Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 27 janvier 2021, n° 18/03831

  • Licenciement·
  • Développement·
  • Avenant·
  • Mission·
  • Ingénieur·
  • Marchés publics·
  • Responsable·
  • Rémunération variable·
  • Sociétés·
  • Pilotage

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 27 janv. 2021, n° 18/03831
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 18/03831
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye, 19 août 2018, N° F17/00095
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 27 JANVIER 2021

N° RG 18/03831

N° Portalis DBV3-V-B7C-SULO

AFFAIRE :

A X

C/

SAS KONICA MINOLTA BUSINESS SOLUTIONS FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 août 2018 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de ST GERMAIN EN LAYE

Section : E

N° RG : F 17/00095

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Christian DELUCCA

Me A SEGOND

Copie numérique délivrée à :

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur A X

né le […] à […]

de nationalité française

[…]

[…]

Représentant : Me Christian DELUCCA, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de NICE, vestiaire : 168

APPELANT

****************

SAS KONICA MINOLTA BUSINESS SOLUTIONS FRANCE

N° SIRET : 302 695 614

[…]

[…]

[…]

Représentant : Me A SEGOND de la SCP PIGOT SEGOND – ASSOCIES, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: P0172

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 novembre 2020 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

Par jugement du 20 août 2018, le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye (section encadrement) a :

— dit que le licenciement de M. A X repose sur une cause réelle et sérieuse,

— condamné la société Konica Minolta Business Solutions à payer à M. X les sommes suivantes:

. 13 510,00 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

. 48 252,00 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

. 4 825,00 euros au titre des congés payés afférents,

. 1 200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Konica Minolta Business Solutions à payer les intérêts de droit sur les salaires et éléments de salaire à compter du 22 mars 2017, date de réception par le défendeur de la convocation à l’audience du bureau de conciliation et d’orientation et du prononcé pour le surplus,

— ordonné l’exécution provisoire totale en application de l’article 515 du code de procédure civile,

— débouté M. X du surplus de ses demandes,

— condamné la société Konica Minolta Business Solutions France aux éventuels dépens comprenant les frais d’exécution du présent jugement.

Par déclaration adressée au greffe le 4 septembre 2018, M. X a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 6 octobre 2020.

Par dernières conclusions remises au greffe le 22 septembre 2020, M. A X demande à la cour de :

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

— dire ainsi, que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

et en conséquence,

— condamner la société Konica Minolta Business Solutions France à lui verser les sommes suivantes :

. 48 252 euros au titre de son préavis de 6 mois,

. 4 825,20 euros au titre des congés payés afférents,

. 13 510 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

. 144 756 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par son licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

. 15 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

. 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

. les intérêts moratoires à compter de la date de saisine du conseil de prud’hommes,

— condamner la société Konica Minolta Business Solutions France aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe le 29 septembre 2020, la société Konica Minolta Business Solutions France demande à la cour de :

— la recevoir en ses écritures,

l’y disant bien fondée,

— confirmer le jugement déféré rendu le 20 août 2018 par le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye en ce qu’il a considéré que le licenciement notifié le 28 décembre 2016 n’était pas dénué de cause réelle et sérieuse,

— infirmer le jugement en ce qu’il a considéré que ledit licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et non une faute grave,

statuant à nouveau,

— dire bien fondé le licenciement prononcé le 28 décembre 2016,

en conséquence,

— débouter M. X l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

— condamner M. X à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X aux entiers dépens.

LA COUR,

La société Konica Minolta Business Solutions France a pour activité principale la commercialisation et de la maintenance de machines et d’équipements de bureaux.

M. A X a été engagé par la société Konica Minolta Business Solutions France, en qualité d’ingénieur commercial grands comptes par contrat de travail à durée indéterminée du 18 décembre 2009, à effet au 4 janvier 2010.

Il a bénéficié de plusieurs avenants et en dernier lieu, suivant avenant du 8 juin 2015 à effet au 1er avril 2015, occupait les fonctions de Responsable Développement et Coordinations Marchés Stratégiques.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective des industries métallurgiques et connexes de la région parisienne.

M. X percevait une rémunération brute mensuelle de 8 042,00 euros (moyenne des 12 derniers mois).

Par courrier du 12 septembre 2016, la société Konica Minolta Business Solutions France (ci-après société KMBSF) a informé l’ensemble des salariés de la nécessité, en raison de résultats non conformes aux attentes, de revoir le ' business model ' pour s’adapter aux nouveaux besoins des clients.

A l’issue de plusieurs entretiens, M. Y, directeur des ventes, par mail du 30 novembre 2016 ( pièce n°3) a indiqué à M. X que les nouvelles missions qui lui étaient confiées, et qu’il lui avait à nouveau précisées le matin même, ne nécessitaient pas la rédaction d’un avenant et qu’il n’en serait

donc pas destinataire.

Par lettre du 13 décembre 2016, M. X a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé le 21 décembre 2016.

Il a été licencié par lettre du 28 décembre 2016, pour faute grave dans les termes suivants :

« Ainsi, cet entretien préalable n’a pas été de nature à modifier notre appréciation de la situation et les explications que vous avez fournies ont confirmé l’attitude d’obstruction dont vous avez fait preuve ces derniers mois; obstruction que nous considérons comme injustifiée et qui témoigne d’une insubordination manifeste.

Cette mesure de licenciement est fondée sur les motifs suivants.

Vous êtes entré au sein de notre société le 4 janvier 2010 et y occupez, depuis le 1er avril 2015, le poste de Responsable Développement Coordination Marchés Stratégiques (RDCMS) sous la responsabilité de Monsieur C D – Directeur Marchés Publics.

Comme vous le savez et comme nous vous l’avons à maintes reprises expliqué, nous souhaitons procéder à des évolutions au sein de notre organisation et ce, pour répondre à des contraintes de marché et atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

Les collaborateurs participent à la mise en place de ces évolutions/aménagements d’organisation interne mais celles-ci demeurent décidées par l’entreprise. Les collaborateurs doivent donc s’inscrire dans ces évolutions – sous réserve naturellement de ne pas voir modifier de façon substantielle le contenu de leur poste.

Dans ce cadre, votre management a partagé avec vous, comme avec l’ensemble de l’équipe, dès le mois de septembre dernier, les changements devant intervenir.

Il s’agissait pour nous de vous associer pleinement à cette nécessaire prise en considération des exigences de notre métier.

Ils vous ont à maintes reprises expliquer l’intérêt d’une telle évolution pour l’entreprise, le contexte dans lequel celui-ci s’inscrivait et les raisons qui les conduisaient à aménager votre mission -étant précisé que cet aménagement faisait appel à vos compétences, votre expérience, votre formation et votre ancienneté au sein de la société KMBSF, dans le respect de vos obligations contractuelles.

Il était le témoin de la confiance que nous portions en vous.

Il ne s’agissait en aucun cas de modifier de façon fondamentale vos missions mais bien de mettre à profit l’expérience acquise pour réussir de nouveaux challenges. L’objectif était également que vous puissiez rebondir après l’échec de certaines affaires sur lesquelles vous aviez travaillé et non de vous «rétrograder» comme vous avez pu l’indiquer.

Malheureusement et malgré ces échanges qui se sont poursuivis sur plusieurs mois (parce que nous souhaitions votre adhésion), vous vous êtes inscrit dans une posture de blocage en refusant tout aménagement quel qu’il soit, ce que nous ne pouvons plus admettre. L’entreprise a en effet l’impérieuse nécessité d’avancer pour se positionner au plus vite face à la concurrence qui est, vous le savez, accrue.

Nous nous devons désormais de faire ce constat, à la lecture notamment de votre email du 1er décembre 2016 au terme duquel vous avez prétendu que :

- nous avions décidé de vous changer de fonction en vous rétrogradant ;

- nous avions choisi de vous imposer ce changement de force ;

- nous tentions de faire croire à une désobéissance pour nous séparer de vous ;

- nous tentions de vous placer dos au mur ; et que vous ne cèderiez pas à ces « pressions ».

Les propos que vous avez tenus par courriels puis lors de notre entrevue le 13 décembre dernier démontrent que vous vous êtes placés dans une logique d’opposition définitive et que vous n’accepterez pas la mission que l’entreprise souhaite vous confier alors que celle-ci s’inscrit dans votre contrat de travail et n’impose donc pas la régularisation d’un avenant comme vous le soutenez de manière obstinée.

En effet, vous êtes aujourd’hui RDCMS et êtes chargé, à ce titre, de promouvoir, développer et coordonner les marchés nationaux publics. Dans ce cadre, vous devez notamment :

- assurer un travail de lobbying et de suivi des ministères (ce que vous auriez continué à faire);

- accompagner et soutenir la réponse aux appels d’offres (ce que vous auriez continué à faire);

- travailler avec l’ensemble des services internes agissant sur les différents comptes (ce que vous auriez continué à faire) ;

- coordonner et suivre les marchés sur un périmètre national, pérenniser les relations commerciales (ce que vous auriez continué à faire) ;

- suivre les clients et développer les marchés (ce que vous auriez continué à faire) ;

- négocier et produire du chiffre d’affaires sur votre propre liste (ce que vous auriez continué à faire);

- détecter les opportunités de vente et renseigner les outils de pilotage de la société (ce que vous auriez continué à faire).

Ainsi, les aménagements envisagés consistent très précisément dans le périmètre de mission (DVD au lieu de DVI) et nous considérons que ces aménagements ne modifient pas de manière substantielle vos fonctions.

Nous rappelons que, face à votre refus, nous avons souhaité vous montrer notre volonté de vous inscrire dans cette évolution (et non de vous rétrograder) en vous accompagnant pendant les six premiers mois suivant cet aménagement : en effet, dans l’attente du dénouement de nouveaux marchés Résah DVI, nous étions favorables au versement de vos commissions sous la forme d’une avance.

Par ailleurs, nous vous avons communiqué les modes de calcul de votre rémunération variable à la suite de ces changements pour vous permettre de pleinement apprécier l’intérêt de cette évolution.

Ces explications n’ont pas permis de recueillir votre adhésion. Vous avez préféré maintenir votre position et persister dans votre demande tenant à la régularisation d’un avenant à votre contrat de travail en admettant, parallèlement, que vous n’auriez pas accepté un tel avenant, ce que nous ne pouvons accepter.

Nous avons donc été contraints de faire le constat d’une situation d’opposition et d’insubordination définitive de nature à porter atteinte à la cohésion de l’équipe, à ma mise en place de la stratégie de l’entreprise, à l’atteinte des objectifs que nous nous devons d’atteindre et au positionnement de l’entreprise face à la concurrence. Ce comportement n’est donc pas compatible avec les intérêts de l’entreprise et ne peut plus durer.

En conséquence, nous sommes contraints de notifier à votre encontre une mesure de licenciement pour faute grave.

Cette rupture s’impose d’autant plus que lors de l’entretien préalable, vous vous êtes montré incapable de la moindre remise en question.

Croyez bien que nous sommes les premiers à le déplorer.»

Le 17 juillet 2016, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye pour contester son licenciement pour faute grave et le dire dépourvu de cause réelle et sérieuse et solliciter le paiement de diverses sommes de nature salariale et de nature indemnitaire.

Sur la rupture :

M. X expose que la société Konica Minolta Business Solutions France l’a d’autorité rétrogradé en le ramenant au poste qu’il occupait deux années auparavant, celui d’ingénieur commercial, et en le privant de toute fonction de management. Il ajoute que le nouveau poste modifiait totalement la structure de sa rémunération variable ce qui constituait d’ailleurs le véritable motif de sa rétrogradation.

Il soutient qu’un avenant aurait dû lui être proposé et que, dans ce contexte, son refus était légitime et ne constituait ni une insubordination ni une obstruction.

La société Konica Minolta Business Solutions France réplique que, dans le cadre de la réorganisation, les missions de tous les salariés du Département des Marchés Publics devaient évoluer et que M. X, malgré de nombreux entretiens et l’engagement de versements de commissions sous forme d’avance pendant six mois, s’est obstiné à refuser ce qui ne constituait qu’une évolution de ses missions.

Elle ajoute que le contrat de travail prévoyait l’acceptation d’une remise en cause régulière du plan de rémunération variable.

Elle affirme que l’opposition injustifiée de M. X E une insubordination.

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; la charge de la preuve incombe à l’employeur qui l’invoque.

Il est constant que l’employeur ne peut imposer au salarié une modification de son contrat de travail.

Par mail du 7 novembre 2016 à 13h01 ( pièce 23) M. Z a rappelé à M. X que, le marché de la santé étant un des axes stratégiques, la société souhaitait faire un focus particulier sur le marché du Résah afin de développer les entités régionales DVR et DVI et l’a informé des modifications le concernant :

' En ce qui te concerne, en tant que IC Grands marchés Stratégiques II, nous avons décidé que tu reprendras à compter du 7 novembre, la gestion de la majeure partie de la liste des comptes que suit actuellement F G (cette liste te sera bien évidemment précisée par ton management), plus le suivi et le développement du marché du Résha sur le périmètre DVI ( hors zone DBC/OMR). Ceci afin de couvrir égalament ce potentiel de marché en région, potentiel actuellement mal couvert.

Bien sûr tu conserves la gestion des comptes Ministériels dont tu assurais le suivi et le développement commercial.

Nous te précisons que, comme pour tes missions actuelles, cette nouvelle mission concernant le Résah nécessitera des déplacements fréquents et une parfaite coordination – non seulement avec nos services internes, avec le responsable du compte mais également avec nos partenaires de la DVI- qui devront, sur ces zones, assurer un certain nombre d’actions techniques et /ou commerciales.

Bien évidemment, nous t’accompagnerons au quotidien et je te confirme d’ores et déjà que j’irai avec toi présenter ce nouveau focus marché à H I afin de répertorier les différents cas de figure que nous allons devoir élaborer sur le périmètre DVI hors DBC/OMR.

Comme nous l’avons déjà évoqué, la première priorité consistera à établir une cartographie des établissements potentiellement bénéfciaires et déterminer leur date de renouvellement afin de les convaincre de passer, au plus tôt par le marché Résah.

Nous aurons d’autres occasions, ainsi que ton management, d’échanger précisément sur ces projets pour lesquels nous comptons sur toi et ton expérience.

Nous te précisons que, dans l’attente du dénouement de nouveaux marchés public Résah-DVI, nous procèderons au versement de tes commissions sous la forme d’une avance sur les six mois à venir et ce, même si ta mission reste globalement la même (suivi des comptes ministériels) et que ta liste de comptes est enrichie de nouveaux comptes parisiens. '

Par mail du 7 novembre à 17h25, M. X a indiqué ne pas pouvoir accepter en l’état la mission car elle comportait des données peu claires sur ses fonctions ( Responsable de développement ou Ingénieur commercial, nature des déplacements, nature et base de calculs des commisions) et a demandé la transmission d’un avenant.

Par mail du 25 novembre 2016, M. Y a confirmé les informations déjà énoncées dans le mail du 7 novembre en y ajoutant le mode de calcul de la prime.

Par mail du 28 novembre, M. X a indiqué qu’en dépit de sa demande il n’avait toujours pas reçu d’avenant et qu’il refusait la nouvelle mission proposée qui constituait une rétrogradation.

Par mail du 30 novembre, M. Y a maintenu sa position en lui précisant qu’il était impératif qu’il se remette au travail car les dossiers s’entassaient et que les nombreux allers et retours faisaient perdre un temps précieux et qu’il estimait que la discussion était close.

Par mail du 1er décembre, M. X a fait part de sa surprise de voir qu’une rétrogradation lui était imposée sans passer par un avenant et a indiqué qu’il ne céderait pas aux pressions, refusant de revenir en arrière après des années d’effort. Il a précisé qu’il continuait de travailler et qu’il aimerait bien que l’on n’empêche pas de le faire et que l’on rétablisse ses accès à la liste-Marketing RESAH.

Il doit être constaté que la nouvelle mission de M. X, qui était depuis le 1er avril 2015 Responsable Développement et coordination marchés stratégiques, dispose du titre de Ingénieur Commercial Grands marchés Stratégiques II.

D’après l’organigramme (pièce n°26), M. X en exerçant la fonction de Responsable Développement et Coordination Marchés Stratégiques appartenait à une équipe de quatre salariés, dont une assistante commerciale, qui réalisait le pilotage du marché et était directement rattachée à la direction des ventes. Il était désigné comme Responsable Développement et Coordination Nationale sous l’autorité du Responsable Développement Marchés Publics lui-même sous l’autorité du Directeur Marché Public.

Il est donc mal fondé à se prévaloir de la fiche de poste de Responsable Développement Marchés Publics ( pièce n°27) qui ne correspond pas à son ancien poste.

En revanche, à juste titre, il affirme que faisant partie d’une équipe de pilotage il n’exerçait pas à titre principal une activité commerciale caractérisée par la prospection téléphonique, la réponse aux appels d’offre, l’animation des démonstrations produits, tâches qui correspondent aux fonctions d’Ingénieur Commercial Grands Marchés Stratégiques.( Pièce n°28)

Egalement à bon droit, il souligne que, d’après l’organigramme, l’équipe de pilotage participait à la coordination des huit directions régionales.

Aussi, sur les organigrammes transmis à l’UCANSS il est positionné nommément comme faisant partie de la Direction des Ventes Nationales et Comptes Stragégiques.

D’après le document ' Politique Véhicules ' (pièce n°33) les ingénieurs commerciaux SI (catégorie supérieure des IC) ont droit à un véhicule catégorie G alors que le Responsable développement a droit à un véhicule catégorie E. S’il n’est pas établi que M. X aurait subi un changement de véhicule, ces attributions montrent que le statut d’ingénieur commercial, même SI, est considéré dans la société comme inférieur à celui de Responsable Développement.

En ce qui concerne la rémunération variable, les trois avenants successifs n’ont pas modifié l’article 5 du contrat initial sur les primes variables qui, notamment, prévoit que les principes et modalités des primes variables sont définis dans le cadre du plan de rémunération dont les modalités précises sont portées à la connaissance de M. X régulièrement par notes de sa hiérarchie et que l’acceptation du contrat de travail comporte l’acceptation d’une remise en cause régulière du plan de rémunération variable.

M. X ne peut donc se prévaloir d’une modification du mode de rémunération variable.

Cependant, l’ensemble des éléments décrits montre que la nouvelle mission confiée à M. X l’affectait à des missions uniquement commerciales alors qu’en qualité de Responsable Développement et Coordination Nationale il assumait une fonction de pilotage de nature différente.

Cette nouvelle mission étant constitutive d’une modification du contrat de travail elle devait recevoir l’accord du salarié et être formalisée par un avenant. D’ailleurs un avenant du 8 juin 2015 avait confirmé sa nomination au poste de Responsable Développement et Coordination marchés Stratégiques après qu’il ait exercé la fonction d’Ingénieur Commercial Grands Marchés Stratégiques 2 par l’effet d’un avenant du 1er juillet 2013.

Dès lors M. X était en droit de refuser la nouvelle mission. Les termes de ses mails de refus n’étant ni excessifs, ni injurieux, ni diffamatoires, l’insubordination et l’obstruction reprochées ne sont pas établies.

Il convient donc, infirmant le jugement, de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :

M. X qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement.

Au regard de son âge au moment du licenciement, 56 ans, de son ancienneté d’environ 7 ans dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et de la justification de ce qu’il a perçu

les allocations Pôle emploi en tous les cas jusqu’au mois de mai 2018, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 65 000 euros.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Konica Minolta Business Solutions France à verser au salarié une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents dont il a été indûment privé et dont les montants ne sont pas critiqués.

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement abusif :

Au soutien de cette demande, M. X ne soumet à la cour aucun moyen de droit ou de fait établissant qu’il a subi un préjudice distinct de celui réparé par l’allocation d’une indemnité réparant le préjudice né de la perte de son emploi.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de ce chef.

Sur les intérêts :

La créance indemnitaire portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Pour le surplus, le jugement sera confirmé.

Sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

Il est inéquitable de laisser à la charge de M. X les frais par lui exposés non compris dans les dépens au titre des frais exposés en première instance et en cause d’appel à hauteur de

3 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Konica Minolta Business Solutions France à payer à M. X la somme de 65 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

ORDONNE d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités,

CONFIRME pour le surplus le jugement,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Konica Minolta Business Solutions France à payer à M. X la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d’appel,

DÉBOUTE la société Konica Minolta Business Solutions France de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Konica Minolta Business Solutions France aux entiers dépens.

- prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

[…]

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 27 janvier 2021, n° 18/03831