Cour d'appel de Versailles, du 2 avril 1998

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Résumé de la juridiction

L’obligation de délivrance du vendeur d’un équipement informatique s’étend à la mise au point et comporte une obligation accessoire d’information et de conseil du client aux fins de lui fournir un matériel adapté à ses besoins et aux services qui en étaient attendus.Dès lors que les débats établissent que plusieurs années après la vente, un système d’analyse spectrométrique n’était toujours pas correctement exploitable et ne présentait pas, en dépit de multiples tentatives de mise au point, la fiabilité requise conformément aux buts et attentes du client, démontrant ainsi l’incapacité du vendeur à conseiller son client et à lui fournir un produit adapté à ses besoins, ce client est fondé à poursuivre la résolution de la vente.

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 2 avr. 1998
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Importance : Inédit
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006934919

Texte intégral

Courant mars 1987, la société de droit marocain SADVEL, exerçant son activité dans le domaine des peintures, a commandé à la SARL MESURE ET TRAITEMENT DU SIGNAL « M. T.S. » un matériel informatique et électronique destiné à constituer une bibliothèque pigmentaire qui a été livré le 15 décembre 1997 et dont le prix de 350.000 francs HT a été intégralement honoré le 17 janvier 1998.

Se prévalant de nombreuses difficultés de fonctionnement de l’équipement en dépit de plusieurs interventions de la société M. T.S., la société SADVEL a obtenu en référé, le 21 juillet 1993, la désignation de Monsieur X…, en qualité d’expert, mais n’a pas entendu poursuivre sa demande en sorte qu’une ordonnance de radiation est intervenue le 09 mai 1994.

Arguant du non respect par la société M. T.S. de son obligation de délivrance, la société SADVEL a saisi le Tribunal de Commerce de PONTOISE d’une action en résolution de la vente.

Par jugement du 26 octobre 1995, cette juridiction a débouté la société SADVEL de toutes ses prétentions, l’a condamnée à payer à la société M. T.S. la somme de 3.500 francs au titre du solde du prix du contrat de maintenance avec intérêts de droit à compter du 21 juillet 1993 et une indemnité de 20.000 francs en vertu de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu’aux dépens.

Appelante de cette décision, la société SADVEL soutient que la société M. T.S. a failli à ses obligations de délivrer le bien contractuellement prévu et conforme à sa destination lui incombant, en application des articles 1603 et 1604 du Code Civil et n’a pas respecté son devoir de conseil.

Elle fait valoir, à cet effet, que la société M. T.S. ne démontre pas que le produit livré corresponde à ce qu’elle avait promis et que les nombreuses réparations effectuées attestent qu’il était impropre à une destination normale comme à ce qu’elle-même était en droit d’en

attendre.

Elle fait grief au tribunal d’avoir admis la demande de la société M. T.S. fondée sur le contrat de maintenance qui, selon elle, n’a pas été exécuté et dénie devoir le coût de réparations dont la réalité et la nécessité ne sont pas établies.

Elle réitère donc ses demandes en résolution du contrat de vente du matériel en cause sur le fondement de l’article 1184 du Code Civil, en remboursement du prix de 350.000 francs HT et du coût de 23.500 francs du contrat de maintenance avec intérêts légaux à compter respectivement du 20 avril 1987 et de la décision à intervenir et en règlement de la somme de 100.000 francs à titre de dommages et intérêts ainsi que d’une indemnité de 30.000 francs pour frais irrépétibles.

La société M. T.S. ayant fait l’objet, le 08 janvier 1996, d’un redressement judiciaire, Maître HAMAMOUCHE, es-qualités d’administrateur judiciaire à cette procédure collective, est intervenu volontairement à l’instance et conclut de concert avec elle à la confirmation du jugement déféré, hormis en ce qu’il a rejeté les demandes en paiement de la facture de réparation du matériel et en dommages et intérêts. Ils forment appel incident pour obtenir de ces chefs, les sommes de 20.907,43 francs HT avec intérêts légaux depuis le 21 juillet 1993 et de 20.000 francs, outre une indemnité de 30.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ils opposent qu’il n’est aucunement démontré que l’équipement installé au Maroc ait été défectueux, ni qu’en toute hypothèse, la défectuosité alléguée soit imputable à un vice du matériel lui-même alors que l’expert a constaté qu’il fonctionnait normalement.

Assigné en intervention forcée, Maître CANET, en qualité de

représentant des créanciers au redressement judiciaire de la société M. T.S., sollicite la confirmation intégrale de la décision entreprise et s’en rapporte à justice sur le mérite de la demande en dommages et intérêts formée par la société M. T.S.

Il estime que la société SADVEL ne démontre pas un quelconque manquement de la société M. T.S. à ses obligations.

La société SADVEL a reconclu pour demander l’admission de sa créance au passif de la société M. T.S. pour le montant des sommes déclarées. L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 octobre 1997.

MOTIFS DE L’ARRET

Considérant que l’obligation de délivrance du vendeur d’un équipement informatique s’étend à la mise au point et comporte une obligation accessoire d’information et de conseil du client aux fins de lui fournir un matériel adapté à ses besoins et aux services qui en étaient attendus.

Considérant qu’aux termes de la commande de la société SADVEL ayant fait l’objet d’une facture pro-forma établie le 03 mars 1987 par la société M. T.S. la vente conclue entre les parties comprenait un spectrophotomètre SD8, un calculateur IBM-AB, une imprimante IBM proprinter 4201 et une bibliothèque de logiciels pour un prix de 350.000 francs HT incluant la formation, l’installation, la mise en route et les mises à jour des logiciels gratuites pendant un an.

Considérant que la société M. T.S. ne discute pas que le matériel a été acquis par la société SADVEL dans le but de constituer une bibliothèque pigmentaire destinée à être utilisée dans le cadre de ses activités d’entreprise de peintures.

Considérant que le système informatique livré en décembre 1987, a été installé en mars 1988 et mis en oeuvre le 22 juillet 1988, mais n’a pas fonctionné selon les prévisions attendues.

Considérant, en effet, que dès l’automne 1988, il a été constaté des problèmes de dérive et de calibration ayant donné lieu à une reprise du spectrophotomètre par la société M. T.S. pour procéder à sa remise en état par la voie du remplacement dans ses ateliers de certaines parties défectueuses, comme en fait foi la facture dressée par cette société le 21 novembre 1988.

Que cependant, la société SADVEL a fait part au cours de l’année 1989 de difficultés persistantes les 30 juin, 10 juillet, 26 et 30 octobre 1989 qui n’étaient toujours pas réglées à la fin de l’année.

Que le 11 mai 1990, il a été relevé des problèmes de formulation et d’application et préconisé le 29 mai 1990 l’installation d’un transformateur électrique d’isolement par la société M. T.S., laquelle a accepté à la même date le remplacement pur et simple du spectrophotomètre.

Considérant qu’après la conclusion du contrat de maintenance, le 13 juillet 1990, et la mise en place du transformateur requis, la société SADVEL a confirmé par lettre du 02 novembre 1990, l’impossibilité d’aboutir à une stabilisation de la calibration de l’appareil.

Qu’à la suite de nouvelles réclamations et interventions au cours de l’année 1991, la société M. T.S. a reconnu le 11 juillet 1991 l’existence encore de phénomènes de décalage constatés par l’un de ses techniciens et leur similitude avec ceux observés pour la première fois un an et demi auparavant sur l’ancien spectrophotomètre et a estimé que l’origine de la panne se situait au niveau de l’ordinateur et non pas du spectrophotomètre, puis a transmis un autre ordinateur afin d’effectuer des tests de contrôle de la stabilité de mesure.

Que l’analyse de leurs résultats s’est traduit par la constatation, le 09 septembre 1991 d’une importante dérive de 0,85 à 2,33 selon les

teintes entre le début et la fin de la journée comme une instabilité de lecture dans certaines zones du spectre.

Que le 17 septembre 1991, la société M. T.S., en raison des problèmes rencontrés avec les programmes et le spectrophotomètre, a pris la décision de rapatrier l’ensemble de l’équipement afin de déterminer la panne éventuelle.

Que depuis lors, le système informatique qui, aux dires de la société M. T.S., aurait été endommagé pendant son transport et réparé par ses soins, n’a jamais été réexpédié à la société SADVEL compte tenu du non règlement par cette dernière du solde du prix du contrat de maintenance et des réparations.

Considérant qu’il incombait à la société M. T.S., vendeur professionnel de matériels informatiques d’une haute technicité, de se renseigner sur les besoins de son acheteur profane en la matière et de lui fournir un équipement exploitable, que les constatations précédemment énoncées démontrent que tel n’a pas été le cas puisque plusieurs années encore après la vente, le système ne présentait pas la fiabilité requise et que la société M. T.S. n’a jamais été en mesure de le mettre définitivement au point conformément à la situation, aux buts et aux attentes de la société SADVEL.

Considérant que la société M. T.S. soutient vainement que la société SADVEL n’aurait pas correctement utilisé le matériel informatique dès lors qu’en toute hypothèse, il lui appartenait contractuellement de former les membres de son personnel afin qu’ils puissent y parvenir. Qu’elle s’est révélé incapable de conseiller son client comme de lui livrer un produit adapté à ses besoins et à ses objectifs, fiable et immédiatement opérationnel dès lors qu’indépendamment des difficultés fonctionnelles survenues, des études et des essais complémentaires se sont avérés nécessaires.

Considérant, dans ces conditions, que la société SADVEL est en droit d’obtenir la résolution de la vente, la restitution du prix de 350.000 francs comme du coût de 23.500 francs du contrat de maintenance dépourvu consécutivement de cause, outre les intérêts légaux ne devant courir qu’à compter du présent arrêt, ces sommes ne pouvant cependant faire désormais l’objet de condamnation mais uniquement d’une fixation de créance au passif de la société M. T.S. eu égard à la procédure collective ouverte à l’encontre de celle-ci, dès lors qu’il est justifié de sa déclaration non discutée par Maître CANET, es-qualités.

Considérant que la société SADVEL ne produit aucun justificatif sur le coût du recours à divers prestataires de services, qu’elle prétend avoir mandatés afin de pallier la carence de la société M. T.S.

Qu’il est néanmoins incontestable qu’elle n’a pu constituer depuis 1988 la bibliothèque pigmentaire auquel l’équipement vendu était destiné et subi ainsi un préjudice qui, eu égard à l’ensemble des éléments d’appréciation dont la Cour dispose, sera suffisamment indemnisé par l’allocation d’une indemnité de 40.000 francs qui donnera lieu aussi à une fixation de créance de ce chef.

Considérant que la société M. T.S. sera, par ailleurs, déboutée de ses demandes en paiement du solde du contrat de maintenance désormais sans objet et de la facture de réparations, en l’absence de réserve, par elle effectuée au moment de la réception du matériel expédié par la société SADVEL et de toute commande et accord de cette dernière pour y procéder.

Qu’eu égard à l’issue du litige, la demande en dommages et intérêts de la société M. T.S. non fondée sera rejetée.

Considérant que l’équité commande d’accorder à la société SADVEL une indemnité de 14.000 francs en vertu de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Que la société M. T.S. qui succombe en toutes ses prétentions et supportera les dépens des deux instances n’est pas fondée en sa demande au même titre. PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

 – Constate le redressement judiciaire de la SARL M. T.S. COLORIMETRIE MESURE ET TRAITEMENT DU SIGNAL et les interventions volontaire et forcée à l’instance de Maîtres Charles-Henri HAMAMOUCHE et Patrick CANET, es-qualités d’administrateur judiciaire et de représentant des créanciers à cette procédure collective,

 – Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

 – Prononce la résolution de la vente de matériel informatique conclue entre les sociétés M. T.S. COLORIMETRIE MESURE ET TRAITEMENT DU SIGNAL et SADVEL,

 – Ordonne en tant que de besoin la restitution de l’équipement qui en était l’objet à la SARL M. T.S. COLORIMETRIE MESURE ET TRAITEMENT DU SIGNAL,

 – Fixe la créance de la société de droit marocain SADVEL à la somme de 373.500 francs outre les intérêts légaux à compter du présent arrêt et à celle de 40.000 francs à titre de dommages et intérêts,

 – Déboute la SARL M. T.S. COLORIMETRIE MESURE ET TRAITEMENT DU SIGNAL de toutes ses prétentions,

 – La condamne à verser à la société SADVEL une indemnité de 14.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

 – Rejette sa demande sur le même fondement,

 – La condamne aux dépens des deux instances qui seront recouvrés par les SCP LISSARRAGUE & DUPUIS & ASSOCIES et GAS, Avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR MARON, CONSEILLER ET

ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT qui a assisté au prononcé S. RENOULT

F. ASSIÉ

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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