Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 29 mars 2022, n° 21/06153

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 13e ch., 29 mars 2022, n° 21/06153
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 21/06153
Décision précédente : Tribunal de commerce de Pontoise, 3 octobre 2021, N° 2021L00814
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES


Code nac : 4ID

13e chambre

ARRET N°


REPUTE


CONTRADICTOIRE


DU 29 MARS 2022


N° RG 21/06153


N° Portalis


DBV3-V-B7F-UY2E


AFFAIRE :

Z X


C/

LE PROCUREUR GENERAL



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Octobre 2021 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE


N° chambre :


N° Section :


N° RG : 2021L00814


Expéditions exécutoires


Expéditions


Copies

délivrées le :

à :


Me Stéphanie ARENA
Ministère Public


T.C. PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT DEUX,


La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur Z X

né le […] à Eaubonne

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637

Représentant : Me Albert SERFATY de la SELARL DORLEAC AZOULAY ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R277 -

APPELANT

****************

LE PROCUREUR GENERAL


POLE ECOFI – COUR D’APPEL DE VERSAILLES

[…]

[…]

S.E.L.A.R.L. MMJ prise en la personne de Me B Y ès qualités de liquidateur de la société TECHNOLOGIES & COSMETIQUES DENTAIRES

[…]

[…]

INTIMES

****************

Composition de la cour :


L’affaire a été débattue à l’audience publique du 07 Février 2022, Madame F-G
BAUMANN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame F-G BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,


Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN

En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l’avis du 13/10/2021 a été transmis le même jour au greffe par la voie électronique.


La SARL Technologies & cosmétiques dentaires, dirigée par M. Z X depuis son immatriculation en janvier 2008, exploitait une activité d’étude, de préparation, réalisation et fabrication de tous types de prothèses dentaires


Par jugement du 24 mai 2019, le tribunal de commerce de Pontoise saisi par M. X, après avoir prononcé la résolution du plan arrêté par jugement du 9 décembre 2011 et exécuté sur les six premiers dividendes, a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société


Technologies & cosmétiques dentaires, désigné la Selarl MMJ, prise en la personne de maître


B Y, en qualité de liquidateur judiciaire et fixé la date de cessation des paiements au 9 décembre 2018.


Par jugement contradictoire assorti de l’exécution provisoire du 4 octobre 2021, le tribunal de commerce Pontoise, saisi par le ministère public, a :


- déclaré M. le procureur de la République recevable et bien fondé en sa demande d’interdiction professionnelle à l’encontre de M. X ;


- condamné M. X à une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale pour une durée de 12 ans ;


- condamné M. X aux dépens.


Le tribunal a retenu l’absence de tenue d’une comptabilité complète.


Par déclaration du 11 octobre 2021, M. X a interjeté appel du jugement. La déclaration d’appel a été signifiée le 21 octobre 2021, par acte d’huissier remis à personne habilitée, à la Selarl MMJ, ès qualités, qui n’a pas constitué avocat.


Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 17 novembre 2021 puis signifiées, par acte d’huissier remis à personne habilitée, le 24 novembre 2021 à la Selarl MMJ, ès qualités, M. X demande à la cour de :
- prononcer la 'révocation’ du jugement ;


Statuant à nouveau,


- déclarer qu’il n’a commis aucune faute de gestion et n’encourt aucune interdiction de gérer.

M. X, pour conclure dans les motifs de ses écritures à la réformation totale du jugement, expose tout d’abord qu’il est 'un bon gestionnaire’ en relatant dans quelles conditions la société qu’il a créée en 2008 est parvenue à rembourser son plan de redressement dont il a sollicité, en janvier 2017,

l’aménagement pour lui permettre de régler les cinquième et sixième annuités ; il souligne que durant toute cette période la comptabilité a été tenue et annuellement envoyée au commissaire à l’exécution du plan.


Il conteste le manquement reproché en exposant que comme le relève le rapport du liquidateur judiciaire du 20 septembre 2019, il lui a transmis les bilans 2016 et 2017 et qu’il a été coopérant, seule l’absence de transmission du dernier bilan clos au 30 octobre 2018 lui étant reprochée ; il relève que la communication de cette pièce a été sollicitée par le liquidateur par un courrier simple sans autre relance entre juin et septembre 2019, expliquant qu’à cette période il s’était séparé de son épouse à laquelle il avait laissé la jouissance du domicile conjugal et que ce courrier ne lui a pas été transmis.


Il précise que son conseil, par mail du 27 juillet 2021, a adressé au liquidateur judiciaire les comptes clos au 31 octobre 2018 et la preuve de leur télétransmission par l’expert-comptable dès le 7 juin

2019, observant que maître Y n’a présenté aucune observation à la réception de ces comptes, de sorte qu’aucune interdiction de gérer ne doit être prononcée à son encontre.


Il ajoute que sa situation personnelle est encore obérée des suites de la procédure collective dont il assume pécuniairement une partie des conséquences dès lors qu’il a été condamné, par arrêt du 8 octobre 2015, au paiement de la somme de 205 964 euros en sa qualité de caution de la société liquidée et que son appartement a fait l’objet d’une saisie immobilière. Il précise que la procédure de divorce est toujours en cours et que compte tenu de ses difficultés à trouver un emploi salarié, il s’est réinstallé en qualité de prothésiste dentaire via la société 'Dental facturing’ dont il est associé et gérant, poste dont il a démissionné à la suite de la sanction prononcée qu’il estime disproportionnée et infondée.


Dans son avis notifié par RPVA le 13 octobre 2021, le ministère public demande à la cour de réformer le jugement. Il observe que compte tenu de la démonstration d’un unique grief tiré de

l’absence de tenue d’une comptabilité complète, la sanction prononcée est particulièrement sévère alors que le parquet avait requis une interdiction de gérer pendant trois ans ; une interdiction de gérer de deux ans lui paraît plus juste et proportionnée.


Par courrier daté du 25 novembre 2021, communiqué à l’appelant et au ministère public, la Selarl


MMJ, ès qualités, a transmis son rapport en date du 20 septembre 2019 que le ministère public a également communiqué par le RPVA.


L’ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2022.


Le conseil de M. X, autorisé par la cour, a adressé les éléments justifiant des modifications apportées dans la gestion des sociétés qu’il dirigeait, outre sa pièce d’identité.


Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,


Aux termes des articles L. 653-1 et L. 653-5 6° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale, contre lequel a été relevé le fait d’avoir fait disparaître des documents comptables, de ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou d’avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables. En application de

l’article L.653-8 du même code, il peut être prononcé à la place de la faillite personnelle,

l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.


Les articles L.123-12 à L.123-28 et R.123-172 à R.123-209 du code de commerce imposent aux commerçants personnes physiques et personnes morales la tenue d’une comptabilité donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise, au moyen de la tenue d’un livre journal, d’un grand livre et d’un livre d’inventaire ; les mouvements doivent être enregistrés chronologiquement au jour le jour et non en fin d’exercice, seuls les comptes annuels étant établis à la clôture de l’exercice.


Ainsi l’établissement d’une comptabilité complète d’une société ne se limite pas à la remise annuelle des bilans et comptes de résultat mais suppose l’établissement d’une comptabilité quotidienne au travers des éléments comptables précités.


Il ressort des rapports du liquidateur judiciaire en date des 20 et 23 septembre 2019, que M. X, dont il note qu’il a été coopérant, lui a transmis les comptes de la société liquidée pour les exercices

2014 à 2017 ; cependant, le liquidateur judiciaire, ainsi qu’il le relève dans ces deux rapports, n’a reçu ni le livre journal, ni le livre d’inventaire ni le grand livre pour chacun de ses exercices ; de même pour l’exercice du 1er novembre 2017 au 31 octobre 2018, seuls les comptes annuels ont été transmis en juillet 2021 par le conseil de M. X au liquidateur judiciaire qui en a accusé réception.


Il n’est ainsi pas justifié de l’établissement d’une comptabilité complète et régulière par M. X alors qu’il s’agit d’une obligation essentielle du dirigeant de sorte que le manquement est caractérisé.
La sanction doit être proportionnée à la gravité de la faute commise.

M. X qui est âgé de 51 ans et qui justifie de son implication dans le suivi du plan de redressement judiciaire de la société Technologies & cosmétiques qu’il a créée en 2008 et dont il a lui-même sollicité la résolution lorsqu’il a constaté que la société ne pouvait plus assurer le paiement des dividendes annuels, justifie que le 16 novembre 2021, les associés de la SARL Académie de céramique ont décidé de sa dissolution anticipée en le nommant liquidateur et que la société Global advanced dentistry laboratory dont il était le gérant a été radiée le 9 février 2017.


Il prouve également que le 16 novembre 2021, en sa qualité d’associé unique de la SARL Dental manufactory Paris qui a débuté son activité le 22 décembre 2018, il a procédé à son remplacement en nommant Mme D E en qualité de gérante de la société.


Au regard de l’ensemble de ces éléments, de la nature de la faute retenue mais aussi de

l’établissement d’une partie de la comptabilité de la société liquidée, il convient, infirmant le jugement, de condamner M. X à une interdiction de gérer de deux ans et de l’autoriser, dès à présent, à assurer la gérance de droit de la société Dental manufactory Paris.

PAR CES MOTIFS


Statuant par arrêt réputé contradictoire,


Infirme le jugement du 4 octobre 2021 ;


Statuant à nouveau,


Prononce pour une durée de deux ans à l’encontre de M. Z, H-F, X, né le […]

1970 à Eaubonne (95), de nationalité française, demeurant […]


Asnières-sur-Seine, une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale à la seule exception de la SARL Dental manufactory Paris, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 847 548 534 ;


Dit qu’en application des articles 768 et R.69-9° du code de procédure pénale, la présente décision sera transmise par le greffier de la cour d’appel au service du casier judiciaire après visa du ministère public ;


Dit qu’en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au Fichier national automatisé des interdits de gérer, tenu sous la responsabilité du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce auprès duquel la personne inscrite pourra exercer ses droits d’accès et de rectification prévus par les articles 15 et 16 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement.


Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.


Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Le greffier, La présidente,
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