Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 10 février 2022, n° 20/00091

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 21e ch., 10 févr. 2022, n° 20/00091
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/00091
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nanterre, 8 décembre 2019, N° 18/02211
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

21e chambre

ARRET N°


CONTRADICTOIRE


DU 10 FEVRIER 2022


N° RG 20/00091 – N° Portalis DBV3-V-B7E-TV2U


AFFAIRE :

Najate X


C/

S.A.S. CAPGEMINI TECHNOLOGY SERVICES (TS)


Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Décembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE


N° Chambre :


N° Section : E


N° RG : 18/02211


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SCP FEDARC

la SELEURL MONTECRISTO

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE DIX FEVRIER DEUX MILLE VINGT DEUX,


La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Najate X

né le […] à MOULAY-BOUAZZA

de nationalité Française […]

[…]


Représentant : Me Philippe ROLLAND de la SCP FEDARC, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 10

APPELANT

****************

S.A.S. CAPGEMINI TECHNOLOGY SERVICES (TS)


N° SIRET : 479 766 842

[…]

[…]


Représentant : Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J153

INTIMEE

****************

Composition de la cour :


En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 30 Novembre 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,

Madame Valérie AMAND, Président,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,


Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,

FAITS ET PROCEDURE,

Mme X a été engagée à compter du 1er avril 2014 en qualité de consultant process et métier sénior, par la société Capgemini Technology Services, selon contrat de travail à durée indéterminée.


L’entreprise, qui exerce son activité dans le domaine du conseil en technologie de l’information, transformation de systèmes d’information, architectures réseaux, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective des bureaux d’études techniques 'Syntec'. Mme X a été employée par la société Capgemini sur des missions jusqu’au mois de mai

2015. À compter de cette date, elle a été placée en intercontrat.


Convoquée le 22 août 2016 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 6 septembre suivant, Mme X a été licenciée par lettre datée du 12 septembre 2016 énonçant une cause réelle et sérieuse avec dispense d’exécuter le préavis.


Contestant son licenciement, Mme X a saisi le 29 juin 2018, le conseil de prud’hommes de


Nanterre aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et que soit condamnée la société à lui verser diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.


La société s’est opposée aux demandes de la requérante et a sollicité sa condamnation au paiement

d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


Par jugement rendu le 9 décembre 2019, notifié le 12 décembre 2019, le conseil a statué comme suit

:

Dit que le licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme X de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Capgemini à verser à Mme X :

- 5 188 euros au titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,

- 5 000 euros pour non-respect des conditions de la rupture,

Ordonne l’exécution provisoire,

Déboute Mme X de sa demande de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société Capgemini de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,

Laisse à la société la charge d’éventuels dépens y compris les éventuels frais d’exécution du jugement à intervenir.


Le 9 janvier 2020, Mme X a relevé appel de cette décision par voie électronique.


Par ordonnance rendue le 27 octobre 2021, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 30 novembre 2021.
' Selon ses dernières conclusions, en date du 16 juillet 2020, Mme X demande à la cour

d’infirmer le jugement rendu le 9 décembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Nanterre et en conséquence, de :


Dire et juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,


Condamner la société à lui verser la somme de 60 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,


Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société aux sommes de :


- 5 188 euros de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,


- 5 000 euros de dommages et intérêts pour les conditions de la rupture,


Condamner en outre la société à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens.

' Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 27 mai 2020, la société Capgemini


Technology Services demande à la cour de :


Sur le licenciement :


Juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,


Confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme X de ses fins et prétentions ;


Sur le préjudice distinct :


Constater l’absence de tout harcèlement dans le présent dossier ;


Réformer le jugement entrepris sur ce point ;


Débouter en conséquence Mme X de ses fins et prétentions


En tout état de cause, condamner Mme X au versement la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’instance.


Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS I – Sur le licenciement

Mme X critique la décision entreprise en ce que le conseil de prud’hommes a considéré établie l’existence d’une cause réelle et sérieuse alors même que la cause de sa situation d’intercontrat est imputable à l’incapacité de l’employeur de lui proposer des missions conformes à ses compétences lesquelles n’étaient pas techniques mais uniquement fonctionnelles et en lien avec le

'capital market'. Elle plaide avoir été débauchée par la société Capgemini Technology Services de son précédent emploi, exercé auprès de la société Capfi Technology, et avoir été engagée, en qualité de consultant process et métier senior, sur un emploi 'fonctionnel’ et non 'technique’ la société intimée étant intéressée par son profil centré sur les activités de marché financier des banques

d’investissement.


Elle ajoute que la majeure partie des emplois proposés étaient d’ordre technique, auxquels elle ne pouvait postuler, et avoir présenté sa candidature, entre septembre 2015 et la date de son licenciement, sur 24 offres d’emplois fonctionnels, mais n’avoir obtenu aucune réponse positive de la part des commerciaux. Elle conclut qu’en tout état de cause, elle ne saurait être tenue pour responsable d’un rejet éventuel de sa candidature sur une mission, puisque ce choix dépend exclusivement du client final, qui prend sa décision en fonction du profil qu’il recherche, et effectue une sélection entre les différents profils proposés par Capgemini, qu’elle n’avait aucun contact direct avec les clients, qu’elle ne pouvait donc pas dialoguer avec eux pour les convaincre de sa motivation ou de ses compétences et n’avait donc aucune maîtrise sur le process de sa mise à disposition.


La société Capgemini Technology Services demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a considéré établi la cause réelle et sérieuse du licenciement, soulignant que l’attention de la salariée avait été attirée à l’occasion de ses compte-rendus d’évaluation sur ses axes de progrès, qu’elle a fait

l’objet d’un plan d’amélioration, mis en 'uvre au cours du premier semestre 2016, et que devant

l’absence d’amélioration de la situation elle a décidé légitimement d’engager la procédure de licenciement le 22 août 2016.


Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.


Si un doute subsiste, il profite au salarié.


Après avoir, en premier lieu, précisé que la salariée ne s’était pas présentée à l’entretien préalable et que depuis le 5 septembre 2016, elle ne s’était pas présentée dans les locaux de l’entreprise sans avoir justifié de son absence, et, en second lieu, rappelé les fonctions occupées à savoir celles de


C o n s u l t a n t M é t i e r S , d o n t l e s p r i n c i p a u x a t t e n d u s , t e l s q u e d é f i n i s d a n s l e

'Global Competency Model’ sont les suivants :

« il sait concevoir une solution métier ou technique, en s’appuyant sur ses équipes et ses partenaires, il maîtrise en profondeur au moins une méthodologie et il a une bonne connaissance d’un ou plusieurs domaines Business, ou bien d’une ou plusieurs solutions ERP, ou encore l’un ou plusieurs langages/outils techniques ; il a une connaissance étendue des innovations industrielles et des activités de la concurrence ; il est très engagé dans le développement interne et externe des connaissances ; il peut entre autres, exercer du conseil en amélioration de processus, faire des analyses « existant/cible » pour des processus métiers ou Si, ou encore du conseil fonctionnel pour la mise en oeuvre d’un ou plusieurs module ERP – Certification : BA niveau 1 obtenue et BA niveau 2 en cours »,


L’employeur présente divers griefs, qu’il convient de reprendre, desquels il déplore in fine :

« le non investissement de la salariée dans son évolution professionnelle au sein de la société », un

« comportement qui n’est pas en adéquation avec les attendus de son rôle » et que « malgré nos différentes tentatives, nous avons constaté avec regret qu’aucun dialogue constructif ne pouvait

s’engager sur ces différents sujets, qu’il était de plus en plus difficile de poursuivre le relation de travail qui nous lie et que ce manquement à vos obligations professionnelles nous conduit à vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, l’employeur (vous) exemptant de présence dans l’entreprise durant le préavis de trois mois » :


Il convient d’examiner les différents motifs visés dans la lettre de licenciement :

1) 'Vous devez avoir un taux d’ARVE personnel Projet de 85 % et vous impliquer pour le développement de la Practice (Recrutement, foisonnement chez nos clients, réalisations d’évaluations de mission).


Or depuis plus d’un an, vous n’atteignez pas les objectifs qui vous sont fixés, en effet, votre ARVE a été faible en 2015 (28,44%) et pour 2016 votre ARVE est de 0% à ce jour; vous n’êtes pas intervenue sur un projet client depuis un an et quatre mois, votre dernier jour en mission est le 7 mai 2015.'


L’objectif ARVE dépendant du travail accompli par le collaborateur en mission au profit d’un client et la salariée étant en intercontrat depuis le 7mai 2015, ce point est constant.


Les parties sont en revanche en désaccord sur la cause de cette situation d’intercontrat qui a perduré quinze mois avant l’engagement de la procédure de licenciement.

2) 'Ce non positionnement n’est pas dû à un manque de compétences de votre part, ni à des non propositions de la part de Capgemini, mais bien à des refus de missions. En effet, vous ne cessez de contester les missions qui vous sont proposées lors des présentations de celles-ci dans les sessions internes « war room » dédiées à la recherche d’opportunités et ce pour l’ensemble des collaborateurs en inter-contrat. Vous avez notamment refusé de vous positionner sur des opportunités, de manière quasi-systématique, sans même chercher à comprendre le contenu des missions'.


Pour exemple le 8 juillet 2016, vous avez envoyé un courriel à votre Manager hiérarchique M. Y, contenant le tableau de synthèse des opportunités que nous vous avions proposées en « war room », avec les motifs de vos refus.


Dans ce tableau, vous invoquez systématiquement que les missions proposées ne sont pas en adéquation avec votre profil : « profil junior », « profil technique », ou avec votre niveau de séniorité : « grade D », ou encore avec votre domaine de compétences : « Pas de connaissance en


IBM Websphère », « Pas de connaissance SEPA ».


Autre exemple, le 29 juillet 2016, vous n’avez pas souhaité vous positionner sur une mission pour le constructeur PSA – Peugeot Citroën, pour un poste de Chef de projet, invoquant le motif suivant, dans un mail que vous avez adressé à M. Y :

« Cette mission demande des connaissances en PSA pour eProgramme pour PSA que je n’ai pas. »


Or, PSA est le nom du client et non d’une compétence attendue, vous comprendrez donc aisément que nous sommes légitimement en droit de nous interroger sur vos refus de mission, alors même que vous confondez le nom d’un client avec une compétence.'

Mme X réfute cette analyse et considère que la situation d’intercontrat est imputable au choix des clients sur les différents profils proposés par la société Capgemini Technology Services et au fait que celle-ci est dans l’incapacité de lui proposer des projets conformes à ses compétences fonctionnelles dans le domaine des marchés financiers.


Il ressort des pièces communiquées par l’employeur que la salariée a effectivement justifié ses refus de se positionner sur six projets de mission en invoquant le profil technique de la mission proposée, en soulignant ses compétences fonctionnelles et non techniques, en relevant le profil junior de certains emplois proposés, qu’elle considérait non conforme à son statut 'senior'.


L’employeur ne s’étant pas prévalu des stipulations de l’article 8 de la convention collective applicable desquels il ressort que sous certaines conditions, et le constat de 'circonstances particulières résultant de la situation du travail dans l’entreprise', un salarié ne peut refuser une mission temporaire, dans des conditions de durée précisées à l’avance par écrit, n’excédant pas six mois, et sans diminution de sa classification ni diminution de ses appointements, une fonction inférieure à celle qu’il assume habituellement, la société Capgemini ne peut reprocher à la salariée

d’avoir refusé des missions relevant d’un niveau hiérarchique inférieur au sien.


Si le curriculum vitae de la salariée n’est pas communiqué pour apprécier son profil, il ressort de divers éléments, à savoir le compte-rendu d’évaluation 2014 ('suite à une bonne intégration au sein de la FSGBU en avril, Najate a eu l’occasion de mettre en application des connaissance fonctionnelles capital Markets en première partie de sa mission liquidité.


Malgré plusieurs changements de périmètre du fait du client, Najate a prouvé son adaptabilité et sa motivation : elle a été en mesure d’accompagner le client sur des tâches de PMO et de chef de projet
MS-BI qui n’étaient pas son domaine de prédilection. En revanche, Najate doit impérativement prendre connaissance et respecter les process capgemini pour ne pas que cela lui pose problème par la suite. Elle devra également en 2015 passer et réussir sa certification BA'), le plan d’amélioration des performances lequel visait l’objectif d’ 'améliorer sa visibilité auprès des sales ('planifier des rencontres pour présenter son curriculum vitae et son profil, et son SF extrême de couverture fonctionnelle') et l’appréciation portée par M. Y qui concède que son coeur de métier porte sur les marchés financiers, que le profil de la salariée était effectivement d’ordre 'fonctionnel dans le domaine du capital market’ et non 'technique', ce que la société intimée ne conteste pas sérieusement.


Il est toutefois établi que contrairement à ce qu’elle prétend, sa candidature a été sélectionnée par des clients qu’elle a été amenée à rencontrer au cours de la relation de travail, l’employeur établissant par les compte-rendus de ces entretiens que dans ces circonstances Mme X n’a pas défendu sa candidature :


- entretien client SG du 18 mars 2016 par M. Z :

'la séniorité et la sécurité n’est pas un problème puisqu’elle a sélectionnée son CV.

[…] dans les faits, lors de l’entretien Najate a fait une présentation de son CV. 0 la suite d’une première question qui était 'vous avez un profil très typé CIB, vous êtes consciente que c’est différent '', Najate n’a pas répondu. Elle n’a pas cherché à défendre son profil. Il est vrai que najate a un profil très CIB. C’est un fait. Néanmoins, elle a accepté la mission […]'.


- compte-rendu de l’entretien du 28 juin 2016 par M. A :

'Lundi 27/06 : présentation par téléphone du contexte client (projet, environnement, effectifs,) de

l’historique de nos activités pendant 30 à 40 minutes. Proposition de se rencontrer physiquement à


SET le mardi fin de matinée afin de finaliser la préparation – refus de Najate et on a convenu de se retrouver 30 minutes avant l’entretien à l’accueil de la tour SG.


Mardi 28/06 : j’ai demandé à najate de se présenter en commençant par résumer ce qu’elle a compris de notre ,entretien téléphonique hier et comme je ne l’ai pas sentie opérationnelle, je lui ai fait un rappel de l’ensemble. Entretien avec le client :


- le client a demandé à najate de se présenter en commençant par résumer ce qu’elle a compris de la mission et de ce que je lui avais présenté… le début des ennuis ! (j’ai tenté de faire diversion pour remettre l’entretien sur sa présentation.


- présentation faite de Najate et là, j’apprends en même temps que le client qu’elle a fait de la formation Pega !


Question du client : qu’avez-vous retenu de Pega et de son apport… retour 0
Question du client : sur l’une des missions que vous avez mené, comment pourrions nous mettre


Pega dans l’environnement… retour 0


Question du client : Sur la mission SG/BASILIQ quelle était l’entité pour laquelle vous travailliez '… retour 0


Question du client : Quel était votre interlocuteur sur SG BASILIQ '… retour que sur le prénom


Question du client : je vois que vous êtes en intercontrat depuis avril 2015, qu’avez vous fait depuis '… retour : j’ai participé à quelques avant-vente pour capgemini et j’ai fait la formation Pega.


Il ressort de ce compte-rendu que contrairement à ce que soutient Mme B, la connaissance du système Pega ne constituait pas pour le client, la SG, un prérequis, mais constituait un atout que la salariée, qui avait été formée sur ce système pendant une semaine en mai 2016, n’a pas été en mesure de mettre en avant.


Par ailleurs, la société Capgemini Technology Services souligne à juste titre que la réponse fournie par Mme X relativement à la proposition concernant le groupe PSA (chef de projet pour la gestion projet Eprogramme pour PSA, l’équipe consiste environ 15 personnes. 20/80% France-Inde), aux termes de laquelle l’intéressée associait cet acronyme à un système informatique en lieu et place du nom de la société cliente souligne le manque d’implication et de sérieux de la salariée, le fait que la mission s’inscrive non pas dans son domaine de prédilection du secteur bancaire, mais dans le secteur industriel, ne pouvant justifier le refus d’examiner cette offre de mission.


Il ressort des éléments versés aux débats que si la salariée a effectivement postulé spontanément ou répondu favorablement à des offres de mission sur la période litigieuse (sous pièce n°15 de

l’appelante), elle a opposé, nonobstant une situation d’intercontrat qui se prolongeait, des refus sur des projets de mission en apportant une réponse inadaptée (connaissance en PSA !) a priori sans demander de précision, et adopté un positionnement en retrait lors d’entretiens avec les clients, desquels il ressort un manque d’implication et de participation pour sortir de la situation

d’intercontrat dans laquelle elle était positionnée depuis de nombreux mois.

3) A ces refus de mission, s’ajoute une non implication manifeste de votre part à réaliser les travaux que nous vous demandons de faire.


Pour exemple, votre note de performance de l’année 2015 ayant été de 4 : « objectifs partiellement atteints», nous avons mis en place, et ce comme pour l’ensemble des collaborateurs dans une situation similaire à la vôtre, un Plan d’Amélioration de la Performance pour l’année 2016, appelé aussi ; « PAP ». Ce plan a été mis conjointement en place avec votre Delegate, Mme C, dès la fin du mois de janvier 2016 afin de vous permettre d’améliorer votre employabilité et votre développement professionnel au sein de Capgemini.


Ce « PAP » prévoyait plusieurs axes de travail, comme le précise l’extrait de celui-ci formalisé le 29janvier 2016 :


- « […] Réaliser un benchmark sur l’Asset Management,


- […]


- Participer à une avant-vente « Murex CDC » dans votre coeur de solution Capital Market.


- […] »


Durant un point de suivi de ce « PAP », Mme C a constaté avec regret, que le benchmark qui vous a été demandé pour l’Asset Management n’était pas d’un niveau de pertinence satisfaisant, compte tenu de votre séniorité et de votre expertise dans ce domaine.

Mme C vous a envoyé un courriel à ce sujet, le 11 avril 2016, dans lequel elle indique :

'Concernant le Benchmark, nous nous sommes vues 2 fois en janvier pour détailler le plan du document ainsi que le contenu qui avait été préalablement défini par mail en décembre.

Malgré 1 mois d’absence en congés maladie, /e document présente un pourcentage d’achèvement de

50%. La partie réalisée décrit l’activité Asset Management avec présentation de ranking européen et mondial. La majorité des slides sont des copies d’écran issus d’internet : il y a peu de rédaction et

d’analyse sur le sujet.

La qualité globale du document est donc bien en dessous des attentes pour un grade C. Un prochain meeting est fixé le 13 avril pour revoir l’intégralité du document. »

Mme X ne conteste pas sérieusement le caractère incomplet et la faible qualité du travail fourni au sujet de ce projet de benchmark et n’a formulé aucune réserve relativement aux critiques de sa supérieure, hormis celle consistant à mettre en avant son arrêt maladie de février, alors même que le constat était fait au début du mois d’avril et qu’elle n’avait pas été affectée sur une mission au mois de mars 2016, et qu’elle ne justifie en aucune façon ses allégations selon lesquelles elle aurait été invitée à se contenter de procéder à des copiés/collés à partir d’une documentation sur internet.

4) Pour ce qui est de votre contribution à l’avant-vente « Murex CDC », pour laquelle M. D


E, responsable du développement de la solution Capital Market, vous a sollicitée dès le 27 janvier 2016, avec son équipe, vous ne vous êtes pas rendue disponible.

M. E vous a envoyé un premier courrier le 27 janvier 2016 :

« Bonjour Najate, En accord avec F et G, peux tu STP prendre contact rapidement avec H I ( en copie). H pilote la réponse sur l’AO CDC MUREX. La réponse est attendue début mars par le Client H a besoin de tes services. Le travail est sur SET Merci D'
Puis, M. E vous a envoyé un second courrier le 28 janvier 2016 :

« Bonjour Najate, Je fais suite à mon mail d’hier. Je viens de voir H qui a prévu de faire un point sur son dossier avec son équipe de réponse. Il te cherche sur SET sans succès. J’ai bien indiqué dans mon mail d’hier que le travail sur ce dossier est sur SET. D. »


Une fois encore, vous avez contesté le 12 avril 2016 par courriel, le fait que vous soyez injoignable :

« S’agissant de l’AO CDC UREX, projet qui m’a été proposé par D E fin janvier, sachez que si je n’ai pas pu mener à bout ce projet, ce n’est pas par manque de volonté de ma part mais par ce que tout simplement j’étais tombée malade .


En effet, j’étais en congés maladie pendant quasiment tout le mois de février et ledit projet sur lequel

j’étais amenée à travailler se terminait début mars »


Or votre arrêt maladie datait du 2 février 2016, vous auriez donc due être présente dans nos locaux en date du 28 janvier 2016, et répondre aux sollicitations de votre employeur.


Le fait de ne pas répondre aux sollicitations de votre employeur, n’est hélas pas un fait nouveau, puisque dès le mois d’octobre 2015, M. Y vous a fait un courriel de rappel à l’ordre à ce sujet :

« Bonjour Najate, Comme tu le sais, étant en intercontrat actuellement, il est accordé le droit de pouvoir rester chez toi si aucune activité ne nécessite ta présence sur site. Néanmoins, tu dois rester joignable durant les heures ouvrées, par téléphone, email et Lync. Or, hier, L M a essayé de te contacter, et ce a plusieurs reprises, sans succès. Après vérification, tu n’avais pas posé de jours de congés, de ce fait, tu devais être à la disposition de ton employeur pendant les horaires collectifs.


Merci donc de revenir vers moi pour m’expliquer pourquoi tu n 'as pas répondu, et si tu ne peux être joignable depuis ton domicile, alors il faudra que tu viennes sur site. »


Il est constant que Mme X a été rappelée à l’ordre en octobre 2015 sur sa disponibilité durant l’intercontrat. Toutefois, la salariée justifie sur ce point s’être manifestée auprès de son correspondant dans l’heure suivant son message par mail en lui expliquant avoir un problème de téléphone (connexion box) et avoir essayé vainement de le joindre au téléphone depuis l’extérieur de son domicile. Au bénéfice du doute, l’indisponibilité de l’intéressée à cette date n’est pas établie.


En revanche, s’agissant du mois de janvier 2016, la salariée ne pouvait sérieusement invoquer son arrêt maladie lequel ne débutera que le 2 février 2016. À l’examen des messages échangés, il est établi que bien qu’avertie par son supérieur, M. E, de ce qu’elle devait participer le lendemain

à un 'avant contrat’ avec M. I, la salariée ne s’est pas rendue disponible, affirme être rentrée à son domicile à 13 heures, c’est à dire à l’heure à laquelle M. I lui adressait un message en lui demandant où elle se trouvait, tout en lui précisant les références de la salle où il l’attendait, message auquel Mme X ne devait répondre que deux heures plus tard, en lui demandant si son interlocuteur souhaitait qu’elle revienne sur le site.


De ce chef, il est établi une mauvaise volonté de la salariée de se rendre disponible pour participer à cet avant contrat.

5) Cette réelle difficulté à vous joindre se conjugue avec votre manque de motivation évident à vous impliquer par ailleurs sur des travaux internes, que tout collaborateur en inter-contrat est susceptible de réaliser.


Pour exemple, le 23 juin 2016, Mme N J, O P de la F8 SBU France, vous

a sollicitée par courriel pour une aide à la vérification d’une traduction pour un document interne.

'Bonjour Najate, Je me permets de te contacter, j’aurai un petit exercice à te faire faire dans le cadre du sous titrage d’un elearning IQ.


Nous avons déjà les données en anglais qui ont été traduites. Te serait il possible de :


Vérifier que le français est bien en phase avec l’anglais et mettre à jour toutes les coquilles éventuelles ou tournage de phrase plus approprié si besoin.


Vérifier que le sous titrage propose sur les slides sont bien en phase avec la version anglaise dans le elearning (version test). Je te donnerai :


Un document word qui contient la version anglais + française pour chacune des slides (mettre toutes modifications en rouge -j’ai commence l’exercice, tu pourrais continuer sur ce même schéma)


Le elearning version test que tu pourras suivre en parallèle et confirmer que le sous titrage est bien approprié. Merci de me dire si tu as du temps aujourd’hui pour revoir ce document. »


Bien que vous ayez accepté de réaliser ce travail, le 24 juin 2016, Mme J a dû vous recontacter par courriel, n’ayant pas de visibilité sur votre avancement :

'Bonjour Najate, Peux tu nous indiquer où tu en es de l’exercice de vérification du sous-titrage de

l’elearning IQ ' Pourrais tu nous renvoyer les 2 dossiers Word d’ici la fin de la journée ' As-tu réussi à parcourir le elearning wersion test ' Merci pour ton aide, merci de ton retour, »


Vous avez envoyé le document complété par vos soins, le 24 juin 2016 au soir, après relecture de celui-ci force a été de constater que la qualité n’était pas au rendez-vous à tel point que le document en l’état était inexploitable et a nécessité à Mme J de le refaire dans son intégralité, cela vous a d’ailleurs été précisé dans le courriel en date du 1er juillet 2016, envoyé par Mme J :

'Bonjour Najate, Merci de ton retour. Par contre, avec K, nous avons constaté que la vérification avait été très « light ». Nous avons dû passer beaucoup de temps à refaire l’exercice sur l’ensemble des documents. Nous aurions apprécié que tu nous informes de tes éventuelles difficultés à compléter cet exercice, et par ailleurs ca/a nous aurait épargné cette charge de travail supplémentaire. »


Sur ce point si la matérialité de l’insatisfaction de Mme J est établie, les circonstances dans lesquelles Mme X a accepté cette tâche, qui ne relevait pas de ses compétences et aucun élément permettant d’apprécier son niveau en langue anglaise, la brièveté du délai consenti en comparaison (l’après-midi du 24 juin) à comparer au temps que la supérieure indique avoir dû y consacrer, soit 'beaucoup de temps', ne permet pas de caractériser le sérieux du grief reproché à ce titre.

6) De plus, concernant votre Plan de formation 2016, Mme N J vous a transmis par courriel début mars 2016 votre parcours de formation personnalisé à suivre (« Plan Formation:


Cursus e-O Communication»), et ce comme à l’ensemble des collaborateurs.


Or, à ce jour, nous constatons que malgré votre période d’inter-contrat, qui dure depuis plusieurs mois, aucune des formations que vous deviez réaliser ne l’a été.


Cela démontre encore une fois, votre non investissement dans votre évolution professionnelle au sein de notre société.


Sur ce point, Mme X communique un état de suivi des formations 'web based O’ faisant état de sa participation à diverses séquences de formation pour un total d’une quinzaine

d’heures contre un attendu global pour l’ensemble de ces formations de 8 jours, 15 heures.


En outre, si Mme X justifie avoir suivi la formation SEGA prévue sur cinq jours en présentiel, en mai 2016 (pièce n°16 de l’appelante) , force est de relever qu’elle n’a pu en faire aucune restitution auprès du client SG lors de l’entretien organisé à la fin du mois de juin, ainsi qu’il ressort ci-avant.


Enfin, nous déplorons globalement votre manque de contribution au sein de la Practice


Go-to-Market : non participation aux réunions de practice, aucune collaboration dans la capitalisation et le partage de connaissance ou encore dans la gestion de carrières des collaborateurs plus juniors.


Ce comportement n’est pas en adéquation avec les attendus de votre rôle, d’autant plus qu’étant en inter-contrat vous avez tout le temps pour 'contribuer à l’effort collectif au niveau de votre Practice

d’appartenance.


À ce titre, Mme X fournit plusieurs messages datant de septembre 2015 au 17 mars 2016 attestant que, sur cette période elle était concrètement impliquée dans ce travail, organisant une réunion, rendant compte d’une présentation. Aucun élément n’est communiqué pour la période des deuxième et troisième trimestres 2016. Ce grief est établi dans cette limite.
En définitive, alors que Mme X avait été effectivement alertée, d’une part, à l’occasion de ses évaluations, l’employeur soulignant dans son évaluation 2015 déplorer son comportement en visant « son manque de volonté et de motivation pour partir en mission, les difficultés pour être jointe par téléphone, mail, etc. (des échanges factuels par mail ont pu démontrer ces difficultés) et un entretien d’EDP effectué totalement hors délai demandé par le management » et, d’autre part, par la mise en oeuvre d’un plan d’amélioration des performances et l’exigence de formation, il est établi que la salariée a fait preuve d’un manque de disponibilité, a manifesté une certaine réticence que ce soit auprès des collaborateurs de la société Capgemini Technology Services, voire de clients auprès de qui elle passait des entretiens et a fait preuve d’une manière générale d’un manque d’implication, caractérisant une cause réelle et sérieuse de licenciement de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a considéré le licenciement bien-fondé.

II – Sur la demande en paiement d’une indemnité pour licenciement irrégulier :


Alors que l’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée au salarié ou la remise en main propre de la lettre de convocation, il n’est pas utilement discuté par l’employeur que ce délai n’a pas été en l’espèce respecté, la société intimée se contentant de plaider le non cumul de cette indemnité et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l’ancienneté de Mme X et de l’effectif de l’entreprise.


Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Capgemini Technology Services à payer à Mme X la somme de 5 188 euros à ce titre.

III – Sur l’indemnité de 5 000 euros au titre des conditions de la rupture :


Le conseil a accueilli cette réclamation pour les motifs suivants :

« En droit :


La loi n’impose pas au salarié que l’entretien ait lieu obligatoirement, de ce fait le déroulement de la procédure de licenciement n’est pas interrompu.


En fait :


Attendu que Mme X de retour de congés n’a pas demandé le report de son entretien préalable, la procédure de licenciement s’est poursuivie dans les conditions précédentes lui imposant les mêmes contraintes de calendrier.


Le conseil fait droit à la demande de Mme X […] ».


Alors que la société Capgemini Technology Services demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée de ce chef, Mme X ne fait valoir en cause d’appel aucun moyen ni argumentation au soutien de cette prétention.
À supposer que la demande reposait sur des conditions vexatoires ou brutales, la salariée ne justifie pas d’une faute ni d’un quelconque préjudice spécifique résultant des circonstances dans lesquelles la procédure de licenciement a été initiée.


Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société Capgemini Technology Services au paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts.

PAR CES MOTIFS


La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale, par mise à disposition au greffe,


Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la société Capgemini Technology


Services au paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour 'non respect des conditions de la rupture',


Statuant à nouveau sur ce chef,


Déboute Mme X de sa demande de dommages et intérêts pour 'non respect des conditions de la rupture',


Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause

d’appel comme en première instance.


Condamne Mme X aux entiers dépens.


Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.


Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Monsieur TAMPREAU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Le greffier, Le président,
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Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 10 février 2022, n° 20/00091