Cour d'appel de Versailles, 4e chambre 2e section, 17 février 2021, n° 18/07009
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 4e ch. 2e sect., 17 févr. 2021, n° 18/07009 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 18/07009 |
Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Versailles, 12 septembre 2018, N° 17/00341 |
Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : Agnès BODARD-HERMANT, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties :
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 72D
4e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 17 FEVRIER 2021
N° RG 18/07009 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SWSX
AFFAIRE :
M. B X
…
C/
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Septembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° Chambre : 3e
N° RG : 17/00341
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur B X
né le […] à […]
[…]
[…]
Madame C D épouse X
née le […] à […]
[…]
[…]
Représentant : Maître Claude LEGOND de la SCP LEGOND & ASSOCIES, avocat postulant et plaidant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 007
APPELANTS
****************
Société TS IMMO représentée par son gérant en exercice Monsieur Y
N° SIRET : 513 746 206 R.C.S. Versailles
Ayant son siège […]
[…]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Société TS MOTO repérsentée par son président en exercice
N° SIRET : 514 581 925 R.C.S. Versailles
Ayant son siège […]
[…]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Aliénor DE BROISSIA de la SELARL CONCORDE AVOCATS, avocat postulant, au barreau de VERSAILLES – N° du dossier 1702378 – vestiaire : 407
Représentant : Maître Rodolphe LOCTIN de la SELEURL Cabinet Rodolphe LOCTIN, avocat plaidant, au barreau de PARIS, vestiaire : E0283 -
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 20 Janvier 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Agnès BODAD-HERMANT Présidente et Madame Valentine BUCK, Conseillère, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseillère,
Madame Valentine BUCK, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame A DUCAMIN,
FAITS ET PROCEDURE,
M. et Mme X sont propriétaires d’un appartement dans un ensemble immobilier sis 37,
[…], constitué par les lots 10-11, 12-13 et 14 du règlement de
copropriété, pour l’avoir acquis le 25 janvier 2002.
La SCI TS Immo est propriétaire d’un local commercial situé dans cet immeuble au rez-de-chaussée,
donné à bail à la société TS Moto.
Considérant que la société TS Moto s’est appropriée la cour commune pour y entreposer batteries
usagées, bidons d’huile, pneus, ferrailles et tout autre objet issus de son activité, M. et Mme X
ont assigné le 5 janvier 2017 la SCI TS Immo et la société TS Moto devant le tribunal de grande
instance de Versailles aux fins de faire cesser ce trouble ainsi que l’activité de réparation de
motocycles de la société TS Moto, activité contraire au règlement de copropriété.
Par jugement rendu le 13 septembre 2018 (RG n°17/00341), le tribunal de grande instance de
Versailles a :
— Déclaré recevable l’action de M. et Mme X';
— Débouté M. et Mme X de leur demande tendant à ce qu’il soit interdit à la société TS Moto
d’exercer l’activité de réparation de motocycles';
— Ordonné à la SCI TS Immo et à son locataire la société TS Moto de ne pas encombrer, par la
présence d’objets et matériels usagés, la cour commune de l’immeuble […] à
VERSAILLES, et ce sous astreinte provisoire de 200 euros par infraction constatée';
— Débouté M. et Mme X du surplus de leurs demandes';
— Débouté les sociétés TS Immo et TS Moto de leur demande reconventionnelle de dommages et
intérêts pour procédure abusive';
— Ordonné l’exécution provisoire';
— Condamné in solidum la SAS TS Moto et la SCI TS Immo à payer à M. et Mme X la somme
de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par déclaration enregistrée le 12 octobre 2018, M. et Mme X ont interjeté appel.
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 21 mai 2019, M. et Mme X demandent
à la cour de ':
— Déclarer recevable et bien fondée leur action';
— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il n’a pas fait droit à leur demande d’interdire l’activité de
réparation de motocycles de la société TS Moto et en ce qu’il les a déboutés de leur demande de
dommages et intérêt';
Et statuant à nouveau de ces chefs,
— Interdire à la société TS Moto à l’enseigne Manicourt Moto d’exercer l’activité de réparations de
motos et tous types d’engins à moteur et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter de la
signification du jugement à intervenir';
— Condamner solidairement la société TS Immo et la société TS Moto à leur payer la somme de 40
000 euros en réparation du préjudice subi';
— Confirmer le jugement pour le surplus';
— Condamner solidairement la société TS Immo et la société TS Moto à la somme de 4 000 euros au
titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 25 novembre 2020, la SCI TS Immo et la
société TS Moto sollicitent de':
— Déclarer recevables et bien fondées leurs demandes, fins et prétentions';
— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
— déclaré recevable l’action de M. et Mme X, au titre de leur demande tendant à ce qu’il soit
interdit à la société TS Moto d’exercer l’activité de réparation de motocycles,
— condamné in solidum la société TS Moto et la SCI TS Immo à payer à M. et Mme X la
somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamné in solidum la société TS Moto et la SCI TS Immo aux entiers dépens de l’instance.
Et, statuant à nouveau :
— Dire et juger irrecevables M. et Mme X en leurs demandes tendant à ce qu’il soit interdit à la
société TS Moto d’exercer l’activité de réparation de motocycles, comme se heurtant à la fin de
non-recevoir du fait de la prescription de l’action ;
— Condamner solidairement M, et Mme X, succombant en leur appel, à payer à la SCI TS
Immo et la société TS Moto la somme de 4 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de
procédure civile ;
— Condamner solidairement M. et Mme X aux entiers dépens.
Subsidiairement, il est sollicité la confirmation du jugement en ce qu’il a :
— Débouté M. et Mme X de leur demande tendant à ce qu’il soit interdit à la société TS MOTO
d’exercer l’activité de réparation de motocycles,
— Débouté M. et Mme X du surplus de leurs demandes.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à la décision et aux
conclusions susvisées pour plus ample exposé du litige.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2020.
MOTIFS
La qualité et l’intérêt à agir de M. et Mme X et la question du défaut d’information du syndic
n’étant pas contestées, il n’y a pas lieu d’examiner leurs développements à ce sujet.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action de M. et Mme X
La société TS Moto et la SCI Immo soutiennent que la prescription n’est pas interrompue du fait des
ventes successives du lot litigieux, que l’activité de "réparation de motocycles" est exercée par les
exploitants successifs de l’enseigne Manicourt Moto de manière continue et similaire depuis le 1er
avril 1986 et que, dans ces conditions, l’action de M. et Mme X est irrecevable car prescrite.
M. et Mme X répliquent que le délai décennal de la prescription a comme point de départ la
survenance des faits qui sont la cause génératrice de l’action. Or, ils considèrent que la société TS
Moto qui se prévaut de cette prescription, ne justifie pas de la date d’apparition du fait générateur de
l’action. Ils ajoutent que le point de départ du fait générateur de l’action des époux X débute à
la date de l’immatriculation de la société TS Moto, soit le 2 septembre 2009.
Ils précisent que le local commercial était auparavant occupé par la société Manicourt Moto, qui ne
réparait pas ses motos dans son local commercial de vente, mais dans son second établissement à
Meulan. A ce sujet, ils estiment que les attestations produites par la société TS Moto sont erronées.
Ils font valoir que le local était vacant du 5 août 2009 au 2 septembre 2009, que la société TS Moto a
procédé à des travaux d’aménagement du local commercial qui ont permis de changer l’occupation de
l’espace dans le local, que son activité a donc en réalité démarré en octobre 2009, après la réalisation
des travaux.
Sur ce,
Selon l’article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de la loi n°2014-366
du 24 mars 2014, sans préjudice de l’application des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les
actions personnelles nées de l’application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un
copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.
Comme l’a très justement retenu le tribunal, « il est établi par les pièces produites que la SCI TS
Immo a acquis le local par acte de vente notarié du 3 septembre 2009 et que la société TS Moto s’est
immatriculée au RCS de Versailles le même jour, date à laquelle elle a nécessairement commencé à
exercer son activité commerciale.
Il est dès lors indifférent que les sociétés défenderesses cherchent à démontrer que l’activité de
réparation de motocycles a débuté dès 1986 et que l’occupation de la cour commune de l’immeuble
perdure depuis cette date, ou à tout le moins depuis 2001, dans la mesure où le point de départ de la
prescription décennale est le fait générateur de l’action de M. et Mme X, à savoir l’activité de
réparation exercée par la société TS Moto dans le local commercial (…).
En effet, il convient de souligner qu’une même activité professionnelle peut générer ou non des
nuisances en fonction de l’aménagement du local, des horaires de cette activité, des modalités de son
exercice et de son volume d’activité. La société TS Moto ne peut donc utilement se prévaloir de
l’activité de ses prédécesseurs et des fonctions dans lesquelles cette activité était exercée pour
demander le bénéfice du mécanisme de la prescription décennale.
Au surplus, ayant acquis leur appartement dans la copropriété par acte notarié du 25 janvier 2002,
les époux X ont pu utilement apprécier les éventuelles nuisances découlant de l’activité de la
défenderesse à compter de son installation le 3 septembre 2009 ».
Ayant assigné la SCI TS Immo et la société TS Moto le 5 janvier 2017, l’action de M. et Mme
X tendant à ce qu’il soit interdit à la société TS Moto d’exercer l’activité de réparation de
motocycles n’est donc pas prescrite. La fin de non recevoir sera alors rejetée et le jugement confirmé
sur ce point.
Sur la demande de cessation de l’activité de réparation de motocycles de la société TS Moto
M. et Mme X exposent avoir alerté le syndic et les copropriétaires sur la dangerosité de
l’activité de la société TS Moto.
Ils considèrent que l’activité de réparation de motocycles est une activité par nature dangereuse et
présente des risques chimiques, de pollution, électriques,
Ils font valoir que des déchets inflammables sont désormais stockés dans la cave sous le local, à la
suite du jugement, et non plus dans la cour.
Ils reprochent à la société TS Moto de n’avoir jamais fourni une copie de sa police d’assurance
annuelle prouvant, depuis sa création le 2 septembre 2009, qu’elle était bien assurée pour cette
activité dangereuse de réparation mécanique et que sa police couvrait bien la réparation des
dommages en cas d’incendie, ni un certificat annuel de conformité de ses installations par un bureau
d’expertise indépendant montrant que ces installations étaient bien conformes aux règles en vigueur
pour l’exercice de ce type d’activité dangereuse notamment s’agissant du stockage de produits
dangereux dans une cave située sous l’atelier et sans accès extérieur.
La SCI TS Immo et la société TS Moto rétorquent que l’activité commerciale ne présente pas de
risque élevé d’incendie, que M. et Mme X ne prouvent pas qu'in concreto cette activité crèèe
des nuisances. La société TS Moto précise louer un box extérieur pour stocker son matériel et
soutient ne stocker aucun produit dangereux. Elle produit une attestation d’assurance.
Sur ce,
L’article 10 du règlement de copropriété établi le 26 octobre 1983 prévoit :
' Les appartements ne pourront être occupés que bourgeoisement à l’exception des locaux situés au
rez-de-chaussée qui pourront être occupés commercialement, pourvu que le commerce ou l’industrie
exploité dans les lieux ne constitue pas un établissement dangereux ou insalubre ou de nature à
incommoder par le bruit ou les odeurs les personnes habitant l’immeuble.'
Il en résulte que le réglement n’interdit pas expressément l’activité de réparation de motocycles.
Par ailleurs, M. et Mme X ne produisent aucun élément permettant de caractériser des
nuisances sonores ou olfactives résultant de cette activité, son caractère dangereux qui ne peut
s’apprécier qu'in concreto, l’activité de réparation de motocycles n’étant pas par nature dangereuse et
les constats d’huissier versés aux débats ne concernant que la situation désormais résolue de
l’occupation de la cour commune.
Succombant ainsi dans la preuve qui leur incombe, M. et Mme X seront déboutés de leur
demande tendant à ce qu’il soit interdit à la société TS Moto d’exercer l’activité de réparations de
motos et tous types d’engins à moteur, sous astreinte. Le jugement sera donc confirmé.
Sur la demande d’indemnisation du préjudice subi
M. et Mme X sollicitent une indemnisation de leur préjudice. Ils évaluent leurs préjudices à la
somme de 40 000 euros correspondant à la perte de la valeur vénale de leur appartement de l’ordre de
400 euros le m² , les candidats à la location invoquant l’état de la cour, sa dangerosité pour des
enfants et celle de l’activité de réparations de motos dans un immeuble d’habitation.
La SCI TS Immo et la société TS Moto considèrent que le préjudice allégué n’est pas justifié et qu’au
demeurant de nouveaux locataires ont emménagé dans l’appartement de M. et Mme X.
Sur ce,
Il n’est pas contesté que la société TS Moto n’entrepose plus de matériel dans la cour commune. En
outre, l’action engagée pour interdire l’activité de la société TS Moto a été jugée malfondée. Enfin,
M. Et Mme X ne caractériset aucune une faute de la SCI TS Immo ou de la société TS Moto à
l’origine d’un préjudice au demeurant simplément allégué. Le jugement du tribunal, qui les avait
déboutés, sera donc confirmé.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Succombant dans leur action, M.et Mme X seront déboutés de leur demande au titre de l’article
700 du code de procédure civile. Ils seront condamnés aux dépens d’appel et à payer respectivement
la somme de 1 000 euros à la SCI TS Immo et celle de 1 000 euros à la société TS Moto au titre des
frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, par arrêt contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Déboute M. et Mme X de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. et Mme X à payer respectivement la somme de 1 000 euros à la SCI TS Immo
et la somme de 1 000 euros à la société TS Moto au titre des frais irrépétibles.
Condamne M. et Mme X aux dépens d’appel.
— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été
préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de
procédure civile.
— signé par Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente, et par Madame A
DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
Textes cités dans la décision