Cour d'appel de Versailles, 20 octobre 2016, n° 14/07013

  • Tierce personne·
  • Consolidation·
  • Préjudice esthétique·
  • Rejet·
  • Dépense de santé·
  • Poste·
  • Hypermarché·
  • Souffrances endurées·
  • Réserve·
  • Tiers payeur

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 20 oct. 2016, n° 14/07013
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/07013
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Versailles, 24 septembre 2012, N° 10/11040

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 64B

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 OCTOBRE 2016

R.G. N° 14/07013

AFFAIRE :

X Y épouse Z

C/

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

Décision déférée à la cour :
Jugement rendu le 25 Septembre 2012 par le Tribunal de Grande
Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 04

N° RG : 10/11040

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me A B de la SELARL MARCONNET & B

Me C D

Me E F

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT OCTOBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame X Y épouse Z

née le XXX à XXX)

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me A
B de la SELARL MARCONNET &
B, Postulant et
Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 226 -
N° du dossier 100151

APPELANTE AU PRINCIPAL – INTIMEE
INCIDENTE

****************

1/ SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

N° SIRET : 451 321 335

dont le siège social est ZAE Saint-Guénault – 1 rue
Jean Mermoz à EVRY (91), prise en son établissement sis 280 avenue Gabriel Perry à MONTESSON (78360)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me C
D, Postulant, avocat au barreau de
VERSAILLES, vestiaire :
627 – N° du dossier 14469

Représentant : Me G
H, Plaidant, avocat au barreau de
PARIS substituant Me Stella BEN
ZENOU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire :
G0207

INTIMEE AU PRINCIPAL – APPELANTE
INCIDENTE

2/ CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES
YVELINES

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me E
F, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de
VERSAILLES, vestiaire : 391

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Septembre 2016 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président chargé du rapport, et Madame Caroline DERNIAUX,
Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET,
Président,

Madame Françoise BAZET, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame I J


FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES
PARTIES

Le 16 juin 2006 Mme Z a fait une chute dans un magasin carrefour situé à Montesson (78) et s’est blessée.

Par ordonnance de référé du 20 mai 2008 le président du tribunal de grande instance de Versailles a désigné en qualité d’expert médical le docteur
Lafaye de Michaux avec mission de définir et évaluer les conséquences corporelles de l’accident du 16 juin 2006, et M. K aux fins de fournir tous éléments relatifs à l’adaptation de l’habitat et de véhicule au handicap résultant dudit accident

Le docteur Lafaye de Michaux a déposé le 1er décembre 2009 un rapport dont les conclusions sont les suivantes :

— déficit fonctionnel temporaire total (DFTT) du 16 juin 2006 au 31 octobre 2007,

— déficit fonctionnel temporaire partiel (DFTP) du 31 octobre 2007 au 8 février 2008,

— consolidation : le 8 février 2008,

— déficit fonctionnel permanent : 20 %,

— souffrances endurées : 5/7,

— préjudice esthétique : 3/7,

— préjudice d’agrément : gêne modérée au niveau des activités alléguées,

— préjudice professionnel : Mme Z n’a pu rejoindre son poste de travail à
Bruxelles pendant 2 ans,

— préjudice sexuel : présent,

— tierce personne : 3 heures par semaine de l’accident à la date de consolidation,

— aides techniques nécessaire :

bas de contention droit classe II,

orthèse cruro-pédieuse droite sur moulage en carbone, type GII,

semelle orthopédique droite avec soulagement d’appui sous têtes métatarsiens et talonnette compensant l’équin,

voiture à boîte automatique et inversion de pédale d’accélérateur,

—  2 -

rampe d’accès de la rue à la maison pour le jardin,

barres d’appui douche et WC,

— réserves :

thrombose du pontage veineux et chirurgie en urgence de revascularisation (traitement préventif par
Plavix au long cours nécessaire),

gonarthrose droite,

tentatives correctrices chirurgicales.

M. K a déposé son rapport le 24 février 2009 concluant à :

— un surcoût d’adaptation architecturale du domicile pour mise en accessibilité

de 3 600,00 euros

— un besoin d’adaptation du véhicule de 2 400,00 euros

avec un amortissement annuel de 343,00 euros

— un coût de reprise de leçons de conduite de 950,00 euros

compris les frais de dossier.

P a r a c t e s d e s 1 7 e t 1 8 n o v e m b r e 2 0 1 0 M m e B r i c e a a s s i g n é l a S A S C A R R E F O U R
HYPERMARCHÉS (Carrefour) et la CPAM des Yvelines aux fins d’indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 25 septembre 2012 le tribunal de grande instance de Versailles a :

— considéré que la responsabilité de Carrefour était engagée sur le fondement de l’article 1384 du code civil,

— fixé le préjudice de Mme Z de la façon suivante :

postes de préjudice susceptibles de recours de tiers payeurs

dépenses de santé actuelles (DSA)

débours de la CPAM des Yvelines 177 915,73 euros

à charge 493,08 euros

dépenses de santé futures (DSF)

chiffres de la CPAM des Yvelines 25 623,39 euros

à charge réserves

tierce personne avant consolidation 11 336,00 euros

pour ses besoins personnels

872 heures sur un coût horaire de 13 euros

pour remplacement dans la vie de sa famille 5 850,00 euros

450 heures sur un coût horaire de 13 euros

—  3 -

tierce personne après consolidation

pour sa vie à Bruxelles

2 h 30 x 52 semaines x 13 euros x 22,355 37 779,85 euros

pour ses week-ends et séjours en
France

2 h x 52 semaines x 13 euros x 22,355 30 223,96 euros

pertes de gains professionnels actuels (PGPA)

du 16 juin au 12 septembre 2006 fin du contrat en cours lors de l’accident

pertes nettes globales 5 040,02 euros

à déduire

indemnités journalières de la CPAM 78 2 559,04 euros

solde 2 480,98 euros

à partir du 12 septembre 2006

jusqu’au nouvel emploi à Bruxelles rejet

pertes de gains professionnels (PGPF) rejet

de la demande de réserves,

le nouvel emploi étant plus rémunérateur que celui exercé lors de l’accident et les modifications de son état de santé dans l’avenir pouvant interférer sur son activité en relation avec l’accident du 16 juin 2006 relevant en ce cas d’une appréciation dans le cadre d’une aggravation.

incidence professionnelle rejet

la pénibilité accrue invoquée, en présence d’un nouvel emploi, n’étant corroborée par aucun élément justificatif.

postes de préjudice non susceptibles de recours de tiers payeurs

frais divers

téléphone, téléviseur, frais de transport, parking 765,30 euros

frais de logement adapté 3 600,00 euros

frais de véhicule adapté

coût initial et renouvellement tous les 7 ans 7 667,76 euros

permis de conduire adapté 950,00 euros

DFTT et DFTP 13 350,00 euros

DFTP

20 % à 1.500 euros du point 30 000,00 euros

souffrances endurées 5/7 20 000,00 euros

préjudice esthétique temporaire rejet

préjudice esthétique permanent 4 000,00 euros

préjudice d’agrément rejet

faute de justifications

—  4 -

préjudice sexuel 10 000,00 euros

préjudice moral exceptionnel rejet

de la demande fondée sur l’impossibilité du fait des conséquences de l’accident d’avoir pu assister sa mère pour la fin de ses jours, aggravant ainsi son deuil, au motif qu’il s’agissait d’un préjudice qui n’est pas directement lié à l’accident.

— réservé les droits de Mme Z au titre des frais de santé futurs,

— alloué à Mme Z sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile une somme de 3 500,00 euros

— condamné Carrefour à verser à la CPAM des
Yvelines

à titre principal 208 623,39 euros

avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2011

— au titre de l’indemnité forfaitaire 980,00 euros

— sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile une somme de 1 500,00 euros

en sus des dépens.

— donné acte à la CPAM des Yvelines de ses réserves au titre des DSF,

— ordonné l’exécution provisoire de la décision à l’exception des dépens,

— condamné Carrefour aux dépens comprenant les frais de référé et d’expertise avec faculté de recouvrement direct.

Le 23 septembre 2014 Mme Z a interjeté appel du jugement.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément fait référence pour Mme Z, appelante au principal et intimée incidente, Carrefour, intimée au principal et appelante incidente et la CPAM des Yvelines, intimée au principal, à leurs conclusions signifiées les 22 décembre 2014, 16 et 20 février 2015 tendant à ce que la cour :

pour Mme Z,

— réforme partiellement le jugement dont appel,

— fixe son préjudice de la façon suivante :

postes de préjudice susceptibles de recours de tiers payeurs

dépenses de santé actuelles (DSA)

à charge 493,08 euros

dépenses de santé futures (DSF)

à charge réserves

—  5 -

tierce personne avant consolidation 13 952,00 euros

pour ses besoins personnels

872 heures sur un coût horaire de 16 euros

pour remplacement dans la vie de sa famille 14 448,00 euros

903 heures sur un coût horaire de 16 euros

tierce personne après consolidation

pour sa vie à Bruxelles

2 h 30 x 52 semaines x 16 euros x 22,355 46 498,40 euros

pour ses week-ends et séjours en
France

3 h x 52 semaines x 16 euros x 22,355 55 798,08 euros

pertes de gains professionnels actuels (PGPA)

du 16 juin au 12 septembre 2006 fin du contrat en cours lors de l’accident

pertes nettes globales 5 040,02 euros

à déduire

indemnités journalières de la CPAM 78 2 559,04 euros

solde 2 480,98 euros

du 12 septembre 2006 à la date du nouvel emploi à
Bruxelles

25 mois x 4 361,96 euros 109 049,00 euros

dont à déduire

IJ versées par la CPAM des Yvelines 15 995,58 euros

ASSEDIC 9 078,75 euros

soit un solde visé dans les écritures de 83 082,70 euros

pertes de gains professionnels (PGPF) réserves

incidence professionnelle 15 000,00 euros

postes de préjudice non susceptibles de recours de tiers payeurs

frais divers

téléphone, téléviseur, parking 290,00 euros

frais de transport 475,30 euros

frais de logement adapté 10 000,00 euros

frais de véhicule adapté

coût initial et renouvellement tous les 7 ans 7 667,76 euros

permis de conduire adapté 950,00 euros

DFTT et DFTP 13 350,00 euros

DFP

20 % à 1.500 euros du point 30 000,00 euros

souffrances endurées 5/7 25 000,00 euros

préjudice esthétique temporaire 5 000,00 euros

—  6 -

préjudice esthétique permanent 5 000,00 euros

préjudice d’agrément 15 000,00 euros

préjudice sexuel 10 000,00 euros

préjudice moral

qualifié d’exceptionnel dans le dispositif 10 000,00 euros

— condamne Carrefour à lui payer sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile la somme de 3 500,00 euros

et à supporter tous les dépens de première instance et d’appel comprenant les frais de référé et d’expertise avec faculté de recouvrement direct.

pour la CPAM des Yvelines, intimée

— confirme le jugement entrepris en ses dispositions la concernant, lui donne acte de ce qu’en application de l’exécution provisoire elle a été intégralement réglée des condamnations à son profit et statue ce que de droit sur les dépens d’appel,

pour Carrefour,

— évalue le préjudice subi par Mme Z de la façon suivante :

postes de préjudice susceptibles de recours de tiers payeurs

dépenses de santé actuelles (DSA)

débours de la CPAM des Yvelines 177 915,73 euros

à charge 493,08 euros

dépenses de santé futures (DSF)

chiffres de la CPAM des Yvelines 25 623,39 euros

à charge rejet

de la demande de réserves

tierce personne avant consolidation 11 336,00 euros

pour ses besoins personnels

sur un coût horaire de 13 euros

pour remplacement dans la vie de sa famille rejet

tierce personne après consolidation

pour sa vie à Bruxelles

2 h 30 x 52 semaines x 13 euros x 22,355 37 779,85 euros

subsidiairement

pour ses week-ends et séjours en
France

1 h x 52 semaines x 13 euros x 22,355 15 111,98 euros

pertes de gains professionnels actuels (PGPA)

du 16 juin au 12 septembre 2006 fin du contrat en cours lors de l’accident

—  7 -

pertes nettes globales 5 040,02 euros

A déduire

indemnités journalières de la CPAM 78 2 559,04 euros

solde 2 480,98 euros

du 12 septembre 2006 à la date du nouvel emploi à
Bruxelles

à titre principal rejet

à titre subsidiaire

perte de chance largement couverte par les ASSEDIC et les indemnités journalières versées par la
CPAM des Yvelines et la MATMUT.

pertes de gains professionnels (PGPF) rejet

incidence professionnelle rejet

postes de préjudice non susceptibles de recours de tiers payeurs

frais divers

téléphone, téléviseur, frais de transport, parking 568,90 euros

frais de logement adapté 3 600,00 euros

frais de véhicule adapté

coût initial et renouvellement tous les 7 ans

et permis de conduire adapté 8 617,76 euros

DFTT et DFTP 13 350,00 euros

DFTP

20 % à 1.500 euros du point 30 000,00 euros

souffrances endurées 5/7 16 000,00 euros

préjudice esthétique temporaire rejet

préjudice esthétique permanent 4 000,00 euros

préjudice d’agrément rejet

préjudice sexuel 10 000,00 euros

préjudice moral exceptionnel rejet

— déboute Mme Z ainsi que tous contestants de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

— condamne tout succombant aux entiers dépens avec faculté de recouvrement direct.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 juin 2016.

—  8 -

SUR CE :

Sur la responsabilité de Carrefour :

Les dispositions du jugement retenant la responsabilité de Carrefour pour l’accident subi par Mme Z le 16 juin 2006 au magasin de
Montesson sur le fondement de l’article 1384 du code civil ne font l’objet d’aucune critique des parties.

Sur les demandes de la CPAM des
Yvelines

La décision entreprise n’est pas non plus critiquée en ses dispositions relatives aux réserves et aux différentes sommes allouées à la CPAM des Yvelines, aux intérêts alloués à compter du 10 octobre 2011 et qui ont été réglées.

Sur la fixation du préjudice corporel de Mme Z

Sur les rapports du docteur Lafaye de Michaux et de M. K

Les rapports d’expertise du docteur Lafaye de Michaux et de M. K ont été dressés respectivement les 5 janvier et 24 février 2009.

Aucune pièce médicale postérieure à ces deux dates n’est versée aux débats à l’appui des critiques relatives aux diligences des experts judiciaires qui n’auraient pas répondu aux questions posées.

Les seules pièces postérieures aux dites dates concernent des pièces relatives à la situation professionnelle de la victime ou les interventions familiales de ses deux soeurs.

Les éléments contenus dans ces rapports sont suffisants pour permettre à la cour d’apprécier les différents postes de préjudice réclamés.

Sur les postes de préjudice susceptibles de recours de tiers payeurs

Compte tenu de l’accord des parties, pour les DSA et les PGPA pour la première période, les chiffres suivants doivent être retenus soit :

dépenses de santé actuelles (DSA)

débours de la CPAM des Yvelines 177 915,73 euros

à charge 493,08 euros

pertes de gains professionnels actuels

du 16 juin au 12 septembre 2006 à charge 2 480,98 euros

pertes de gains professionnels actuels pour la période courant du 12 septembre 2006, fin du CDD à
United Biscuits jusqu’à l’engagement à
Bruxelles

La fin du CDD de Mme Z était prévue le 12 septembre 2006 et son salaire mensuel était alors de 1 873,77 bruts soit de l’ordre de 1 600 euros nets.

—  9 -

Ainsi que le tribunal l’a mentionné, Mme Z était inscrite dans le 3e groupe de mérite sur la liste de réserve après avoir été admise au concours et aucune certitude de date d’embauche n’était alors établie.

Les différents documents produits aux débats ne permettent pas d’établir que le salaire prévu lors de l’embauche à Bruxelles aurait été, comme allégué, d’un montant mensuel de 4 361,96 euros,
Carrefour faisant valoir pour sa part que le salaire du 1er échelon aurait été de 1 341,61 euros.

On cherche en vain dans le dossier le contrat de travail de
Bruxelles, les déclarations de revenus et les bulletins de paye de l’emploi exercé à Bruxelles désormais depuis près de 8 années.

La carence de Mme Z pour la production de ces pièces place la cour dans l’impossibilité de retenir le salaire mensuel de 4 361,96 euros servant de base au calcul de l’indemnité sollicitée pour les 25 mois.

Compte tenu du délai aléatoire entre la fin du CDD et l’embauche à Bruxelles en dehors de l’accident, de l’incertitude affectant le salaire perçu pour ce nouvel emploi, du fait de la carence de la victime, et des sommes perçues pendant cette période soit :

des IJ totales de 15 995,48 euros

des ASSEDIC de 9 082,70 euros

de la MATMUT 4 140,00 euros

C’est avec pertinence que les premiers juges ont considéré que seule pouvait être retenue une perte de chance mais qui ne pouvait être évaluée à un montant supérieur aux sommes perçues.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef pour la période du 12 septembre 2006 à la consolidation de Mme Z pour cette période.

Sur les pertes de gains professionnels futurs

Le docteur Lafaye de Michaux précise dans son rapport que les séquelles dont souffre Mme Z n’empêchent pas son travail de secrétariat à un poste de fonctionnaire européen de langue française.

Mme Z indique dans ses écritures qu’elle a retrouvé une activité professionnelle plus rémunératrice que celle précédemment occupée mais, comme indiqué plus haut, en s’abstenant de produire aux débats le moindre contrat de travail ni un quelconque bulletin de paye ou déclarations de revenus concernant l’emploi occupé maintenant depuis bientôt 8 années.

Sa demande tendant à ce que le poste de PGPF soit réservé est fondée sur le fait que son activité actuelle est sous condition d’un état de santé compatible.

Or, comme l’a retenu le premier juge, la motivation de Mme Z concerne l’hypothèse de l’aggravation de son état qui ne serait alors plus compatible avec son activité professionnelle à
Bruxelles.

—  10 -

Les réserves étant de droit en cas d’aggravation et aucune PGPF n’étant alléguée actuellement, le jugement sera confirmé en ce que Mme Z a été déboutée de sa demande de réserves au titre des
PGPF.

Sur l’incidence professionnelle

Le docteur Lafaye de Michaux retient comme séquelles de l’accident du 16 juin 2006 :

— une gêne fonctionnelle représentée par l’instabilité postéro-externe du genou droit (elle empêche toute activité de loisir en extérieur), la raideur de la flexion dorsale de la cheville droite (elle entraîne une boiterie pour le passage du pas) associée aux troubles sensitifs superficiels et profonds du pied droit (elle empêche la conduite automobile d’un véhicule non aménagé (boîte automatique et inversion de pédale d’embrayage vers la gauche),

— des troubles trophiques permanents nécessitant le port de bas de contention classe II à droite,

— une gêne du fait de la nécessité de traitement anti-plaquettaire à vie.

Il relate que la victime a été reconnue comme travailleur handicapé par la MDPH avec station debout prolongée pénible.

Ces séquelles, ayant justifié un taux de DFP de 20 %, génèrent une plus grande pénibilité dans le travail, néanmoins limitée en raison du poste de secrétariat occupé.

La perte d’avancement par promotion et la dévalorisation sur le marché du travail, eu égard à la nature de l’emploi occupé et en l’absence de tout élément sur les rémunérations perçues depuis près de 8 ans désormais, ne peuvent être retenus faute de justifications.

L’incidence professionnelle sera donc réparée par la somme de 10 000,00 euros

dépenses de santé futures (DSF)

Les frais viagers de la CPAM des Yvelines 25 622,36 euros

correspondant à des frais de semelle plantaire, de bas de contention, d’orthèse cruro pédieuse articulée sur mesure et de moulage ne font l’objet d’aucune critique.

Mme Z ne fait pas état de frais de ce chef restés à charge depuis la consolidation et ne fournit aucune explication quant aux réserves sollicitées indiquant en haut de page 11, poste réservé.

En l’absence de DSF restées à ce jour à charge de la victime, il y a lieu de rejeter la demande tendant à ce que ce poste soit réservé, les réserves étant de droit en cas d’aggravation de l’état de Mme Z.

Tierce personne avant consolidation

pour la victime personnellement

La durée horaire de la tierce personne avant consolidation soit 872 heures ne fait l’objet d’aucune observation par les parties.

—  11 -

En l’absence de nécessité d’une qualification particulière de cette tierce personne, le taux horaire retenu en première instance soit 13 euros doit être confirmé ce qui fait apparaître une somme de 11 336,00 euros

La demande au titre d’une tierce personne au bénéfice de la famille ne peut être admise dans le cadre de ce poste de préjudice puisqu’elle constitue, ainsi que justement observé par Carrefour, une demande correspondant à des frais de garde des deux enfants, ou de femme de ménage, le poste tierce personne n’ayant vocation à réparer que la nécessité d’une aide humaine au profit de la victime directe, et ne s’étendant pas à la prise en charge des enfants par leur père ou l’entourage familial. Elle sera donc examinée au titre des frais divers.

Tierce personne après consolidation

Il résulte des indications données par la victime et des pièces versées aux débats que la victime :

— bénéficiait lors de l’accident du 16 juin 2006 d’un contrat à durée déterminée devant s’achever le 12 septembre 2006 auprès de la société United
Biscuits,

— avait réussi avant l’accident un concours de secrétaire de langue auprès de la Commission
Européenne.

Mme Z a pris son travail à
Bruxelles le 17 novembre 2008, la consolidation étant intervenue le 8 février 2008.

Il doit être rappelé que l’indemnité allouée au titre de l’assistance d’une tierce personne ne saurait être réduite en cas d’assistance bénévole par l’entourage.

Les parties s’accordent sur :

— la date à partir de laquelle Mme Z s’est rendue seule pendant la semaine à son travail à
Bruxelles,

— la nécessité d’une tierce personne de 2 h 30 par semaine pendant la semaine à Bruxelles durant 52 semaines dans l’année,

— l’euro de rente à appliquer pour la capitalisation de 22,355.

Sur ces bases et en retenant un taux horaire de 15 euros pour cette tierce personne ne nécessitant aucune qualification particulière, il y a donc lieu d’allouer à Mme Z à ce titre la somme de :

15 euros x 2 h 30 x 52 semaines x 22, 355 43 592,25 euros

Pour la tierce personne, à titre viager, durant les week-ends en famille, et eu égard aux besoins résultant des séquelles décrites dans le rapport d’expertise, il y a lieu de retenir la nécessité d’une heure par semaine, pendant 52 semaines, un coût horaire de 15 euros et le même euro de rente de 22,355 ce qui aboutit à une indemnité de :

15 euros x 1 heure x 52 semaines x 22 355 17 436,90 euros

Pour les mêmes motifs que précédemment, la demande au titre de la tierce personne au bénéfice de la famille ne peut aboutir. En outre, Mme Z ayant fait le choix de travailler à

—  12 -

Bruxelles avant même la survenance de l’accident, l’organisation familiale de la semaine induite par cette nouvelle situation tenait nécessairement compte de l’absence de Mme Z du foyer familial pendant cette période.

Mme Z sera en conséquence déboutée de sa réclamation de ce chef.

Sur les postes de préjudice non susceptibles de recours de tiers payeurs

Ne font l’objet d’aucune critique par les parties, et seront dès lors confirmées, les sommes allouées au titre :

— des frais divers

de télévision, téléphone et parking 290,00 euros

— les frais d’adaptation de véhicule

et leur renouvellement 8 617,76 euros

— du DFP

1 500 euros x 20 % 30 000,00 euros

— du préjudice sexuel 10 000,00 euros

— des DFTT et DFTP 13 350,00 euros

En l’absence de justificatifs intéressant des frais de garde des enfants, ou d’aide ménagère, la demande improprement qualifiée de tierce personne au bénéfice de la famille sera rejetée.

— frais de transport

Seul un relevé manuscrit de frais de transport est versé aux débats sans autres justifications.

S’il ne peut être contestable que des frais ont été exposés pour des examens médicaux en lien direct

avec l’accident du 16 juin 2006, cependant ceux concernant les rendez-vous d’avocats font partie des frais irrépétibles et ceux de dentiste n’apparaissent pas rattachables à cet accident.

Dès lors l’offre formulée par Carrefour de 278,90 euros

doit être déclarée satisfactoire.

— frais d’adaptation de logement

Ainsi que mentionné précédemment, si Mme Z critique le rapport de M. K, elle ne fournit aucun élément pouvant remettre en question les constatations et conclusions particulièrement circonstanciées qui y figurent.

La demande tendant à l’organisation d’une expertise complémentaire doit en conséquence être rejetée.

—  13 -

Seuls doivent être retenus les aménagements dont la nécessité résulte des conséquences de l’accident soit :

— la mise en place d’une main courante de sécurité sur la partie la plus pentue du cheminement soit environ 10 ml 2 000,00 euros

— le déplacement du sèche linge et du lave linge dans le local rez de chaussée, avec reprise des évacuations soit 300,00 euros

— la mise en place de nez de marches antidérapants, l’amélioration de l’éclairage de l’escalier,

l’ajout d’une main courante 600,00 euros

— le traitement antidérapant de l’escalier 600,00 euros

— la mise en place d’une barre d’appui d’accès à la baignoire et la mise en place de deux tapis antidérapants 100,00 euros

soit un total de 3 600,00 euros

M. K précise en ce qui concerne la réclamation relative à l’aménagement d’une salle de bains dans le local du rez de chaussée, qu’il n’y a pas lieu de la retenir car elle serait plus difficile d’utilisation que la salle de bains spacieuse et fonctionnelle de l’étage.
Il ne retient aucune nécessité de renouvellement de ces différents éléments.

L’interdiction de choisir un autre logement en toute liberté, alléguée par Mme Z à l’appui de sa demande de dommages et intérêts, n’est nullement caractérisée, puisqu’il ne s’agit que d’aménagement minimes, fort heureusement, pouvant s’adapter facilement à tout logement.

Le jugement sera en conséquence confirmé sur la somme allouée au titre de l’aménagement du logement soit 3 600,00 euros

— souffrances endurées 5/7

Ce poste de préjudice, comme mentionné précédemment, concerne

' toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c’est à dire du jour de l’accident à celui de sa consolidation.
En effet, à compter de la consolidation les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisables à ce titre'.

Le docteur Lafaye de Michaux a quantifié les souffrances endurées à 5/7 du fait de la douleur syncopale initiale, de la longue hospitalisation avec 2 anesthésies générales, des douleurs neuropathiques très intenses pendant de nombreuses semaines rendant nécessaires de lourds traitements médicaux et prolongés, de la complication par algoneurodystrophie du genou, de la cheville et du pied droit, de la nature et de la durée des immobilisations, des nombreux examens pratiqués, des soins prodigués.

En considération des ces éléments, l’évaluation de première instance d’un montant

de 20 000,00 euros

sera confirmée.

—  14 -

— préjudice esthétique temporaire et permanent

Les interventions au niveau des veines, la présence d’un fixateur externe au niveau du genou droit jusqu’au 17 août 2006, la déambulation en fauteuil roulant puis avec des béquilles, le port d’une attelle rigide cruro-pédieuse, d’une orthèse releveur mollet-plante, de chaussettes de contention caractérisent un préjudice esthétique temporaire.

Le docteur Lafaye de Michaux a quantifié à 3/7 le préjudice esthétique permanent du fait des cicatrices du membre inférieur droit, souvent disgracieuses et de la boiterie persistance avec équin du pied.

Ces préjudices doivent être indemnisés de la façon suivante :

— préjudice esthétique temporaire

jusqu’à la consolidation 1 000,00 euros

— préjudice esthétique permanent 4 000,00 euros

préjudice d’agrément

L’importance et la nature des séquelles résidant notamment dans une instabilité postéro-externe du genou droit, dans la raideur de la cheville droite, dans les troubles sensitifs superficiels et profonds du pied droit, sont un obstacle à tout loisir en extérieur et tout sport nécessitant l’utilisation du membre inférieur droit.

Si Mme Z affirme qu’elle jardinait et faisait des promenades en forêt, force est de constater qu’elle n’en justifie nullement même en cause d’appel.

Cependant il est incontestable que cette victime se voit limitée dans le choix d’activités sportives ou de loisirs alors qu’elle n’était âgée que de 45 ans lors de la consolidation.

Dés lors une indemnité de 5 000,00 euros

sera allouée en réparation du préjudice d’agrément.

préjudice moral exceptionnel

On cherche en vain dans le dossier soumis à l’appréciation de la cour des éléments concernant :

— les conditions, le lieu, l’âge et la date de décès de la mère de la victime,

— des attestations corroborant les affirmations contenues dans les écritures de Mme Z pour justifiant sa réclamation au titre d’un préjudice moral exceptionnel du fait du décès de sa mère.

Les deux attestations émanant de ses deux soeurs
Isabelle et Pascale rédigées en septembre 2010 ne contiennent aucun élément sur ce point.

Au surplus, c’est avec pertinence que le premier juge a considéré que ce préjudice n’était pas directement lié à l’accident du 16 juin 2006 et ne pouvait dès lors donner lieu à une indemnisation.

—  15 -

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Au regard des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il apparaît équitable de :

— confirmer le jugement entrepris du chef des indemnités allouées tant à Mme Z qu’à la CPAM des Yvelines,

— y ajouter la somme de 2 000 euros en cause d’appel au profit de Mme Z.

Sur les dépens

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance, de référé et aux frais d’expertise.

Carrefour supportera les dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct.

L’arrêt doit être déclaré commun à la CPAM des Yvelines.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du 25 septembre 2012 rendu par le
Tribunal de Grande Instance de Versailles en ses dispositions relatives :

— à la condamnation sur le fondement de l’article 1384 du code civil de la société Carrefour
Hypermarchés à indemniser Mme Z du préjudice subi à la suite de l’accident survenu le 16 juin 2006,

— aux sommes allouées à la CPAM des
Yvelines,

— aux DSA à charge,

— au rejet de demandes de réserves de Mme Z du chef des DSF, des
PGPF,

— au rejet des réclamations de PGPA du 12 septembre 2006 à la consolidation, de préjudice moral exceptionnel, de tierce personne famille après consolidation,

— à la tierce personne de la victime personnellement avant consolidation,

— aux PGA du 16 juin au 12 septembre 2006,

— aux frais divers de téléphone, téléviseur, parking,

— aux frais d’aménagement du logement et du véhicule,

— aux DFTT et DFTP,

—  16 -

— au DFP,

— aux souffrances endurées,

— au préjudice sexuel,

— au préjudice esthétique permanent,

— aux dépens de première instance, de référé et honoraires d’expertises judiciaires,

— aux frais irrépétibles accordés en première instance à Mme Z.

Infirmant partiellement le jugement entrepris pour le surplus, fixe :

— la tierce personne après consolidation à 61 029,15 euros

— l’incidence professionnelle à 10 000,00 euros

— les frais de transports à charge 278,90 euros

— le préjudice esthétique temporaire 1 000,00 euros

— le préjudice d’agrément 5 000,00 euros

Déboute Mme Z de sa demande au titre de la tierce personne au bénéfice de sa famille,

Récapitule comme suit les postes de préjudice subi par Mme Z à la suite de l’accident du 16 juin 2006, après imputation de la créance de la CPAM des
Yvelines conformément aux dispositions de la loi du 21 décembre 2006 mais provisions non déduites :

dépenses de santé actuelles (DSA)

à charge 493,08 euros

dépenses de santé futures (DSF)

à charge rejet

tierce personne avant consolidation 11 336,00 euros

pour ses besoins personnels

pour remplacement dans la vie de sa famille rejet

tierce personne après consolidation 61 029,15 euros

pertes de gains professionnels actuels (PGPA)

du 16 juin au 12 septembre 2006 2 480,98 euros

du 12 septembre 2006 au 6 octobre 2008, date du nouvel emploi à Bruxelles rejet

pertes de gains professionnels (PGPF) rejet

incidence professionnelle 10 000,00 euros

frais divers

téléphone, téléviseur, frais de transport, parking 290,00 euros

frais de transport 278,90 euros

frais de logement adapté 3 600,00 euros

frais de véhicule adapté

et permis de conduire 8 617,76 euros

DFTT et DFTP 13 350,00 euros

DFP 30 000,00 euros

souffrances endurées 5/7 20 000,00 euros

—  17 -

préjudice esthétique temporaire 1 000,00 euro

préjudice esthétique permanent 4 000,00 euros

préjudice d’agrément 5 000,00 euros

préjudice sexuel 10 000,00 euros

préjudice moral exceptionnel rejet

Condamne la société Carrefour Hypermarchés au paiement des dites sommes à Mme Z en deniers ou quittances,

Donne acte à la CPAM des Yvelines de ce qu’en vertu de l’exécution provisoire dont a été assorti le jugement entrepris elle a été intégralement réglée des condamnations prononcées à son profit par la société Carrefour Hypermarchés,

Condamne la société Carrefour Hypermarchés à verser à Mme Z sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile une indemnité de 2 000, 00 euros

pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

Condamne la société Carrefour Hypermarchés aux dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Véronique BOISSELET,
Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

—  18 -

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 20 octobre 2016, n° 14/07013