Cour administrative d'appel de Douai, 9 juillet 2009, n° 08DA00274

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Douai, 9 juill. 2009, n° 08DA00274
Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro : 08DA00274
Décision précédente : Tribunal administratif de Rouen, 7 janvier 2008, N° 0300050-0300051

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE DOUAI

N°08DA00274


SARL LE FRANCE


M. Xavier Larue

Rapporteur


M. Alain de Pontonx

Rapporteur public


Audience du 25 juin 2009

Lecture du 9 juillet 2009


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19-06-02-08-01

D

vba

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Douai

(3e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2008 au greffe de la Cour administrative d’appel de Douai, présentée pour la SARL LE FRANCE, représentée par son mandataire liquidataire, ayant son siège Bois d’Alençon à XXX, par Me Di Dio, avocate ; elle demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement nos 0300050-0300051 du 8 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant, d’une part, à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 et, d’autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % à cet impôt ainsi qu’aux pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999 ;

2°) de prononcer lesdites décharges ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu’en procédant le 26 mars 2000 à un contrôle inopiné de sa billetterie, l’administration a commis un détournement de procédure et l’a privée des garanties inhérentes à la procédure de vérification de comptabilité ; que le service a méconnu les dispositions de l’article L. 52 du livre des procédures fiscales en procédant à une vérification de plus de trois mois alors que son chiffre d’affaires global n’excède pas, au cours des exercices en litige, le seuil de 5 000 000 francs prévu à l’article 302 septies A du code général des impôts ; que l’instruction 13 L 7-88 du 6 mai 1988 imposait à l’administration de motiver les réponses à ses observations ; que la charge de la preuve du bien-fondé de la reconstitution de recettes opérée doit être dévolue à l’administration en raison de l’irrégularité de la composition de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires ainsi que de l’insuffisante motivation de l’avis émis par cette commission ; que l’administration n’était pas fondée à écarter, comme non probante, sa comptabilité ; que, concernant ses recettes de billetterie, l’administration n’apporte pas la preuve des irrégularités comptables dont elle se prévaut en l’absence de procès-verbal d’infraction à la réglementation en matière de billetterie et alors qu’elle ne pouvait pas recourir à une procédure contradictoire à fin de constater ces infractions ; que l’obligation de délivrer des billets par ordre numérique croissant ne s’impose qu’au cours d’une même soirée et non comme le soutient l’administration, tout au long de l’exercice ; que si elle ne disposait pas d’un registre, comme prévu à l’article 50 sexies H de l’annexe IV au code général des impôts, elle disposait néanmoins d’un brouillard de caisse mentionnant les premiers et derniers billets délivrés ; que s’agissant des recettes de bars, elle était fondée, en application des dispositions de l’article 286 3° du code général des impôts et de l’article 3 du décret n° 83-1020, à procéder, comme elle l’a fait, à leur comptabilisation globale en fin de journée ; que, pour ces recettes, l’administration ne saurait se prévaloir de l’absence de caisses enregistreuses dès lors que les produits étaient vendus, par catégorie, à un prix unique ; que la globalisation de ses recettes accessoires de vestiaires, de téléphone et de cigarettes, n’est pas de nature à justifier le rejet de sa comptabilité ; que les erreurs constatées dans l’inventaire de ses stocks sont insignifiantes et ne sauraient faire douter de la sincérité de la comptabilité présentée ; que, concernant les reconstitutions opérées, il appartenait à l’administration de présenter plusieurs méthodes de reconstitution de recettes ; que s’agissant des recettes de billetterie, la méthode de reconstitution choisie est simpliste, sommaire et radicalement viciée ; que, pour arrêter les recettes de vestiaires, le vérificateur ne pouvait pas se fonder sur une étude réalisée au cours du seul mois de septembre 2000 à fin de déterminer le pourcentage des clients utilisateurs ; que les recettes de tabacs ne tiennent pas compte des offerts et de la consommation du personnel ; qu’en outre, le vérificateur a commis une erreur en appliquant un prix unique à ces ventes ; qu’il y a lieu de corriger la reconstitution des recettes de bars en considérant, en premier lieu, qu’il ne peut être tiré que trois demis par litre de bière pression et qu’un coefficient de perte de 10 % doit être appliqué sur ces boissons, en second lieu, que les pertes, les sur et sous dosages, les offerts à la clientèle et la consommation du personnel représentent 18 % des recettes et, en dernier lieu, que l’évaluation du prix des consommations liées aux entrées et dites gratuites a été minorée ; que l’administration ne pouvait pas procéder à la réintégration de charges au seul motif qu’elles n’étaient pas justifiées par des documents formant preuve certaine mais retracées dans un cahier de dépenses ; que ces charges ne sont pas excessives au regard de la nature et de l’importance de l’exploitation ; qu’elle est ainsi fondée à se prévaloir de la doctrine administrative résultant de la réponse ministérielle au député X du 8 juillet 1954 ainsi que de l’instruction du 30 octobre 1997 publiée à la documentation administrative de base sous le numéro de référence 4 C-425 ; que l’administration n’apporte pas la preuve de sa mauvaise foi et n’a, de surcroît, pas motivé les pénalités prononcées à ce titre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui demande à la Cour de rejeter la requête ; il fait valoir que le détournement de pouvoir allégué ne peut porter que sur l’exercice clos en 1999 ; qu’en tout état de cause, le contrôle de billetterie du 26 mars 2000 n’a pas eu pour objet de procéder à une vérification de comptabilité alors que la brigade de contrôle et de recherche s’est bornée à examiner la conformité de la billetterie de la soirée et n’a opéré aucun rapprochement avec les écritures comptables de la société ; que le service était fondé à procéder à une vérification de plus de trois mois dès lors que, si le chiffre d’affaires global de la SARL LE FRANCE n’excédait pas 5 000 000 francs au cours des exercices contrôlés, ses recettes de billetterie et, par suite, les recettes liées aux prestations de service qu’elle assure excédaient le seuil de 1 500 000 francs ; que l’absence d’un représentant de la chambre de commerce et d’industrie, régulièrement convoqué à la séance, est sans incidence sur la régularité de l’avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires ; que cet avis est, en outre, suffisamment motivé ; que compte tenu des multiples irrégularités relevées par le service dans la tenue de la comptabilité de la société, la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à soutenir que cette comptabilité a été considérée à tort comme insincère et non probante ; qu’en effet, la globalisation des recettes ne dispense pas les sociétés de fournir des pièces justificatives détaillées ; que les graves erreurs relevées dans l’inventaire des stocks constituent un indice supplémentaire de l’insincérité de la comptabilité ; que la billetterie tenue par la SARL LE FRANCE ne permettait pas de vérifier les recettes y afférentes dès lors, d’une part, que les tickets, qui ne mentionnent ni le nom du fabricant, ni le tarif ou la gratuité et qui ne sont pas numérotés dans un ordre continu et croissant, ont été vendue sans tenir compte, au cours des exercices contrôlés, de la numérotation et à des tarifs différents au cours de l’année et que, d’autre part, le registre de la vente détaillé des billets, prévu à l’article 50 sexies H du code général des impôts, n’a pas été tenu ; que la méthode de reconstitution des recettes de billetterie ne pouvait, aux dires de la société, se montrer plus réaliste ; que le pourcentage des clients utilisant les vestiaires a été fixé contradictoirement, conformément aux informations fournies par le gérant de la discothèque ; que la requérante n’apporte aucune preuve de l’existence de paquets de cigarettes offerts ou consommés par le personnel ; qu’en l’absence de tout justificatif, la SARL LE FRANCE n’est fondée à se prévaloir ni d’une sous-estimation du prix de la consommation gratuite consommée sur présentation du ticket d’entrée, ni d’une sous-estimation du pourcentage des pertes, des offerts et de la consommation du personnel retenue par le vérificateur dans le cadre de la reconstitution de ses recettes de bars ; que le nombre de bières pression tirées par litre a été estimé, conformément à l’avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, à 3,5 par litre et qu’il a été tenu compte d’une perte de 2 litres par fût ; que les charges réintégrées, qui ne sont nullement justifiées, n’ont pas été exposées dans l’intérêt de l’exploitation ; que les pénalités de mauvaise foi, dûment motivées, sont justifiées par les irrégularités de la comptabilité qui ont eu pour conséquence de minorer, de façon systématique et répétée au cours de la période d’imposition, les recettes ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 janvier 2009, présenté pour la SARL LE FRANCE qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; elle ajoute que le prix du billet d’entrée ne correspond pas strictement à une prestation de service dès lors qu’il donne droit à une première consommation ; que l’administration a procédé à l’évaluation du chiffre d’affaires correspondant au prix de ses premières consommations qui a été compris dans les recettes d’entrées ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 février 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut aux mêmes fins que ses précédents écrits par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 83-1020 du 29 novembre 1983 relatif aux obligations comptables des commerçants et de certaines sociétés ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique le rapport de M. Xavier Larue, conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n’étant présente ni représentée ;

Considérant que la SARL LE FRANCE, qui gère une discothèque, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité, qui a débuté dans ses locaux le 3 août 2000 et s’est poursuivie, pour l’exercice clos en 1997, jusqu’au 19 décembre 2000 et, pour les exercices clos en 1998 et 1999, jusqu’au 22 février 2001 ; que, par une notification de redressement du 20 décembre 2000, l’administration l’a informée qu’elle envisageait, selon la procédure contradictoire, de procéder à des rehaussements d’impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % à cet impôt, au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1997, ainsi qu’à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1997 ; que la SARL LE FRANCE a, à titre conservatoire, contesté l’ensemble des rehaussements par lettre en date du 16 décembre 2001 ; que, par une seconde notification de redressement, datée du 23 février 2001, l’administration a informé la SARL LE FRANCE de son intention de procéder à des rappels de taxes sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999 ainsi qu’à des rehaussements de ses bases imposables à l’impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % à cet impôt au titre des exercices clos en 1998 et 1999, liés tant à la reconstitution de ses recettes qu’à la réintégration de certaines charges qui n’auraient pas été effectuées dans l’intérêt de la société ; que, par courrier du 19 mars 2001, la SARL LE FRANCE a contesté la procédure d’imposition suivie ainsi que le rejet de sa comptabilité et a critiqué la reconstitution de ses recettes relatives à son activité de bars ; que, suite aux deux lettres en réponse, datées du 20 avril 2001, refusant de faire droit à ses observations, la SARL LE FRANCE a saisi la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires qui a modifié, à la marge, la reconstitution de recettes opérée en estimant que le nombre de verres pouvant être servis par litre de bière pression devait être fixé à 3,5 et non à 4 comme l’avait estimé le vérificateur ; que les rappels de taxes sur la valeur ajoutée et les cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % à cet impôt, correspondants aux bases d’imposition arrêtées par la commission, ont été mis en recouvrement, respectivement, le 15 avril et le 30 juin 2002 ; que, suite au rejet le 12 novembre 2002 de ses réclamations contentieuses des 13 mai et 17 juillet 2002, la SARL LE FRANCE a saisi le Tribunal administratif de Rouen du litige persistant avec l’administration fiscale ; qu’elle relève appel du jugement nos 0300050-0300051, en date du 8 janvier 2008, par lequel le Tribunal a rejeté ses demandes de décharge des impositions mises à sa charge ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

Considérant, en premier lieu, que la SARL LE FRANCE soutient que le contrôle inopiné de billetterie effectué par la brigade de contrôle et de recherches d’Evreux le 26 mars 2000, en vertu des dispositions de l’article L. 26 du livre des procédures fiscales, a été utilisé par l’administration à des fins de vérification de comptabilité et qu’elle n’a, par suite, pas bénéficié des garanties propres à cette dernière procédure prévues à l’article L. 47 du même livre ; qu’il résulte de l’instruction que, comme le soutient la requérante, le contrôle du 26 mars 2000 a été mis en œuvre irrégulièrement dès lors que l’administration ne fait valoir aucun soupçon de fraude fiscale ou d’infraction à la législation économique le justifiant et qu’il n’a été suivi d’aucune poursuite pénale ; que, toutefois, le procès-verbal des opérations de contrôle de billetterie, daté du 10 avril 2000, établit que les agents de la brigade ne se sont pas livrés à l’examen des pièces comptables de la SARL LE FRANCE et ont procédé à des constatations matérielles limitées au seul contrôle des tickets d’entrée délivrés le 26 mars 2000 ; qu’ainsi, et nonobstant l’irrégularité intrinsèque de leur intervention, il résulte de l’instruction que les agents de la brigade de contrôle et de recherche n’ont pas eu pour dessein de procéder à une vérification de comptabilité ; que, par suite, le moyen, tiré du détournement de procédure commis par l’administration, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que la SARL LE FRANCE soutient que l’administration a méconnu les dispositions de l’article L. 52 du livre des procédures fiscales qui limitent à 3 mois la durée des vérifications de comptabilité des entreprises industrielles et commerciales mentionnées à l’article 302 septies A du code général des impôts ; que ledit article dispose, dans sa rédaction alors en vigueur : « Il est institué (…) un régime simplifié de liquidation des taxes sur le chiffre d’affaires dues par les personnes dont le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 000 francs, s’il s’agit d’entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou 1 500 000 francs, s’il s’agit d’autres entreprises » ; qu’il résulte, toutefois, de ce que dit ci-après que le chiffre d’affaires global de la SARL LE FRANCE a été, à bon droit, rehaussé par l’administration et que ce chiffre dûment rectifié a, comme le montre l’avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, dépassé la limite susmentionnée pour chacun des exercices vérifiés ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu’en l’espèce, la vérification de comptabilité aurait duré plus de trois mois ne peut être accueilli ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte de l’instruction que, à le regarder comme soulevé, le moyen tiré de ce que les réponses aux observations du contribuable sont insuffisamment motivées manque en fait ; que, par suite, la SARL LE FRANCE n’est, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir de l’instruction qu’elle invoque ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant que le premier alinéa de l’article L. 59 du livre des procédures fiscales dispose que : « Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l’administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l’avis, soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires prévue à l’article 1651 du code général des impôts, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l’article 667 du même code » ; que, selon les dispositions de l’article R*60-3 du même livre : « L’avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé (…) » ; que l’article L. 192 du livre des procédures fiscales dispose que : « Lorsqu’une des commissions visées à l’article L. 59 est saisie d’un litige ou d’un redressement, l’administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l’avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l’imposition a été établie conformément à l’avis de la commission. / La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l’administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le redressement est soumis au juge (…) » ;

Considérant que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l’avis de la commission, s’ils n’affectent pas la régularité de la procédure d’imposition, peuvent avoir pour effet de modifier, le cas échéant, la dévolution de la charge de la preuve telle que prévue par l’article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en premier lieu, que la SARL LE FRANCE soutient que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires était irrégulièrement composée dès lors que le représentant de la chambre de commerce et d’industrie n’était pas présent lors de la séance et que la composition paritaire de la commission en a été affectée ; que, toutefois, aucune règle législative ou réglementaire n’impose que siègent en nombre égal, à la commission, les représentants des contribuables et ceux de l’administration ; qu’il résulte, en outre, de l’instruction que le commissaire absent a été dûment convoqué à la séance du 14 février 2002 ; qu’ainsi, cette absence n’est pas de nature à vicier l’avis rendu par la commission qui était composée de cinq membres, y compris son président, et pouvait donc valablement statuer ; qu’il suit de là que la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à soutenir que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, réunie le 14 février 2002, était irrégulièrement composée ;

Considérant, en second lieu, que la SARL LE FRANCE soutient que l’avis de la commission est insuffisamment motivé et méconnaît les dispositions précitées de l’article R*60-3 du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, il résulte de l’instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires a, d’une part, précisé les raisons, nonobstant leur bien-fondé, pour lesquelles la comptabilité de la SARL LE FRANCE ne pouvait être regardée comme probante et, d’autre part, procédé à une analyse des motifs retenus par l’administration pour justifier les rehaussements en litige ainsi qu’à un examen, quel qu’en soit le bien-fondé, des arguments et moyens du contribuable ; que, dès lors, l’avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires était suffisamment motivé ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SARL LE FRANCE, dont l’imposition a été établie conformément à l’avis émis par la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires le 12 février 2004, n’est pas fondée à soutenir que cet avis est entaché de vices de forme ou de procédure de nature à modifier la dévolution de la charge de la preuve prévue par les dispositions précitées de l’article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité de la SARL LE FRANCE :

Considérant que l’article 54 du code général des impôts dispose que : « Les contribuables mentionnés à l’article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l’administration tous documents comptables, inventaires, copie de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l’exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. » ;

S’agissant de la comptabilisation des recettes de billetterie :

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 290 quater du même code : « I. Dans les établissements de spectacles comportant un prix d’entrée, les exploitants doivent délivrer un billet à chaque spectateur avant l’entrée dans la salle de spectacle. (…) » ; que l’article 50 sexies B de l’annexe IV au code général des impôts dispose que : « Les billets doivent être numérotés suivant une série ininterrompue et utilisés dans leur ordre numérique » ; qu’aux termes des dispositions de l’article 50 sexies G de ladite annexe : « Les exploitants de spectacles sont comptables des billets qu’ils ont reçus ; ils doivent présenter les coupons de contrôle et les billets non utilisés à toute réquisition des agents des impôts » ; qu’enfin, l’article 50 sexies H de cette même annexe dispose : « Les exploitants de spectacles sont tenus d’établir, dès la fin de chaque journée ou représentation, un relevé comportant, pour chaque catégorie de places : les numéros des premiers et derniers billets délivrés, le nombre de ceux-ci, le prix de la place et la recette correspondante. Tous registres ou documents présentant les indications prévues ci-dessus tiennent lieu de relevé. Les relevés doivent être tenus à la disposition des agents des impôts et conservés par les exploitants selon les modalités prévues au I de l’article L. 102 B du livre des procédures fiscales. » ;

Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’instruction que la SARL LE FRANCE a utilisé, au cours de la période d’imposition en litige, des billets, qui ne mentionnaient ni le nom du fabricant, ni le tarif ou la gratuité et qui n’étaient pas numérotés dans un ordre continu et croissant ; qu’il n’est pas contesté que ces billets ont été vendus, en certaines occasions, à des tarifs différents de ceux qu’ils mentionnaient et que le registre détaillé de leur vente, prévu à l’article 50 sexies H de l’annexe IV au code général des impôts, n’a pas été tenu ; que si la SARL LE FRANCE soutient qu’elle disposait d’un brouillard de caisse mentionnant les premier et dernier billets délivrés, ce document, à supposer qu’il existe, ne comporte pas les mentions relatives au nombre des billets, au prix des places et à la recette correspondante et ne saurait donc tenir lieu de registre au sens des dispositions précitées de l’article 50 sexies H de l’annexe IV au code général des impôts ; que si la SARL LE FRANCE soutient que l’obligation de délivrer des billets par ordre numérique croissant ne s’impose qu’au cours d’une même soirée, il résulte, toutefois, des dispositions de l’article 50 sexies B de l’annexe IV au code général des impôts que les discothèques sont tenues d’utiliser, dans leur ordre numérique, des billets numérotés suivant une série ininterrompue ; que dès lors, l’obligation en cause s’impose, comme le fait valoir l’administration, tout au long de l’exercice ;

Considérant, en second lieu, que la SARL LE FRANCE soutient que l’administration n’apporte pas la preuve des irrégularités comptables dont elle se prévaut en l’absence de procès-verbal d’infraction à la réglementation en matière de billetterie et alors qu’elle ne pouvait pas recourir à une procédure contradictoire aux fins de constater ces infractions ; que ces moyens sont, néanmoins, inopérants dès lors que la vérification de comptabilité n’a pas eu pour objet de constater des infractions à la législation applicable en matière de billetterie ;

S’agissant de la comptabilisation des recettes de bars, de vestiaires et de cigarettes :

Considérant qu’il n’est pas contesté que la SARL LE FRANCE a procédé à la comptabilisation journalière globale de ses recettes de bars, de vestiaires et de cigarettes et que, lors de la vérification de comptabilité, elle n’a produit aucun justificatif ou relevé détaillé de nature à apporter la preuve de l’exactitude des recettes déclarées ; que si elle se prévaut des dispositions de l’article 3 du décret du 29 novembre 1983, alors en vigueur, prévoyant la possibilité d’une comptabilisation sur une pièce justificative unique, ainsi que des dispositions de l’article 286 3° du code général des impôts, qui dans sa rédaction alors applicable, permettait une comptabilisation globale des ventes de chaque journée lorsqu’elles étaient inférieures à 500 francs, cette méthode de comptabilisation ne l’exonérait pas de la production de justificatifs détaillés prévus à l’article 54 du code général des impôts ; qu’en outre, si la SARL LE FRANCE allègue que les ventes de bars sont effectuées, par famille de produits, à un prix unique, elle ne l’établit pas ;

S’agissant des erreurs commises dans l’inventaire des stocks :

Considérant que la SARL LE FRANCE, en se bornant à faire valoir l’insignifiance des anomalies affectant son inventaire des stocks, ne conteste pas que, comme l’affirme l’administration, de nombreuses erreurs ont été commises ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu des nombreuses anomalies affectant les justificatifs de recettes et la tenue des stocks de la SARL LE FRANCE, l’administration apporte la preuve, qui lui incombe, de ce que la comptabilité de l’intéressée comporte de graves irrégularités ; que, par suite, l’administration était fondée à écarter cette comptabilité et à procéder à la reconstitution du chiffre d’affaires de la SARL LE FRANCE au titre de l’ensemble des exercices vérifiés ;

En ce qui concerne la reconstitution de recettes :

Considérant, en premier lieu, que, pour reconstituer les recettes de billetterie, le vérificateur a estimé que le nombre de billets vendus, par tarifs d’entrée, était égal, compte tenu de la numérotation croissante continue, à la différence entre le numéro du dernier billet vendu en fin d’exercice et celui du premier billet vendu en début d’exercice ; que la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à soutenir que cette méthode serait radicalement simpliste et sommaire alors qu’elle reconnaît que les recettes ainsi déterminées sont proches de celles qu’elle avait initialement comptabilisées et qu’elle ne produit aucune pièce justifiant que les montants de recettes ainsi déterminés seraient erronés ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour procéder à l’évaluation des recettes de bars, le vérificateur s’est fondé sur le décompte des achats revendus de boissons obtenu à partir des factures présentées lors du contrôle, corrigé par la variation des stocks en début et en fin d’exercice ; que la SARL LE FRANCE ne conteste pas le principe de la méthode ainsi retenue, exposée avec précision dans la notification de redressement, mais soutient seulement que des corrections doivent y être apportées ; que si la requérante allègue que les pertes, les casses, les sur et sous dosages, les offerts à la clientèle et les consommations du personnel représentent un minimum de 18 % du total des achats consommés, elle ne l’établit pas ; que la SARL LE FRANCE se borne, en outre, à alléguer que le prix des consommations liées aux entrées a été minoré par le service, qu’il ne peut être tiré que trois « demis » par litre de « bière pression » et qu’un coefficient de perte de 10 % doit être appliqué sur ces boissons ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour déterminer les recettes de vestiaires, le vérificateur s’est fondé sur un pourcentage d’utilisation déterminé contradictoirement avec le gérant de la SARL LE FRANCE ; qu’il suit de là que la méthode retenue n’est ni excessivement sommaire, ni radicalement viciée alors, qu’en outre, la requérante n’apporte aucun élément permettant d’établir que les bases d’imposition ainsi arrêtées sont exagérées ;

Considérant, en quatrième lieu, que, s’agissant des recettes de cigarettes, la SARL LE FRANCE se borne à faire valoir que les offerts et la consommation du personnel auraient dus être pris en compte et qu’un tarif unique a été appliqué par le vérificateur ; que ces allégations, dépourvues de justifications, ne sont pas de nature à établir l’exagération de la base d’imposition retenue par l’administration ; que, par suite, c’est à bon droit que des redressements qui ne sont pas, contrairement à ce qu’elle soutient, dépourvus de base légale en matière de taxe sur la valeur ajoutée, lui ont été notifiés à ce titre ;

Considérant, enfin, que, à supposer même que la SARL LE FRANCE ait entendu invoquer, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une instruction qui recommande à l’administration d’exposer plusieurs méthodes de reconstitution, elle ne saurait utilement s’en prévaloir dès lors que ladite instruction ne comporte pas une interprétation formelle de la loi fiscale ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SARL LE FRANCE n’apporte pas la preuve qui lui incombe de l’exagération des bases d’imposition retenues par l’administration ;

En ce qui concerne la réintégration des charges :

Sur le terrain de la loi :

Considérant qu’aux termes du 1 de l’article 39 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (…) » ; qu’il appartient au contribuable, pour l’application de ces dispositions de justifier tant du montant des charges qu’il entend déduire du bénéfice net défini à l’article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c’est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que cette justification résulte de la production d’éléments suffisamment précis relatifs à la nature de la charge en cause ainsi qu’à l’existence et à la valeur de la contrepartie qu’il en a retiré ;

Considérant que le service a réintégré aux résultats imposables de la SARL LE FRANCE des dépenses, engagées au cours des exercices clos en 1998 et 1999, qui ont été enregistrées dans ses comptes « réceptions » et « cadeaux clientèles » ; que l’intéressée, qui se borne à alléguer le caractère déductible desdites charges, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe ;

Sur le terrain de la doctrine :

Considérant que si la SARL LE FRANCE invoque, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la doctrine administrative résultant de la réponse ministérielle à M. X, député, en date du 8 juillet 1954 ainsi que de l’instruction du 30 octobre 1997 publiée à la documentation administrative de base sous le numéro de référence 4 C-425, elle ne saurait utilement s’en prévaloir dès lors qu’il s’agit de simples recommandations qui ne comportent pas une interprétation formelle de la loi fiscale ; que, par suite, la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à solliciter la déduction des charges en litige ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant, en premier lieu, que l’administration apporte la preuve, ainsi qu’il a été dit précédemment, que les irrégularités relevées dans la comptabilité de la SARL LE FRANCE avaient systématiquement pour effet de faire apparaître des recettes minorées et que ces irrégularités se sont répétées au cours de l’ensemble de la période d’imposition ; qu’il suit de là que l’absence de bonne foi de la requérante est établie ; que, par suite, la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort qu’ont été mises à sa charge les pénalités de mauvaise foi prévues à l’article 1729 du code général des impôts ;

Considérant, en second lieu, qu’il résulte de l’instruction que le moyen, tiré de l’insuffisante motivation des pénalités en litige, manque en fait ; qu’il doit, par suite, être écarté ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SARL LE FRANCE n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant, d’une part, à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférents auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 et, d’autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % à cet impôt ainsi qu’aux pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999 ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la SARL LE FRANCE au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL LE FRANCE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LE FRANCE ainsi qu’au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

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Cour administrative d'appel de Douai, 9 juillet 2009, n° 08DA00274