Cour d'appel de Versailles, 6ème chambre, 8 janvier 2013, n° 11/04767

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 6e ch., 8 janv. 2013, n° 11/04767
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 11/04767
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Poissy, 21 novembre 2011, N° 11/00404
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 JANVIER 2013

R.G. N° 11/04767

AFFAIRE :

D Z A

C/

XXX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Novembre 2011 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de POISSY

Section : Activités diverses

N° RG : 11/00404

Copies exécutoires délivrées à :

Me Larbi BELHEDI

SELARL ODINOT & ASSOCIES

Copies certifiées conformes délivrées à :

D Z A

XXX

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT JANVIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur D Z A

XXX

XXX

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2012/001992 du 02/04/2012 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)

Représenté par Me Larbi BELHEDI, avocat au barreau de VERSAILLES

APPELANT

****************

XXX

N° RCS 482 227 014

XXX

XXX

Représentée par Me Christine LUSSAULT membre de la SELARL ODINOT & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Novembre 2012, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Présidente chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, président,

Madame Pascale LOUÉ WILLIAUME, conseiller,

Monsieur François LEPLAT, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

FAITS ET PROCÉDURE

M. D Z A a été engagé par la société TRIGO le 4 janvier 2002 en qualité de contrôleur cariste puis chef d’équipe.

Il a été victime d’un accident du travail le 18 septembre 2006.

Après plusieurs arrêts de travail il faisait l’objet d’une double visite médicale avec inaptitude partielle et étude de postes.

Il était licencié pour inaptitude le 5 novembre 2009 après que l’avis des délégués du personnel ait été recueilli.

Il a saisi le conseil de prud’hommes de Poissy aux fins de contester son licenciement.

Par jugement en date du 22 novembre 2011, le conseil de prud’hommes de Poissy a dit le licenciement justifié et a relevé que l’employeur avait normalement rempli ses obligations.

M. Z A a régulièrement relevé appel du jugement.

Par conclusions déposées le 12 novembre 2012, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, il demande la réformation du jugement et il réclame 22 000 euros d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il demande également en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 000 euros.

Par conclusions déposées le 12 novembre 2012, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société Trigo demande confirmation du jugement déféré et sollicite une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le premier juge a estimé à partir des documents produits que l’employeur avait normalement respecté ses obligations légales et avait correctement rempli son obligation de reclassement.

Pour critiquer ce jugement, M. Z A soutient que la société n’a pas respecté son obligation d’aménager le poste et que le licenciement n’est pas justifié.

Les éléments du dossier permettent de retenir que M. Z A exerçait la fonction de contrôleur cariste. Il était affecté au site de PSA à Poissy et il était chargé des opérations de tri, contrôle et retouches des composants automobiles.

Il a été victime d’un accident du travail le 18 septembre 2006.

Il n’a pas repris le travail, ayant des arrêts régulièrement renouvelés et sur l’année 2009, il a fait l’objet de trois séries de visites de reprise, des arrêts maladie pour rechute intervenant après la mise en oeuvre des visites de reprise.

Les deux visites de reprise qui doivent être prises en compte sont intervenues les 6 octobre et 20 octobre 2009.

L’avis du médecin du travail du 6 octobre est ainsi rédigé :

'1- contre-indication partielle aux tâches du poste de chef d’équipe contrôleur cariste

2-contre indication médicale aux ports de charges supérieures à 2 kilos et aux gestes répétitifs du membre supérieur droit

3- étude de poste faite le 6 mai 2009 par le docteur Y

4-Proposition de mutation de poste. Serait médicalement apte à un poste administratif et un poste d’encadrement respectant les contre indications du point 2

5-Proposition de reclassement, serait médicalement apte à tout nouveau poste ou toute nouvelle formation respectant les contre indications du point 2

A revoir dans deux semaines.'

L’avis du 20 octobre 2009 mentionne les éléments suivants :

'Inaptitude partielle au poste avec proposition d’aménagement ou de reclassement

1-inapte partiellement aux tâches du poste de chef d’équipe contrôleur cariste dans l’entreprise Trigo sur le site de PSA Poissy.

2-inapte médicalement au port de charges supérieures à 2 kilos et aux gestes répétitifs du membre supérieur droit donc inapte aux tâches de déconditionnement, tri, contrôle et reconditionnement des pièces

3-Etude de poste faite le 6 mai 2009 pour le docteur Y aménagement organisationnel par recomposition des tâches avec le travail en zone de barrage montage B2 possible

4-proposition de mutation de poste, serait médicalement apte à un poste administratif un poste d’encadrement des équipes respectant les contre-indications du point 2

5-proposition de reclassement : serait médicalement apte à tout nouveau poste ou toute nouvelle formation respectant les contre indications du point 2".

Il sera relevé que les constatations du médecin du travail sont restées inchangées sur l’ensemble de l’année 2009, ce qui justifie le fait que les deux certificats de reprise établis en octobre 2009 fassent référence à une étude de poste menée en mai 2009.

Le 23 octobre 2009, l’employeur adressait à M. B A, un courrier relatant l’ensemble des visites médicales de reprise, rappelant que le salarié avait fait l’objet d’un bilan de compétence à la fin du mois de mai 2009.

L’employeur explique ensuite qu’il ne peut organiser un poste de cariste ou de chef d’équipe qui de façon permanente ne nécessite pas de port de charge supérieure à 2 kilos.

Notamment, les zones de barrage ne correspondent d’après lui qu’à des tâches ponctuelles.

Enfin, l’employeur constate que les résultats des tests de compétence empêchent d’envisager que M. B A soit affecté à un poste administratif ou d’encadrement.

Il conclut en indiquant qu’il n’a aucun poste de reclassement disponible.

La lettre de licenciement adressée le 5 novembre 2009, à M. B A reprend à son tour les diverses visites de reprise, les préconisations de la médecine du travail et les recherches de reclassement effectuées par l’employeur tant dans la société que dans le groupe.

Aux termes de l’article L. 1226-10 du code du travail, à l’issue d’un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise et après avis des délégués du personnel, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement.

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de l’impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions prévues ci-dessus, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions.

S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédures prévue applicable au licenciement pour motif personnel.

Lorsque l’entreprise fait partie d’un groupe, les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l’intérieur du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel.

En l’espèce, l’employeur a effectivement fait connaître par courrier antérieur à la procédure de licenciement, qu’elle estimait ne pouvoir procéder à son reclassement.

Par ailleurs, il justifie avoir recherché dans le groupe les postes disponibles pouvant être proposés à M. Z A et il produit les réponses négatives reçues.

Enfin, il démontre par la production des résultats des bilans de compétence dont les conditions de réalisation ne font pas difficulté, que M. Z A ne pouvait exercer des fonctions administratives ou d’encadrement, même après une formation.

En revanche, ainsi que le soutient l’appelant, il sera relevé que lors de l’étude de poste interne à l’entreprise, réalisée le 6 mai 2009, en l’absence du médecin du travail qui avait été invité à participer à cette étude, un certain nombre d’activités étaient réservées à des salariés de PSA et ne pouvaient donc être proposées à M. Z A.

Mais sur la zone Bâtiment B1, environ 35 % de l’activité, il était précisé que 'Trigo réalise les prestations de tri et retouches des pièces de petite et moyenne dimension de 50 g à 2 kilos, dans de moyens et petits conteneurs.

Les prestations sont réalisées soit par un salarié debout soit sur des tables ergonomiques ou ergonomiques dynamiques, sur un siège assis debout.

Dans cette zone, le travail est exécuté avec un transpalette et très occasionnellement par un petit chariot élévateur.'

Sur la zone Bâtiment B2 Zone devant le bureau administratif Trigo, environ 5 % de l’activité, 'Trigo réalise des prestations de tri et retouche de pièces de petite et moyenne dimension de 100 g à 1 kilo dans de petits contenants. Les retouches de pièces se font soit en position debout soit en position assis debout.

La prestation est réalisée avec l’aide d’un transpalette.'

Sur la zone Bâtiment B2 Zone barrage, environ 10 % de l’activité, 'la prestation consiste à réaliser différents points de contrôles visuels, traction, références … à l’intérieur et à l’extérieur du véhicule en mouvement.

Il n’y a pas de manutention de pièce. En revanche, lors de certains contrôles portières, capots, sièges, cela génère des contraintes posturales, torsion du tronc, station prolongée debout ou des gestes répétitifs des membres supérieurs.'

Le responsable de la prévention sécurité Trigo concluait qu’il n’y avait pas de poste à temps complet pour M. B A et que le médecin du travail devait apporter des précisions sur la faisabilité de conduire un chariot élévateur.

Ce rapport était transmis au docteur Y qui répondait le 19 mai à M. X, responsable de la prévention sécurité :

'Le point 5 correspondant à la zone Barrage parait correspondre à une situation de travail adapté. D’autres zones pourraient convenir également si les mouvements répétitifs pouvaient être réalisés coude droit collé au corps pour des pièces de petites tailles et de faibles poids.

En revanche, si vous trouvez des situations de travail adaptables par des aménagements techniques ou organisationnels, sachez que nous pouvons faire intervenir l’ergonome de mon service de santé au travail spécialisé dans l’aide au maintien dans l’emploi. Il en est de même pour l’aménagement du poste de cariste si les caractéristiques du chariot élévateur le nécessitaient.'

Ce courriel qui a été transmis à la direction par le responsable sécurité, n’a eu aucune suite et notamment l’employeur n’a jamais demandé l’intervention de l’ergonome préconisée par le médecin du travail.

Manifestement, il ressort de ces pièces produites que la recherche de reclassement n’a pas été menée de manière sérieuse et complète à l’intérieur de l’entreprise Trigo sur le site où travaillait M. B A.

Il est manifeste que sur un poste dont il aurait pu être envisagé qu’il soit à temps partiel, M. B A pouvait être affecté au traitement de pièces de moins de 2 kilos, les tests de compétence démontrant que si le salarié ne pouvait effectivement prétendre à des postes administratifs et ne souhaitait pas occuper un poste à responsabilité, il était doté d’un certain nombre de compétences professionnelles qui lui permettaient une adaptation à d’autres tâches d’exécution.

C’est à tort que le premier juge a estimé que le licenciement de M. B A était justifié, l’employeur n’ayant pas rempli son obligation de reclassement.

Le salarié ayant été licencié en violation des dispositions de l’article L 1226-8 du code du travail il lui sera alloué une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire.

Il sera fait droit à la demande de M. Z A qui devra recevoir une somme de 22 000 euros.

Conformément à la demande du conseil de M. B A qui bénéficie de l’aide juridictionnelle totale, il sera fait application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991et l’employeur sera condamné à verser une indemnité de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

STATUANT contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,

RÉFORME le jugement déféré et statuant à nouveau ;

CONDAMNE la société TRIGO Solutions à verser à M. B A, la somme de 22 000 € (VINGT DEUX MILLE EUROS) en réparation d’un licenciement prononcé en violation des dispositions de l’article L 1226-8 du code du travail ;

DONNE acte au conseil de M. Z A de ce qu’il sera fait application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et CONDAMNE la société Trigo Solutions à verser une indemnité de 2000 € (DEUX MILLE EUROS) à ce titre ;

CONDAMNE la société Trigo Solutions aux dépens de la procédure de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridictionnelle.

— arrêt prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, président, et par madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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