Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 7 octobre 2015, n° 14/01622

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 15e ch., 7 oct. 2015, n° 14/01622
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/01622
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nanterre, 9 mars 2014, N° 11/01832
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

15e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 07 OCTOBRE 2015

R.G. N° 14/01622

AFFAIRE :

Z Y

C/

XXX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 10 Mars 2014 par le Conseil de prud’hommes – Formation de départage de NANTERRE

N° RG : 11/01832

Copies exécutoires délivrées à :

Me Brigitte BATEJAT

la AARPI AMPEA

Copies certifiées conformes délivrées à :

Z C

XXX

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur Z Y

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Me Brigitte BATEJAT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 35

APPELANT

****************

XXX

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Sabine MAKOWSKI BIQUARD de l’AARPI AMPEA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0608

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Michèle COLIN, Président,

Madame Marie-Hélène MASSERON, Conseiller,

Madame Bérénice HUMBOURG, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte BEUREL,

EXPOSE DU LITIGE

M. Z Y a été engagé le 4 janvier 2006 par la société Hoist Locatel France (ci-après la société Locatel) en qualité de responsable marketing statut cadre, moyennant un salaire fixe annuel de 60 000 euros bruts outre une prime annuelle sur objectifs de 10 000 euros, ces objectifs étant fixés par écrit avant le 31 mars.

En dernier lieu, il occupait les fonctions de directeur marketing et des ventes internationales moyennant une rémunération fixe de 99 996 euros et une rémunération variable de 60 000 euros à 100 % des objectifs atteints.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective du commerce et services électronique, audiovisuel et électroménager.

Le 16 juin 2010, les parties ont signé une rupture conventionnelle. Il était versé au salarié une indemnité spécifique de 80 000 euros outre des salaires, une indemnité compensatrice de congés payés et de RTT.

M. Y a contesté son solde de tout compte, considérant n’avoir pas été rempli de l’intégralité de ses droits au titre de sa rémunération variable pour les années 2009 et 2010.

Le 29 juin 2011, il a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre.

Il a obtenu du bureau de conciliation la condamnation de la société Locatel à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de la prime 'Ebitda’ de l’année 2010.

Devant le bureau de jugement, il a sollicité le paiement des sommes suivantes :

* 15 000 euros au titre de la prime Ebitda 2010,

* 10 000 euros au titre du reliquat de la partie variable du salaire pour l’année 2009,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jugement et exécution provisoire,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive de l’employeur,

* 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Locatel a conclu au débouté et à la condamnation de M. Y à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement de départage du 10 mars 2014, le conseil de prud’hommes de Nanterre a débouté M. Y de l’intégralité de ses demandes et a fait droit à la demande reconventionnelle de la société Locatel en remboursement de la somme de 15 000 euros payée en exécution de la décision du bureau de conciliation, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2013, laissant au salarié un délai de six mois pour s’acquitter de sa dette. Il a débouté les parties du surplus de leurs demandes et laissé les dépens à la charge de M. Y.

Pour se déterminer ainsi, le conseil a considéré :

— que la prime Ebitda 2009 n’était pas due car non contractuellement prévue, l’avenant du 10 décembre 2008 alors applicable ne la prévoyant pas, le salarié ayant par ailleurs perçu une rémunération variable individuelle de 10 000 euros versée en deux fois (5 000 euros en août 2009 et 5 000 euros en avril 2010) ;

— que la prime Ebitda 2010, prévue par l’avenant signé le 17 février 2010, n’était pas due, son seuil de déclenchement (81 % de l’objectif de 12 800 000 euros) n’étant pas atteint au moment du départ de M. Y de l’entreprise le 30 septembre 2010.

Ce dernier a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Il sollicite l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société Locatel à lui payer les sommes suivantes :

* 10 000 euros au titre du reliquat de la partie variable du salaire pour l’année 2009,

* 15 000 euros au titre de la prime Ebitda 2010,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la saisine de la juridiction prud’homale,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

* 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Après avoir précisé que l’Ebitda est une notion comptable qui désigne les revenus d’une entreprise avant soustraction des intérêts, impôts, dotations et provisions sur immobilisation,

M. Y fait valoir que le conseil a commis deux erreurs d’appréciation :

— D’une part, en ce qu’il a considéré qu’une prime Ebitda était sollicitée pour l’année 2009, alors que la demande portait sur un rappel de salaire variable, quant à lui contractuellement fixé ;

— D’autre part, en ce qu’il a considéré que la réalisation de l’Ebitda devait être appréciée au 30 septembre 2010, date de départ du salarié de l’entreprise, alors qu’elle devait l’être au 31 décembre 2010, seul le calcul du montant de la prime devant s’effectuer au prorata temporis.

Au titre de la partie variable du salaire pour l’année 2009, fixée par l’avenant du 10 décembre 2008 à 20 000 euros à objectifs atteints à 100 % sur la base d’objectifs devant être fixés au plus tard le 30 avril de l’année concernée, il soutient que faute de fixation d’objectifs pour cette année là la part de rémunération devait lui être réglée en totalité (20 000 euros) et non partiellement (10 000 euros), ce qui lui confère un reliquat de 10 000 euros.

Au titre de la prime Ebitda 2010, il soutient que l’objectif Ebitda 2010 (contractuellement fixé à 12 800 000 euros) étant atteint ainsi qu’il résulte du bilan consolidé au 31 décembre 2010, la prime de 20 000 euros était acquise et devait être payée au prorata de son temps de présence dans l’entreprise en 2010 (neuf mois), ce qui lui confère une créance de 15 000 euros.

La société Locatel sollicite la confirmation du jugement déféré, la condamnation de M. Y à lui payer la somme de 3 182,01 euros lui restant due en exécution dudit jugement et celle de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir :

— Sur la demande au titre de l’année 2009, que le conseil de prud’hommes a justement retenu qu’aucune prime Ebitda n’est prévue contractuellement et que M. Y a bien perçu une rémunération variable sur la base des objectifs qui lui avaient été fixés pour cette année, soit 5 000 euros comme cela ressort de son bulletin de salaire d’août 2009 et 5 000 euros comme mentionné sur son bulletins de salaire d’avril 2010 ;

— Sur la demande au titre de l’année 2010, qu’il résulte des dispositions contractuelles que l’objectif Ebitda s’apprécie au prorata temporis ; qu’au 30 septembre 2010, date à laquelle M. Y a quitté l’entreprise, cet objectif était de 9 137 000 euros, qu’à cette même date l’Ebitda s’élevait à 7 246 000 euros, soit un montant qui ne dépassait pas 80 % de l’objectif Ebitda, de sorte que le seuil de déclenchement de la prime, contractuellement fixé à 81 %, n’était pas atteint et qu’en conséquence cette prime n’était pas due pour l’année 2010.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues oralement à l’audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande au titre de l’année 2009

Il est désormais constant que pour l’année 2009, M. X sollicite paiement, non d’une prime dite Ebitda mais d’un complément de sa rémunération variable, laquelle est ainsi fixée contractuellement aux termes de l’avenant du 10 décembre 2008 à effet du 1er janvier 2009, dont l’application n’est pas discutée :

Une partie variable de 20 000 euros bruts à objectifs atteints à 100 %. Cette part variable sera calculée au prorata temporis.

Les objectifs déterminant l’attribution de la partie variable de votre rémunération feront chaque année l’objet d’un avenant formalisé au plus tard le 30 avril de l’année concernée.

Il n’est pas contesté qu’au titre de cette rémunération variable de l’année 2009, M. Y a perçu la somme totale de 10 000 euros.

Cependant, aucun avenant déterminant les objectifs de l’année 2009 n’est versé aux débats. La note écrite qui été signée par les parties le 19 février 2009 et à laquelle se réfère le conseil de prud’hommes dans son jugement , intitulée 'Objectifs individuels 2009 – H1", ne porte que sur le premier semestre 2009 et non sur l’année entière, et elle n’est pas formalisée comme un avenant. Elle fixe à 5 000 euros bruts le montant de la rémunération variable individuelle au titre de ce premier semestre 2009 à 100 % d’atteinte des objectifs, sans toutefois préciser qu’elle opère une modification contractuelle du montant de la rémunération variable telle que prévue dans l’avenant du 10 décembre 2008. Elle ne peut donc être considérée comme correspondant à l’avenant portant définition des objectifs de l’année 2009 ainsi que prévu par l’avenant du 10 décembre 2008.

Faute d’avoir été modifié , cet avenant du 10 décembre 2008 doit recevoir application quant au montant de la rémunération variable prévu pour l’année 2009, fixé à 20 000 euros.

D’après les termes de la note précitée du 19 février 2009, M. Y a atteint l’objectif fixé pour le premier semestre 2009 puisqu’il a perçu, ainsi qu’il résulte de son bulletin de salaire d’août 2009, la somme de 5 000 euros prévue par cette note pour une atteinte à 100 % des objectifs de ce premier semestre. S’agissant du second semestre, si aucune note n’a été établie, M. Y a pareillement perçu la somme de 5 000 euros ainsi qu’il est mentionné sur son bulletin de salaire d’avril 2010, ce qui tend à établir que le salarié a aussi rempli à 100 % ses objectifs pour ce second semestre, en admettant logiquement que les dispositionsde la note du 19 février 2009 applicables au premier semestre ont été reconduites pour le second semestre.

En tout état de cause, la société Locatel ne prétend pas que les objectifs fixés pour l’année 2009 entière n’auraient pas été atteints par M. Y, de sorte qu’elle doit lui verser l’intégralité de la rémunération variable telle que prévue par l’avenant non modifié du 10 décembre 2008, soit la somme de 20 000 euros bruts.

Le salarié n’ayant perçu que 10 000 euros, il a droit à la somme complémentaire de 10 000 euros bruts ; le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la demande au titre de l’année 2010

Il est constant que pour cette année 2010, est applicable l’avenant du 17 février 2010, lequel prévoit une rémunération variable de 60 000 euros bruts à objectifs atteints à 100 %, calculée au prorata temporis et se composant comme suit :

—  20 000 euros bruts correspondant aux objectifs de performance personnelle (…)

—  20 000 euros bruts correspondant aux objectifs de prise de commandes à l’international (…)

—  20 000 euros bruts versés proportionnellement à la réalisation de l’objectif d’Ebitda consolidé pour l’année 2010, cet objectif étant de 12 800 000 euros.

C’est cette troisième modalité de rémunération variable, dite prime Ebitda, qui est ici concernée.

Un tableau définit comme suit le calcul de cette prime : aucune prime n’est versée si l’Ebitda n’est réalisé qu’entre 0 et 80 % ; une prime de 90 % est versée si l’objectif d’Ebitda est réalisé à hauteur de 96 à 100 %.

Il résulte des ces dispositions contractuelles que la prime n’est due que si l’objectif d’Ebitda est atteint à hauteur d’au moins 81 %, et qu’elle est calculée proportionnellement au pourcentage de cet objectif. Il en résulte aussi que, comme le soutient M. Y, c’est à la date du 31 décembre 2010 et non à celle du départ du salarié de l’entreprise que doit être vérifiée la réalisation de l’objectif d’Ebitda. Le contrat se réfère en effet à la réalisation de l’objectif d’Ebitda consolidé pour l’année 2010, soit pour l’année entière, sans autre stipulation autorisant à limiter cette période qui correspond à celle de l’exercice comptable.

La société Locatel se borne à justifier du montant de l’Ebitda au 30 septembre 2010 (7 246 000 euros), mais cette date est inopérante, celle du 31 décembre 2010 devant être prise en compte.

Sur la base du bilan consolidé au 31 décembre 2010, M. Y soutient, aux termes d’un calcul qui n’est pas critiqué par la société Locatel et qui dès lors sera retenu, que l’Ebitda s’élevait au 31 décembre 2010 à la somme minimale de 11 161 455 euros, soit 87 % de l’objectif d’Ebitda (12 800 000 euros).

Le seuil de déclenchement de la prime était donc atteint, l’objectif étant réalisé à plus de 81 %.

Le salarié avait donc droit, d’après les dispositions contractuelles, à une prime égale à 90 % de son montant maximum, soit 18 000 euros au titre de l’année 2010 entière.

N’ayant été présent dans l’entreprise que pendant neuf mois en 2010, le contrat de travail ayant été rompu le 30 septembre, il a droit, au prorata de son temps de présence dans l’entreprise (l’application de la règle du prorata temporis n’étant pas sur ce point discutée), à une prime de 13 500 euros.

M. Y n’ayant reçu aucune prime Ebitda au titre de l’année 2010, il lui sera alloué cette somme de 13 500 euros bruts ; le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Il n’est pas caractérisé d’abus dans le refus opposé par la société Locatel de payer les sommes réclamées par son salarié ; ce refus se fonde sur une interprétation divergente des dispositions contractuelles.

M. Y sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts et le jugement entrepris confirmé de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle

M. Y se révélant créancier de la société Locatel, celle-ci doit être déboutée de sa demande de remboursement des sommes qu’elle a payées en exécution de la décision du bureau de jugement.

Sur les dépens et l’indemnité de procédure

Partie succombante, la société Locatel sera condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer sur ce fondement à M. Y la somme de 2 000 euros, soit 1000 euros pour chacune des deux instances.

PAR CES MOTIFS

La COUR, Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du 10 mars 2014 du conseil de prud’hommes de Nanterre et statuant à nouveau :

Condamne la société Hoist Locatel France à payer à M. Z E les sommes suivantes:

* 10 000 euros bruts au titre de la rémunération variable de l’année 2009

* 13 500 euros bruts au titre de la prime Ebitda de l’année 2010 :

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 1er août 2011, jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation ;

* 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société Hoist Locatel France aux entiers dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, et signé par Mme Michèle Colin, président, et par Mme Brigitte Beurel, greffier.

Le GREFFIER Le PRESIDENT

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