Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 24 novembre 2021, n° 20/04182

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. soc., 24 nov. 2021, n° 20/04182
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 20/04182
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Amiens, 27 juillet 2014
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 20/04182 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IUIC

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2021

DÉCISION

DÉFÉRÉE :

jugement du 28 juillet 2014 du tribunal des affaires de sécurité sociale d’Amiens

APPELANTE :

Société HOMEPERF

[…]

[…]

[…]

représentée par Me François MUSSET, avocat au barreau de LYON substitué par Me Anne GUILLET DELATTRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME

[…]

[…]

représentée par M. X Y muni d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 12 Octobre 2021 sans opposition des parties devant Monsieur POUPET, Président, magistrat chargé d’instruire l’affaire.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur POUPET, Président

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Z A

DEBATS :

A l’audience publique du 12 Octobre 2021, où l’affaire a été mise en délibéré au 24 Novembre 2021

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 24 Novembre 2021, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur POUPET, Président et par M. A, Greffier.

* * *

La caisse primaire d’assurance maladie de la Somme (la caisse) a procédé à un contrôle des facturations de la société Homeperf (la société), spécialisée dans la fourniture de matériel médical destiné aux perfusions à domicile, sur la période du 26 décembre 2008 au 17 novembre 2009 et lui a notifié un indu de 39 195 euros.

Le 16 avril 2012, la société a saisi la commission de recours amiable de la caisse d’une contestation de l’indu puis, à la suite de la décision de rejet implicite de celle-ci, a poursuivi sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Amiens qui, par jugement du 28 juillet 2014, a :

— condamné la société à payer à la caisse la somme de 39 969,56 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

— condamné la société à payer à la caisse la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 27 juin 2019, la cour d’appel d’Amiens a confirmé ce jugement mais, le 22 octobre 2020, la Cour de cassation a cassé son arrêt, pour un motif de pure forme, et renvoyé l’affaire et les parties devant la cour d’appel de Rouen.

Par le dispositif de conclusions remises le 7 mai 2021 et soutenues oralement à l’audience, la société demande à la cour d’infirmer le jugement et, abstraction faite du rappel de ses moyens :

— d’annuler la notification d’indu, la mise en demeure et la décision de la commission de recours amiable,

— de condamner la caisse à lui restituer la somme de 31 453,81 euros réglée en exécution de l’arrêt cassé du 27 juin 2019 et à lui régler la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions remises le 2 avril 2021 et soutenues oralement à l’audience, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner la société à lui payer la somme de 39 969,56 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2014 outre 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé complet de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu de l’article L 165-1 du code de la sécurité sociale, la prise en charge par l’assurance maladie d’un dispositif médical est subordonnée à l’inscription de celui-ci sur la «'liste des produits et prestations remboursables'», dite LPPR.

En tant que signataire de la Convention nationale des prestataires délivrant des dispositifs médicaux, produits et prestations inscrits aux titres I et IV de la liste prévue audit article L 165-1 en date du 7 août 2002, la société Homeperf facture directement à la caisse les dispositifs médicaux fournis aux assurés.

La société précise que sa contestation ne porte que sur la 3è anomalie relevée par la caisse, ayant donné lieu à la notification d’un indu de 31'453,81 euros : «'nombre d’accessoires pour la pose de perfusion, application du code LPP 1185668'».

Les parties rappellent que la chambre à cathéter implantable est un dispositif veineux de longue durée, placé sous la peau, permettant l’injection de médicaments, qu’afin de piquer dans la chambre à cathéter, on utilise une aiguille spéciale, appelée aiguille de Huber, qu’il en existe de deux types, les aiguilles de type 1 qui sont changées chaque jour et les aiguilles de type 2 qui restent en place plusieurs jours, qu’une fois l’aiguille piquée dans la chambre, la perfusion est branchée sur elle pour l’injection des médicaments, que l’on peut donc distinguer les opérations suivantes :

— la pose de l’aiguille de Huber dans la chambre à cathéter,

— le branchement de la perfusion sur l’aiguille,

— son débranchement.

Pour procéder à des perfusions de la sorte, les soignants utilisent des sets d’accessoires stériles à usage unique comprenant masque, champs, gants, calot, compresses, seringue, aiguille, […], prolongateur, robinet à 3 voies.

L’anomalie relevée par la caisse et objet du litige réside dans la facturation d’un nombre d’accessoires à usage unique (code LPP 1185668) supérieur au nombre de dispositifs de perfusion. Autrement dit, pour une perfusion, la société facturait régulièrement plus d’un accessoire.

La société conteste qu’il s’agisse d’une anomalie en soutenant principalement que le code 1185668 ne conditionne pas le remboursement des accessoires stériles à usage unique utilisés pour la pose de la perfusion à la pose simultanée d’une aiguille de type Huber, que, par conséquent, ces accessoires peuvent être remboursés aussi lorsqu’ils sont utilisés pour procéder aux opérations de branchement et de débranchement de perfusions, indépendamment de la pose ou d’un changement d’aiguille de type Huber.

Elle se prévaut notamment, en ce sens, de l’évolution des pratiques sanitaires et de l’avis de la Haute Autorité de Santé en faveur de la prévention des infections, en soulignant que l’utilisation d’accessoires stériles s’impose tout particulièrement dans le cas d’actes réalisés à domicile où les conditions d’hygiène sont aléatoires et les bénéficiaires des soins particulièrement fragiles et vulnérables sur le plan immunitaire.

Pour la caisse, au contraire, seule la pose d’une aiguille de Huber dans une chambre à cathéter implantable, et non le branchement d’une perfusion sur l’aiguille ou son débranchement, justifie la prise en charge des accessoires prévue par le code 1185668.

La LPPR, à l’époque des facturations contrôlées, prévoyait ceci :

«'code 1185668 :

Perfusion, accessoires pour chambre à cathéter implantable ou cathéter central.

Accessoires stériles non réutilisables pour pose de la perfusion, nécessaires à l’utilisation d’une chambre à cathéter implantable ou d’un cathéter central :

Ils sont pris en charge dans la limite de trois attributions maximales par semaine s’ils sont délivrés avec des aiguilles de type 2 mais sans limitation d’attribution en cas de délivrance avec des aiguilles de type 1'». La rédaction de ce texte, en ce qu’il envisage à la fois l’utilisation des accessoires pour la «'pose’ de la perfusion'», ce qui inclut l’implantation de l’aiguille, et leur délivrance «'avec'» des aiguilles (de type 1 ou 2), ce dont il résulte qu’ils sont destinés à accompagner l’usage de l’aiguille, permet de retenir, ainsi que le plaide la caisse, que leur remboursement n’est envisagé que lorsqu’ils sont utilisés pour la pose de l’aiguille de Huber.

L’avis de la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé relatif aux dispositifs médicaux de perfusion à domicile, que l’appelante verse aux débats, confirme cette lecture dès lors que, dans le tableau décrivant les dispositifs médicaux en présence, il définit la «'pose de la perfusion'» comme «'l’ensemble'» des gestes réalisés au cours du processus de perfusion, incluant la pose de l’aiguille de Huber, et, en revanche, le branchement ou le débranchement de la ligne de perfusion comme l’un des gestes isolés dans ce processus, consistant à placer la ligne de perfusion sur l’aiguille ou à l’en retirer.

Cet avis, daté du 14 septembre 2010 et postérieur à la période contrôlée, et les recommandations qu’il émet en vue d’une modification des conditions d’inscription sur la LPPR des dispositifs médicaux pour la perfusion à domicile qu’il n’y a pas lieu d’examiner, ne sont donc pas de nature à remettre en question l’application, en l’espèce, du code 1185668 ainsi que le comprend à juste titre la caisse.

L’extrait d’un rapport d’expertise également produit par la société, demandé semble-t-il dans une affaire similaire, en ce qu’il expose que des patients porteurs d’une chambre à cathéter implantable qui utilise des aiguilles de type Huber 2 doivent bénéficier de perfusions une ou deux fois par jour et que la pose de ces perfusions, sur le plan médical, implique l’utilisation d’accessoires complémentaires comprenant masque, champ (…) pour pouvoir injecter le produit en toute sécurité et pour éviter des fautes d’asepsie, et en ce qu’il constate «'qu’il y a à l’évidence une incompatibilité entre ce qui est reconnu dans la LPPR sur le plan comptable et le respect des bonnes pratiques afin d’éviter des complications infectieuses'» ne fait que déplorer cet état de chose mais ne conteste pas le caractère applicable de la règle posée par la LPPR ni n’en propose une autre interprétation, argumentée.

Le fait que la pose de l’aiguille, le branchement et le débranchement de la ligne de perfusion sont répertoriés et leur prise en charge réglementée par une nomenclature propre aux soins infirmiers est sans incidence sur l’application de la LPPR qui en est distincte.

Enfin, le fait que les accessoires surnuméraires soient, le cas échéant, prescrits par un médecin ne saurait entraîner leur prise en charge en violation des limites applicables.

L’anomalie relevée par la caisse est donc réelle.

***

La société considère le calcul de l’indu comme incohérent aux motifs que :

— la caisse a accepté la prise en charge d’un accessoire alors même qu’aucune aiguille de Huber n’avait été facturée, tout en affirmant que l’absence de facturation d’une aiguille de Huber en présence d’une facturation pour perfusion dans la chambre à cathéter caractérise en soi une anomalie puisque l’aiguille est nécessairement utilisée,

— la méthodologie de calcul retenue par la CPAM ne tient pas véritablement compte de la réalité de l’utilisation d’aiguilles de Huber,

— la caisse a écarté la règle d’attribution de ces accessoires en cas de délivrance avec des aiguilles de Huber de type 1 prévue au code 1185668, savoir «'sans limite d’attribution en cas d’aiguille de Huber de type'1'» au profit d’une limite résidant dans le nombre de perfusions alors que cette limite n’est pas prévue par le texte du code 1185668 qui évoque la « durée prescrite de la cure de traitement'»,

— la CPAM a considéré que le nombre de perfusions visé au point 2, qu’elle considère unilatéralement comme déterminant, est nécessairement corrélé au nombre de dispositifs de perfusion facturé sous les codes 1196413 et 1154739 de la LPPR alors que le nombre d’accessoires de perfusion 1196413 et 1154739 ne lui permettait pas de déduire que le nombre d’accessoires à usage unique utilisés et facturés était surnuméraire et donc indu.

La caisse expose que, la société n’ayant pas facturé d’aiguilles de Huber, ce qui n’est pas contesté, elle a recherché la correspondance entre le nombre d’accessoires facturés et le nombre de dispositifs de perfusion facturés, pris en charge un accessoire par perfusion facturée et considéré comme indue la prise en charge des accessoires facturés au-delà du nombre de perfusions réalisées et facturées.

La LPPR, ainsi que cela a été dit, prévoit qu’un accessoire ne peut être pris en charge que pour la pose d’une aiguille de Huber et limite donc le nombre d’accessoires pris en charge au nombre d’aiguilles de Huber posées, de sorte que l’absence de facturation d’aiguilles de Huber empêche la caisse, ainsi que celle-ci le relève, de vérifier la conformité du nombre d’accessoires facturés au nombre d’aiguilles utilisées. Dès lors qu’une aiguille de Huber est nécessairement utilisée pour une perfusion mais peut l’être pour plusieurs perfusions, l’acceptation par la caisse d’un accessoire par perfusion, qui ne limite pas le nombre de prises en charge de perfusions réalisées avec une aiguille de type 1, est favorable à la société et le calcul de l’indu sur le nombre d’accessoires facturés au-delà de cette limite est fondé.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement.

***

Il appartient à la société, partie perdante, de supporter la charge des dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, et de ses autres frais; il est en outre équitable, vu l’article 700 du même code, qu’elle indemnise la caisse des frais que celle-ci a été contrainte d’exposer pour assurer la défense de ses intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

confirme le jugement entrepris,

déboute la société Homeperf de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

la condamne aux dépens et au paiement à la caisse primaire d’assurance maladie de la Somme d’une indemnité de 1000 euros par application dudit article 700.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 24 novembre 2021, n° 20/04182