Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 6 avril 2022, n° 19/03214

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 6 avr. 2022, n° 19/03214
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/03214
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nanterre, 25 juin 2019, N° F16/00759
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES


Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°


CONTRADICTOIRE


DU 6 AVRIL 2022


N° RG 19/03214


N° Portalis DBV3-V-B7D-TMNE


AFFAIRE :

Z-A X


C/

Société UBAF


Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 juin 2019 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de NANTERRE


Section : E


N° RG : F 16/00759


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Anne Karin KOUDELLA

Me Julien DUFFOUR


Copie numérique adressée à :

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE SIX AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,


La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur Z A X

né le […] à […]

de nationalité française

[…]

[…]


Représentant : Me Anne Karin KOUDELLA de la SELARL KMD AVOCATS, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 93

APPELANT

****************

SA UNION DES BANQUES ARABES ET FRANÇAISES (UBAF)


N° SIRET : 702 027 178

[…]

[…]

[…]


Représentant : Me Julien DUFFOUR de l’AARPI AVOCATION, Plaidant/ Constitué , avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0470

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :


En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 février 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller


Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK


Par jugement du 26 juin 2019, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement) a:


- dit que le licenciement de M. Z A X est bien-fondé,
- dit que le salaire moyen mensuel de référence de M. X s’élève à la somme de 4 144,46 euros,


- débouté M. X de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,


- débouté M. X de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis,


- débouté M. X de sa demande d’exécution provisoire du jugement au titre de l’article 515 du code de procédure civile,


- débouté M. X du surplus de ses demandes,


- débouté la société Union des banques arabes et françaises de sa demande reconventionnelle,


- dit qu’il n’y a pas lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.


Par déclaration adressée au greffe le 6 août 2019, M. X a interjeté appel de ce jugement.


Une ordonnance de clôture a été prononcée le 14 décembre 2021.


Par dernières conclusions remises au greffe le 2 décembre 2020, M. X demande à la cour de':


- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre, le 26 juin 2019, en ce qu’il a dit que son licenciement était bien fondé, et l’a débouté de ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis, de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,


- dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence,


- condamner la société Union des banques arabes et françaises (UBAF) à lui payer :


- 12 433,29 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,


- 1 243,33 euros au titre des congés payés afférents,


- 98 746 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,


- condamner en outre la société UBAF à lui verser 3 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, pour les procédures de première instance d’appel.


Par dernières conclusions remises au greffe le 11 février 2021, la société UBAF demande à la cour de':


- dire que le salaire moyen de référence s’élève à la somme de 4 144,46 euros


- dire que le licenciement de M. X était bien fondé sur une cause réelle et sérieuse,

en conséquence,


- débouter M. X de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- débouter M. X de ses demandes de congés payés et indemnité compensatrice de préavis,


- condamner M. X à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,

subsidiairement, si la cour devait considérer le licenciement de M. X dépourvu de cause réelle et sérieuse,


- limiter le montant de sa condamnation à la somme de 24 866,76 euros, soit 6 mois de salaire.

LA COUR,


La société Union des banques arabes et françaises (UBAF) a pour activité principale le financement des échanges commerciaux entre l’Europe, l’Asie, l’Afrique et le Monde Arabe.

M. Z A X a été engagé par la société UBAF,en qualité d’aide comptable, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 2 mai 1974.


En dernier lieu, M. X occupait le poste d’attaché de direction depuis le 24 janvier 1995 et a été promu cadre le 1er janvier 2000.


Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective de la banque.

M. X percevait une rémunération brute mensuelle de 4 144,46 euros (moyenne des 12 derniers mois).


L’effectif de la société était de plus de 10 salariés.


A compter de février 2015, M. X a fait l’objet de plusieurs arrêts de travail pour maladie.


Par avis du 19 juin 2015, le médecin du travail a déclaré à l’issue du premier examen du salarié «'qu’une inaptitude au poste d’attaché de direction est à prévoir'» et a ajouté qu’en attendant «'l’état de santé de Monsieur X ne lui permet pas d’être affecté à un poste dans l’entreprise'».


A l’issue du second examen du 7 juillet 2015, le médecin du travail a conclu que «'Monsieur X est inapte au poste d’attaché de direction, à la suite de l’étude de poste en date du 1/07/15 et avis spécialisés. Le salarié pourra occuper un emploi de type administratif à temps très partiel ou à domicile'».


Par lettre du 17 juillet 2015, la société UBAF a proposé à M. X un emploi, dans le cadre d’un télétravail à domicile, en tant que chargé de support comptable au département des opérations documentaires et garanties, avec mise à disposition du matériel et équipement nécessaires, prise en charges des dépenses engendrées par le télétravail et maintien intégral du salaire, une réponse étant attendue au plus tard le 24 juillet 2015.


Par lettre du 21 juillet 2015, M. X a refusé la proposition de reclassement.


Par lettre remise en main propre contre décharge du 21 juillet 2015, M. X a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé le 29 juillet 2015.

M. X a été licencié par lettre du 6 août 2015 pour inaptitude physique d’origine non professionnelle dans les termes suivants :

« En date du 7 juillet 2015, le Médecin de travail a conclu à votre inaptitude définitive à reprendre votre emploi dans l’entreprise.

Nous vous avons alors proposé par un courrier du 17 juillet 2015 un emploi répondant très exactement aux préconisations du Médecin du travail.

Vous avez, par lettre du 21 juillet 2015, décliné notre proposition, puis lors de notre entretien préalable, confirmé votre refus.

Nous sommes par conséquent dans l’obligation de prendre l’initiative de rompre votre contrat de travail et vous notifions par la présente votre licenciement pour votre inaptitude physique médicalement constatée ».


Le 24 mars 2016, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Sur la rupture du contrat de travail :


Le salarié soutient que l’employeur a manqué à son obligation de recherche de poste de reclassement en ayant interrompu prématurément les recherches, y compris au sein du groupe auquel il appartient, le Crédit Agricole, rendant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il explique que le refus de la proposition de reclassement reposait sur un motif légitime, l’impossibilité matérielle d’installer un poste de travail à son domicile occupé par six personnes.


Il ajoute que l’employeur ne fait pas mention de l’absence de tout poste de reclassement dans la lettre de licenciement et qu’à défaut d’une telle mention, le motif de la lettre de licenciement n’est pas suffisamment précis pour justifier de son bienfondé.


L’employeur fait valoir qu’il a tout mis en 'uvre pour trouver une solution de reclassement au salarié. Il expose avoir proposé un poste qui répondait totalement aux préconisations du médecin du travail, particulièrement restrictive, et que contre toute attente, M. X a refusé cette proposition ' sur mesure’ sans donner aucune précision, la société UBAF n’ayant pas d’autre poste à lui proposer.


L’employeur indique que le refus de M. X est illégitime et que le salarié, de mauvaise foi, se fonde aujourd’hui sur le caractère prétendument exigu de son appartement, information qu’il n’avait pas communiquée à l’époque. Il ajoute enfin que le salarié n’est pas en mesure de démontrer que la société UBAF et le Crédit Agricole font partie du même groupe.


Il résulte des articles L. 1226-2 et L. 1232-6 du code du travail, en leur rédaction applicable en la cause, que ne constitue pas l’énoncé d’un motif précis de licenciement l’inaptitude physique du salarié, sans mention de l’impossibilité de reclassement. A défaut, le licenciement sans cause réelle et sérieuse.


S’il n’est pas exigé que l’employeur vise expressément sa recherche de reclassement dans la lettre de licenciement, il lui est imposé de mentionner l’impossibilité de reclassement du salarié dans l’entreprise.


Au cas présent, la lettre de licenciement énonce comme cause du licenciement uniquement l’inaptitude de M. X sans mention de l’impossibilité de reclassement.


Elle n’est donc pas suffisamment motivée.


Il convient donc, infirmant le jugement, de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture : M. X qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement.


Au regard de son âge au moment du licenciement, 61 ans, de son ancienneté d’environ 41 ans dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de ce qu’il ne communique pas des informations précises sur ses revenus après la rupture en ce compris le montant de sa pension de retraite à compter du 1er janvier 2016, il convient, infirmant le jugement, d’allouer à M. X, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 30 000 euros.


Dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis.


Il’convient, infirmant le jugement, d’allouer à M. X à titre d’indemnité compensatrice de préavis la somme de 12 433,29 euros outre les congés payés afférents, montants non utilement discutés par l’employeur.


En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile:


Il est inéquitable de laisser à la charge de M. X les frais par lui exposés en première instance et en cause d’appel non compris dans les dépens à hauteur de 3 600 euros.

PAR CES MOTIFS :


Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,


INFIRME le jugement,


Statuant à nouveau,


DIT le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,


CONDAMNE la SA Union des banques arabes et françaises à payer à M. Z A X les sommes suivantes :

. 30'000'euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 12 433,29 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

. 1 243,33 euros à titre de congés payés sur préavis,


ORDONNE d’office le remboursement par l’employeur, aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités,


DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
CONDAMNE la SA Union des banques arabes et françaises à payer à M. Z A X la somme de 3 600 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,


DÉBOUTE la SA Union des banques arabes et françaises de sa demande au titre des frais irrépétibles,


CONDAMNE la SA Union des banques arabes et françaises aux entiers dépens.

- prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente
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Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 6 avril 2022, n° 19/03214