Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 14 novembre 2013, 12BX00465, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Par Maître Sébastien BECUE, avocat of counsel (Green Law Avocats) Un arrêt récent du Conseil d'Etat en matière de erres agrivoltaïques doit retenir l'attention (CE, 12 juil. 2019, n°422542) La question semblait déjà réglée pour la plupart des juridictions du fond : la pose de panneaux photovoltaïques en toiture de serres, dès lors qu'il est démontré que ces serres servent réellement un projet agricole, ne remet pas en cause le caractère agricole des serres. C'est le cas même lorsque l'électricité produite par la couverture solaire est destinée à l'injection sur le réseau public de …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 1re ch. - formation à 3, 14 nov. 2013, n° 12BX00465
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 12BX00465
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Martinique, 22 décembre 2011, N° 1000489
Identifiant Légifrance : CETATEXT000028270227

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 24 février 2012 par télécopie, régularisée le 27 février 2012, présentée pour la société FPV La Broue, ayant son siège social Immeuble Phoenix, Lareinty à Le Lamentin (97232), par Me B… ;

La société FPV La Broue demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1000489 du 23 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 26 mars 2010 du préfet de la Martinique ayant rejeté sa demande de permis de construire des serres agricoles anticycloniques parasismiques, recouvertes pour partie de panneaux photovoltaïques, sur un terrain cadastré S n° 177, appartenant à M. A… et situé au Vauclin ;

2°) d’annuler l’arrêté du 26 mars 2010, ensemble la décision implicite par laquelle le préfet de la Martinique a rejeté le recours gracieux qu’elle a formé contre cet arrêté ;

3°) d’enjoindre au préfet de la Martinique de procéder à un nouvel examen de sa demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’arrêté à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 octobre 2013 :


- le rapport de Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

1. Considérant que par un arrêté du 26 mars 2010, le préfet de la Martinique a rejeté la demande de permis de construire présentée par la société FPV La Broue et portant sur la construction de 1,1 hectare de serres anticycloniques et parasismiques (pour 2,1 hectares d’emprises au sol), dont 50 % des toitures (pans de toiture orientés au sud) doivent être recouverts de panneaux photovoltaïques, permettant une production annuelle d’électricité de l’ordre de 1 496 mégawatts-heure ; que par le jugement attaqué n° 1000489 du 23 décembre 2011, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté la demande de la société FPV La Broue tendant à l’annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que l’article L. 9 du code de justice administrative dispose que : « Les jugements sont motivés. » ; qu’il ressort des pièces du dossier que les premiers juges, qui n’étaient pas tenus de répondre à l’ensemble des arguments présentés par la FPV La Broue à l’appui de ses moyens, ont jugé, d’une part, que l’arrêté du 26 mars 2010 comportait une motivation suffisante, en droit et en fait, au sens des dispositions de l’article R. 424-5 du code de l’urbanisme et, d’autre part, qu’il ne ressortait ni de l’étude d’impact ni d’aucune autre pièce du dossier que les ouvrages projetés par la FPV La Broue pouvaient être regardés, au sens de l’article NC 1 du règlement du plan d’occupation des sols, soit comme des bâtiments d’exploitation agricole, soit comme des installations nécessaires à l’exploitation agricole, soit comme des compléments d’une exploitation agricole ; qu’ils ont ainsi suffisamment répondu aux moyens soulevés par la FPV La Broue et tenant, pour le premier, à l’insuffisance de motivation de l’arrêté attaqué et, pour le second, à l’erreur commise par le préfet quant à la qualification juridique des constructions envisagées ; que, par conséquent, le jugement du tribunal administratif de Fort-de-France du 23 décembre 2011 est suffisamment motivé ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article NC 1 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune du Vauclin : « 1.1 – Occupations et utilisations du sol admises sans condition : Les bâtiments d’exploitations agricoles ou d’élevage. (…) » ;

4. Considérant que si la demande de permis de construire en litige a été déposée par la FPV La Broue, filiale du groupe Akuo Energy spécialisé dans la production d’électricité, il ressort clairement des pièces du dossier, et il n’est d’ailleurs pas contesté en défense, que les serres projetées, édifiées sur un terrain actuellement utilisé pour la culture du melon, seront mises, notamment, à la disposition de l’EARL Agri-Caraïbes, qui, installée au Vauclin, y exploite 60 hectares de terres agricoles affectés à la culture du melon, dont 4 000 mètres carrés sont d’ores et déjà couverts par une serre traditionnelle ; qu’en raison de l’importance de la saison des pluies, qui affecte ses rendements ainsi que sa capacité à satisfaire la demande pendant une période pouvant s’étendre jusqu’à six mois par an, cette société a souhaité réaliser un plan d’investissement sur trois ans portant, notamment, sur la création de 40 000 mètres carrés de serres de production répartis sur trois ou quatre sites ; que, pour la mise en oeuvre de ce projet, elle s’est rapprochée de la société Akuo Energy, laquelle avait d’ores et déjà mené des projets comparables de construction de « serres anticycloniques photovoltaïques » à la Réunion ; que le site du Vauclin, qui comprend 11 000 mètres carrés de serres, devait constituer la première tranche du projet envisagé par la société Agri-Caraïbes ;

5. Considérant par ailleurs qu’en dehors de la saison des pluies, il est prévu que les serres seront mises à la disposition de M. C…, agriculteur, lequel y développera des cultures maraichères et/ou horticoles performantes, qui nécessitent une réduction de l’ensoleillement, particulièrement important pendant la saison sèche ; que la couverture prévue sur les serres, qui alterne des zones couvertes par des panneaux photovoltaïques et des zones couvertes par un matériau diffusant type « Ondex », favorisera une répartition homogène de la luminosité ;

6. Considérant ainsi que le projet litigieux de construction de « serres anticycloniques photovoltaïques » permettra une exploitation annuelle en continu des terres concernées, associée à une augmentation du rendement, et se traduira donc par un accroissement de la production agricole, évalué, sans contredit, à plus de 200 % par l’étude d’impact afférente au projet ;

7. Considérant que ledit projet est rendu possible par la prise en charge de sa réalisation par la société FPV La Broue, qui assumera la rentabilité de cet investissement par la vente de la production électrique à ERDF ; que dans ces conditions, les « serres anticycloniques photovoltaïques » en litige doivent être regardées comme destinées à l’exploitation agricole, une telle destination ne se trouvant pas dénaturée par l’installation, sur une partie de leur couverture, de panneaux photovoltaïques, lesquels, en tant qu’ils permettent d’assurer la rentabilité de l’exploitation, revêtent un caractère accessoire ;

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société FPV La Broue est fondée à soutenir que le préfet de la Martinique, en considérant que le projet litigieux de construction de onze serres agricoles anticycloniques et parasismiques, recouvertes pour partie de panneaux photovoltaïques, méconnaissait les dispositions du règlement du plan d’occupation des sols applicable en zone NC, a entaché l’arrêté attaqué du 26 mars 2010 d’une erreur d’appréciation ;

9. Considérant que, pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, en l’état du dossier, aucun autre moyen ne paraît susceptible de fonder l’annulation prononcée par le présent arrêt ;

10. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société FPV La Broue est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

11. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. » ;

12. Considérant que l’exécution de la présente décision implique que la demande de permis de construire présentée par la société FPV La Broue soit examinée par l’autorité compétente pour en connaître ; que l’article L.422-2 du code de l’urbanisme a prévu que " Par exception aux dispositions du a de l’article L. 422-1, l’autorité administrative de l’Etat est compétente pour se prononcer sur un projet portant sur : (…)b) Les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d’énergie, ainsi que ceux utilisant des matières radioactives ; un décret en Conseil d’Etat détermine la nature et l’importance de ces ouvrages  » ; qu’en vertu de l’article R. 422-2-1 du code de l’urbanisme, tel qu’introduit par l’article 3 du décret n° 2012-274 du 28 février 2012 relatif à certaines corrections à apporter au régime des autorisations d’urbanisme : « Les installations de production d’électricité à partir d’énergie renouvelable accessoires à une construction ne sont pas des ouvrages de production d’électricité au sens du b de l’article L. 422-2. » ; qu’il résulte de ces dispositions que l’autorité communale, et donc en l’espèce le maire du Vauclin, est seule compétente pour examiner une demande d’autorisation de construire des serres agricoles supportant, sur une partie de leur couverture, des panneaux photovoltaïques destinés à produire de l’électricité en vue de sa revente à ERDF ; que toutefois, la commune du Vauclin n’est pas partie à la présente procédure ; que, par suite, les conclusions en injonction présentées par la société FPV La Broue ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros à verser à la société FPV La Broue en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1000489 du tribunal administratif de Fort-de-France du 23 décembre 2011 et l’arrêté n° PC97223209BR112 du préfet de la Martinique du 26 mars 2010, sont annulés, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux de la société FPV La Broue du 17 mai 2010.


Article 2 : L’Etat versera à la société FPV La Broue une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société FPV La Broue est rejeté.

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No 12BX00465

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