Cour d'appel de Toulouse, 20 février 2014, n° 12/03440

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 20 févr. 2014, n° 12/03440
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 12/03440
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 21 mars 2012, N° F09/02556

Sur les parties

Texte intégral

20/02/2014

ARRÊT N°

N° RG : 12/03440

CP/CC

Décision déférée du 22 Mars 2012 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE (F09/02556)

XXX

XXX

C/

Y X

CONFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 1 – Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE

***

APPELANT(S)

SNC COGEDIM VENTE prise en la personne de Monsieur A B

XXX

XXX

représentée par Me Bruno DENKIEWICZ, avocat au barreau de PARIS

INTIME(S)

Madame Y X

XXX

XXX

représentée par la SELARL ALTIJ, cabinet d’avocats au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Décembre 2013, en audience publique, devant C. PESSO, chargée d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

F. GRUAS, président

C. PESSO, conseiller

F. CROISILLE-CABROL, vice-président placée

Greffier, lors des débats : H. ANDUZE-ACHER

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

— signé par F. GRUAS, président, et par H. ANDUZE-ACHER, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme X a été engagée à compter du 22 août 2005 en qualité de secrétaire non cadre de niveau 3 coefficient 270 selon la classification de la convention collective nationale de l’immobilier par la société COGEDIM VENTE.

À compter du 1er janvier 2007, elle a été nommée comme secrétaire de service 1er échelon de niveau 4 coefficient 290.

La société COGEDIM VENTE a mis en oeuvre une restructuration de l’entreprise entraînant la suppression de 82 postes de travail qui a donné lieu à un plan de sauvegarde de l’emploi en date du 16 décembre 2008.

Par courrier du 19 janvier 2009, elle a informé Mme X de la suppression de son poste de travail et lui a proposé quatre postes de reclassement.

Par courrier du 28 janvier 2009, la société employeur a notifié à la salariée qu’elle avait jusqu’au 10 février 2009 pour faire connaître sa décision concernant la convention de reclassement personnalisé qui lui avait été proposée la veille. Elle a en outre notifié à l’intéressée « en l’absence de reclassement interne au groupe ALTAREA malgré la proposition qui vous a été présentée le 19 janvier 2009 » son licenciement économique en précisant que les motifs de ce licenciement économique sont ceux exposés dans le document d’information remis aux représentants du personnel joint à la lettre, résumés ainsi : 'le ralentissement de l’activité a conduit la direction de Cogedim à différentes mesures exposées sur ce document qui entraînent la suppression de votre emploi (cf. le document sur la partie restructuration et conséquences sur l’emploi).'

Contestant son licenciement, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse , lequel, par jugement du 22 mars 2012, considérant la violation de l’obligation de reclassement par l’employeur en raison de l’extrême rapidité de la procédure et du contenu très succinct des propositions de reclassement, a dit que ce licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence a condamné la société COGEDIM VENTE à payer à la salariée la somme de 14 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

La société COGEDIM VENTE a régulièrement relevé appel de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l’audience des débats.

La société COGEDIM VENTE demande à la cour d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé qu’elle n’avait pas loyalement respecté son obligation légale de reclassement et de condamner Mme X à lui verser la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient pour l’essentiel les moyens suivants :

— la mesure de réduction du personnel ne devait s’apprécier qu’au niveau de la société COGEDIM qui a pour activité principale la promotion construction immobilière sur deux secteurs l’immobilier résidentiel et l’immobilier d’entreprise, alors que les autres sociétés du groupe ALTAREA auquel elle appartient sont spécialisées dans l’immobilier commercial ;

— la lettre de licenciement, qui comporte en annexe le document relatif à la restructuration, est correctement motivée ; il est produit les éléments économiques objectifs ayant conduit à la nécessité impérieuse de procéder à une réorganisation de l’entreprise et d’adapter les effectifs à la baisse significative et durable de l’activité sur le secteur de la promotion construction ayant débuté en 2007 et se caractérisant par des pertes financières substantielles en 2008 ;

— elle a strictement respecté son obligation légale de reclassement : elle a proposé à la salariée avant la notification conservatoire du licenciement des offres de reclassement écrites précises et individualisées ; l’intéressée avait eu connaissance de ces postes de reclassement et de l’ensemble des 17 postes à pourvoir identifiés au sein du groupe ALTAREA par la diffusion sur le site intranet et par mails à chaque salarié des procès-verbaux des réunions du comité d’entreprise, de sorte qu’elle aurait pu postuler sur l’un de ces postes dès le 2 décembre 2008 puis à compter du 16 décembre 2008 ; la salariée ne peut soutenir qu’elle ne pouvait imaginer être concernée par le licenciement collectif avant le 19 janvier 2009 ; elle a donc pu disposer d’un délai raisonnable pour postuler aux emplois de reclassement qui lui étaient proposés ; il s’agissait bien de propositions de reclassement interne ; elles ont été formulées bien après l’expiration du délai d’un mois à compter de la diffusion, prévu par le plan de sauvegarde de l’emploi pour l’affectation sur ces postes ;

— les propositions de reclassement faites à Mme X sont satisfaisantes et complètes ; le poste de régularisatrice à Marseille a pu être pourvu par contrat à durée déterminée le 22 décembre 2008 puisqu’elle n’a pas postulé avant cette date mentionnée sur le plan de sauvegarde de l’emploi ; ce d’autant qu’elle n’avait jamais exercé cette fonction d’une catégorie supérieure à la sienne ; ayant proposé à la salariée tous les postes disponibles au sein du groupe au moment de la procédure de licenciement économique collectif, la société COGEDIM VENTE a satisfait à son obligation de reclassement ;

— les critères d’ordre des licenciements ont été respectés ; ils ont été établis après des modifications demandées par le comité d’entreprise puis avis favorable de celui-ci ; Mme X a été informée par courrier du 19 février 2009 des modalités d’application de ces critères ayant conduit à son licenciement; les notations qui lui ont été appliquées sont justifiées ; elle a obtenu la moins bonne note de Toulouse sur les 20 salariés de sa catégorie.

Mme X demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la société COGEDIM VENTE n’a pas respecté son obligation de reclassement, de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, à titre subsidiaire, de reconnaître que la société COGEDIM VENTE n’a pas respecté l’application de l’ordre des licenciements ce qui lui a causé un préjudice,

en conséquence dans les deux cas, de condamner la société employeur à lui payer la somme de 28 450 euros à titre de dommages intérêts outre 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Elle fait valoir pour l’essentiel les moyens suivants :

Le périmètre d’appréciation du motif économique du licenciement est le secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise employeur. Or, l’ensemble des données fournies à l’appui du licenciement économique collectif concerne la seule société COGEDIM;

— la société COGEDIM VENTE est défaillante dans son obligation de fournir les éléments établissant la réalité des difficultés invoquées à l’appui de son licenciement ;

— les neuf jours qui séparent l’envoi des propositions de reclassement et de la lettre de rupture mettent en évidence le non-respect par l’employeur de l’obligation de reclassement, alors que le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit des mesures d’accompagnement et de recherche de solutions visant au reclassement des salariés dont l’emploi est supprimé, ce qui prend nécessairement du temps ; à la date du 8 janvier 2009 quand elle a pu prendre connaissance du plan de sauvegarde de l’emploi définitif, elle ne savait pas encore qu’elle serait concernée par une éventuelle mesure de licenciement qu’elle a apprise en recevant la proposition de reclassement du 19 janvier 2009 ;

— la proposition de reclassement est incomplète dès lors que ne lui ont pas été proposés le poste d’assistante service étude à Paris et le poste de régularisatrice à Marseille ; en effet elle a effectivement occupé les fonctions de régularisatrice dès le début 2007 et jusqu’à son départ en congé maternité ; la société employeur ne lui a donc pas proposé tous les postes disponibles ;

— à titre subsidiaire, sa notation dans le cadre des critères d’ordre des licenciements est en contradiction avec la réalité en ce qui concerne notamment son potentiel d’évolution au regard des fonctions de régularisatrice qu’elle était capable d’exercer et de ses aptitudes au travail en équipe.

SUR CE

Selon l’article L1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut,

et sous réserve de son accord exprès, sur un emploi d’une catégorie inférieure.

L’obligation de reclassement est préalable au licenciement, elle prend effet dès l’instant où un licenciement, individuel ou collectif, est envisagé.

Même si un plan social est mis en oeuvre, l’employeur doit rechercher s’il existe des possibilités de reclassement du salarié dont le licenciement est envisagé jusqu’à la date de notification du licenciement et doit lui proposer les emplois disponibles en rapport avec ses aptitudes professionnelles.

Les propositions de reclassement proposées au salarié sont personnalisées, écrites, précises. Elles doivent permettre à l’intéressé de faire un choix éclairé.

En l’espèce, le plan de sauvegarde de l’emploi adopté après avis du comité d’entreprise du 16 décembre 2008 mentionnait au titre de la mobilité interne que la société COGEDIM VENTE avait recensé au sein du groupe ALTAREA auquel elle appartient 17 emplois à pourvoir qui seront portés à la connaissance de l’ensemble du personnel, sur lesquels chaque salarié pourra se porter candidat dans un délai de 3 semaines à compter de leur diffusion de sorte que les décisions d’affectation voire d’embauche ne pourront être prises qu’à l’issue d’un mois après cette diffusion. Il était précisé que pour 4 postes alors pourvus selon des contrats à durée déterminée, le délai pour postuler était réduit au 22 décembre 2008.

Il est certain que Mme X a eu connaissance dès le 16 décembre 2008, date à laquelle le procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise du 2 décembre 2008 a été diffusé à tous les salariés que 3 postes d’assistante étaient supprimés au sein de la direction de Toulouse de sorte que son licenciement était envisagé.

Toutefois, il appartenait à la société COGEDIM VENTE dès ce moment de mettre en oeuvre son obligation de recherche de reclassement individualisée en adressant à Mme X les offres personnalisées des emplois disponibles au sein du groupe correspondant à ses capacités.

Or, l’employeur a effectivement présenté ces offres de manière individualisée à Mme X par le courrier du 19 janvier 2009.

A cette date, le délai prévu dans le plan de sauvegarde de l’emploi pour la candidature des salariés était expiré de sorte que les emplois concernés étaient ouverts à l’embauche extérieure. De plus, l’employeur ne pouvait plus proposer le poste d’assistante étude de marché à Paris pourvu par contrat à durée déterminée jusqu’au 22 décembre 2008 transformé en contrat à durée indéterminée à cette date.

Par ailleurs, les offres d’emploi mentionnées dans le courrier du 19 janvier 2009, comme celles énoncées dans le plan de sauvegarde de l’emploi annexé à ce courrier n’étaient pas suffisamment précises, ne comportant ni la description des taches, ni la classification, ni la rémunération.

Ce dernier élément était déterminant pour le choix de l’intéressée, puisque l’indemnité différentielle prévue par le plan de sauvegarde de l’emploi en cas de reclassement sur un poste moins rémunéré était limitée dans son montant et dans le temps (12 mois).

Le plan de sauvegarde de l’emploi prévoyait que la direction des ressources humaines « accompagnera et supervisera la recherche de solutions visant au reclassement des salariés dont l’emploi est supprimé, en collaboration avec la cellule de mobilité interne et avec la direction des ressources humaines du groupe ALTAREA ».

Il précisait que « la période d’information/consultation du comité d’entreprise sera mise à profit pour que la cellule de mobilité interne dont la mise en place est prévue dès après la première réunion du comité d’entreprise, informe chaque salarié sur le contenu des postes proposés ainsi que sur les aspects liés à la mobilité elle même… »

Or, la société COGEDIM VENTE ne produit aucun élément de nature à établir que Mme X a pu bénéficier de ces dispositions relatives à la cellule de mobilité interne avant le 19 janvier 2009.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société COGEDIM VENTE n’a pas satisfait à son obligation de présenter à Mme X une offre précise et personnalisée de reclassement relative à tous les postes disponibles au sein du groupe, de sorte que le licenciement de cette salariée est dénué de cause réelle et sérieuse .

Compte tenu du dernier salaire de l’intéressée (2304 euros bruts), de son ancienneté (environ 3,5 ans) et de ce qu’elle a retrouvé un emploi rapidement, les premiers juges ont justement évalué son préjudice à la somme de 14 000 euros.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

La société COGEDIM VENTE qui succombe sera tenue aux dépens d’appel et au paiement d’une comme complémentaire de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne la société COGEDIM VENTE aux dépens d’appel,

La condamne à payer à Mme X la somme complémentaire de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par F.GRUAS, Président et H.ANDUZE-ACHER, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

H.ANDUZE-ACHER F.GRUAS

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Cour d'appel de Toulouse, 20 février 2014, n° 12/03440