Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 26 mars 2019, n° 18/03390

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 26 mars 2019, n° 18/03390
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 18/03390
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 8 mai 2018, N° 2018R00286
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

FS

Code nac : 56B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 MARS 2019

N° RG 18/03390 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SMFH

AFFAIRE :

Société BIOSANTECH agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

C/

[…]

ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DES HAUTS DE SEINE

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu(e) le 09 Mai 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 00

N° Section : 00

N° RG : 2018R00286

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Franck X,

Me Martine DUPUIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société BIOSANTECH

[…]

[…]

Représentant : Me Franck X, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20180207

Représentant : Me Nathalie LOPEZ, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

APPELANTE

****************

[…]

[…]

[…]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1859946 – Représentant : Me Paul-Marie GAURY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0221

par Me DUMONT

INTIMEE

****************

ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DES HAUTS DE SEINE

[…]

[…]

Représentant : Me Franck X, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20180207

Représentant : Me Michel GUICHARD de la SELAFA TAJ, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 1704 -

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Janvier 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

La société Biosantech, ayant pour activité la promotion et la valorisation de travaux de recherche scientifique en matière médicale a conclu en 2015 avec la société Neoptim Consulting, société de conseils en entreprise en matière de réduction des coûts, un ordre de mission portant sur la mise en place du dispositif crédit d’impôt recherche et crédit d’impôt innovation.

Le 23 mai 2017, la société Neoptim Consulting a émis une facture de 37 947,12 euros TTC à l’ordre de la société Biosantech, qui a procédé au paiement de la somme de 5 000 euros par chèque non provisionné.

Après l’envoi d’une mise en demeure du 24 juillet 2017 par la société Neoptim Consulting, un échéancier a été mis en place le 13 septembre 2017, avec l’accord de la société Biosantech.

C’est dans ce contexte que l’échéancier n’étant pas respecté, la société Neoptim Consulting a fait assigner le 19 mars 2018 la société Biosantech devant le président du tribunal de commerce de Nanterre statuant en référé aux fins principalement de paiement de la somme provisionnelle de 37 947, 12 euros.

Par ordonnance du 5 mai 2018, le juge des référés a :

— condamné la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme provisionnelle de 37 947,12 euros en principal, majorée des intérêts au taux contractuel de trois fois le taux légal à compter du 27 mai 2017,

— condamné la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme provisionnelle de 40 euros,

— débouté la société Neoptim Consulting de faire cesser les actes de dénigrement,

— condamné la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Biosantech aux dépens ,

— rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

PRETENTIONS DES PARTIES

La société Biosantech a interjeté appel le 14 mai 2018 de la décision par déclaration d’appel visant expressément toutes les dispositions de l’ordonnance entreprise.

Par dernières conclusions notifiées le 26 juillet 2018, la société Biosantech demande à la cour de :

— réformer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 9 mai 2018,

— débouter la société Neoptim Consulting de toutes ses demandes, fins et conclusions,

A titre principal :

— dire et juger que la société Neoptim Consulting devra mieux se pourvoir en saisissant le juge du fond,

A titre subsidiaire :

— dire et juger que la société Neoptim Consulting ne peut prétendre qu’à une somme de 32 947,12 euros en raison du virement effectué le 11 octobre 2017,

Dans tous les cas :

— condamner la société Neoptim Consulting à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— laisser les entiers dépens de première instance et d’appel à la société Neoptim Consulting avec distraction au profit de maître X conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le le 4 janvier 2019, la société Neoptim Consulting sollicite de la cour de :

— confirmer l’ordonnance du 9 mai 2018 en ce qu’elle a :

* condamné la société Biosantech à lui payer la somme provisionnelle de 32 947,12 euros ( déduction faite du virement de 5 000 euros en date du 11 octobre 2017), en principal, majorée des intérêts au taux contractuel de trois fois le taux légal à compter du 27 mai 2017,

*condamné la société Biosantech à lui payer la somme provisionnelle de 40 euros,

*condamné la société Biosantech à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Biosantech aux dépens,

* rappelé que l’exécution provisoire est de droit,

Et statuant à nouveau :

— dire et juger la société Biosantech irrecevable en ses demandes ;

— la débouter de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

— débouter l’Ordre des avocats du barreau des Hauts de Seine de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

— condamner la société Biosantech à lui payer la somme de 5.000 euros complémentaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel ;

— condamner la société Biosantech aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

— dire que les dépens d’appel pourront être directement recouvrés par la Selarl Lexavoué Paris-Versailles, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le le 19 décembre 2018,, l’Ordre des avocats du barreau des Hauts de Seine, partie intervenante demande à la cour :

— accueillir son intervention volontaire,

— statuer ce que de droit,

— condamner la société Neoptim Consulting à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— laisser la charge des dépens à la société Neoptim Consulting dont distraction au profit de maître X conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 17 janvier 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « dire et juger » qui ne sont, en l’espèce, pas des prétentions mais des moyens.

La cour relève également que la société Neoptim Consulting ne formule pas dans le dispositif de ses dernières conclusions, qui seules la saisissent , de demande de faire cesser les actes de dénigrement.

Sur l’intervention volontaire de l’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine :

L’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine soutient son intervention volontaire en expliquant que la société Neoptim Consulting a une activité de conseil et d’accompagnement pour valoriser les dépenses de la société Biosantech, qu’il s’agit d’une activité juridique encadrée par la loi, que dès lors l’exercice développé par la société Neoptim Consulting constitue un exercice illégal de la profession d’avocat.

La société Biosantech indique également que la société Neoptim Consulting exerce une activité de conseil juridique à titre habituel et rémunéré, alors qu’elle n’est pas inscrite à l’Ordre des Avocats.

La société Neoptim Consulting réplique que l’intervention de l’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine n’apporte pas d’élément nouveau, à défaut de tout exposé de moyens de fait et de droit au soutien de sa prétention.

En application de l’article 544 du code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.

L’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine, à qui des faits susceptibles de constituer un exercice illégal par la société Biosantech de la profession d’avocat ont été portés à sa connaissance le 4 avril 2018, justifie d’un intérêt à intervenir en cause d’appel dans la présente procédure, étant en charge de la déontologie des avocats et du respect des règles les concernant.

Il y a donc lieu de donner acte à l’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine de son intervention volontaire.

Sur le principal :

L’article 873 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder une provision au créancier.

La hauteur de la provision susceptible d’être ainsi allouée n’a d’autre limite que celui du montant de la dette alléguée. Dans cette limite, le juge des référés fixe souverainement le montant de la provision.

La société Biosantech s’oppose à la demande en paiement de la société Neoptim Consulting, faisant valoir la nullité absolue de la convention d’optimisation fiscale conclue entre les parties en raison de son illicéité au regard des dispositions de l’article 1128 du code civil et de l’article 54 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme des professions judiciaires et juridiques.

La société Neoptim Consulting réplique que sa demande en paiement n’est pas sérieusement contestable, qu’en effet la société Biosantech a accepté l’ordre de mission et n’a jamais remis en cause la réalisation de ses prestations, qu’elle a également reconnu sa dette en versant la somme de 5 000 euros et qu’elle a accepté l’échéancier qui lui a été proposé le 21 septembre 2017.

Elle fait valoir que la société Biosantech n’est plus recevable à soulever la nullité d’un contrat qui a été exécuté, qu’elle n’a pas plus qualité et intérêt à agir à l’encontre de la société Neoptim Consulting pour invoquer un prétendu exercice illégal de la profession, qui relève exclusivement du Conseil national des Barreaux.

Il appartient à la société Biosantech de démontrer que la société Neoptim Consulting a exercé une activité de conseil juridique relevant de l’article 54 de la loi du 31 décembre 1971 ou se soit livrée à l’exercice de la profession d’avocat.

Il ressort des énonciations et pièces produites par les parties :

— que le KBIS de la société Neoptim Consulting montre que son activité porte sur ' le conseil aux entreprises en matière de réduction des coûts',

— que la société Neoptim Consulting a obtenu le certificat de qualification professionnelle des sociétés et ingénieurs conseils en management (OCQCM) en ce qui concerne le domaine de qualification de l’optimisation des coûts, qu’il n’est pas fait mention de l’activité de conseil juridique, que son activité consiste à effectuer des audits et des collectes de documents pour obtenir la réduction des coûts,

— que l’ordre de mission signé par les parties en 2015 avait pour objet 'l’intervention du consultant auprès du client en qualité de conseil et d’accompagnement afin de valoriser les dépenses du client engagées pour ses activités de R&D', qu’il s’agissait d’une convention d’optimisation fiscale,

— que les conditions générales du contrat également signées par la société Biosantech indique que 'le consultant effectue des missions d’audit et de conseil afin d’évaluer les possibilités de mise en place de leviers permettant des économies dans les domaines comme […] le dispositif de crédit d’impôt', que ' pour mener à bien sa mission, le consultant fait appel à un avocat conseil, maître Marques',

— que le rapport d’expertise remis le 10 mars 2016 par la société Neoptim Consulting à la société Biosantech conclut que le projet ' développement d’un vaccin efficace sur tous les variants du virus du sida’ est éligible au crédit d’impôt 'recherche’ conformément à l’article 244 quater B du code général des impôts, que cette seule référence juridique ne peut suffire à établir l’activité de conseil juridique de la société Neoptim Consulting, qu’au demeurant il n’est pas établi que l’avocat conseil ne soit pas intervenu dans l’établissement de ce rapport,

— que le fait que la société Biosantech ait déposé plainte à l’encontre de la société Neoptim Consulting pour exercice illégal de la profession d’avocat ne suffit pas en tant que tel à établir la réalité des faits, plainte au demeurant déposée le 4 avril 2018 c’est-à-dire après l’introduction de la présente instance en paiement.

Il s’ensuit de ces éléments qu’il n’est pas établi avec l’évidence requise en référé que la société Neoptim Consulting exerce illégalement la profession d’avocat, que dès lors la contestation soulevée par la société Biosantech portant sur la nullité de la convention conclue entre les parties tirée de l’exercice illégal par la société Neoptim Consulting de la profession d’avocat ne revêt pas un caractère suffisamment sérieux rendant contestable l’obligation au paiement par la société Biosantech des prestations fournies par la société Neoptim Consulting.

Par conséquent, la société Biosantech, qui ne conteste ni la réalité des prestations de la société Neoptim Consulting qui lui a permis de bénéficier des crédits d’impôt innovation à hauteur de la somme de 158 113 euros ni le fait que la rémunération prévue était égale à 20% du crédit d’impôt réalisé outre la TVA applicable, qui a accepté le 21 septembre 2017 l’échéancier de règlement proposé sans cependant l’exécuter et qui a opéré un virement de 5 000 euros le 11 octobre 2017, sera condamnée à payer à la société Neoptim Consulting la somme provisionnelle non sérieusement contestable de 32 947,12 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2017.

La décision du premier juge sera dès lors confirmée, sauf sur le quantum de la provision pour tenir compte du versement opéré par la société Biosantech le 11 octobre 2017.

Sur les autres demandes :

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

En cause d’appel, il y a lieu de condamner la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter toute demande de l’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine à ce titre.

Les dépens d’appel seront à la charge de la société Biosantech.

PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant par arrêt contradictoire

Donne acte à l’Ordre des Avocats du Barreau des Hauts de Seine de son intervention volontaire en cause d’appel,

Confirme l’ordonnance rendue le 9 mai 2018 par le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, sauf sur le quantum de la provision,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme provisionnelle de 32 947,12 euros en principal, majorée des intérêts au taux contractuel de trois fois le taux légal à compter du 27 mai 2017,

Condamne la société Biosantech à payer à la société Neoptim Consulting la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne la société Biosantech aux dépens d’appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été

préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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