CAA de PARIS, 10ème chambre, 29 mars 2016, 14PA03028, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 10e ch., 29 mars 2016, n° 14PA03028
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 14PA03028
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 14 mai 2014, N° 1220761/5-1
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032373671

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D… B… a demandé au Tribunal administratif de Paris, d’une part, d’annuler la décision du 4 juin 2012 par laquelle le directeur des ressources humaines de l’Assemblée nationale lui a notifié la rupture de son contrat de travail, d’autre part, de condamner l’Assemblée nationale à lui verser une somme de 322 595,04 euros en réparation du préjudice subi du fait du non-paiement des heures supplémentaires qu’il a effectuées, une indemnité équivalant au montant total des salaires dont il a été illégalement privé depuis la fin de son préavis jusqu’à la date du jugement à intervenir et une somme de 53 500 euros en réparation des troubles dans les conditions d’existence et du préjudice de carrière résultant des conditions d’exécution de son contrat de travail et de la rupture de ce contrat, assorties des intérêts au taux légal eux-mêmes capitalisés.

Par un jugement n° 1220761/5-1 du 15 mai 2014, le Tribunal administratif de Paris n’a fait droit à sa demande qu’à hauteur de 2 500 euros tous intérêts compris.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2014, M. B…, représenté par Me C…, demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 15 mai 2014 du Tribunal administratif de Paris en tant qu’il ne fait droit que très partiellement à sa demande ;

2°) d’annuler la décision du 4 juin 2012 par laquelle le directeur des ressources humaines de l’Assemblée nationale lui a notifié la rupture de son contrat de travail, avec toutes les conséquences de droit ;

3°) de dire, parmi les heures qu’il a travaillées, celles qui ne relèvent pas directement de l’exécution du contrat de travail qu’il a conclu avec l’Assemblée nationale ;

4°) de condamner l’Assemblée nationale à lui verser une somme de 220 632,22 euros bruts à titre de rappels d’heures supplémentaires en application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;

5°) de condamner l’Assemblée nationale à lui verser une indemnité équivalant au montant total des salaires dont il a été illégalement privé depuis la fin de son préavis jusqu’à la lecture de l’arrêt à intervenir, et ce sur la base d’une rémunération brute mensuelle de 4 115,82 euros ;

6°) de condamner l’Assemblée nationale à lui verser une somme de 98 800 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des divers préjudices résultant de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

7°) de dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts échus à la date de leur paiement effectif ;

8°) de mettre à la charge de l’Assemblée nationale le versement d’une somme de 15 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le jugement attaqué est entaché d’irrégularité pour insuffisance de motivation et défaut de réponse au moyen tiré de la violation de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

 – c’est à tort que le tribunal a estimé que sa relation de travail n’était pas un contrat à durée indéterminée et n’était pas régie par les dispositions relatives aux agents non titulaires de l’Etat prévues par la loi du 11 janvier 1984 et le décret du 17 janvier 1986, a écarté l’exception d’illégalité des décisions de questure des 19 janvier 1994 et 4 septembre 2001, n’a pas fait application des principes généraux du droit au nombre desquels figure le principe d’une juste rémunération en contrepartie du service fait ;

 – ses demandes indemnitaires sont fondées eu égard à la réalité et au volume des heures supplémentaires non rémunérées et effectuées depuis le 1er janvier 2008 pour tenir compte de la prescription quadriennale des dettes de l’Etat, au non-respect des dispositions, tant nationales que communautaires, en matière de durée du travail, au préjudice résultant de l’illégalité de la rupture de son contrat de travail et, à titre subsidiaire, de son non-renouvellement à supposer que son contrat doive être regardé comme ayant été à durée déterminée, au préjudice moral et aux troubles dans ses conditions d’existence subis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2014, l’Assemblée nationale, représentée par Me A…, conclut au rejet de la requête et à ce que la Cour mette à la charge de M. B… une somme de 10 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu’aucun moyen d’appel n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la Constitution du 27 octobre 1946, ainsi que son Préambule ;

 – la Constitution du 4 octobre 1958, ainsi que son Préambule ;

 – la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

 – la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

 – la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’amélioration des conditions d’emploi des agents non titulaires dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;

 – l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ;

 – le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

 – le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’Etat ;

 – le décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ;

 – le règlement de l’Assemblée nationale du 3 juin 1959 ;

 – le règlement intérieur sur l’organisation des services portant statut du personnel de l’Assemblée nationale ;

 – les décisions prises en réunion de questure des 19 janvier 1994 et 4 septembre 2001 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Auvray,

 – les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

 – les observations de Me C…, pour M. B… ;

 – et les observations de Me A…, pour l’Assemblée nationale.

1. Considérant que, par une lettre du 4 juin 2012, le directeur des ressources humaines de l’Assemblée nationale a informé M. B…, qui exerçait les fonctions de chauffeur-maître d’hôtel, que son contrat de travail s’achèverait de plein droit le 19 juin 2012, date de cessation des fonctions du questeur auprès duquel il était affecté ; que M. B… relève régulièrement appel du jugement du 15 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris, rejetant ses conclusions à fin d’annulation de cette décision du 4 juin 2012, n’a fait droit à sa demande indemnitaire qu’à concurrence de 2 500 euros ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que si M. B… soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en tant qu’il écarte l’applicabilité, aux agents non titulaires des assemblées parlementaires, des dispositions de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 17 janvier 1986 relatives aux agents non titulaires de l’Etat, il résulte des termes même du jugement entrepris que ce grief manque en fait ; que si l’intéressé entend contester le raisonnement suivi par les premiers juges, qui ont déduit du fait que le décret du 17 janvier 1986 ayant été pris en application de la loi du 11 janvier 1984, laquelle constitue le titre II du statut général des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales, il ne pouvait régir la situation des agents non titulaires des assemblées parlementaires au motif que les fonctionnaires de ces dernières sont exclus du champ d’application de la loi du 13 juillet 1983, qui constitue le titre Ier du statut général des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales, une telle critique ressortit, en tout état de cause, au bien-fondé du jugement attaqué ;

3. Considérant, en second lieu, que M. B… soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la décision contestée du 4 juin 2012 mettant fin à son contrat de travail dans les conditions rappelées au point 1 a méconnu les dispositions de la loi susvisée du 12 mars 2012 et, notamment, celles de son article 8, qui prévoient que la transformation en contrat à durée indéterminée doit obligatoirement être proposée aux agents contractuels justifiant d’au moins six ans de services accomplis auprès du même département ministériel ou de la même autorité publique ;

4. Considérant, toutefois, que le juge n’est tenu de répondre qu’aux seuls moyens opérants ; que, pour les raisons indiquées aux points 6 et 11, un tel moyen était inopérant ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les moyens d’irrégularité invoqués par M. B… doivent être rejetés ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d’annulation :

6. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : « (…) La présente loi constitue, à l’exception de l’article 31, le titre Ier du statut général des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales » ; qu’aux termes de l’article 2 de cette même loi : « La présente loi s’applique aux fonctionnaires civils des administrations de l’Etat (…), à l’exclusion des fonctionnaires des assemblées parlementaires (…) » ; qu’aux termes de l’article 3 de cette loi : « Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l’Etat (…) sont, à l’exception de ceux réservés aux magistrats de l’ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l’ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut » ; qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : « La présente loi constitue le titre II du statut général des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales » ; qu’aux termes de l’article 2 de cette même loi : « Le présent titre s’applique aux personnes qui, régies par les dispositions du titre Ier du statut général, ont été nommées dans un emploi permanent à temps complet et titularisées dans un grade de la hiérarchie des administrations centrales de l’Etat, des services déconcentrés en dépendant ou des établissements publics de l’Etat » ; qu’aux termes de l’article 4 de cette loi : « Par dérogation au principe énoncé à l’article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants (…) » ; qu’aux termes de l’article 7 de ladite loi : « Le décret qui fixe les dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat recrutés dans les conditions définies aux articles 4, 6, 6 quater, 6 quinquies et 6 sexies de la présente loi est pris en Conseil d’Etat après avis du Conseil supérieur de la fonction publique (…) » ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que le décret susvisé du 17 janvier 1986, qui a été pris en application de l’article 7 de la loi du 11 janvier 1984, ne s’applique pas de plano aux agents des assemblées parlementaires qui occupent un emploi temporaire ;

7. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 15, devenu 17, du règlement de l’Assemblée nationale du 3 juin 1959 modifié : « Le Bureau détermine par des règlements intérieurs l’organisation et le fonctionnement des services de l’Assemblée (…), ainsi que le statut du personnel et les rapports entre l’administration de l’Assemblée et les organisations professionnelles du personnel » ; qu’aux termes de l’article 146 du règlement intérieur sur l’organisation des services portant statut du personnel de l’Assemblé nationale : « 1. La nature et le nombre des emplois temporaires sont fixés après accord entre le Président et les questeurs (…) 3. Les employés temporaires, recrutés et licenciés directement par les questeurs, ne font pas partie des cadres de l’Assemblée nationale et leur emploi ne peut, en aucun cas, leur conférer un droit quelconque à cet égard » ; qu’aux termes de la décision prise en réunion de questure du 19 janvier 1994, il est accordé « aux employés aux appartements officiels le statut de contractuel de droit public, recruté sur contrat à durée indéterminée, s’achevant de plein droit lorsque la personnalité auprès de laquelle ils sont placés perd la qualité ouvrant droit à la mise à disposition d’un employé » ; qu’aux termes du contrat de travail conclu le 18 avril 1995 entre M. B… et le questeur, ainsi qu’aux termes des contrats de travail successivement conclus depuis lors, « M. D… B… est informé que la cessation, pour quelque cause que ce soit, des fonctions de questeur de l’Assemblée nationale » du questeur auprès duquel il est placé, « entraîne la rupture immédiate du contrat (…) » ;

8. Considérant qu’il est constant que le questeur auprès de qui M. B… était affecté depuis la conclusion, le 4 juillet 2007, de son dernier contrat de travail, avait cessé ses fonctions à la date du 19 juin 2012 mentionnée par la décision contestée ; qu’eu égard aux stipulations de ce contrat de travail, la décision litigieuse ne peut, par suite et en tout état de cause, être regardée comme ayant été prise en considération de la personne ; que M. B… soutient toutefois que le principe de séparation des pouvoirs n’est pas de nature à justifier une différence de traitement entre les agents temporaires de l’Assemblée nationale et les agents contractuels de l’Etat, alors surtout qu’eu égard à ses fonctions de chauffeur-maître d’hôtel, il ne participe pas aux travaux législatifs, pour en déduire que le refus de regarder sa situation de travail comme régie par le décret du 17 janvier 1986 méconnaît le principe constitutionnel d’égalité et porte une atteinte aux droits fondamentaux des salariés dès lors que la décision prise en réunion de questure du 19 janvier 1994 ne suffit pas à lui offrir des garanties équivalentes à celles dont bénéficient les agents non titulaires de l’Etat et, plus généralement, les travailleurs, en vertu des directives n° 89/391/CEE du 12 juin 1989 et 2003/88/CE du 4 novembre 2003 ;

9. Considérant, d’une part, qu’ainsi que l’ont relevé les premiers juges, la décision prise en réunion de questure du 19 janvier 1994 a pour seul objet d’accorder aux employés aux appartements officiels le statut de contractuel de droit public et de fixer le fait générateur du terme des contrats de travail conclus entre les intéressés et l’Assemblée nationale ; que, par suite, M. B… ne peut utilement, par la voie de l’exception d’illégalité, faire grief à cette décision de questure, qui sert de base légale à la décision contestée, de méconnaître le principe constitutionnel et les garanties des travailleurs mentionnés au point précédent ; qu’au surplus, il ressort des pièces du dossier et, notamment, des stipulations du dernier contrat de travail que M. B… a conclu le 4 juillet 2007 avec le questeur, d’une part, que les règles applicables en matière d’assurance maladie, en matière disciplinaire et d’indemnisation en cas de rupture anticipée du contrat sont celles prévues par le décret du 17 janvier 1986 dont l’intéressé revendique l’application, d’autre part, que ce contrat de travail stipule, outre une rémunération de 3 702,73 euros bruts par mois sur la base de 151,67 heures mensuelles, durée légale du temps de travail, une majoration correspondant à un treizième mois, un repos hebdomadaire le samedi et le dimanche et prévoit, s’agissant de la rupture du contrat de travail en cause prononcée au seul motif, prévu ab initio, c’est-à-dire à la signature de son contrat de travail sus-analysé du 4 juillet 2007, que le questeur auprès de qui le requérant a été affecté a cessé ses fonctions, qu’elle ouvre droit au versement d’indemnités prévues par la décision prise en réunion de questure du 14 mai 2002 ; qu’il résulte de ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à soutenir qu’il aurait été employé au service des questeurs de l’Assemblée nationale dans des conditions discriminatoires au regard de celles applicables aux agents contractuels de l’Etat et sans bénéficier des garanties fondamentales assurées aux travailleurs ; qu’enfin, pour le motif retenu par les premiers juges et qu’il y a lieu pour la Cour d’adopter, le moyen, invoqué par voie d’exception, tiré de l’illégalité de la décision prise en réunion de questure du 4 septembre 2001, doit être écarté ;

10. Considérant, d’autre part, que M. B… soutient que c’est à tort que les premiers juges ont qualifié sa relation de travail de contrat à durée déterminée et que la rupture de ce dernier est entachée d’illégalité ;

11. Considérant, toutefois, qu’aux termes de l’article 8 de la loi du 12 mars 2012 susvisée : « A la date de publication de la présente loi, la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée est obligatoirement proposée à l’agent contractuel, employé par l’Etat, l’un de ses établissements publics ou un établissement public local d’enseignement sur le fondement du dernier alinéa de l’article 3 ou des articles 4 ou 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précités dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, qui se trouve en fonction ou bénéficie d’un congé prévu par le décret pris en application de l’article 7 de la même loi (…) » ; qu’il résulte de ces dispositions, combinées avec celles citées au point 6, que M. B… ne peut utilement en invoquer le bénéfice en sa qualité d’agent non titulaire d’une assemblée parlementaire ;

12. Considérant que M. B… se prévaut, en outre, des stipulations mêmes des différents contrats de travail, selon lesquelles ces contrats sont conclus pour une durée indéterminée ; qu’outre que le dernier contrat signé le 4 juillet 2007 stipule qu’il est conclu pour « une durée non déterminée », chacun de ces contrats précise que l’intéressé est informé que la cessation, pour quelque cause que ce soit, des fonctions de questeur de l’Assemblée nationale du questeur auprès duquel il est placé entraîne la rupture immédiate du contrat ; qu’il suit de là que, contrairement à ce que soutient M. B…, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le contrat de travail en cause était à durée déterminée, peu important que le terme de la relation de travail ne puisse pas, compte tenu de son fait générateur, lequel est défini ab initio, être fixé à une date précise lors de la conclusion du contrat ;

13. Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué, tiré de ce que les services de l’Assemblée nationale n’auraient pas apprécié que M. B… se présente aux dernières élections législatives et ait attrait devant la juridiction prud’homale le questeur au service duquel il avait été placé en dernier lieu, n’est en tout état de cause, pas établi ;

14. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision du 4 juin 2012 par laquelle le directeur des ressources humaines de l’Assemblée nationale lui a notifié la rupture de son contrat de travail laquelle, compte tenu de ce qui a été dit, ne peut être analysée comme une décision de licenciement alors surtout qu’il n’est pas contesté que le questeur avec qui le contrat avait été conclu le 4 juillet 2007 n’a pas été reconduit dans ses fonctions ; que le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ne peut, dès lors, qu’être écarté ;

En ce qui concerne les conclusions à fins indemnitaires :

15. Considérant, en premier lieu, que M. B… soutient que l’Assemblée nationale a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en omettant de le rétribuer pour les heures supplémentaires qu’il a effectuées ; que l’intéressé soutient, à cet égard, que sa durée hebdomadaire de travail s’établissait en moyenne à 65 heures et 21 minutes, ce qui contrevient aux dispositions du décret n° 2000-815 du 25 août 2000, lesquelles fixent à 35 heures hebdomadaires la durée de travail et limitent cette dernière à 48 heures avec un maximum de 10 heures par jour, aux dispositions du décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002, qui imposent que les heures supplémentaires accomplies n’excèdent pas 25 heures par mois moyennant une rémunération, ainsi qu’aux dispositions de la directive n° 2003/88/CE du 4 novembre 2003 qui prévoient notamment un temps de repos minimal hebdomadaire de 24 heures ; que, pour établir la réalité du volume d’heures travaillées qu’il revendique, M. B…, qui produit des emplois du temps hebdomadaire entre le 31 décembre 2007 et le 30 janvier 2012, ajoute qu’il exerçait ses fonctions de maître d’hôtel du questeur tant dans la partie privative de l’appartement de ce dernier que dans la partie non privative, qu’il était en outre chargé de passer les commandes, de superviser les menus et le service, d’accueillir les invités, d’assurer le protocole et la sécurité, de participer aux tâches de secrétariat et de comptabilité et qu’en sus du logement, dit « 4G », du questeur auprès de qui il était placé, il lui incombait de s’occuper d’un autre appartement, dit « 3G », situé à l’étage du dessous ;

16. Considérant, toutefois, que s’il est incontestable que les tâches de M. B… étaient variées, il ressort des pièces du dossier que le questeur auprès de qui l’intéressé était placé disposait en réalité d’autres personnels, tels qu’un cuisinier, deux secrétaires et, ponctuellement, recourait à des personnels recrutés en « extra » notamment pour les réceptions et qu’en outre, un maître d’hôtel était également affecté à l’appartement « 3G » ; que l’Assemblée nationale relève, quant à elle, que M. B…, lui-même logé à proximité immédiate, disposait sur une journée d’un temps libre important, ce que confirment les tickets de caisse concernant des achats effectués pour ses propres besoins et en journée, et que l’intéressé omet de prendre en compte, dans les emplois du temps qu’il a d’ailleurs lui-même établis, que le questeur était en principe absent les fins de semaine et, en général, les lundis et vendredis, outre les périodes en dehors des sessions parlementaires ; que, dans ces conditions, la réalité des heures supplémentaires alléguées devant donner lieu, selon M. B…, à un rappel de rémunération de 220 632,22 euros bruts au titre de la période courue du 1er janvier 2008 au 5 février 2012, ne peut être regardée comme établie ; qu’au surplus, il ressort des stipulations mêmes du contrat de travail conclu le 4 juillet 2007 que les éléments de salaire alloués à l’intéressé, soit 3 702,73 euros bruts à quoi s’ajoute un treizième mois, « rémunéreront forfaitairement les heures supplémentaires qu’il (M. B…) sera amené à effectuer », l’Assemblé nationale faisant valoir que le requérant a ainsi perçu, en 2011, un salaire brut de 62 301,56 euros ; que, contrairement à ce que soutient M. B…, la rémunération des heures supplémentaires a pu légalement se faire sur une base forfaitaire, d’ailleurs prévue contractuellement, compte tenu des caractéristiques particulières de l’emploi en cause qui ne permettent pas de prédéterminer le temps de travail ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que les prétentions indemnitaires formulées par M. B… à raison du préjudice résultant de la rupture de son contrat de travail et, à titre subsidiaire, du non-renouvellement de ce dernier, ne peuvent qu’être rejetées dès lors, d’une part, que, ainsi qu’il a déjà été dit, le contrat en cause avait été conclu à durée déterminée et qu’il y a été mis un terme pour le motif, stipulé au contrat, tiré de la cessation des fonctions du questeur auprès de qui il avait été affecté, et d’autre part, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le non-renouvellement du contrat de travail serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation, contrairement à ce que soutient M. B…, alors surtout que le renouvellement de son contrat de travail ne constituait, en tout état de cause, pas un droit pour l’intéressé ; qu’au surplus, outre qu’il est constant que M. B… a perçu des indemnités de licenciement calculées sur une ancienneté de 17 ans, tenant ainsi compte des contrats de travail conclus avant celui du 4 juillet 2007, l’Assemblée nationale soutient, sans être contredite, que l’intéressé a repris aussitôt un emploi à temps plein ;

18. Considérant, en troisième lieu, que M. B… présente des conclusions tendant à être indemnisé à raison du préjudice, notamment moral, qu’il aurait subi pendant l’exécution de son contrat de travail ainsi que lors de la rupture de ce dernier, préjudice qu’il évalue à 98 800 euros, soit l’équivalent de deux années de rémunération ; qu’au soutien de ses prétentions, l’intéressé invoque les nombreuses heures supplémentaires effectuées, mais aussi la dégradation de son état de santé résultant de la précarité de sa situation en tant qu’agent temporaire, de l’anxiété provoquée par le poids de ses missions, exigeantes et parfois délicates, sans qu’il ait jamais cessé de travailler malgré les arrêts prescrits par son médecin, ainsi que le dénigrement dont il a fait l’objet durant les dernières semaines, malgré son ancienneté et la qualité de son travail, en particulier lors de son déménagement ;

19. Considérant, toutefois, que s’il est exact que M. B… a exercé ses fonctions de chauffeur-maître d’hôtel, entre le 18 avril 1995 et le 19 juin 2012, sous couvert de six contrats à durée déterminée, sans qu’aient jamais été remises en cause ni son implication, ni la qualité de son travail, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’intéressé ait été soumis à des exigences excédant celles inhérentes à ce type d’emploi ; que, concernant la poursuite de son activité malgré un accident de service survenu le 26 septembre 2005 ayant entraîné la fracture d’un orteil et donné lieu à un arrêt de travail, il ressort des pièces du dossier et, notamment, d’un courrier du 19 décembre 2006 du questeur, que M. B…« compte tenu de la charge de travail et de ses responsabilités (…) a néanmoins continué son service qui a été aménagé en raison de sa fracture » et que, s’agissant des conditions dans lesquelles l’intéressé a dû restituer son logement de fonction, d’une part, la présence de deux agents de l’Assemblée nationale lors de son déménagement est conforme à l’usage, d’autre part, le courrier du 26 juin 2012, par lequel le directeur des ressources humaines de l’Assemblée nationale lui a rappelé qu’il devait libérer son logement de fonction, d’ailleurs au plus tard le 13 juillet 2012, compte tenu de la cessation de son contrat de travail à effet du 19 juin 2012, n’a constitué qu’un simple rappel des clauses du contrat de travail ;

20. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris n’a fait droit à ses demandes qu’à concurrence de 2 500 euros ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour mette à la charge de l’Assemblée nationale qui n’est pas, en la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais que M. B… a exposés à l’occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l’Assemblée nationale tendant au bénéfice de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l’Assemblée nationale tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D… B… et à l’Assemblée nationale.

Délibéré après l’audience du 15 mars 2016 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 29 mars 2016.

Le rapporteur,

B. AUVRAY

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au président de l’Assemblée nationale, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 14PA03028

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CAA de PARIS, 10ème chambre, 29 mars 2016, 14PA03028, Inédit au recueil Lebon