Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 18 juin 2012, n° 08/01758

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 18 juin 2012, n° 08/01758
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 08/01758
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Albi, 24 février 2008, N° 07/00222

Texte intégral

.

18/06/2012

ARRÊT N° 293

N°RG: 08/01758

CB/CD

Décision déférée du 25 Février 2008 – Tribunal de Grande Instance d’ALBI – 07/00222

D C épouse Y

(SCP NIDECKER PRIEU JEUSSET)

C/

SOCIETE SOLTECHNIC

(SCP MALET)

XXX

(SCP BOYER GORRIAS)

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DOUZE

***

APPELANTE

Madame D C épouse Y

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP NIDECKER PRIEU JEUSSET avocats au barreau de TOULOUSE

assistée de la SCP COLOMES PAMPONNEAU TERRIE avocats au barreau d’ALBI

INTIMEES

SOCIETE SOLTECHNIC

XXX

XXX

représentée par la SCP MALET avocats au barreau de TOULOUSE

assistée de la SCP SALESSE JEAN-FRANCOIS avocats au barreau de TOULOUSE

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP BOYER & GORRIAS avocats au barreau de TOULOUSE

assistée de Me Emmanuel GIL avocat au barreau d’ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 2 Avril 2012 en audience publique, devant la Cour composée de :

A. MILHET, président

C. FOURNIEL, conseiller

C. BELIERES, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : J. BARBANCE-DURAND

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par A. MILHET, président, et par C. DUBARRY, faisant fonction de greffier de chambre.

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE

Mme D C épouse Y, assurée en multirisque habitation auprès de la compagnie Groupama d’Oc, est propriétaire d’une maison à usage d’habitation située XXX édifiée en 1975 affectée d’un phénomène de fissuration qui a fait l’objet en 1985 de la création par le constructeur, M. B, d’une ceinture en béton puis en 1991 d’une reprise en sous oeuvre par micropieux financée par son assureur de responsabilité décennale et réalisés par la Sas Soltechnic qui est réintervenue en juin 1994 en procédant à la pose de longrines ancrées dans la semelle existante et au renforcement des têtes de pieux et fin 1995 aux réfections intérieures nécessaires.

Elle a effectué en 2002, en raison de l’apparition de nouvelles fissures, deux déclarations de sinistre pour sécheresse classée catastrophe naturelle suivant arrêtés du 3 octobre 2003 couvrant la période de 1er janvier 2002 au 30 septembre 2002 puis du 25 août 2004 couvrant la période du 1er juillet 2003 au 30 septembre 2003.

Elle a obtenu du juge des référés une ordonnance du 29 août 2005 désignant M. X en qualité d’expert qui a déposé son rapport le 9 juin 2006.

Elle a fait assigner par acte des 6 et 15 février 2007 la Sas Soltechnic et la compagnie Groupama d’Oc devant le tribunal de grande instance d’Albi en déclaration de responsabilité de cet entrepreneur et en indemnisation à l’encontre des deux parties.

Par jugement du 25 février 2008 cette juridiction a

— déclaré les demandes irrecevables

— condamné Mme C à payer à la Sas Soltechnic la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— rejeté les autres demandes

— condamné Mme C aux entiers dépens.

Par acte du 7 avril 2009 elle a interjeté appel général de cette décision.

Par arrêt du 8 juin 2009 la cour d’appel a infirmé le jugement et statuant à nouveau a

— jugé qu’en exécutant spontanément à partir de 1994 des travaux de reprise de ses propres ouvrages réalisés en 1991 la Sas Soltechnic a reconnu sa responsabilité et interrompu le délai de prescription courant à compter de 1991

— jugé que cette reconnaissance de responsabilité était parfaite à la réception des travaux de réparation dont l’achèvement a été entrepris après le mois de septembre 1995

— jugé que l’assignation en référé expertise du 11 août 2005 a été délivrée avant l’expiration du délai de prescription qui a commencé à courir à la réception des travaux de réparation dont l’achèvement a été entrepris après le mois de septembre 1995

— déclaré en conséquence recevable l’action engagée contre la Sas Soltechnic

— jugé que cette interruption de la prescription ne concerne que les désordres correspondants aux travaux exécutés en 1994, 1995 et ces travaux ainsi que ceux de 1991 qu’ils ont repris ou utilisés

Avant dire droit sur l’ensemble des demandes,

— ordonné un expertise

— commis pour y procéder M. Z.

Ce technicien judiciaire a déposé son rapport le 25 mai 2001.

MOYENS DES PARTIES

Mme C demande dans ses conclusions du 2 mars 2012 de

— dire que la Sas Soltechnic est responsable de ses préjudices sur le fondement de la garantie décennale et, subsidiairement, sur le fondement de sa responsabilité civile contractuelle pour défaut de conformité

— condamner la Sas Soltechnic à lui payer les sommes de

* 173.878,12 € au titre du coût des travaux de réfection indexée sur l’indice BT 01 du coût de la construction depuis la date des devis retenus par l’expert judiciaire au jout de la décision à intervenir

* 8.889,22 € au titre de la remise en état du plafond du séjour avec indexation

* 8.986,74 € outre 418,60 € au titre des frais de déménagement et garde meubles

* 1.400 € au titre de la location d’un immeuble équivalent pendant les travaux

* 4.500 € au titre du surcoût de la consommation d’électricité

—  80.000 € au titre de la perte de jouissance du bien depuis 1999 date de son entrée dans les lieux

* 20.000 € en réparation du préjudice moral eu égard à l’exceptionnelle longueur de la procédure liée en particulier à l’attitude fautive de la Sas Soltechnic

Subsidiairement, si par impossible la cour estimait que tout ou partie des désordres étaient imputables de manière déterminante au phénomène de sécheresse,

— condamner la compagnie Groupama d’Oc à lui payer l’ensemble des indemnités précitées au titre de la garantie catastrophe naturelle

— condamner solidairement tout succombant à lui payer la somme de 15.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Elle fait valoir que le sapiteur de M. Z a attribué les désordres d’une part à la sensibilité du sol d’assise des fondations au phénomène de retrait gonflement et d’autre part au défaut de longueur des micro pieux de sorte que, quelle que soit l’origine des désordres, la reprise en sous oeuvre est objectivement défaillante.

Elle soutient qu’un vice de conception est imputable à faute à la Sas Soltechnic qui a manqué à ses obligations contractuelles en procédant à ces travaux sans avoir effectué de sondage pressiométrique préalable pour permettre le dimensionnement des micro pieux alors que leur pose devait non seulement suppléer à des fondations insuffisantes mais affranchir la bâtisse de tous mouvements liés au phénomène de retrait gonflement.

Elle souligne que l’ensemble des désordres apparus postérieurement aux interventions de cette société témoigne de l’impropriété à la destination de l’ouvrage réalisé, atteint dans sa solidité étant souligné que de nouvelles fissures sont apparues dès 1999 et en 2002 de sorte que ces désordres ne sauraient être imputés à la sécheresse de 2003, étant rappelé que ce phénomène naturel n’est pas en soi exonératoire de la responsabilité décennale des constructeurs et qu’en l’espèce il n’était ni extérieur à l’ouvrage, ni imprévisible et irrésistible ni la cause déterminante des désordres.

Elle fait remarquer que la sécheresse est intervenue sur un ouvrage défectueux, inapte à assurer la confortation attendue selon les conclusions du géotechnicien en raison du défaut de dimensionnement des micropieux alors que le phénomène de sécheresse était déjà connu dans la région au moment de ses interventions.

Elle estime qu’elle est tenue à la réparation intégrale des préjudices subis.

La Sas Soltechnic sollicite dans ses conclusions du 29 mars 2012 de

— débouter Mme C de ses demandes

— dire qu’elle n’a commis aucune faute dans la réalisation de ses travaux

— dire que ses travaux ne sont pas à l’origine des désordres dont il est demandé réparation

— dire que la sécheresse de 2003 est la seule cause des désordres dont il est demandé réparation

— la mettre hors de cause

A titre subsidiaire

— dire qu’elle devra être relevée et garantie par la compagnie Groupama d’Oc à qui il incombe de prendre en charge de coût des travaux de reprise des désordres dus à la sécheresse

— condamner tout succombant à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

A titre infiniment subsidiaire

— dire que la somme de 8.889,22 € sollicitée au titre de la réfection du plafond doit être prise en charge par Mme C

— dire que l’indemnité au titre de pertes d’énergies s’évalue à 4.050 €

— dire que la demande au titre du préjudice de jouissance est excessive ; la ramener à de plus justes proportions

— dire que la demande au titre du préjudice moral n’est pas justifiée et fait double emploi avec la demande d’indemnité au titre du préjudice de jouissance.

Elle fait valoir que la mise en oeuvre des micropieux a été effectuée en 1991 selon les règles de l’art et les données connues à l’époque, pour pallier à des fissurations dues à une insuffisance de portance des fondations avec une dernière intervention en 1994 pour procéder à une consolidation localisée, la stabilisation étant confirmée lors d’une visite de 1995 et une expertise en 1999 à la demande du propriétaire qui souhaitait vendre l’immeuble.

Elle affirme que les nouveaux désordres importants ne sont apparus qu’après la sécheresse de 2003, reconnue comme catastrophe naturelle et trouvent leur cause dans celle-ci.

Elle se prévaut des deux rapports d’expertise judiciaire pour invoquer son absence de faute dans la réalisation des travaux.

Elle soutient que la présomption de responsabilité de l’article 1792 du code civil ne saurait s’appliquer en l’absence de lien de causalité entre les travaux et les dommages causés, la réparation pour inefficace qu’elle ait été n’ayant rien ajouté aux désordres pré existants.

Elle estime que les travaux étaient suffisants à l’époque de la réalisation des travaux et ne sont en tout cas pas à l’origine des désordres constatés.

Elle considère que le sinistre se situe dans le cadre de l’article L 125-1 du code des assurances.

La compagnie Groupama d’Oc demande dans ses conclusions du 16 mars 2012 de

Au principal,

— dire que la Sas Soltechnic sur le fondement de la garantie décennale ou de la responsabilité civile contractuelle pour défaut de conformité la Sas Soltechnic doit assurer la prise en charge du sinistre subi par Mme C

— dire que l’événement naturel n’est pas la cause déterminante du désordre

— rejeter toute demande des parties à son encontre alors qu’il est démontré que les problèmes de fondations sont subis par cet immeuble depuis l’origine et que les travaux effectués par la Sas Soltechnic sont défaillants et engagent sa responsabilité

— dire que les arbres avec un phénomène de succion ont contribué aux désordres

— retenir en toute hypothèse que l’événement naturel n’est pas la cause déterminante des désordres

— rejeter toute réclamation à son encontre

A titre infiniment subsidiaire,

— si la cour estimait que tout ou partie des désordres était imputable au phénomène de sécheresse,

— constater qu’elle ne pourrait prendre en charge que les dommages matériels directs concernant la remise en état des lieux à l’exclusion des dommages concernant le plafond du séjour, les frais de déménagement et garde meubles, la location, le surcoût d’électricité, la perte de jouissance et le préjudice moral

En toute hypothèse,

— rejeter toute demande à son encontre

— débouter toutes parties de ses demandes concernant l’application de l’article 700 du code de procédure civile à son encontre

— dire que les dépens outre les frais d’expertise judiciaire de M. X et de M. Z seront entièrement supportés par la Sas Soltechnic ou par la partie défaillante

— condamner toute partie défaillante à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose une argumentation voisine à celle de son assurée, rappelant que l’immeuble présentait un vice d’origine des fondations que l’intervention de la Sas Soltechnic avait pour objet de reprendre et qui s’est révélé défaillante, les micropieux n’étant pas ancrés dans le substratum compact et ne pouvant assurer leur rôle stabilisateur mettant l’immeuble en péril.

Elle soutient que si la sécheresse a pu jouer un rôle déclenchant ou aggravant des dernières phases de désordres, elle ne peut exonérer l’entrepreneur de sa garantie décennale dès lors que la reprise en sous oeuvre et les travaux confortatifs devaient affranchir la maison de tout problème de retrait gonflement consécutif à la sécheresse.

Elle se prévaut de la teneur du rapport du sapiteur qui note que les micropieux mis en oeuvre sont trop courts, de sorte que l’ouvrage aurait nécessairement bougé indépendamment d’un événement naturel en raison des caractéristiques mécaniques avec un substratum existant au delà de 16 m de profondeur et compact partir de 18,5 m.

Elle souligne que la chronologie de l’évolution des fissures (1991, 1994, 1999, 2002 …) ne laisse pas place au doute sur l’absence de lien avec

la sécheresse de 2003.

MOTIFS DE LA DECISION

sur l’action en responsabilité à l’encontre de la Sas Soltechnic

La lecture du rapport d’expertise de M. Z et de ses documents annexes révèle que la Sas Soltechnic est intervenue sur la maison en vue d’effectuer des reprises en sous oeuvre pour pallier à des mouvements et fissures constatés.

Ces travaux ont consisté dans le matage des fissures y compris couturage et dans la pose de micropieux intérieurs et extérieurs.

Ils ont donné lieu en 1994 à de nouvelles intervention en raison de la découverte de fondation affaiblie à certain endroits qui ont conduit à la réalisation de longrines ancrées dans la semelle existante et reprises sur les micropieux 1.2 et 3.4 et à la fin 1995/début 1996 aux travaux de réfection intérieures nécessaires.

Des fissures sont apparues en 1999 puis en 2002 et se sont ultérieurement aggravées.

L’expert Z a décrit aux pages 9 à 13 de son rapport celles relevées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la villa.

La lecture du rapport de son sapiteur la société Sols et Eaux qui a procédé à l’étude des caractéristiques géotechniques du sol de fondation révèle qu’il est composé de couches superposées de remblais et argile molle (0 à 2m) d’argile avec quelques petits cailloutis (2 m à 7,5 m), d’argile sablo graveleuse et argile sableuse (7,5 m à 15,70 m) et que le substratum compact (marne argileuse) se situe à partir de 15,70 m et très compact (marne) à partir de 18,40 m.

Ce spécialiste conclut que 'les désordres sont à mettre en relation avec un ensemble de causes à savoir sensibilité au phénomène de retrait gonflement du sol d’assise des fondations et défaut de longueur des micropieux'.

Il explique 'les essais de comportement indiquent que le sol support de fondation est sensible à très sensible aux variations de teneurs en eau, d’un point de vue volumétrique et ce malgré la présence des micropieux qui ne sont pas suffisamment ancrés (8 m à 13 m d’après les informations fournies par le maître de l’ouvrage) ; la succion des racines des arbres proches a pu accélérer le phénomène ; les désordres sont donc liés en partie au phénomème de retrait/gonflement des argiles dans le contexte de sécheresse climatique actuel.

D’après la facture des travaux de réalisation des micropieux, ces derniers atteignent des profondeurs comprises entre 10 m/TN et 13,5 m/TN. Ces profondeurs sont insuffisantes vis à vis des informations fournies par le sondage pressiométrique SP1. Les micropieux devaient être ancrés au-delà de 18,50 m/TN.

De ce fait l’ancrage est insuffisant et à cause du caractère sensible aux phénomènes de retrait/gonflement des argiles reconnues jusqu’à 7,5 m/TN, ils ne peuvent jouer leur rôle stabilisateur

Ensuite la proximité des chênes engendrerait des poussées latérales sur les micropieux et expliquerait également les désordres et leur aggravation ajoutée à l’insuffisance d’ancrage.

De plus, malgré les études passées aucun sondage pressiométrique n’a été réalisé ou ne nous a été fourni ; or les micropieux ne peuvent être dimensionnés qu’à partir de ce sondage.

Ces désordres tel que décrits et constatés par l’expert Z, non réservés et non apparents à la réception, rendent l’ouvrage impropre à sa destination puisque 'les fissures atteignent une largeur importante, affectent autant les murs que les cloisons entre pièces et plafonds et que les parois extérieures du logement ne sont pas étanches à l’air’ ; elles portent même atteinte à sa solidité puisque selon l’expert Z 'ils conduiront à terme au démantèlement de la villa et à sa ruine si aucun travaux de reprise ne sont entrepris'.

Ils rentrent ainsi dans le cadre de la garantie décennale qui pèse de plein droit sur la Sas Soltechnic, laquelle en l’absence de toute cause étrangère ou d’immixtion fautive du maître de l’ouvrage, ne peut s’exonérer de la présomption de responsabilité qui pèse sur elle.

Elle ne peut notamment invoquer leur absence d’imputabilité aux travaux réalisés par ses soins et les attribuer exclusivement à la sécheresse de 2003.

En effet, en sa qualité de constructeur elle est responsable des vices du sol.

Or elle a accepté d’effectuer des travaux de reprise en sous oeuvre des fondations pour pallier à des mouvements de la maison ; elle avait à sa disposition une étude de sol réalisée en 90-91 par la société 2GH ; bien que celle-ci précisait qu’elle ne devait pas servir pour des travaux confortatifs ou autres, elle n’a effectué aucune étude complémentaire et a implanté les micropieux sans avoir préalablement procédé à des sondages pressiométriques, qui étaient pourtant techniquement indispensables pour les dimensionner, ce que la Sas Soltechnic ne pouvait ignorer en sa qualité de professionnel spécialisé.

La chronologie du phénomène de fissuration postérieurement à cette intervention : 1994 au point de justifier une nouvelle reprise, puis en 1999 puis 2002 confirme que le phénomène de sécheresse exceptionnelle de l’été 2003 ne peut être considéré comme la cause déterminante des désordres ; il ne peut davantage être assimilé à un cas de force majeure, faute de caractère imprévisible et irrésistible pour un constructeur consciencieux, le phénomène étant connu dans la région à l’époque de ses interventions pour avoir déjà sévi dans le passé avec une dessication sévère.

sur l’indemnisation

La nature (reprise en sous oeuvre par micropieux approfondis et embellissements intérieurs) et le montant des travaux de remise en état nécessaires pour mettre fin aux désordres tels que proposés l’expert Z ne sont discutés par aucune des parties, si ce n’est la réfection du plafond en briques du séjour et de la cuisine chiffrée à 8.889,22 €.

Ce dommage doit être mis à la charge de la Sas Soltechnic à hauteur de moitié ; l’expert Z indique que selon son sapiteur ECBTI les fissures affectant ce plafond ont pour origine un contreventement défectueux de la charpente réalisé lors de la construction de la villa en 1975 mais il considère 'qu’il ne peut être occulté que les désordres affectant les maçonneries des façades aient eu une influence négative sur la stabilité du plafond’ et que 'le maître de l’ouvrage doit en conserver 50 % à sa charge’ (page 17 du rapport).

Le coût de la réparation tel que figurant aux pages 17 à 19 du rapport doit donc être entériné et s’établit aux sommes de 173.878,12 € TTC et 4.444,61 € TTC à indexer sur l’indice BT 01 du coût de la construction depuis mai 2001, date du dépôt du rapport d’expertise au jour du présent arrêt.

S’y ajoute

— le coût des frais de déménagement et de garde meubles

soit 9.405,34 €

— le coût de la location d’une maison meublée pendant la durée

des travaux 1.400,00 €

— le surcoût de la consommation électrique lié à la rupture des murs périphériques et de l’isolation en raison des fissures (passage d’air froid)

4.500,00 €

Mme C a subi un préjudice complémentaire né des troubles de jouissance, tracas, désagréments et dérangements divers liés aux désordres depuis plusieurs années puisqu’elle habite personnellement l’immeuble depuis 1999 et doit faire face à des difficultés pour manoeuvrer certaines menuiseries extérieures, des courants d’air, des chutes continuelles d’éclats de plâtre, et l’impossibilité d’envisager la vente du bien tant que la reprise en sous oeuvre n’est pas réalisée ; l’habitabilité des lieux n’a, toutefois, jamais été en cause et ne le sera que pendant la durée des travaux de reprise, même si, étant enceinte, elle a préféré le quitter au cours de l’hiver 2011 ; au vu de l’ensemble de ces données, l’octroi d’une indemnité globale de 10.000 € au titre de l’entier dommage est justifiée.

En l’absence de preuve de l’existence d’un préjudice distinct des chefs de dommages ainsi indemnisés, aucune somme ne peut être allouée au titre d’un préjudice moral, non démontré.

Sur l’action récursoire

L’action récursoire exercée par la Sas Soltechnic à l’encontre de la compagnie Groupama, ne peut prospérer.

La garantie de cet assureur au titre de la catastrophe naturelle au sens de l’article L 125-1 du code des assurances qui dispose que le sinistre n’est pris en charge que si les mesures habituelles de précaution n’ont pu être prises ou ont été insuffisantes à prévenir les dommages ne peut être retenue dès lors que la sécheresse de 2003 n’a pas été la cause déterminante mais l’une des causes des désordres, que les dommages avaient commencé à se manifester avant sa survenance, même si elle les a accélérés et aggravés et auraient pu être prévenus par une conception adaptée de l’ancrage des micropieux.

Ces circonstances ne permettent pas de considérer comme fautif au regard de l’article 1382 du code civil le refus de prise en charge de cet assureur.

Sur les demandes annexes

La Sas Soltechnic qui succombe dans ses prétentions supportera la charge des dépens de première instance en ce compris les frais de référé et de l’expertise de M. X et les dépens d’appel en ce compris les frais d’expertise de M. Z et ne peut, de ce fait, bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande d’allouer les sommes globale de 8.000 € à Mme C et de 1.500 € à la compagnie XXX au titre des frais irrépétibles exposés devant le tribunal et la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Vu l’arrêt du 8 juin 2009

— Dit que la Sas Soltechnic a engagé sa responsabilité envers Mme D C épouse Y sur le fondement de l’article 1792 du code civil,

— Condamne la Sas Soltechnic à payer à Mme D C épouse Y les sommes de

* 173.878,12 € TTC et 4.444,61 € TTC au titre des travaux de réparation à indexer selon l’évolution de l’indice BT 01 du coût de la construction depuis mai 2001 jusqu’à ce jour

* 9.405,34 € TTC au titre des frais de déménagement, garde meubles et réaménagement

* 1.400,00 € TTC au titre du coût de la location d’une maison meublée pendant la durée des travaux

* 4.500,00 € TTC au titre du surcoût de la consommation électrique

* 10.000 € au titre des troubles de jouissance

avec intérêts au taux légal à compter de ce jour.

— Déboute la Sas Soltechnic de son action récursoire à l’encontre de la compagnie Groupama d’Oc,

— Condamne la Sas Soltechnic à payer à

* Mme D C épouse Y la somme de 8.000 €

* la compagnie Groupama d’Oc la somme de 1.500 €

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— Déboute la Sas Soltechnic de sa demande à ce même titre,

— Condamne la Sas Soltechnic aux entiers dépens d’appel,

— Dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile au profit de la SCP NIDECKER, PRIEU-PHILIPPOT, JEUSSET et la SCP BOYER GORRIAS.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT

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