CAA de NANCY, 26 mai 2020, 19NC03247, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 26 mai 2020, n° 19NC03247
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 19NC03247
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Autres
Décision précédente : Tribunal administratif de Besançon, 2 décembre 2019
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043109494

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes du Haut-Jura a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Besançon de prescrire une expertise aux fins de se prononcer sur l’origine et l’étendue des désordres affectant la toiture terrasse en forme de dôme de la médiathèque communautaire de Saint-Claude, de déterminer les travaux pour y remédier et de donner les éléments permettant d’établir les responsabilités encourues.

Par ordonnance n° 1802244 du 11 juin 2019, le juge des référés a fait droit à cette demande.

La société mutuelle d’assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) a demandé au juge des référés d’étendre les opérations d’expertise prescrites par son ordonnance du 11 juin 2019 à d’autres personnes que les parties initialement désignées et à compléter la mission de l’expert.

Par une ordonnance n° 1901307 du 24 octobre 2019, rectifiée par une ordonnance du 3 décembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon n’a fait que partiellement droit à sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 novembre 2019 et des mémoires en réplique enregistrés les 20 janvier, 31 janvier et 6 février 2020, la SMABTP, représentée par Me C…, demande à la cour :

1°) de réformer l’ordonnance du 24 octobre 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon ;

Statuant à nouveau :

2°) d’étendre et rendre communes et opposables les opérations d’expertise prescrites par l’ordonnance du 11 juin 2019 du juge des référés à la MAF, en sa qualité d’assureur de la société Etamine ;

3°) d’étendre et rendre communes et opposables les opérations d’expertise prescrites par l’ordonnance du 11 juin 2019 du juge des référés à la société AXA Iard en sa qualité d’ancien assureur de la société ECB, à la société anonyme de transaction et courtage et à la société Socotec construction ;

4°) de débouter la MAF, ès qualités d’assureur de la société Etamine et de la société EDA Eclairement désenfumage aération de toutes leurs demandes, moyens, fins et conclusions.

Elle soutient que :

— la MAF a été attraite aux opérations d’expertise prescrites par l’ordonnance du 11 juin 2019 en tant qu’assureur de la société Architecture Patrick Maugier et non en qualité d’assureur de la société Etamine ;

— la demande n’est interruptive de prescription à l’égard d’un assureur qu’en la qualité au titre de laquelle il est mis en cause ;

— la mise en cause de la MAF, ès qualités d’assureur de la société Etamine, présente donc un caractère utile ;

— la société Etamine a réalisé les prestations qui lui avaient été confiées avant la résiliation de sa police d’assurance auprès de la MAF ;

— la mise en cause des constructeurs n’a pas d’effet à l’égard de l’ensemble des parties, notamment à l’égard de l’assureur dommages ouvrages ;

— les mises en cause de la société AXA France Iard, en qualité d’assureur de la société ECB, de la société anonyme de transaction et courtage et de la société Socotec construction, étant intervenues à la seule initiative du juge des référés, n’ont aucun effet interruptif de prescription à son égard ;

— la présence de la société EDA Eclairement désenfumage aération et de son sous-traitant, la société Souchier-Boullet, aux opérations d’expertise est indispensable dans la mesure où ils sont intervenus sur la couverture pour réaliser des prestations d’asservissement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 janvier 2020, la Mutuelle des architectes français (MAF), représentée par Me H…, demande à la cour :

1°) de confirmer l’ordonnance du 24 octobre 2019 en ce qu’elle a prononcé sa mise hors de cause ès qualité d’assureur de la société Etamine ;

2°) de rejeter la requête de la SAMBTP.

3°) de mettre à la charge de la SAMBTP une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la société Etamine a résilié son contrat d’assurance souscrit auprès d’elle avec effet au 31 décembre 2013 ;

— compte tenu de ce que la DOC est en date de 2014, elle n’est pas l’assureur de la société au titre tant des garanties obligatoires que facultatives.

Par un mémoire enregistré le 24 janvier 2020, les sociétés Architecture Patrick Mauger, Synacoustique et M. A… M…, représentés par Me F…, s’en rapportent à justice sur l’appel de la SMABTP.

Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2020, la mutuelle d’assurance L’Auxiliaire, prise en qualité d’assureur des sociétés CVF Structure et Puget, représentée par Me E…, demande à la cour de lui donner acte de ce que tous droits et moyens des parties par ailleurs réservés et sous les plus expresses réserves de garantie, elle s’en rapporte à justice quant au bien-fondé de la requête de la SMABTP.

Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2019, la société Bejean et son assureur, la mutuelle d’assurance L’Auxiliaire, représentés par Me E…, demandent à la cour de donner acte à la mutuelle d’assurance L’Auxiliaire, en sa seule qualité d’assureur de la société Bejean, de ce que tous droits et moyens des parties par ailleurs réservés et sous les plus expresses réserves de garantie, elle s’en rapporte à justice quant au bien-fondé de la requête de la SMABTP.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2020, la société EDA Eclairement désenfumage aération, représentée par Me D…, demande à la cour de débouter la SMABTP de sa demande à son endroit.

Elle soutient qu’elle n’est pas concernée par le litige.

Par un mémoire enregistré le 3 février 2020, la compagnie AXA France Iard, ès qualité assureur de la société Broissiat-Dequeker, représentée par Me D…, demande à la cour de statuer ce que de droit sur la demande de la SMABTP quant à l’extension des opérations d’expertise à l’endroit des entreprises déjà dans la cause.

Par un mémoire enregistré le 4 février 2020, la société Broissiat-Dequeker, représentée par Me D… demande à la cour de statuer ce que de droit sur la demande de la SMABTP quant à l’extension des opérations d’expertise à l’endroit des entreprises déjà dans la cause.

Par un mémoire enregistré le 4 février 2020, la compagnie AXA France Iard ès qualité assureur de la société ECB, représentée par Me D…, demande à la cour de statuer ce que de droit sur la demande de la SMABTP quant à l’extension des opérations d’expertise à l’endroit des entreprises déjà dans la cause.

Par un mémoire enregistré le 5 février 2020, la société Pateu et Robert, représentée par Me I…, demande qu’il soit fait droit à la demande d’extension d’expertise présentée par la SMABTP.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes Haut-Jura Saint-Claude (CCHJSC) a procédé à partir de l’année 2014 à des travaux de rénovation de l’ancienne Banque de France en vue de l’aménagement d’une médiathèque communautaire. Elle a, le 9 août 2011, conclu à cet effet un marché de maîtrise d’oeuvre avec un groupement ayant pour mandataire la société Architecture Patrick Mauger. L’aménagement des locaux prévoyait notamment la création d’une toiture terrasse en forme de dôme. L’apparition d’infiltrations d’eau et de fuites sous cette terrasse a conduit le maître d’ouvrage à prononcer avec réserves la réception du lot n° 5 « Etanchéité », confié à la société ECB. Une expertise amiable non contradictoire n’ayant pu déterminer précisément la cause des désordres, la CCHJS a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Besançon d’une demande tendant à désigner un expert aux fins de se prononcer sur l’origine et l’étendue des désordres, de prescrire les travaux pour y remédier et de donner les éléments permettant d’établir les responsabilités encourues. Par une ordonnance n° 1802244 du 11 juin 2019, il a été fait droit à cette demande. La société mutuelle d’assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), appelée en la cause en qualité d’assureur dommages-ouvrages du maître d’ouvrage, a demandé au juge des référés, notamment, d’étendre l’expertise à d’autres intervenants. Elle fait appel de l’ordonnance n° 1901307 du 24 octobre 2019, rectifiée par une ordonnance du 3 décembre 2019, en tant qu’elle n’a fait pas entièrement droit à ses conclusions.

2. Aux termes du premier alinéa de l’article R. 532-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction ». Aux termes de l’article R. 532-3 du même code : « Le juge des référés peut, à la demande de l’une des parties formée dans le délai de deux mois qui suit la première réunion d’expertise, ou à la demande de l’expert formée à tout moment, étendre l’expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l’ordonnance, ou mettre hors de cause une ou plusieurs des parties ainsi désignées. (…). ».

3. Il résulte de l’instruction que la CCHJS a introduit le 18 décembre 2018 une action en référé devant le tribunal administratif de Besançon afin de constater les désordres litigieux. Par une ordonnance du 11 juin 2019, le juge des référés a fait droit à cette demande et a rendu les opérations d’expertise communes à la SMABTP, assureur dommages-ouvrage de cette collectivité. La SMABTP demande, afin que soit interrompu le délai de prescription à l’encontre de l’ensemble des constructeurs, que ces opérations d’expertise soient étendues à la compagnie MAF Assurance, en sa qualité d’assureur de la société Etamine, à la société AXA France Iard, en sa qualité d’ancien assureur de la société ECB, à la société anonyme de transactions et courtage et à la société Socotec construction.

4. Aux termes l’article 2241 du code civil applicable en l’espèce, qui reprend en substance les termes de l’ancien article 2244 du même code : « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. / Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure. ». Aux termes de l’article 1792 du même code : « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère. ».

5. Il résulte des dispositions de l’article 2241 du code civil, applicables aux principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs à l’égard des maîtres d’ouvrage, qu’une demande en référé présentée par le maître d’ouvrage public, tendant à la désignation d’un expert aux fins de constater des désordres imputés à des constructeurs, ou d’en rechercher les causes a pour effet d’interrompre le délai de dix ans à l’expiration duquel la responsabilité de ces constructeurs ne peut plus être recherchée devant le juge administratif à raison des désordres.

6. Dans ces conditions, la SMABTP, qui, au demeurant, a elle-même engagé une citation en justice dans le cadre de l’extension de l’expertise, bénéficiait de l’effet interruptif de l’ensemble de la procédure engagée par la CCHJS dès le 18 décembre 2018 sur le fondement de la garantie décennale, à raison des désordres qu’elle estimait de nature à rendre l’ouvrage impropre à sa destination. Contrairement à ce qu’elle fait valoir, le délai de prescription à l’encontre de l’ensemble des constructeurs, appelés en la cause par la CCHJS, ainsi que leurs assureurs a, dès lors, été interrompu à son profit. Sa demande d’extension de l’expertise prescrite par l’ordonnance du 11 juin 2019 à la compagnie MAF Assurance, en sa qualité d’assureur de la société Etamine, à la société AXA France Iard, en sa qualité d’ancien assureur de la société ECB, à la société anonyme de transactions et courtage et à la société Socotec construction ne présente donc pas de caractère utile. Par suite, elle n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes dirigées contre ces sociétés.

Sur les conclusions incidentes de la MAF :

7. Si la MAF fait valoir que la société Etamine a résilié son contrat d’assurance avec effet au 31 décembre 2013, il ressort des pièces du dossier que l’acte d’engagement du groupement de maîtrise d’oeuvre, dont faisait partie la société Etamine et qui a participé à la construction de l’ouvrage en cause, a été signé le 9 août 2011. Dès lors, sa participation aux opérations d’expertise apparait utile. Par suite, les conclusions de la MAF tendant à sa mise hors de cause doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mise à la charge de la SMABTP, qui n’est pas la partie perdante à l’égard de la MAF, la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens exposés par elle en appel.

ORDONNE :


Article 1er : La requête de la SMABTP est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de la MAF et celles présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée dans les conditions de l’article 13 de l’ordonnance n° 2020 du 26 mars 2020 à la SMABTP, à la communauté de communes Haut-Jura-Saint-Claude, à la compagnie Axa France Iard, à la compagnie L’Auxiliaire, à la Mutuelle des architectes français, à la société Eda éclairement désenfumage aération, à la société Souchier Boullet, à Me K…, mandataire liquidateur de la société ECB, à la société anonyme de transactions et courtage, au cabinet Architecture Patrick Mauger, à la société CVF Structures, à M. A… L…, à la société Etamine, à la société Broissiat Dequerer, à la société Synacoustique, à la société Socotec construction, à Me G…, mandataire liquidateur de la société Puget, à la société Pateu et Robert, à la société Bejean et à la société SMA. Copie en sera adressée à M. J… B…, expert.


Fait à Nancy, le 26 mai 2020.

La présidente de la cour

Signé : Françoise Sichler

La République mande et ordonne au préfet du Jura, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

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19NC03247

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