ;

— frais à échoir à raison de 32 USD par jour et par conteneur jusqu’à la libération ou la confiscation par les autorités locales ;

— frais d’entreposage des conteneurs sur le terminal portuaire à raison de 5 USD par jour et par conteneur à compter du 16e jour soit 18150 USD au 19/03/2015 et XXX) par jour et par conteneur soit XXX au 19/03/2015.

Que s’agissant des conteneurs dont la valeur totale est de 19226 USD, elle est fondée à solliciter un sursis à statuer jusqu’à ce qu’il soit disposé des marchandises par le chargeur le destinataire ou l’autorité locale ;

*sur les frais d’immobilisation des trois conteneurs

Au vu des tarifs pratiqués en Irak dûment justifiés au dossier, il convient de faire droit à la demande en paiement et d’actualiser la créance à la somme de 115 680 USD à la date du 19 mars 2015 majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 juin 2012 ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt.

De même la société Necotrans sera tenue des frais d’immobilisation à échoir à compter du 20 mars 2015 jusqu’au retour des conteneurs vides à raison de 32 USD par jour et par conteneur ou sa contrepartie en euros au jour de l’arrêt.

*sur les frais d’entreposage

Au soutien de sa demande la société MSC produit une facture pro forma de la société Gulftainer en Irak en date du 22 janvier 2015 d’un montant de 18 150 USD, laquelle devra être prise en compte puisqu’elle concerne bien les conteneurs litigieux pour la période courant à compter du 11 novembre 2011 et pourra être actualisée sur justification de la facture correspondante ;

Il n’y a pas lieu d’accueillir la demande de sursis à statuer s’agissant effectivement d’une demande purement éventuelle de la société MSC pour le cas où les conteneurs seraient confisqués alors qu’ils ne l’ont pas été depuis plus de trois ans maintenant.

Le jugement critiqué sera donc pour partie réformé en ce sens.

Sur les recours en garantie

*de la société Necotrans à l’encontre de la société Charlatte Réservoirs

Au soutien de son appel la société Necotrans expose que le tribunal a déclaré à tort son appel en garantie sans objet ;

Que ses conditions générales figurant au verso de ses factures et conformes à l’article 8.3 du contrat type de commission de transport, prévoient qu’en cas de refus des marchandises par le destinataire comme en cas de défaillance de ce dernier pour quelque cause que ce soit, tous les frais initiaux et supplémentaires dus et engagés pour le compte de la marchandise resteront à la charge du donneur d’ordre ; qu’il existe par ailleurs un courant d’affaires entre la société Charlatte et elle- même ;

Que la jurisprudence considère également que le commissionnaire de transport n’a pas à assumer les frais de stationnement exposés dans l’intérêt de la marchandise en raison d’un retard qui ne lui est pas imputable ;

Que par conséquent la société Charlatte Réservoirs devra payer l’intégralité des surestaries et frais d’entreposage de la marchandise réclamés par la société MSC ; Que subsidiairement si elle devait être condamnée à payer tout ou partie des sommes réclamées, ladite société devra la relever et garantir de toute condamnation en principal frais et intérêts ;

Que si la Cour devait maintenir la condamnation solidaire entre son donneur d’ordre et elle, elle devra statuer sur la contribution respective des codébiteurs à la dette et la mettre intégralement à la charge de la société Charlatte Réservoirs ;

La société Charlatte Réservoirs réplique qu’elle n’est plus propriétaire des marchandises en souffrance depuis le 20/09/2011 date à laquelle le droit de propriété et les risques en ont été transférés à la société Al Barih ; qu’elle ne peut en disposer ; que la société Necotrans doit être renvoyée à se pourvoir à l’encontre de cette dernière ;

Que subsidiairement le contrat type de commission de transport dont se prévaut la société Necotrans date du 5/04/2013 soit postérieurement au contrat litigieux de sorte qu’il ne lui est pas applicable ; que de plus le décret invoqué a été abrogé en mai 2014 ;

L’article 41 du décret du 31/12/1966 prévoit que le chargeur supporte le prix du fret ; or il est acquis que les frais accessoires suivent le régime du fret.

Selon les conditions générales de vente de la société Necotrans adressées à la société Charlatte dès le 6/12/2010 et reproduites au verso de la facture de sa prestation en date du 18/10/2011 lesquelles lui sont donc opposables, les frais liés au refus de livraison ou à la défaillance du destinataire incombent au donneur d’ordre ;

Il en résulte que le coût de l’immobilisation et du stationnement des conteneurs au port irakien doit être pris en charge par la société Charlatte, laquelle doit garantir la société Necotrans à concurrence de la totalité des sommes au paiement desquelles celle- ci est condamnée.

Le jugement déféré sera donc réformé en ce sens.

*de la société Charlatte Réservoirs à l’encontre de la société Necotrans

Au soutien de son appel la société Necotrans expose qu’elle n’encourt aucune responsabilité du fait de son substitué la société MSC, qui a transporté les marchandises en temps et heure sans dommage jusqu’au port convenu d’Umm Qasr ;

Qu’elle- même a parfaitement rempli sa mission laquelle se terminait à l’arrivée du navire ; que le réceptionnaire a été régulièrement avisé de l’arrivée des marchandises et a été invité à en prendre livraison par les sociétés MSC et Charlatte ; qu’elle ne peut être responsable de la défaillance de l’acheteur choisi par son donneur d’ordre.

Le recours en garantie de la société Necotrans à l’encontre de la société Charlatte étant accueilli il y a lieu, confirmant le jugement sur ce point, de rejeter la présente demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société Necotrans ne prouve pas l’existence d’une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit d’agir en justice ; elle n’établit pas par ailleurs avoir subi un préjudice distinct de celui réparé par les intérêts moratoires; il convient confirmant de ce chef le jugement déféré de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Il n’apparaît pas équitable de laisser à la société Necotrans la charge de ses frais irrépétibles et non compris dans les dépens en cause d’appel qu’il y a lieu d’évaluer à 10 000 €, et de mettre la charge de la société Charlatte Réservoirs .

De même la société Charlatte Réservoirs sera tenue de verser à la

société MSC une indemnité de procédure de 10.000 €.

Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné

la société Charlatte Réservoirs à payer à la société MSC une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile mais de le réformer en ce qu’il a condamné la société Necotrans solidairement avec la première au paiement d’une indemnité de procédure au profit de la société MSC.

Sur les dépens

La société Charlatte Réservoirs qui succombe dans la présente instance supportera la charge des entiers dépens de première instance et d’appel, le jugement déféré devant être également réformé sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris:

— sur le principe des condamnations prononcées contre la société Necotrans au profit de la société MSC,

— sur le rejet de la demande de dommages-intérêts formée par la société Necotrans

— sur le rejet de la demande de sursis à statuer de la société MSC

— sur le rejet du recours en garantie de la société Charlatte Réservoirs à l’encontre de la société Necotrans

— sur le principe de la condamnation pour frais irrépétibles prononcée à l’encontre de la société Charlatte Réservoirs au profit de la société MSC.

Le réforme pour le surplus.

Et statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande en paiement de la société MSC à l’encontre de la société Charlatte Réservoirs.

Condamne la société Necotrans à verser à la société MSC la somme de 115 680 USD ou sa contrepartie en euros au titre des frais d’immobilisation des conteneurs avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2012 date de l’assignation sur la somme de 106 139,07 USD, et la somme de 18 150 USD ou sa contrepartie en euros au titre des frais d’entreposage avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2012 sur la somme de 12 390 USD.

Dit que la société MSC pourra réclamer le cas échéant à la société Necotrans les frais d’entreposage postérieurs sur justification de la facture de l’autorité portuaire et que la société Charlatte Réservoirs devra la garantir de ce chef.

Condamne la société Necotrans à verser à la société MSC les frais d’immobilisation à échoir à compter du 20 mars 2015 jusqu’au retour des conteneurs vides à raison de 32 USD par jour et par conteneur ou sa contrepartie en euros.

Rejette le surplus des demandes en paiement formé par la société MSC à l’encontre de la société Necotrans.

Condamne la société Charlatte Réservoirs à garantir la société Necotrans à hauteur des sommes susvisées.

Rejette la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile formée par la société MSC à l’encontre de la société Necotrans.

Y ajoutant,

Condamne la société Charlatte Réservoirs.à payer à chacune des sociétés MSC et Necotrans Aata une indemnité de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Condamne la société Charlatte Réservoirs aux entiers dépens de première instance et d’appel avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Rouen, Ch. civile et commerciale, 21 mai 2015, n° 14/02942