Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 21 mai 2021, n° 19/02879

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 2, 21 mai 2021, n° 19/02879
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 19/02879
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Montauban, 19 mai 2019, N° 17/00031
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

21/05/2021

ARRÊT N° 2021/394

N° RG 19/02879 – N° Portalis DBVI-V-B7D-NBNN

FCC/VM

Décision déférée du 20 Mai 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de MONTAUBAN ( 17/00031)

Y Z

X A B

C/

SAS INGRAM MICRO SERVICES

CONFIRMATION TOTALE

Grosse délivrée le 21/05/2021

à :

— Me MICHAUD

— Me RIVES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 2

***

ARRÊT DU VINGT ET UN MAI DEUX MILLE VINGT ET UN

***

APPELANTE

Madame X A B

[…]

[…]

Représentée par Me Olivier MICHAUD de la SELARL JURICIAL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

SAS INGRAM MICRO SERVICES prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

[…]

Représentée par Me Robert RIVES, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat postulant et par Me Olivier THIBAUD de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Mars 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant F. CROISILLE-CABROL, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée

de :

C. H, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffière, lors des débats : A. F

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par C. H, présidente, et par A. F, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme X A B a été embauchée le 9 février 1982 en qualité de secrétaire sténo-dactylo par la société Talco.

Son contrat de travail a été transféré à la société Sagem en 1995, puis à compter du 1er juillet 2008 à la SASU Anov France qui fait partie du groupe Anovo. Celui-ci a été racheté en 2015 par le groupe Ingram Micro.

Dans le dernier état des relations contractuelles, suite à un avenant du 4 juillet 2014 à effet du 1er avril 2014, Mme A B était classée au niveau V échelon 2 coefficient 335 selon les dispositions de la convention collective de la métallurgie. Elle était qualifiée sur les bulletins de paie d’ «assistante ressources humaines», et percevait un salaire mensuel brut de 2.628 € ainsi que la prime d’ancienneté de 383,71 €.

Mme A B a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 10 septembre 2014, et

ce de manière continue jusqu’en 2016.

Dans le courant de l’année 2015, la société Anov France a mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi impliquant la suppression de 63 postes, qui a été homologué le 13 janvier 2016 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Beauvais (60), lieu du siège social de la société.

Par courrier du 24 février 2016, la société Anov France a informé Mme A B que dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi, le poste « paie » qu’elle occupait au sein de l’établissement de Montauban était supprimé, et que l’application à la catégorie professionnelle «paie» des critères d’ordre des licenciements désignait une salariée de l’établissement de Beauvais, dont le poste lui était proposé avec modification du contrat de travail.

Mme A B a refusé cette mutation à Beauvais par courrier du 21 mars 2016, tout en rappelant qu’elle occupait le poste «d’assistante ressources humaines» et non un poste de la catégorie «paie».

La société employeur lui a adressé le 1er avril 2016 des offres de reclassement interne ainsi qu’un questionnaire en vue de reclassement à l’étranger. La salariée a décliné toutes les propositions qui lui ont été présentées.

Son licenciement pour motif économique lui a été notifié par lettre du 22 avril 2016.

Elle a adhéré le 29 avril 2016 au dispositif de congé de reclassement. Son contrat de travail a pris fin le 24 juillet 2016.

Le 9 février 2017, Mme A B a saisi le conseil de prud’hommes de Montauban pour contester son licenciement.

La société Anov France a changé de dénomination le 27 juillet 2018 pour s’appeler SASU Ingram Micro Services.

Par jugement de départition du 20 mai 2019, le conseil de prud’hommes de Montauban a :

— dit que le licenciement de Mme A B repose sur un motif économique réel et sérieux,

— dit que l’obligation de reclassement a été respectée de façon loyale,

— débouté Mme A B de ses demandes de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail et pour non respect des critères d’ordre des licenciements,

— condamné Mme A B à payer à la SASU Ingram Micro Services la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Mme A B a relevé appel de ce jugement le 20 juin 2019 dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

Par conclusions notifiées le 7 juillet 2020, auxquelles il est expressément fait référence, Mme A B demande à la cour de :

— réformer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions,

— à titre principal, dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

— à titre subsidiaire, dire que les critères d’ordre des licenciements n’ont pas été respectés,

— en tout état de cause :

* fixer son salaire mensuel moyen à 3.247,71 € bruts,

* condamner la société Ingram Micro Services à lui verser la somme de 105.000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre principal ou pour violation des critères d’ordre des licenciements à titre subsidiaire,

* condamner la société Ingram Micro Services à lui verser la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamner la société Ingram Micro Services aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 6 décembre 2019, auxquelles il est expressément fait référence, la société Ingram Micro Services demande à la cour de :

— dire que le licenciement de Mme A B repose sur un motif économique réel et sérieux,

— dire qu’elle a respecté son obligation préalable de reclassement,

— dire que Mme A B relève de la catégorie professionnelle « paie » et que la société a correctement appliqué les critères d’ordre,

— en conséquence, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

— condamner Mme A B à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme A B aux entiers dépens.

MOTIVATION

- Sur la cause économique du licenciement

Aux termes de l’article L.1233-3 du code du travail, en sa version applicable au litige, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Une réorganisation de l’entreprise constitue une cause économique de licenciement à condition qu’elle soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l’emploi.

Lorsqu’une société fait partie d’un groupe, la situation économique doit s’apprécier au niveau du secteur d’activité du groupe dans lequel elle intervient, qui est déterminé en prenant en considération un faisceau d’indices relatifs à la nature des produits, à la clientèle auxquels il s’adressent et au mode de distribution mis en oeuvre.

La lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige, doit énoncer la cause économique mais également son incidence sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié concerné.

* Sur la réalité de la cause économique

Mme A B soutient en premier lieu que le motif de son licenciement n’est pas réel, n’est pas économique mais est inhérent à sa personne, parce que la responsable des ressources humaines de la société Anov France lui a annoncé au cours d’un déjeuner le 23 mars 2015, soit un an avant la notification du licenciement, que son poste allait être prochainement supprimé.

La seule affirmation de la salariée, même répétée dans plusieurs courriers, ne peut constituer la preuve du fait rapporté, lequel, à le supposer établi, ne pourrait avoir pour conséquence de dénier la cause économique de la suppression du poste alors envisagée, mais décidée ultérieurement dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi.

* Sur le secteur d’activité

Dans la lettre de licenciement, la société Anov France expose clairement que la dégradation de la situation économique a été appréciée au niveau du secteur d’activité de la réparation et rénovation d’équipements de communication.

Il résulte de l’ensemble des pièces versées aux débats, en particulier des documents relatifs au projet de réorganisation de la société Anov France, que le groupe Ingram micro auquel elle appartient, qui intervient en B2B (d’entreprise à entreprise) dans le domaine de l’industrie technologique, a pour activité le négoce de matériel informatique, d’outils technologiques de l’information, du cloud et de supports de logistique ainsi que la réparation et la rénovation d’équipements de communication (box internet et parc téléphonique).

Mme A B met en doute que cette dernière activité constitue un secteur d’activité dans la mesure où elle fait partie d’une des quatre divisions du groupe dans laquelle figure également la « distribution » que la société employeur expose être la logistique de la distribution des produits aux clients.

Toutefois l’activité de réparation et rénovation est par nature distincte de celles relatives au négoce de produits ou à leur distribution, elle implique le développement d’usines techniques en télécom, téléphonie, réseau et informatique, et a pour clientèle principale les opérateurs téléphoniques, contrairement aux autres activités.

Il s’en déduit qu’elle constitue un secteur d’activité.

C’est donc légitimement que la cause économique du licenciement de Mme A B a été appréciée au niveau de ce secteur, comprenant le groupe Anovo dont la société Anov France est la principale société en France et la société Datrepair la principale société en Allemagne.

* Sur la cause énoncée dans la lettre de licenciement

Dans la lettre de licenciement, la société Anov France analyse longuement la situation du secteur de la réparation et rénovation d’équipements de communication en raison de la perte du contrat avec le groupe SFR/ Numéricable ainsi que d’autres contrats moins importants, notamment avec le client VOO, dans un contexte de faible croissance et de concurrence accrue, exposant que ces évènements associés à une pression constante sur les prix affectent significativement et durablement les résultats, entraînent une perte d’exploitation de 4,3 millions d’euros ainsi que la diminution de la marge sur coût direct, une baisse significative de l’activité et du chiffre d’affaires, un fort recul des résultats, de sorte que la dégradation de la situation économique est flagrante.

Elle en conclut que : « Compte tenu de cette situation économique et financière particulièrement fragile et dégradée, dans un contexte de ralentissement économique et face à un environnement fortement concurrentiel, le groupe Ingram micro et la société Anov France se trouvent confrontés à la nécessité d’agir afin de sauvegarder leur compétitivité économique sur le secteur d’activité de la réparation et rénovation d’équipements de communication. »

Mme A B soutient qu’il résulte des termes de cette lettre que ce sont de prétendues difficultés économiques résultant de la perte de plusieurs contrats importants qui ont imposé une réorganisation de l’entreprise, et non la sauvegarde de la compétitivité du secteur concerné, de sorte que le motif invoqué est fallacieux.

Elle fait valoir ensuite que les difficultés économiques ne sont pas réelles, importantes et durables mais seulement prévisibles.

Toutefois, de nombreux termes de la lettre rappellent que la perte des contrats affecte la pérennité du secteur d’activité, rend particulièrement vulnérable toute entreprise du secteur dont la compétitivité se joue sur les prix, donc sur les coûts de production, du travail et sur le taux de marge, et en conséquence impose des ajustements des capacités de production.

Ainsi, il apparaît nettement que la cause économique énoncée dans la lettre de licenciement est une réorganisation du secteur d’activité ayant pour objectif de sauvegarder sa compétitivité en prévenant des difficultés économiques prévisibles.

* Sur la sauvegarde de la compétitivité

Mme A B fait valoir que la société Anov France (aujourd’hui dénommée Ingram Micro Services) ne démontre pas que les pertes de marchés ont mis en péril sa compétitivité au sein du secteur concerné.

Pour justifier de la réalité de la cause économique, la société Ingram Micro Services verse aux débats les documents établis dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi accompagnés de pièces comptables, desquels il ressort que cette société a effectivement perdu en mai 2015 le marché de réparation des produits du groupe SFR/Numéricable qui représentait en 2014 20 % de son chiffre d’affaires et 27 % de sa marge commerciale, alors que le chiffre d’affaires de la société représentait 40,27 % du chiffre d’affaires total du secteur d’activité de la réparation et rénovation d’équipements de communication.

Il s’agit donc d’un événement significatif, d’autant qu’il s’est accompagné de la fin d’un autre contrat (VOO) et de difficultés des autres sociétés du groupe Anovo situées à l’étranger, de sorte que l’EBIT (bénéfice avant impôts) du groupe Anovo pour l’année 2015 a été négatif à hauteur de 45,496 millions d’euros.

Par ailleurs, la société Datrepair a également perdu un client important (Deutsche telekom) de sorte que son résultat de 2015 a été également négatif de 1,057 millions d’euros.

Le marché français de la réparation, du service après vente et de la maintenance des dispositifs d’accès à internet (box), constituant la principale activité de la société Anov France, était caractérisé par la concentration de la clientèle constituée à 97 % de 4 fournisseurs principaux d’accès à internet (Orange, Free, Bouygues télécom et SFR /Numéricable).

Ce marché comme celui, complémentaire, de la rénovation des téléphones, évoluait dans un contexte de forte concurrence, de pression à la baisse des prix, de réduction des marges, donc de faible croissance, et de la nécessité de services à plus forte valeur ajoutée.

Il s’en déduit que la perte du marché SFR/Numéricable ne pouvait être compensée par une croissance en volume auprès des clients existants ou par la possibilité de gagner un ou plusieurs nouveaux clients.

Il est donc établi que le secteur d’activité de la réparation et rénovation d’équipements de communication se trouvait dans une situation de grande fragilité mettant en péril sa pérennité, ce qui rendait nécessaire sa réorganisation pour en sauvegarder sa compétitivité.

Le diagnostic effectué par la société Secafi à la demande du comité central d’entreprise n’apporte pas d’éléments contraires. En effet, cette société indique que le groupe Ingram micro était robuste sur le plan économique, ce qui est sans intérêt dès lors que la situation est appréciée au niveau du secteur d’activité et non du groupe.

Elle conclut que le groupe Anovo avait un potentiel structurel de croissance et de profitabilité, permettant à ce dernier ainsi qu’à la société Anov France, après une année 2016 de « creux », un « retour à meilleure fortune » à compter de 2017, ce qui s’est avéré inexact puisque la société Anov France a dû procéder à un nouveau plan social en 2018.

La cause économique du licenciement de Mme A B est donc réelle et sérieuse.

* Sur la suppression du poste

Dans la lettre de licenciement, il est précisé que la réorganisation prévue par le plan de sauvegarde de l’emploi impacte le service paie et conduit à la suppression du poste occupé par Mme A B dans l’établissement de Montauban, rattaché à la catégorie professionnelle « paie » à laquelle elle appartient.

La salariée soutient qu’elle n’occupait pas le poste « paie » prétendument supprimé mais celui d’assistante ressources humaines qui s’en distingue et ajoute que l’employeur ne justifie pas de la suppression du poste qu’elle occupait.

Dans un courrier du 21 mars 2016, Mme A B décrit précisément les fonctions qu’elle exerçait : plusieurs activités concernant l’administration du personnel ainsi que la gestion des temps et des absences, mais également la gestion de la paie (saisie des éléments variables, contrôle des données saisies sur les bulletins de paie, édition des attestations Pôle emploi, établissement des soldes de tout compte, les autres opérations étant effectuées à Beauvais).

Elle produit un ensemble de documents ainsi que des attestations d’employés de la société Anov France qui démontrent qu’au cours des nombreuses années passées au service des ressources humaines, elle a effectué l’ensemble des tâches relevant de ce service, mais que, durant les dernières années de la relation contractuelle, elle était chargée de diverses tâches relatives à la gestion administrative du personnel, de la mise en place des élections professionnelles, de la participation à un audit et à la refonte du système de gestion des temps de travail, et qu’elle avait également pour mission la gestion de la totalité de la paie de l’établissement de Montauban.

Or, des attestations des autres salariées du service des ressources humaines, il ressort qu’elle était la seule affectée à la gestion de la paie.

S’il est exact, comme l’intéressée le fait valoir, que la paie est un des domaines des ressources humaines, de sorte que son emploi était qualifié d’assistante ressources humaines, il résulte notamment de la fiche « Rome » de ce métier édité par Pôle emploi versée aux débats par la salariée que la gestion de la paie implique des compétences spécifiques.

D’ailleurs, Mme A B était classée à un niveau supérieur à celui des autres salariées du service des ressources humaines (à l’exception de la responsable) et au même niveau que la responsable paie de Beauvais, dont le poste lui a d’ailleurs été proposé dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi.

Ainsi, il est établi que Mme A B exerçait effectivement à titre principal toutes les fonctions relatives à la gestion de la paie de l’établissement de Montauban.

C’est bien ce poste dont la suppression a été décidée dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi, les tâches relatives à la gestion de la paie étant transférées à Beauvais où se trouve le siège social de l’entreprise.

Par application des critères d’ordre aux salariés de la catégorie « paie » sur l’ensemble des établissements de la société Anov France, c’est une salariée de Beauvais qui devait être licenciée, de sorte que le poste de cette dernière a été proposé à Mme A B, qui l’a refusé.

L’employeur justifie que la salariée de Beauvais est restée à son poste et qu’aucun salarié n’a été recruté sur le poste « paie » de Montauban, de sorte que ce dernier a bien été supprimé.

- Sur l’obligation de reclassement

Selon les dispositions de l’article L.1233-4 du code du travail, en sa version applicable au litige, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie. Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente, ou, à défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, sur un emploi d’une catégorie inférieure.

Mme A B fait valoir que la société employeur ne justifie pas avoir recherché tous les postes disponibles au sein des sociétés du groupe Ingram micro en les interrogeant sur l’existence de postes vacants et donc ne prouve pas que son reclassement était impossible.

Le document unilatéral intégrant le plan de sauvegarde de l’emploi en date du 10 décembre 2015 comportait la liste exhaustive des postes disponibles au reclassement à cette date dans la société, dans le groupe Anovo et dans le groupe Ingram micro.

Par lettre du 1er avril 2016, la société employeur a proposé à la salariée un poste de reclassement comme téléconseiller à Montauban et lui a transmis une liste de postes précisément décrits, disponibles au sein de la société (des postes d’opérateur, de magasinier, de technicien réparateur) ainsi qu’au sein du groupe Ingram micro (plusieurs postes de commercial, technicien informatique, chargé de relations avec les fournisseurs, magasinier …).

Elle lui a également adressé un questionnaire lui demandant A elle acceptait des propositions de reclassement à l’étranger.

Elle lui enfin transmis une liste de postes disponibles fournie par l’UIMM consultée à cet effet par la société Anov France conformément aux dispositions conventionnelles.

Mme A B a répondu qu’elle n’était intéressée par aucun des postes disponibles.

De l’ensemble de ces éléments, il résulte que la société Anov, qui a nécessairement interrogé les différentes sociétés du groupe, a rempli sérieusement et loyalement son obligation de recherche de reclassement de Mme A B.

Il y a donc lieu de conclure que le licenciement de Mme A B est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En conséquence la décision du conseil de prud’hommes qui a jugé que ce licenciement repose sur un motif économique réel et sérieux et que l’obligation de reclassement a été respectée de façon loyale, et qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts, sera confirmée.

- Sur les critères d’ordre des licenciements

Conformément aux dispositions de l’article L. 1233-5 du code du travail, telles qu’elles étaient rédigées lors du licenciement de Mme A B, lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

Les critères d’ordre des licenciements s’appliquent à l’ensemble des salariés relevant d’une même catégorie professionnelle. Appartiennent à une même catégorie professionnelle les salariés qui exercent dans l’entreprise des activités de même nature supposant une formation professionnelle commune.

Mme A B ne conteste pas la définition des catégories professionnelles établies dans le plan de sauvegarde de l’emploi, cette contestation n’étant pas de la compétence de la juridiction prud’homale, mais elle critique son rattachement à l’emploi d'« assistante ressources humaines paie » entrant dans la catégorie « paie », soutenant qu’elle aurait dû être incluse dans la catégorie « assistant administratif », de sorte que, par application des critères d’ordre définis par le plan de sauvegarde de l’emploi à tous les salariés de la société Anov France relevant de cette catégorie, elle n’aurait pas été désignée pour être licenciée, en raison de sa grande ancienneté et de sa situation de personne de plus de 55 ans, séparée avec un enfant à charge.

Le document unilatéral intégrant le plan de sauvegarde de l’emploi homologué par l’administration définit ainsi les catégories professionnelles qui concernent le litige :

— assistant administratif (assistant ressources humaines, assistante de direction, assistante facturation, support technique CCI, assistante QHSE)

— paie (responsable paie, assistant RH paie).

Au vu des éléments énoncés au sujet de la suppression du poste, relatifs aux fonctions réellement exercées par Mme A B dans le dernier état de la relation de travail, il apparaît que dans l’établissement de Montauban, elle était seule à exécuter les travaux de gestion de la paie, travaux de nature spécifique nécessitant des compétences particulières, de sorte que, même A elle exerçait d’autres tâches relevant des ressources humaines, elle était la seule occupant le poste supprimé.

Par ailleurs, elle ne rapporte pas la preuve que les autres salariées du service disposaient des compétences pour remplir les tâches de gestion de la paie.

En conséquence, elle ne pouvait être que classée dans la catégorie professionnelle « assistante RH paie ».

Le non respect des critères de l’ordre des licenciements n’étant donc pas établi, le jugement du conseil de prud’hommes qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre sera confirmé.

- Sur les frais et dépens

Mme A B qui perd sur le principal doit supporter les dépens d’appel comme ceux de première instance. Les dispositions relatives aux frais irrépétibles seront confirmées, l’équité ne

commandant pas d’allouer à l’employeur une somme supplémentaire en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne Mme X A B aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par G H, présidente, et par E F, greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

E F G H

.

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