Cour d'appel de Versailles, 24 juin 2004, n° 03/04398

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 24 juin 2004, n° 03/04398
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 03/04398

Sur les parties

Texte intégral

Greffe 13 Versailles de inutes REPUBLIQUE FRANCAISE COUR D’APPEL ppel de m DE Extrait des de la Cour d’A VERSAILLES AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT QUATRE JUIN DEUX MILLE QUATRE, Code nac: 59C OA La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

12ème chambre section 1 APPELANTES

AC/KP 1. CIC PARIS (CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL DE PARIS), ARRET N° 310 dont le siège est […], […], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux CONTRADICTOIRE domiciliés en cette qualité audit siège. DU 24 JUIN 2004

2. S.A. CREDIT LYONNAIS, R.G. N° 03/04398 dont le siège est […], […], AFFAIRE: agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. CIC PARIS (CREDIT INDUSTRIEL ET 3. S.A. SOCIETE GENERALE, COMMERCIAL DE dont le siège est […], […], C/ agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux Me Y X domiciliés en cette qualité audit siège. (liquidateur de la Sté CS

TELECOM) & autres 4. S.A. NSMD, dont le siège est […],

[…], Décision déférée à la cour : agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux un jugement rendu le 04 domiciliés en cette qualité audit siège. Avril 2003 par le Tribunal de Commerce de 5. S.A. BNP PARIBAS, NANTERRE. dont le siège est […], N° de chambre : 8 […], RG n° 2001F03399 agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Expéditions exécutoires Expéditions 6. S.A. NATEXIS BANQUES POPULAIRES, Copies délivrées le : 28 JUIN 2004 dont le siège est […], […], à: agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux SCP JULLIEN domiciliés en cette qualité audit siège. LECHARNY-ROL

Me RICARD CONCLUANT PAR la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, avoués près la cour SCP JUPIN & ALGRIN PLAIDANT PAR Me TRADIEU-NAUDET, avocat au barreau de PARIS Me BINOCHE

POURVOI

****************

Cassation du 19/12/06 Avit 1452 FSPB, INTIMES Y Av du 12/02 /2009 de lo CA PARIS (15e chambie B) 1. Maître Y X, ès qualités de liquidateur de la Société CS TELECOM, demeurant […].

CONCLUANT PAR Me Claire RICARD, avoué près la cour

AYANT POUR avocat, Me BERGER-PERRIS Bruno du barreau de NANTERRE

tem


2. Société URMET, dont le siège est Via Bologna 188/C, ([…], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. CONCLUANT PAR la SCP JUPIN & ALGRIN, avoués près la cour PLAIDANT PAR Me Hervé ROBERT, avocat au barreau de PARIS

3. Société TELECOM ITALIA SPA, dont le siège est […], […], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. CONCLUANT PAR Me Jean-Pierre BINOCHE, avoué près la cour PLAIDANT PAR Me MALLMANN, avocat au barreau de PARIS

**

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 Mai 2004 devant la cour composée de :

Monsieur Alain RAFFEJEAUD, conseiller faisant fonction de président, Monsieur Jacques DRAGNE, conseiller, Monsieur André CHAPELLE, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Catherine CLAUDE

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Par contrat signé à Rome le 30 juillet 1999, la société de droit italien

Telecom Italia a passé commande à la société CS Telecom d’un certain nombre de matériels de télécommunication, soit des terminaux de réseau “NT1 plus”.

Le 15 septembre 1999, le Crédit Lyonnais, agissant en qualité de chef de file d’un pool bancaire composé des sociétés BNP Paribas, Crédit Industriel et

Commercial (CIC), Natexis Banques Populaires, NSMD et Société Générale, a consenti aux sociétés CS Télécom et CS Systèmes d’Information, une ouverture de crédit sur trois ans d’un montant maximum de 150.000.000 francs ((22.867.352,59

€), en garantie de laquelle la société CS Télécom s’est engagée, par convention du même jour, à céder en propriété au Crédit Lyonnais, dans les formes et conditions de la loi du 2 janvier 1981 les créances qu’elle détenait sur sa clientèle.

Le 4 avril 2000, la société CS Telecom a passé avec la société Urmet une convention dite de sous-traitance pour la fabrication de ces matériels de télécommunication.

Les terminaux ont été fabriqués et livrés mais la société CS Telecom

n’en a pas payé le prix.

Par courrier du 9 avril 2001, la société CS Telecom a autorisé la société Urmet, sous certaines conditions, à demander à être payée directement par la société Telecom Italia.

Le 30 avril 2001, la Crédit Lyonnais, en sa qualité de chef de file du pool bancaire, a notifié à la société Telecom Italia la cession de créances que lui avait consentie la société CS Telecom.

Le 2 mai 2001, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé le redressement judiciaire de la société CS Télécom, et a nommé Maître Gay en qualité

d’administrateur judiciaire, et Maître X en qualité de représentant des créanciers.

Le 8 juin 2001, la société Urmet a déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire de la société CS Telecom, et le 20 juillet 2001, le Crédit

Lyonnais a fait de même.

Par lettre du 18 juin 2001, la société Urmet a mis en demeure la société CS Telecom de lui régler certaines factures impayées et a dressé ce courrier

à la société Telecom Italia.

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Le 12 juillet 2001, la société Urmet a adressé à la société Telecom

Italia copie de sa déclaration de créance au passif de la société CS Telecom en visant

l’article 12 de la loi n° 75-334 du 31 décembre 1975, mais cette mise en demeure

n’a été suivie d’aucun règlement.

C’est dans ces conditions que par actes des 7 août, 30 août et 10 septembre 2001, la société Urmet a fait assigner devant le tribunal de commerce de

Nanterre la société de droit italien Telecom Italia, la société CS Telecom, Maître

Gay et Maître X ès qualités, ainsi que le Crédit Lyonnais aux fins de voir dire que la société Telecom Italia devait s’acquitter directement entre les mains de la société Urmet des factures résultant du contrat du 4 avril 2000, et en conséquence de condamner la société Telecom Italia à lui payer l’équivalent en francs français de

8.686.559.903 lires italiennes avec intérêts au taux légal à compter de

-

l’introduction de l’instance, et de dire que la cession de créance consentie par la société CS Telecom au Crédit Lyonnais était inopposable à la société Urmet.

Les banques composant le pool bancaire sont intervenues volontairement à l’instance.

Par jugement du 4 avril 2003, le tribunal de commerce de Nanterre

a tout d’abord donné acte aux banques de leur intervention volontaire et a constaté

l’admission définitive de la créance de la société Urmet au passif de la société CS

Telecom pour un montant de 4.486.233,79 €.

Après avoir rappelé les conventions passées par les parties, le tribunal a jugé que les relations des sociétés CS Telecom, Telecom Italia et Crédit

Lyonnais étaient placées sous l’empire de la loi française, laquelle était applicable au présent litige si bien que la société Urmet pouvait revendiquer le bénéfice de la loi française sur la sous-traitance du 31 décembre 1975.

Il a jugé que les produits, logiciels et matériels fabriqués par la société Urmet relevaient non d’un contrat de vente mais d’un contrat d’entreprise, la société Urmet ayant bien la qualité de sous-traitant, au sens de la loi du 31 décembre 1975.

Le tribunal a fait droit à la demande de paiement direct présentée par la société Urmet, et a jugé que la cession de créance consentie par la société CS

Telecom au Crédit Lyonnais était inopposable à la société Urmet au motif qu’elle était intervenue postérieurement au contrat de sous-traitance et en violation des dispositions de la loi du 31 décembre 1975, les créances cédées n’entrant pas dans son champ d’application.

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Le tribunal a ainsi dit que la société Telecom Italia devrait s’acquitter directement entre les mains de la société Urmet de la somme de 4.103.180,50 € et

a condamné la Crédit Lyonnais à payer à la société Urmet la somme de 383.053,29

€, montant reçu de la société Telecom Italia, antérieurement à l’exercice de l’action directe, le tout avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement.

Ordonnant l’exécution provisoire sous réserve d’une caution bancaire en cas d’appel de la société Urmet, le tribunal a condamné le Crédit Lyonnais à payer une indemnité de 16.000 € à la société Urmet et de 2.500 € à la société

Telecom Italia sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Appelants, le Crédit Lyonnais et les banques du pool bancaire concluent à l’infirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la société

Urmet à leur payer une indemnité de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Au soutien de leur appel, le Crédit Lyonnais et les autres banques font valoir que tant le contrat passé entre la société Telecom Italia avec la société CS

Telecom, que le contrat dit de sous-traitance passé entre la société CS Telecom et la société Urmet, sont des contrats internationaux soumis à la loi désignée par les règles de conflit prévues à la Convention de la Haye du 15 juin 1955, laquelle conduit, pour le premier contrat, au droit italien, et pour le second, au droit suisse, si bien que le droit français, y compris la loi du 31 décembre 1975, n’est pas applicable en l’espèce. Ils en concluent que cession de créance dont est bénéficiaire le banquier est opposable au sous traitant, puisque l’article 13-1 de la loi de 1975 n’est pas applicable.

A titre subsidiaire, le Crédit Lyonnais et les autres banques font plaider que les deux contrats en cause sont des contrats de vente au sens du droit international, tel qu’il résulte de la loi uniforme découlant de convention de

Vienne du 11 avril 1980, entrée en vigueur en France depuis le 1er janvier 1988, quand bien même l’opération en cause serait susceptible de recevoir la qualification de contrat d’entreprise en droit interne.

Ils en concluent que pour cette raison également, l’application de la loi du 31 décembre 1975 est exclue, cette loi supposant l’existence de deux contrats

d’entreprise successifs.

Encore plus subsidiairement, les appelants font valoir que même en droit interne français, le contrat principal conclu entre la société CS Telecom et la

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société Telecom Italia doit être analysé comme une vente et non comme un contrat

d’entreprise, dans la mesure où le produit que devait fournir la société CS Telecom

n’est pas un produit spécifique destiné à répondre aux besoins particuliers d’un client, mais un produit de série. Ils sollicitent à titre infiniment subsidiaire la désignation d’un expert afin de le constater.

A titre reconventionnel, le Crédit Lyonnais et les autres banques demandent la condamnation de la société Telecom Italia à leur payer la somme totale de 3.480.600,60 € correspondant aux bordereaux Dailly non réglés, avec intérêts au taux légal à compter de la date d’échéance de chacun des bordereaux et capitalisation des intérêts.

Intimé, Maître Y X, mandataire liquidateur de la société

[…], s’associe aux conclusions du pool bancaire et conclut donc à

l’infirmation du jugement entrepris.

Il demande la condamnation de la société Telecom Italia à lui payer la différence entre la somme qu’elle reconnaît devoir à la société CS Telecom soit

4.103.180,50 € et la créance cédée par cette dernière aux membres du pool bancaire, soit 3.480.600,60 €, ce qui fait un solde de 662.579,90 €.

Maître X sollicite en outre une indemnité de 5.000 € sur le

fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Intimée également, la société Telecom Italia, ne conteste pas le principe de sa dette, et demande à la cour de dire qui, du sous-traitant qui a exercé

l’action directe envers le maître de l’ouvrage (la société Urmet) ou du cessionnaire de créance (le Crédit Lyonnais), elle doit payer, étant précisé que le solde des sommes restant dues s’élève à 4.103.180,50 € compte tenu des sommes payées au

Crédit Lyonnais avant l’exercice de l’action directe par la société Urmet.

Elle ajoute que le contrat du 30 juillet 1999 l’autorisait, en cas

d’incertitude sur l’identité du titulaire de la créance, à conserver les sommes dans

l’attente d’une décision de justice rendue au fond, si bien que les intérêts de retard ne sont pas dus.

Elle sollicite enfin une indemnité de 6.000 € sur le fondement de

l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Intimée, la société Urmet, société de droit italien, conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et à la condamnation du Crédit

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Lyonnais et des autres sociétés du pool bancaire à lui verser une indemnité de

20.000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir, pour l’essentiel, que les contrats qui sont intervenus entre Telecom Italia et CS Telecom d’une part, et CS Telecom et Urmet d’autre part, ainsi que les lois qui leur sont applicables, sont étrangers au présent litige qui oppose aujourd’hui les sociétés Urmet, Crédit Lyonnais et Telecom Italia, lesquelles n’ont aucune relation contractuelle entre elles et s’opposent sur le fondement de la loi du 2 janvier 1981 et du 31 décembre 1975, l’article 7 de la loi du 2janvier 1981 faisant expressément référence à la loi du 31 décembre 1975 en créant un article 13-1 qui dispose : « l’entrepreneur principal ne peut céder ou nantir les créances résultant du marché ou du contrat passé avec le maître de l’ouvrage qu’à concurrence des sommes qui lui sont dues au titre de travaux qu’il effectue personnellement ».

Elle souligne que la loi du 31 décembre 1975 présente un caractère

d’ordre public qui s’impose aux relations existant entre les parties au présent litige, ces relations formant un tout, peu important que le sous traitant soit étranger, la loi du 31 décembre 1975 devant recevoir une application impérative.

Elle considère que les établissements bancaires ont commis une faute en acceptant une cession en dehors des limites prévues par ce texte.

La société Urmet considère que le contrat qui la lie à la société CS

Telecom est bien un contrat d’entreprise dès lors qu’il prévoit la fabrication d’un produit original et personnalisé selon des spécifications prévues à un cahier des charges, ce produit devant faire l’objet d’une déclaration de conformité délivrée par le Centre des Etudes et des Laboratoires des Télécommunications.

Elle indique enfin que le contrat lui même précise qu’il s’agit d’un contrat de sous-traitance, et souligne que dans la convention de cession de créance, le co-emprunteur ( la société CS Telecom) s’est engagé à ne pas faire figurer sur le bordereau des créances correspondant à des prestations sous-traitées, si bien qu’il appartenait au Crédit Lyonnais, chef de pool bancaire, de faire preuve d’un minimum de vigilance compte tenu de l’importance des sommes en jeu.

La société Urmet considère que la convention de Vienne du 11 avril

1980 ne peut recevoir application dans la présente procédure car elle ne concerne que la formation et les effets du contrat de vente international, et non la question visée par le présent litige qui concerne exclusivement l’interdiction faite à

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l’entrepreneur principal de céder les créances qui ne résultent pas de son propre travail.

La société Urmet fait enfin valoir que les conditions prévues par la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance sont remplies si bien qu’elle est fondée à exercer l’action directe contre la société Telecom Italia, et que cette action est bien opposable au Crédit Lyonnais.

La société Urmet ajoute également que la société Cs Telecom, entrepreneur principal, a cédé des créances professionnelles sans fournir la caution prévue à l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance.

Elle considère que la cession de créance, intervenue postérieurement à la conclusion du contrat de sous traitance lui est inopposable, quelles que soient

la date portée sur le bordereau et celle de l’exercice de l’action directe.

La société Urmet demande en conséquence la condamnation de la société Telecom Italia à lui payer la somme de 4.103.180,50 € et le Crédit Lyonnais

à lui restituer la somme de 383.053,29 €.

SUR QUOI, LA COUR :

1) Sur la demande du Crédit Lyonnais et des autres banques :

Considérant qu’en contrepartie d’une ouverture de crédit qui lui a été accordée le 15 septembre 1999 par le Crédit Lyonnais et cinq autres banques constituées en pool bancaire, la société CS Telecom a consenti le même jour à ces établissements bancaires une cession des créances détenues sur sa clientèle.

Considérant qu’à l’article 4 de la convention de cession de créances

à titre de garantie, il était expressément prévu que: "le co-emprunteur s’engage également à ne pas faire figurer sur le bordereau des créances correspondant à des prestations sous-traitées ou exécutées dans le cadre de groupement ou

d’associations, ainsi qu’à ne pas sous-traiter ou constituer de tels groupements ou associations, une fois les créances cédées."

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Considérant qu’il n’est pas discutable, ni discuté par les parties que cette cession de créances a été consentie selon les formes et conditions de la loi

française du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises.

Considérant que le législateur a limité le champ d’application de la loi du 2 janvier 1981 par un article 7 insérant un article 13-1 dans la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, ainsi rédigé :

« Art. 13-1: L’entrepreneur principal ne peut céder ou nantir les créances résultant du marché ou du contrat passé avec la maître de l’ouvrage qu’à concurrence des sommes qui lui sont dues au titre des travaux qu’il effectue personnellement. »

Considérant que cette disposition, qui détermine les conditions

d’application de la loi du 2 janvier 1981, doit recevoir application dès lors que cette loi est applicable à la cession de créances, quelles que soient par ailleurs la qualification des opérations concernées et la loi qui leur est applicable au sens du droit international privé.

Considérant qu’en l’espèce, la société CS Telecom n’a pas effectué personnellement les travaux auxquels elle s’est engagée envers la société Telecom

Italia mais a eu recours aux prestations de la société Urmet pour réaliser un produit original et personnalisé selon des spécifications d’un cahier des charges, et soumis

à validation par un laboratoire spécialisé, ces conditions étant précisées dans une convention dans laquelle la société Urmet est présentée elle-même en qualité de sous-traitant.

Considérant en conséquence que le Crédit Lyonnais et les autres banques ne peuvent se prévaloir de la cession de créances qui leur a été consentie par la société CS Telecom, les créances concernées correspondant à des opérations ayant donné lieu au recours à un sous-traitant, ce que ne permet pas la loi du 2 janvier 1981.

Considérant qu’en tout état de cause, ainsi qu’il va être dit, une telle cession de créance n’est pas opposable à la société Urmet.

Considérant que le Crédit Lyonnais et les autres banques constituées en pool bancaire seront donc déboutées de leurs demandes.

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2) Sur la demande de la société Urmet :

Considérant que la société Urmet fonde sur action en paiement à

l’encontre de la société Telecom Italia sur les dispositions de la loi du 31 décembre

1975 relative au contrat de sous-traitance, et en particulier sur l’article 12 de cette loi, ainsi que sur une lettre du 9 avril 2001 par laquelle la société SC Telecom a autorisé la société Urmet à demander paiement directement à la société Telecom

Italia.

Considérant que tant le contrat principal conclu entre la société

Telecom Italia et la société CS Telecom, que le contrat dit de sous-traitance conclu entre la société CS Telecom et la société Urmet, qui ont été signés entre des sociétés établies sur des territoires différents pour la fourniture de produits à livrer en Italie, sont des contrats internationaux.

Considérant que le contrat principal conclu entre la société Telecom

Italia et la société CS Telecom ne comporte aucune désignation de droit applicable.

Qu’il y a donc lieu de faire application de la convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d’objets mobiliers corporels, cette convention étant applicable également aux "contrats de livraison d’objets mobiliers corporels à fabriquer ou à produire, lorsque la partie qui

s’oblige à livrer doit fournir les matières premières nécessaires à la fabrication ou

à la production".

Considérant qu’en application de l’alinéa 2 de l’article 3 de cette convention, « la vente est régie par la loi interne du pays où l’acheteur a sa résidence habituelle… si c’est dans ce pays que la commande a été reçue. »

Considérant que la société Telecom Italia, société de droit italien, a

son siège en Italie.

Qu’il n’est pas contesté que le contrat ayant été signé à Rome, la commande a bien été reçue en Italie.

Considérant que la loi italienne est donc applicable.

Considérant que le contrat de « concessions réciproques de licence et de fabrication » signé le 4 avril 2000 entre la société CS Telecom et la société Urmet, et dans lequel la société Urmet est expressément qualifiée de sous-traitant, ainsi que

l’avenant à ce contrat, signé le même jour, ont été expressément soumis à la loi

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suisse par les parties.

Considérant que ni la loi italienne applicable au contrat principal, ni la loi suisse applicable au contrat dit de sous-traitance, ne comportent de dispositions permettant au sous-traitant d’agir directement contre le maître de

l’ouvrage.

Considérant qu’il n’est pas soutenu que les lois italienne et suisse seraient contraires à l’ordre public international, au sens du droit international privé.

Considérant que si la société Urmet souligne que la loi du 31 décembre 1975 présente un caractère d’ordre public justifiant son application impérative en droit interne, elle ne soutient pas davantage que l’article 12 de cette loi instituant une action directe au profit du sous-traitant et sur lequel elle fonde son action, présenterait les caractères d’une loi d’application immédiate.

Considérant en conséquence que la loi du 31 décembre 1975 n’étant pas applicable au litige, la société Urmet ne peut se prévaloir de l’article 12 de cette loi pour fonder sa demande en paiement à l’encontre de la société Telecom Italia.

Mais considérant que par courrier du 9 avril 2001, la société CS

Telecom a expressément autorisé la société Urmet a recouvrer directement sa créance auprès de la société Telecom Italia, maître de l’ouvrage.

Considérant qu’il était ainsi stipulé :

"Dans l’éventualité d’un défaut de paiement des sommes dues par

CS Telecom à Urmet au titre de l’additif daté du 4 avril 2000, […]

Urmet à demander à être payée directement par Telecom Italia dès lors que les deux conditions suivantes sont cumulativement et entièrement remplies:

- la durée du défaut de paiement, total ou partiel, excède 15 jours calendaires

à compter de la réception adressée par Urmet à CS Telecom et mentionnant le défaut de paiement,

- le défaut de paiement, partiel ou total, est fondé sur des faits non discutés entre les parties et justifiant la demande d’Urmet."

Considérant que Maître X, pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société CS Telecom, se borne à s’associer aux conclusions du

Crédit Lyonnais et à demander la paiement du solde des créances de la société CS

Telecom qui n’ont pas fait l’objet d’une cession aux banques.

-11 tam



Considérant qu’il ne développe aucune argumentation tendant à établir une fraude aux droits des créanciers à la liquidation de la société CS

Telecom, ou à contester la validité ou la portée de cette autorisation de paiement.

Considérant qu’il n’est pas discuté que les deux conditions prévues au courrier du 9 avril 2001 ont été remplies.

Considérant en conséquence que la société Urmet est fondée à poursuivre le règlement de sa créance correspondant aux produits qui lui ont été commandés par la société CS Telecom en s’adressant directement à la société

Telecom Italia, débiteur de la société CS Telecom.

Considérant que le montant total de la créance de la société Urmet

s’élève à 4.486.233,79 €.

Considérant que les premiers juges ont donc à juste titre condamné la société Telecom Italia à payer à la société Urmet la somme de 4.103.180,50 €, montant qu’elle reconnaît détenir à ce jour, et ceci avec intérêts au taux légal, la convention intervenue entre Telecom Italia et CS Telecom concernant l’absence

d’intérêts en cas de litige étant inopposable à la société Urmet.

Qu’ils ont également à bon droit condamné le Crédit Lyonnais et les autres banques constituant le pool bancaire à restituer à la société Urmet la somme de 4.486.233,79-4.103.180,50=383.053,29 € correspondant aux créances cédées.

Considérant que par ces motifs, le jugement entrepris sera confirmé.

3) Sur l’application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant que l’équité justifie qu’une indemnité complémentaire de 5.000 € soit allouée à la société Urmet sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, et mise à la charge du Crédit Lyonnais et des autres banques.

Qu’une indemnité de 2.000 € sera allouée à la société Telecom Italia sur le même fondement et dans les mêmes conditions.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement,

-12 XAR



Confirme le jugement entrepris.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne le Crédit Lyonnais et les autres banques constituées en pool bancaire à payer des indemnités complémentaires de 5.000 € à la société

Urmet et de 2.000 € à la société Telecom Italia sur le fondement de l’article 700 du

nouveau code de procédure civile.

Les condamne aux dépens de l’instance, lesquels pourront être recouvrés directement par la SCP Jupin Algrin, et Maître Binoche, avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

Et ont signé le présent arrêt,

Le président, Le greffier présent lors du prononcé,

A. RAFFEJEAUD C. CLAUDE

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Cour d'appel de Versailles, 24 juin 2004, n° 03/04398