Cour d'appel de Toulouse, 4e chambre section 1, 30 mai 2022, n° 20/03090

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 1, 30 mai 2022, n° 20/03090
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 20/03090
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 7 octobre 2020, N° F18/01134
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

30/05/2022

ARRÊT N° 2022/307

N° RG 20/03090 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NZ2D

S.B/K.S

Décision déférée du 08 Octobre 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F 18/01134)

G [E]

SECTION INDUSTRIE

[P] [J]

C/

S.A. DAHER AEROSPACE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [P] [J]

30, Chemin des Oiseaux

81600 GAILLAC

Représenté par Me Didier OLIVIE, avocat au barreau de ALBI, et par Me David GILLET-ASTIER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

S.A. DAHER AEROSPACE

23 Route de Tours

41400 SAINT JULIEN DE CHEDON

Représentée par Me Gaelle KERMAREC de la SELARL ACTANCE, avocat au barreau de PARIS et par Me Emmanuelle REY-SALETES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant S. BLUME, Présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Lors des débats : K. SOUIFA, faisant fonction de greffier

Greffier lors du prononcé : C.DELVER

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.

FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [P] [J] a été embauché le 4 mars 1991 par la Société générale de maintenance industrielle, en qualité de magasinier, suivant contrat de travail à durée indéterminée.

Le contrat de travail de M. [P] [J] a été transféré à la société Daher Lhotellier Services, à compter du 1er janvier 2005, puis à la société Kuehne & Nagel,

le 1er mai 2009, puis à la société Daher Aerospace, le 1er janvier 2018.

Au dernier état de la relation de travail, M. [J] exerçait les fonctions de magasinier logistique, la relation de travail ayant été régie par la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires de transport.

Par courrier du 21 décembre 2017, assorti d’une mise à pied à titre conservatoire,

M. [J] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé

au 9 janvier 2018 ; il a été licencié suivant courrier du 15 janvier 2018 pour faute grave.

M. [J] a saisi le conseil de prud’hommes le 17 juillet 2018 pour contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes.

Par jugement du 8 octobre 2020, le conseil de prud’hommes de Toulouse, section industrie, a’débouté les parties de leurs demandes et mis les éventuels dépens à la charge de M. [J].

***

Par déclaration du 12 novembre 2020, M. [P] [J] a régulièrement interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 20 octobre 2020.

***

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique au greffe

le 3 février 2021, M. [P] [J] demande à la cour de’réformer le jugement et, statuant à nouveau :

— de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse';

— de condamner la société Daher Aerospace à lui verser les sommes suivantes':

*7.065,24 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 706,52 € de congés payés afférents,

*28.751,60 € à titre d’indemnité légale de licenciement,

*141.304,80 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par exception au barème indemnitaire devant rester inappliqué ou, à défaut, 65.353,47 € sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail nouvellement rédigé,

*2.826,09 € à titre de rappel de salaires concernant la mise à pied à titre conservatoire, outre 282,60 € de congés payés correspondants,

*10.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

*10.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

*3.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile';

— d’ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt.

***

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique au greffe

le 3 mai 2021, la SA Daher Aerospace demande à la cour':

À titre principal,

— de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions et de juger que les demandes du salarié sont mal fondées';

À titre subsidiaire,

— de juger que le licenciement de M. [J] repose sur une cause réelle';

— de débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts';

— de ramener ses demandes indemnitaires à de plus justes proportions';

À titre infiniment subsidiaire,

— de faire application du barème de l’article L. 1235-3 du code du travail';

En tout état de cause,

— de condamner M. [J] à lui payer la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’instance.

***

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 4 mars 2022.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Tout licenciement doit être fondé sur une cause à la fois réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article L. 1232-6 du code du travail, l’employeur est tenu d’énoncer dans la lettre de licenciement, le ou les motifs du licenciement. La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur. En cas de doute, celui-ci profite au salarié.

La lettre de licenciement du 15 janvier 2018 est ainsi rédigée':

«'('). Nous faisons suite à l’entretien préalable du mardi 9 janvier 2018, durant lequel vous avez été assisté par madame [F] [I], représentante du personnel.

Lors de cet entretien, monsieur [D] [V], directeur de sites logistiques et moi-même, nous vous avons exposé les faits qui vous sont reprochés.

Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement fautif. En effet,

le 20 décembre 2017, alors que votre responsable d’exploitation, [W] [K], vous réunissait vous et vos collègues, pour une mise au point opérationnelle, le ton est monté entre votre collègue intérimaire, [A] [U] et vous-même. [A] [U] s’est levé et vous en avez fait de même. Vous lui avez alors asséné un coup de tête dans le visage. Votre responsable d’exploitation et votre collègue, [O] [Z] vous ont séparé. Pendant l’entretien, vous avez reconnu avoir mis un coup de tête à votre collègue et vous nous avez confié le regretter. Vous avez justifié cet emportement par des remarques désobligeantes de votre collègue lors de la réunion organisée par votre responsable d’exploitation, sans préciser les remarques faites. Vous nous avez également fait part de propos antérieurs que [A] [U] aurait tenus à votre égard et qui auraient influé sur votre comportement le 20 décembre 2017.

Ces explications ne nous ont néanmoins pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave.

En effet les faits de violence physique sont inacceptables et ne sauraient être tolérés dans notre entreprise. Votre comportement constitue une infraction à notre règlement intérieur qui stipule expressément qu’il est interdit de « commettre ou participer à des agressions physiques et verbales ».

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien, même temporaire, dans l’entreprise s’avère impossible (') ».

L’employeur produit le courriel de M. [K], responsable d’exploitation ayant signalé à sa propre hiérarchie, le 20 décembre 2017, à 18h12, l’altercation survenue le même jour entre MM. [J] et [U], au cours de la réunion de 16h : «'J’ai convoqué

M. [J] [P], M. [U] [A] et M. [Z] [O] pour une mise au point opérationnelle du service 7T2. J’ai commencé à prendre la parole, le ton est monté entre M. [U] et M. [J], pendant que je m’adressais à M. [Z]. M. [U] s’est levé, M. [J] en a fait de même et M. [J] a mis un coup de tête dans le visage de M. [U] pour lui démontrer son désaccord'!

J’ai attrapé M. [U] et M. [Z] a attrapé M. [J] pour les séparer et calmer la situation. Je déplore le fait que M. [J] a bien usé de sa force physique contre

M. [U] sans que ce dernier lui rende aucun coup du fait que je l’ai saisi aussitôt'».

L’autre témoin de la scène, M. [Z], expose dans un courriel du 27 décembre 2017, dont l’authenticité n’est pas contredite par l’appelant, que, lors de la réunion

du 20 décembre précédent, «'les esprits se sont échauffés. M. [J] s’est soudainement levé, puis M. [U] s’est aussi mis debout. C’est à ce moment précis que M. [J] a agressé physiquement M. [U] en lui assénant un coup de tête'».

Il ressort encore de manière évidente du dépôt de plainte de M. [U] en date du 22 décembre 2017, de la fiche descriptive de son accident du travail du même jour et de la déclaration d’accident du travail du 26 décembre 2017, reconnu par la CPAM au titre des accidents professionnels, que M. [J] a donné un coup de tête à M. [U] au niveau du nez, ce dernier ayant présenté des contusions et saignements.

De plus, le compte rendu de l’entretien préalable au licenciement rédigé par Mme [I], conseiller du salarié, rappelle les propos tenus par celui-ci durant cet entretien : «'Le ton monte entre collègues, des insultes émanent à son encontre de la part d’un de ses collègues et c’est à ce moment-là qu’il fait le geste de donner un coup de tête qu’il regrette fortement'».

M. [J] soutient que la version des faits donnée par les témoins de l’altercation ne concorde pas avec celle de la victime, M. [U], quant au point de départ de l’incident et aux lésions que ce dernier aurait subies au niveau de sa main droite.

Toutefois, d’une part, il demeure établi que l’appelant a asséné un coup de tête à son collègue intérimaire, M. [U], le choc ayant provoqué des séquelles au niveau du nez et un arrêt de travail de près d’un mois.

D’autre part, l’appelant ne produit aucun élément tangible permettant d’affirmer, ainsi qu’il le soutient, que son geste aurait résulté des provocations verbales de M. [U], ce qui, au surplus, n’aurait pas ôté tout caractère disproportionné à sa riposte physique. Il ne démontre pas non plus que son licenciement aurait été prémédité par l’entreprise. Les pièces 15 et 16 du salarié, nommées «'témoignage'», ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile en ce qu’elles ne comportent pas les mentions requises et ne permettent pas d’identifier leurs auteurs. Leur contenu est également imprécis et insuffisant pour établir une quelconque machination de l’employeur aux fins de se séparer de M. [J].

Il doit être précisé que, le 2 mars 2016, M. [J] a reçu un avertissement, dont la nullité (ou l’annulation')n’est pas sollicitée, pour avoir tenu des propos insultants à l’encontre de son supérieur hiérarchique, après avoir refusé d’exécuter les consignes données. Le courrier d’avertissement rappelle très explicitement au salarié que le règlement intérieur de l’entreprise prohibe tout dénigrement et insulte, mais également les violences physique et verbale.

Il résulte de l’ensemble des éléments sus-évoqués que M. [J] a donné un coup de tête à M. [U], son collègue intérimaire, qui a été placé en arrêt de travail pendant près d’un mois. Compte tenu du passif disciplinaire de l’appelant, la gravité de la faute commise empêchait son maintien dans l’entreprise et justifie la sanction prononcée.

Le licenciement pour faute grave est bien fondé et le salarié sera débouté de l’ensemble des demandes qui en découlent.

Le salarié sera également débouté de ses demandes de dommages et intérêts distincts pour rupture vexatoire et préjudice moral, celui-ci ne démontrant aucune faute de l’employeur ni aucun préjudice subi.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur les demandes annexes':

M. [J], partie principalement perdante, sera condamné aux entiers dépens de l’appel.

La société Daher Aerospace est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l’occasion de cette procédure. M. [J] sera donc tenu de lui payer la somme de 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré.

Condamne M. [P] [J] aux dépens de l’instance d’appel

Condamne M. [P] [J] à payer la somme de 500 € à la société Daher Aerospace sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER S.BLUMÉ

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