Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 17 novembre 2022, n° 21/01584

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 3e ch., 17 nov. 2022, n° 21/01584
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 21/01584
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Nanterre, 18 février 2021, N° 19/05042
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 3 décembre 2022
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Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 59D

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 NOVEMBRE 2022

N° RG 21/01584

N° Portalis DBV3-V-B7F-ULXD

AFFAIRE :

[E], [K] [U]

C/

Mutuelle LA CARAC

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Février 2021 par le TJ de Nanterre

N° Chambre : 6

N° RG : 19/05042

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Stéphanie TERIITEHAU

Me Franck LAFON

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [E], [K] [U]

né le 01 Novembre 1949 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 619 – N° du dossier 20210091

Représentant : Me Anne christine BARRATIER, Plaidant, avocat au barreau de BASTIA, vestiaire : G3

APPELANT

****************

MUTUELLE LA CARAC

N° SIRET : 775 691 165

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20210109

Représentant : Me Cécile DEUBEL du cabinet de Me Jean DE CALBIAC de la SELAS AVANTY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Septembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant bulletins du 3 décembre 2004, [P] [R] épouse [N] et [F] [N] ont adhéré au contrat 'Volontés Obsèques Carac’ option Épargne, proposé par la mutuelle d’épargne de retraite et de prévoyance Carac (ci-après, la Carac), prévoyant un versement initial de la somme de 5 675 euros chacun.

Lors de leur adhésion, [P] et [F] [N] ont tous deux désigné en qualité de bénéficiaire l’entreprise de pompes funèbres RSP Rebillon, le solde éventuel devant revenir à leur conjoint.

Par lettres recommandées avec avis de réception du 24 février 2016, reçues le 29 février 2016, [P] et [F] [N] ont informé la Carac de leur changement d’adresse et de la modification de la clause bénéficiaire de leur contrat respectif au profit de M. [E] [K] [U], né le 1er novembre 1949 à [Localité 4].

Par lettre simple du 3 mars 1996, la Carac a accusé réception des demandes de [P] et [F] [N] et leur a demandé de lui transmettre une photocopie recto-verso de leurs pièces d’identité ainsi que le numéro des garanties concernées par ce changement.

[F] [N] est décédé le 4 mars 2016.

[P] [N] est décédée le 14 juin 2017.

Par lettres des 6 avril 2016 et 3 juillet 2017, le notaire chargé de la succession de [P] et [F] [N] a saisi la Carac afin de connaître les bénéficiaires de leurs contrats obsèques, puis d’obtenir le versement des sommes dues à M. [U] au titre de ceux-ci.

Par lettre du 12 octobre 2016, la Carac a informé le notaire que la garantie VOE0000212 avait été partiellement mise en 'uvre par le paiement aux pompes funèbres de la somme de 3 946, 69 euros le 27 juillet 2016.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 23 août 2017, reçue le 25 août suivant, M. [U] a revendiqué sa qualité de bénéficiaire unique des garanties souscrites par [P] et [F] [N] et a réclamé le paiement des sommes dues.

Par lettres des 1er et 29 mars 2018, la Carac a indiqué à M. [U] que [P] et [F] [N] n’avaient pas valablement modifié la clause bénéficiaire de leur contrat, de sorte que M. [U] n’était pas bénéficiaire des garanties.

Le 13 juillet 2018, M. [U] a fait assigner la Carac devant le tribunal de grande instance de Bastia aux fins de condamnation au paiement des sommes prévues aux deux contrats litigieux.

Par ordonnance du 1er mars 2019, le juge de la mise en état a fait droit à l’exception d’incompétence territoriale soulevée par la Carac et a renvoyé l’affaire au tribunal de grande instance de Nanterre.

Par jugement du 19 février 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

— débouté M. [U] de l’intégralité de ses demandes,

— condamné M. [U] à payer à la Carac la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné M. [U] aux dépens de l’instance.

Par acte du 9 mars 2021, M. [U] a interjeté appel et demande à la cour, par dernières écritures du 6 décembre 2021, de :

— déclarer recevable et bien fondé son appel,

Y faisant droit,

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [U] de l’intégralité de ses demandes et l’a condamné au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’instance,

Statuant à nouveau,

— condamner la Carac à payer à M. [U] le capital dû au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [F] [N] décédé le 4 mars 2016, soit la somme de 18 557,02 euros au 2 décembre 2020 sous réserve des actualisations à intervenir,

— condamner la Carac à payer à M. [U] le capital dû au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [P] [N], soit la somme de 18 557,02 euros au 2 décembre 2020 sous réserve des actualisations à intervenir,

— condamner la Carac au paiement à M. [U] de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

— condamner la Carac au paiement de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers, avec recouvrement direct,

— condamner la Carac au remboursement de la somme de 2 000 euros acquittée au titre de l’exécution provisoire du jugement de première instance.

Par dernières écritures du 15 juin 2022, la Carac demande à la cour de :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

débouté M. [U] de l’intégralité de ses demandes,

condamné M. [U] à payer à la Carac la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonné l’exécution provisoire,

condamné M. [U] aux dépens de l’instance,

Et ajoutant au jugement,

A titre principal,

— juger que les courriers des 24 février 2016 et 14 mars 2016 n’ont pas valablement modifié le bénéficiaire des contrats souscrits par [P] et [F] [N] auprès de la Carac,

En conséquence,

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au versement des capitaux décès résultant des garanties :

VOE0000212, CEC0004213 et RMC0256745 dont était titulaire [F] [N],

VOE0000211 et CEC0004210 dont était titulaire [P] [N],

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au versement de la somme de:

en paiement du contrat souscrit par [F] [N]……………………….18 557,02 euros,

en paiement du contrat souscrit par [P] [N]…………………18 557,02 euros,

— ordonner à M. [U] de restituer la somme de 18 557, 02 euros à la Carac,

A titre subsidiaire,

— constater que la demande en paiement formulée par M. [U] est injustifiée,

En conséquence,

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au versement des capitaux décès résultant des garanties :

VOE0000212, CEC0004213 et RMC0256745 dont était titulaire [F] [N],

VOE0000211 et CEC0004210 dont était titulaire [P] [N],

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au versement de la somme de:

en paiement du contrat souscrit par [F] [N]…………………18 557,02 euros,

en paiement du contrat souscrit par [P] [N]…………..18 557,02 euros,

— ordonner à M. [U] de restituer la somme de 18 557,02 euros à la Carac,

A titre infiniment subsidiaire,

— juger que [P] [N] n’a pas valablement modifié la clause bénéficiaire des garanties souscrites par [F] [N],

En conséquence,

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la CARAC au versement des capitaux décès résultant des garanties VOE0000212, CEC0004213 et RMC0256745 dont était titulaire [F] [N],

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au versement de la somme de 18 557,02 euros en paiement du contrat Volontés Obsèques souscrit par [F] [N],

— ordonner à M. [U] de restituer la somme de 18 557,02 euros à la Carac,

En tout état de cause,

— débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Carac au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts,

— débouter M. [U] de sa demande de paiement de la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de condamnation aux dépens,

— débouter M. [U] de sa demande de remboursement de la somme de 2 000 euros acquittée en application du jugement déféré,

— débouter M. [U] de l’ensemble de ses demandes et prétentions,

— condamner M. [U] à restituer la somme de 18 557, 02 euros,

— condamner M. [U] à verser à la Carac la somme de 2 000 euros au titre de la première instance et de 2 000 euros au titre de l’appel correspondant aux frais irrépétibles,

— condamner M. [U] aux entiers dépens d’instance et d’exécution avec recouvrement direct.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 juin 2022.

SUR QUOI

Le tribunal a jugé que les lettres du 24 février 2016 ne pouvaient à elles-seules emporter changement de la clause bénéficiaire compte tenu de leur imprécision, le numéro d’adhérent rappelé étant commun à l’ensemble des garanties souscrites et le numéro d’entité mentionné ne renvoyant à aucun des éléments présents sur le bulletin d’adhésion au contrat 'Volonté Obsèques Carac’ dont il est sollicité l’application par M. [U]. Il a considéré que la volonté des adhérents ne pouvant être considérée comme non équivoque en l’absence des éléments complémentaires sollicités par la mutuelle le 3 mars 2016, la Carac était bien fondée à affirmer que le bénéficiaire des garanties afférentes aux contrats litigieux n’avait pas été modifié par les lettres du 24 février 2016.

Sur le changement de la clause bénéficiaire par la lettre du 14 mars 2016, le tribunal a considéré que [F] [N] étant décédé à cette date, la Carac n’avait pas commis d’erreur en ne tenant pas compte du changement de bénéficiaire ; s’agissant de [P] [N], constatant que la lettre n’était ni manuscrite ni signée par [P] [N], contrairement à celle du 24 février 2016, et que l’écriture du bordereau de recommandé ne correspondait pas à la signature de l’adhérente apposée sur sa précédente lettre, les premiers juges ont considéré que ces éléments ne leur permettaient pas de s’assurer de la volonté non équivoque de [P] [U] de changer de clause bénéficiaire au profit de M. [U].

L’appelant souligne que [F] [N] et son épouse n’ont respectivement souscrit qu’un seul contrat, le 3 décembre 2004, sous les numéros d’adhérent 391893 et 723110, constitué par un acte qui s’intitule 'demande d’adhésion Volontés Obsèques Carac’ ; ils ont opté pour l’option 'Epargne’ avec un versement de 5 675 euros et le choix du bénéficiaire en cas de décès, à savoir l’entreprise de pompes funèbres RSP Rebillon située … [Localité 5] et pour le solde éventuel, chacun a désigné son conjoint survivant.

Il fait valoir que les courriers du 24 février 2016 sont dépourvus de toute ambiguïté et de toute imprécision, et que la Carac en a parfaitement compris les termes et a mis en oeuvre la modification du bénéficiaire en effectuant deux prestations :

— elle a payé la facture de la société de pompes funèbres située en Corse que lui a transmise l’appelant,

— en cours d’instance elle lui a payé un solde,

étant rappelé que, de jurisprudence constante, le paiement vaut reconnaissance de la dette.

En réponse aux arguments développés par l’intimée, M. [U] réplique que [F] et [P] [N] ont tous deux choisi la garantie Epargne c’est à dire le versement d’un capital au décès et qu’il n’y a donc que cette seule garantie qui a été souscrite au titre de ce contrat et non cinq garanties comme le soutient la Carac.

La Carac fait siens les motifs du tribunal.

***

L’appelant verse aux débats les deux originaux des contrats ici invoqués : il s’agit pour chacun des époux [N] d’un document intitulé 'Volontés Obsèques Carac', 'demande d’adhésion, fiche d’information', souscrit le 3 décembre 2004. Il en résulte qu’ils ont choisi l’option 'Epargne’ et ont procédé à un versement de 5 675 euros. Ils avaient alors désigné comme bénéficiaire la société de pompes funèbres RSP Rebillon située à [Localité 5], choix s’expliquant par le fait qu’ils habitaient à l’époque à [Localité 5].

Sur le bulletin d’adhésion de [P] [N] figurent dans un 'cadre réservé à la codification’ les mentions suivantes :

entité : 175

adhérent : 723110

garantie : non renseigné

conseiller : MJ Belcaye

réinvestissement de la garantie : ECLOR 0007111 2380,38 €'.

Sur le bulletin d’adhésion de [F] [N] dans ce même emplacement, les mentions sont les suivantes :

entité : 175

adhérent : 391893

garantie : non renseigné

conseiller : MJ Belcaye

réinvestissement de la garantie : ECLOR 0007141 2325,90 €'.

La fiche d’information jointe aux bulletins d’adhésions signés par les époux [N] prévoit que 'les bénéficiaires en cas de décès sont la ou les personnes ayant fait l’objet d’une désignation expresse et écrite de votre part. En cas de pluralité de bénéficiaires désignés, vous devez préciser l’ordre de priorité de versement du capital et sa répartition. Le(s) bénéficiaire(s) peut (peuvent) accepter la désignation faite à leur profit. En présence d’un (de) bénéticiaire(s) acceptant, vous pouvez modifier la désignation de vos bénéficiaires uniquement si vous obtenez l’accord écrit de celui(ceux)-ci. Cette modification entre en vigueur à la date de la demande de modification que vous aurez faite par écrit.

Si le bénéficiaire est une entreprise de Pompes Funèbres, le capital dû au décès lui sera versé

dans la limite du montant de sa facture. Le solde éventuel est versé au(x) bénéficiaire(s)

subsidiairement désigné(s) ou à défaut de désignation de cette nature, aux héritiers par parts

égales. En cas de défaillance ou de disparition de l’entreprise de Pompes Funèbres, le capital dû est versé au(x) bénéficiaire(s) subsidiairement désigné(s) ou à défaut aux héritiers'.

Par lettres recommandées avec accusé de réception du 24 février 2016, reçues le 29 février suivant, [P] et [F] [N] ont indiqué : 'Veuillez trouver ci-joint le formulaire de changement d’adresse, mon époux/épouse et moi avons décidé de finir notre vie chez nous en corse. Je certifie que l’adresse indiquée sur ce formulaire est parfaitement exacte et signée de ma main. Je vous demande en conséquence de bien vouloir modifier la clause bénéficiaire de mon contrat comme suit :

Je désigne comme seul et unique bénéficiaire :

Monsieur [U] [E] [K] né le 1er novembre 1949 à [Localité 4].

N’ayant pas d’enfant, j’ai désigné cette personne proche et qui m’est chère pour organiser et de

gérer mes funérailles sur place selon mes dernières volontés'.

Chacun des époux avait accompagné son courrier de la copie de sa carte nationale d’identité en vigueur.

Ces lettres, signées de la main de chacun des adhérents, précisent en outre leur numéro d’adhérent, à savoir 723110 pour [P] [N] et 391893 pour [F] [N], ainsi que la mention commune suivante 'entité : 112750".

A ces courriers la Carac a apporté le 3 mars 2016 à [P] [N] la réponse suivante :

'Nous accusons réception de votre courrier en date du 29 février 2016, relatif à la clause bénéficiaire de votre garantie.

Nous vous serions obligés de nous fournir les pièces justificatives nécessaires à la prise en compte de votre demande :

— photocopie recto verso de votre carte nationale d’identité (déjà communiquée, observation de la cour) sur laquelle vous aurez indiqué la mention suivante : 'je certifie que ma carte nationale d’identité est conforme à ma situation actuelle’ suivie de la date et de votre signature.

De plus, nous vous serions obligés de bien vouloir indiquer le numéro des garanties concernées par ce changement.'

La cour ne comprend pas quelles autres garanties auraient été souscrites par les époux [N], la Carac, qui invoque son incapacité à interpréter ce changement de bénéficiaire de manière non équivoque, ne produisant pas aux débats les autres contrats susceptibles d’être concernés par un changement de bénéficiaire.

Dans ces conditions, il apparaît que les courriers du 24 février 2016 exprimaient clairement, sans aucune équivoque, la volonté de chacun des époux [N] de changer de bénéficiaire pour leur contrat 'Volontés Obséques Carac’ au profit de M. [U], plutôt qu’au profit d’une société de pompes funèbres qui n’était évidemment pas celle à laquelle ils auraient confié leurs obsèques, puisqu’ils s’étaient installés en Corse.

Il convient d’ajouter que la Carac dénie aujourd’hui sa garantie à l’égard de l’appelant, alors que :

— le notaire chargé de la succession de [F] puis de [P] [N] l’a interrogée sur les deux contrats obsèques et pas sur d’autres,

— elle a réglé 'partiellement aux Pompes Funèbres Barboni ' le 27 juillet 2016 un montant de 3946,69 euros correspondant à une facture reçue le 10 mars 2016,

— le 29 août 2018, elle a écrit à l’appelant : 'nous faisons suite au décès de notre adhérent Monsieur [F] [N] et nous tenons tout d’abord à vous présenter nos sincères excuses pour le délai de réponse. Nous procèdons actuellement au traitement du dossier afin de vous régler ce qui vous ai dû car il vous a désigné comme bénéficiaire (souligné par la cour). Pour cela nous vous demandons de nous faire parvenir …'.

— le 2 décembre 2020, soit au cours de la première instance, la Carpa a viré sur le compte de M. [U] la somme de 18 557,02 euros.

Ces éléments démontrent que le notaire n’était en possession que d’un seul contrat d’assurance et que la Carac a elle-même tenu compte du changement de bénéficiaire, fût-ce au titre d’un seul des deux contrats 'obsèques'.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.

La Carac sera donc condamnée à payer à M. [U] :

— la somme de 18 557,02 euros arrêtée au 2 décembre 2020, sous réserve de l’actualisation à la date de la présente décision, au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [F] [N] décédé le 4 mars 2016,

— la somme de 18 557,02 euros arrêtée au 2 décembre 2020, sous réserve de l’actualisation à la date de la présente décision, au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [P] [N] décédée le 14 juin 2017.

M. [U] sollicite une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice que le refus de garantie injustifié opposé par la Carac lui a causé.

Il ne fournit aucune explication sur la nature du préjudice qu’il aurait subi. Faute de démontrer l’existence d’un dommage distinct de celui qui résulte de l’obligation d’agir en justice, qui sera indemnisé au titre des dépens et des frais irrépétibles, il sera débouté de cette demande.

Il sollicite la restitution de la somme de 2 000 euros qu’il a dû verser à la Carac au titre de l’exécution provisoire du jugement.

Or,le présent arrêt en ce qu’il infirme la décision de première instance, constitue un titre suffisant pour obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par la Carac. Il n’y a donc pas lieu de statuer sur cette demande.

Compte tenu du sens de la présente décision, la Carac sera déboutée de sa demande tendant à voir M. [U] condamné à lui verser la somme de 18 557,02 euros. Il appartiendra aux parties de prendre en considération ce paiement dans le cadre des comptes que les parties feront entre elles à la suite de cet arrêt.

La Carac qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Elle versera une somme de 4 000 euros à M. [U] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau et ajoutant :

Dit que [F] [N] et [P] [N] ont régulièrement désigné M. [U] le 24 février 2016 comme étant le bénéficiaire de leurs contrats Volontés Obsèques.

Condamne la Carac, mutuelle épargne retraite prévoyance à payer à M. [U] :

— la somme de 18 557,02 euros arrêtée au 2 décembre 2020, sous réserve de l’actualisation à la date de la présente décision, au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [F] [N] décédé le 4 mars 2016,

— la somme de 18 557,02 euros arrêtée au 2 décembre 2020, sous réserve de l’actualisation à la date de la présente décision, au titre du contrat Volontés Obsèques souscrit par [P] [N] décédée le 14 juin 2017.

Rejette la demande de dommages-intérêts formée par M. [U].

Rejette toutes les demandes de la Carac.

Condamne la Carac à payer à M. [U] la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la Carac aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Florence PERRET, Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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