Cour d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 14 novembre 2019, n° 19/01388

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 3e ch., 14 nov. 2019, n° 19/01388
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 19/01388
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Castres, 14 mars 2019, N° 19/00022
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

14/11/2019

ARRÊT N°804/2019

N° RG 19/01388 – N° Portalis DBVI-V-B7D-M3UD

CBB/MR

Décision déférée du 15 Mars 2019 – Président du TGI de CASTRES (19/00022)

M. X

SASU MAISONS VDL

C/

A Y

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3e chambre

***

ARRÊT DU QUATORZE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTE

SASU MAISONS VDL

[…]

[…]

Représentée par Me Joseph LE VAN VANG, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur A Y

[…]

[…]

Représenté par Me Florence PAMPONNEAU de la SCP PAMPONNEAU PERROUIN BELLEN-ROTGER, avocat au barreau d’ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BENEIX-BACHER, président

A. BEAUCLAIR, conseiller

V. BLANQUE-JEAN, conseiller

Greffier, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par I. ANGER, greffier de chambre

FAITS

Par contrat du 21 décembre 2016, M. Y et Mme Z ont confié à la SASU Maisons VDL la construction d’une maison individuelle située à Palleville.

La réception a été constatée par procès verbal du 23 juillet 2018 avec réserves relatives aux lots «'fourniture fenêtre'» et «'pose menuiserie'».

Au cours du mois de décembre 2018, M. Y a publié sur le réseau social Facebook, des photos et des commentaires négatifs à propos du travail de la SASU Maisons VDL.

PROCEDURE

Par acte du 28 janvier 2019, la SASU Maisons VDL a assigné M. Y devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Castres pour voir condamné sous astreinte M. Y à':

— supprimer de son compte Facebook l’ensemble des publications, commentaires, échanges et partages en rapport avec la SASU Maisons VDL constitutifs d’un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser,

— lui interdire de procéder à toute publication, commentaires, échanges et partages en rapport avec la SASU Maisons VDL également sous astreinte par infraction constatée, considérant qu’il s’agit d’actes de malveillance de nature à lui causer un dommage imminent qu’il convient d’éviter.

Par ordonnance du 15 mars 2019 le juge a :

— débouté la SASU Maisons VDL de ses demandes,

— condamné la SAS Maisons VDL à payer la somme de 1500 euros à M. Y au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SASU Maisons VDL aux dépens.

Par déclaration du 20 mars 2019, la SASU Maisons VDL a relevé appel de la décision.

L’ordonnance est critiquée en ce qu’elle a jugé que les propos de M. Y sur internet à l’encontre de la société VDL ne caractérisent pas un trouble manifestement illicite alors qu’en outre ils sont de nature à constituer un dommage imminent.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SASU Maisons VDL dans ses dernières conclusions en date du 6 mai 2019 demande à la cour au visa de l’article 809 du code de procédure civile de :

— dire et juger son appel recevable et bien fondé,

— dire et juger que les dénigrements de M. Y caractérisent un trouble manifestement illicite,

— dire et juger que les actes de malveillance de M. Y font peser sur la SASU Maisons VDL un dommage imminent qu’il y a lieu de prévenir.

En conséquence,

— ordonner à M. Y de supprimer de son compte Facebook l’ensemble des publications, commentaires, échanges et partages en rapport avec la SASU Maisons VDL, et cela sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l’ordonnance,

— interdire à M. Y de procéder à toutes publications, commentaires, échanges et partages en rapport avec la SASU Maisons VDL, de quelque manière que ce soit, et sur quelque support que ce soit, et cela sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée,

— condamner M. Y à devoir payer à la SASU Maisons VDL la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.

Elle soutient que':

— les critiques de M. Y portent sur des travaux non compris dans le contrat de maîtrise d''uvre qui lui a été consenti le 21 décembre 2016, de sorte que les désordres éventuels les affectant ne lui sont pas imputables,

— dans ces conditions, les commentaires négatifs postés en décembre 2018 sur sa page Facebook constituent un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser et dès lors qu’ils constituent un dénigrement, il s’agit bien d’un dommage imminent qu’il convient de prévenir ; en effet, les propos de Monsieur Y, ainsi que le montage de photographies laissent apparaître une volonté malveillante de nuire à la société Maisons VDL,

— il n’est pas justifié du retrait des publications litigieuses.

Par décision du 19 septembre 2019, les conclusions de M. Y en date du 10 juillet 2019 ont été déclarées irrecevables en application de l’article 905-2 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 septembre 2019.

MOTIVATION

En vertu de l’article 809, premier alinéa, du code de procédure civile, peuvent toujours être prescrites en référé, même en présence d’une contestation sérieuse, les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Constitue un dommage imminent celui qui n’est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer. Et le trouble manifestement illicite se définit comme toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit à laquelle le juge des référés peut mettre un terme à titre provisoire.

En l’espèce, la SASU Maisons VDL reproche à M. Y la publication sur son compte Facebook de propos dénigrant constitutifs d’un trouble manifestement illicite et compte tenu de l’absence de retrait de ces commentaires du dit compte, le dommage perdure.

La SASU Maisons VDL produit en copie les captures d’écran des propos et photographies publiés.

Ils sont au nombre de deux dont les termes sont les suivants':

Le 21 décembre': «'merci à mon constructeur de maison individuelle de faire le mort depuis des mois'».

Le 3 janvier': «'quand tu dis à ton constructeur que tu viens de marcher sur un câble dans ton garage et prendre le jus. Et qu’il t’envoie un plombier afin de le condamner et que le plombier ne fait que couper un peu plus loin. C’est comme couper un tuyau d’eau qui fuit un peu plus loin en pensant que ça fuira plus. Le pire c’est quand tu le signales et que plus personne ne te donne de signe de vie. Merci encore Maison VDL vous me faites vibrer'!!!'»

Et en réponse aux commentaires des interlocuteurs':

«'Des démarches sont en cours avec mon avocat ainsi que des journaux locaux pour dénoncer » … «'d’ailleurs la porte de la salle de bain ne ferme plus depuis 3 mois'». «'Le souci est résolu mais les dégâts causés sont toujours là'».

Il s’agit donc de commentaires relatifs d’une part, à la qualité de certains travaux très ciblés exécutés sous la maîtrise d’oeuvre de la SASU Maisons VDL pour le compte de M. Y (comprenant les lots plomberie et électricité) et d’autre part, au manque de réactivité de l’entreprise face aux désordres constatés par son client. Et ainsi que l’a justement relevé le premier juge, les photographies visent des désordres qui ne sont pas contestés.

Ces critiques relatives à ce chantier précis ne comportent aucune observation ni aucune remarque assimilable à un dénigrement de l’entreprise.

En effet, le dénigrement consiste à jeter publiquement le discrédit sur une personne, un produit ou un service identifié et se distingue de la critique dans la mesure où il émane d’un acteur économique qui cherche à bénéficier d’un avantage concurrentiel.

Or, il n’apparaît pas avec évidence que le but poursuivi par M. Y était de jeter le discrédit sur l’entreprise afin de favoriser une entreprise concurrente.

De même, il n’est pas justifié d’une atteinte à l’honneur et à la considération de la SASU Maisons VDL s’analysant en une diffamation, les désordres dénoncés n’étant pas contestés ni même la fonction de maître d’oeuvre en charge du contrôle de l’exécution du chantier.

Ces faits s’inscrivent donc dans les limites du droit à la critique d’un client face à son contractant dans un rapport commercial et relèvent de l’exercice, sans faute ni abus, de la liberté d’expression.

La preuve d’un trouble manifestement illicite ou d’un dommage imminent n’étant pas rapportée, l’ordonnance doit donc être confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour

— Confirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Castres en toutes ses dispositions.

— Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la SASU Maisons VDL à payer à M. Y la somme de 1500€.

— Condamne la SASU Maisons VDL aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

I. ANGER C. BENEIX-BACHER

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