CAA de MARSEILLE, 4ème chambre-formation à 3, 22 avril 2016, 15MA03121, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 4e ch.-formation à 3, 22 avr. 2016, n° 15MA03121
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 15MA03121
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Sur renvoi de : Conseil d'État, 7 juillet 2015, N° 369730
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032582337

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’Office du développement agricole et rural de Corse a demandé au tribunal administratif de Bastia de le décharger des cotisations de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamées au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004.

Par un jugement n° 0900163 du 15 avril 2010, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10MA02771 du 26 avril 2013, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté la requête de l’Office du développement agricole et rural de Corse tendant à l’annulation de ce jugement.

Par une décision n° 369730 du 8 juillet 2015, le Conseil d’Etat a, sur pourvoi de l’Office du développement agricole et rural de Corse, annulé l’arrêt susmentionné et renvoyé l’affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 juillet 2010 et des mémoires enregistrés les 15 janvier 2013 et 17 mars 2016, l’Office du développement agricole et rural de Corse, représenté par Me B…, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement rendu par le tribunal administratif de Bastia le 15 avril 2010 ;

2°) de le décharger des rehaussements de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des exercices 2002 à 2004 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 6 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

— le jugement du tribunal administratif de Bastia est insuffisamment motivé ;

— son activité revêt dans son ensemble un caractère agricole au sens de l’article L. 311-1 du code rural, de la jurisprudence du Conseil d’Etat et du paragraphe n°4 de la documentation administrative de base 5 L 123, car toutes les activités qu’il exerce au titre de l’activité d’expérimentation agricole et du développement des filières agricoles de production s’inscrivent dans le cadre de la maîtrise de l’exploitation d’un cycle biologique et de caractère végétal ou animal ;

— l’administration se livre à une interprétation restrictive de la notion d’activité agricole et le critère du caractère prépondérant de l’activité agricole qu’elle oppose est dépourvu de base légale ;

— l’hypothèse d’une sectorisation évoquée par l’administration est infondée ;

— il ne fait pas partie, au sens des articles 53 bis et 53 ter de l’annexe III au code général des impôts, des organismes assujettis à la taxe sur les salaires en application de l’article 231 du code général des impôts ;

— à titre subsidiaire, son rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires est nul en vertu de l’instruction 3 CA 94 reprise par la doctrine administrative 3 B-112°14 du 20 juin 1995 selon laquelle les subventions qu’il perçoit pour les reverser aux exploitants et les subventions exceptionnelles non liées au prix de vente ne doivent être retenues ni au numérateur ni au dénominateur du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires ; le guide de la taxe sur la valeur ajoutée à l’usage des collectivités locales confirme cette exclusion des subventions du rapport d’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que les doctrines administratives référencées 5 L 4 95 n° 8 et 4 L 1421 n° 13 portant sur les encaissements pour le compte de tiers.

Par des mémoires enregistrés le 10 novembre 2010 et le 26 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut à titre principal au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens soulevés par l’Office du développement agricole et rural de Corse ne sont pas fondés, et conclut à titre subsidiaire, si la Cour estimait que les activités développées dans les deux stations d’expérimentation de l’Office du développement agricole et rural de Corse étaient agricoles et que l’Office ne pouvait être considéré comme devant être assujetti à la taxe sur les salaires au titre des années 2002 à 2004 pour ces seules activités, à la décharge partielle des impositions selon la logique de sectorisation retenue par la jurisprudence administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code rural et de la pêche maritime ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Martin,

 – les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,

 – et les observations de Me A… pour l’Office du développement agricole et rural de Corse.

Une note en délibéré, enregistrée le 30 mars 2016, a été présentée par l’Office du développement agricole et rural de Corse.

1. Considérant que l’Office du développement agricole et rural de Corse, établissement public industriel et commercial créé en 2002 et rattaché à la collectivité territoriale de Corse, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration l’a assujetti, en suivant la procédure de redressement contradictoire prévue à l’article L. 55 du livre des procédures fiscales, à la taxe sur les salaires, et a rappelé les droits correspondants pour la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ; que par jugement en date du 15 avril 2010, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de l’Office du développement agricole et rural de Corse tendant à la décharge de ces impositions ; que la Cour a confirmé ce jugement par un arrêt du 26 avril 2013, en estimant que l’Office du développement agricole et rural de Corse devait être assujetti à la taxe sur les salaires dès lors que l’activité de ses exploitations de Migliacciaro et d’Altiani ne pouvait être regardée comme étant de nature agricole ; que, cependant, par une décision du 8 juillet 2015, le Conseil d’Etat a, sur pourvoi de l’Office, annulé cet arrêt au motif que la Cour, pour écarter la qualification d’activité agricole, a commis une erreur de droit en se fondant sur les circonstances que l’activité des exploitations de Migliacciaro et d’Altiani était menée dans un but d’expérimentation et que la vente du produit de ces exploitations présentait un caractère accessoire, et a renvoyé l’affaire devant la Cour ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par l’Office du développement agricole et rural de Corse, il ne ressort pas du jugement attaqué, lequel est motivé en droit, que le tribunal administratif de Bastia, qui a rappelé les missions de l’Office et recherché dans quelle mesure celles-ci intervenaient dans le déroulement complet d’un cycle végétal de culture, n’aurait pas procédé à l’analyse des activités de l’Office ni précisé les raisons qui l’ont conduit à estimer que cet établissement public ne pouvait être regardé comme appartenant à une profession relevant du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale ; que par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges n’auraient pas suffisamment motivé le jugement critiqué sur ce point doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les moyens soulevés à titre principal par l’Office du développement agricole et rural de Corse :

3. Considérant qu’aux termes de l’article 231 du code général des impôts : « 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant (…) à la charge des personnes ou organismes (…) qui paient ces rémunérations lorsqu’ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires au titre de l’année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. (…) / (…) 3 a. Les conditions et modalités d’application du 1 sont fixées par décret. Il peut être prévu par ce décret des règles spéciales pour le calcul de la taxe sur les salaires en ce qui concerne certaines professions, notamment, celles qui relèvent du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale… » ; qu’il résulte de ces dispositions législatives que les seules activités agricoles assujetties à la taxe sur les salaires sont celles mentionnées par les dispositions réglementaires de l’article 53 bis de l’annexe III au code général des impôts s’agissant des organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles, et celles de l’article 53 ter de cette même annexe au code s’agissant des employeurs agricoles à raison des salaires versés au personnel affecté à des établissements de nature commerciale ou artisanale ;

4. Considérant que la qualification d’activité agricole, qui détermine, en application des dispositions citées au point précédent, l’absence d’assujettissement à la taxe sur les salaires, n’est pas subordonnée à la poursuite d’un objectif de production ou de vente, à l’exclusion des finalités de recherche et d’expérimentation ;

5. Considérant que l’Office du développement agricole et rural de Corse est chargé, selon les termes de l’article L. 112-11 du code rural et de la pêche maritime, « dans le cadre des orientations définies par la collectivité territoriale de Corse, de la mise en oeuvre d’actions tendant au développement de l’agriculture et à l’équipement du milieu rural » ; que, par ailleurs, aux termes de l’article L. 311-1 du code rural dans sa version alors vigueur : « Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation (…). » ;

6. Considérant que, dans le cadre des missions qui lui sont confiées par l’article L. 112-11 précité, l’Office du développement agricole et rural de Corse expérimente diverses techniques culturales et d’irrigation dans la station de Migliacciaro, ainsi que des systèmes de pâturage et des cultures fourragères dans la station d’élevage d’Altiani ; qu’il résulte également de l’instruction que l’Office procède à la vente des produits obtenus dans le cadre de ses opérations de recherche et d’expérimentation ; que ces activités, qui s’inscrivent dans le déroulement et la maîtrise d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal au sens de l’article L. 311-1 du code rural, présentent un caractère agricole ; qu’en revanche, les autres activités de l’Office, telles que la représentation en Corse des offices d’intervention du secteur agricole relevant du ministère de l’agriculture et les actions qu’il mène pour la modernisation des exploitations corses, la diversification de l’agriculture insulaire et la structuration des filières agricoles, notamment par des aides financières, des conseils et des études, ne présentent qu’un rapport indirect avec la production agricole ;

7. Considérant que si l’Office du développement agricole et rural de Corse se réfère, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, à la doctrine tirée du paragraphe n° 4 de la documentation administrative de base 5-L 123 qui prévoit une exonération de fait pour les autres employeurs que ceux énumérés par les articles 53 bis et 53 ter de l’annexe III au code général des impôts, cette doctrine ne comporte pas d’interprétation différente de la loi fiscale qui serait opposable à l’administration ;

En ce qui concerne les moyens soulevés à titre subsidiaire par l’Office du développement agricole et rural de Corse :

8. Considérant que l’Office de développement agricole et rural de Corse soutient, à titre subsidiaire, qu’aucune des subventions qu’il a perçues ne doit être prise en compte au numérateur du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires prévu par le 3° de l’article 231 du code général des impôts selon lequel « (…) Le chiffre d’affaires qui n’a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s’entend du total des recettes et autres produits qui n’ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (…) » et que, par suite, ce rapport est d’une valeur nulle ;

9. Considérant qu’il résulte de l’instruction, et notamment de la lettre que l’administration fiscale a adressée le 27 novembre 2007 que, pour le calcul du prorata d’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de l’Office de développement agricole et rural de Corse fixé à 8,27 % et celui du rapport inversé d’assujettissement à la taxe sur les salaires fixé à 91,73 %, l’administration a exclu du numérateur et du dénominateur du rapport des opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée les sommes pour lesquelles l’office n’intervenait qu’en tant qu’organisme répartiteur et les produits de cessions des biens mobiliers d’investissement ; qu’ainsi le moyen, qui est au demeurant dépourvu de tout élément justificatif chiffré, manque en fait ; que, par suite, l’Office de développement agricole et rural de Corse ne peut de même utilement se prévaloir des doctrines administratives qu’il invoque, qui se rapportent d’ailleurs à la taxe sur la valeur ajoutée, pour revendiquer l’exclusion du numérateur et du dénominateur du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires, des subventions qu’il reverse aux exploitants agricoles ;

10. Considérant que, dans ces conditions, alors qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’Office du développement agricole et rural de Corse pourrait être rattaché aux catégories d’établissements définies par les articles 53 bis et 53 ter de l’annexe III au code général des impôts comme devant acquitter la taxe sur les salaires visée à l’article 231 précité du code général des impôts, l’établissement public requérant est seulement en droit de demander la décharge de la taxe sur les salaires à laquelle il a été assujetti pour la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, au titre de ses activités de nature proprement agricole menées par les stations de Migliacciaro et d’Altiani ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’Office du développement agricole et rural de Corse est fondé à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande relative aux rappels de taxe sur les salaires pour la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 en tant que celle-ci concernait l’activité agricole des stations de Migliacciaro et d’Altiani ; qu’il y a lieu, par suite, de réformer dans cette mesure ledit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l’Office du développement agricole et rural de Corse et non compris dans les dépens ;


D E C I D E :

Article 1er : L’Office du développement agricole et rural de Corse est déchargé des rappels de taxe sur les salaires qui lui sont réclamés pour la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 au titre des activités des stations de Migliacciaro et d’Altiani.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 15 avril 2010 est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l’Office du développement agricole et rural de Corse est rejeté.

Article 4 : L’Etat versera à l’Office du développement agricole et rural de Corse la somme de 2 000 (deux mille) euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l’Office du développement agricole et rural de Corse et au ministre des finances et des comptes publics.


Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l’audience du 22 mars 2016, où siégeaient :

— M. Cherrier, président,

 – M. Martin, président-assesseur,

 – Mme Massé-Degois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 avril 2016.

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N° 15MA03121

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