CAA de PARIS, 1ère chambre, 1 février 2024, 23PA00809, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 1re ch., 1er févr. 2024, n° 23PA00809
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 23PA00809
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 22 décembre 2022, N° 2003153
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 3 février 2024
Identifiant Légifrance : CETATEXT000049083439

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’association Renard (Rassemblement pour l’Etude de la Nature et l’Aménagement de Roissy-en-Brie et son District) a demandé au tribunal administratif de Melun d’annuler la décision du 16 janvier 2019 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris a délivré à

M. A et la société SARL Le Château l’autorisation de travaux portant sur un immeuble classé au titre des monuments historiques.

Par un jugement n° 2003153 du 23 décembre 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 23 février et 26 octobre 2023, l’association Renard, représentée par Me Lang, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 2003153 du 23 décembre 2022 du tribunal administratif de Melun en tant qu’il rejette comme non-fondée la requête tendant à l’annulation de la décision du

16 janvier 2019 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris a autorisé la société SARL Le Château à construire un hôtel dans le parc du domaine classé de Ferrières ;

2°) d’annuler la décision du 16 janvier 2019 du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris ;

3°) de mettre à la charge du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris et de la société SARL Le Chateau le versement de la somme de 2 500 euros chacun, sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

L’association requérante soutient que :

— la décision litigieuse est entachée d’un vice de procédure, dès lors que l’autorité environnementale aurait dû être saisie d’une demande d’examen au cas par cas, en application de l’article R. 122-2 du code de l’environnement ;

— le dossier de demande est incomplet, en méconnaissance des articles L. 621-9 et

R. 621-12 du code du patrimoine, dès lors que le programme d’opération est insuffisant et minore l’ampleur de l’impact du projet sur son environnement protégé, et que les études scientifiques et techniques sont insuffisantes et ne comportent pas de bilan de l’impact du projet sur le parc existant ;

— le projet porte atteinte à l’intérêt public architectural et historique du domaine de Ferrières, classé comme monument historique par une décision du 26 septembre 2000 ;

— la décision attaquée, qui conduit à un déclassement partiel de fait de l’immeuble classé, a été prise par une autorité incompétente, en méconnaissance de l’article L. 621-8 du code du patrimoine ;

— cette décision est illégale, par voie d’exception d’illégalité du plan local d’urbanisme, à l’issue de la modification intervenue le 26 février 2014 ;

— elle a été prise en violation de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme, car le projet porte atteinte au caractère et à l’intérêt des lieux avoisinants.

Par des mémoires enregistrés les 6 avril et 6 novembre 2023, la commune de Ferrières-en-Brie, représentée par l’AARPI Tejas Avocats, conclut, à titre principal, à l’annulation, par la voie de l’appel incident, du jugement du 23 décembre 2022 en tant qu’il a regardé la demande présentée devant le tribunal administratif comme recevable, et au rejet de cette dernière comme irrecevable en raison de sa tardiveté, à titre subsidiaire, au rejet de la requête comme non fondée et à ce que le versement de la somme de 5 000 euros soit mis à la charge de l’association requérante, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la demande de première instance est irrecevable en raison de sa tardiveté et qu’en outre, aucun des moyens soulevés en appel par l’association requérante n’est fondé.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire enregistrés les 11 septembre et

2 novembre 2023, la société SARL Le Château, devenue société SAS GA Education, représentée par Me Saintilan, conclut à l’annulation, par la voie de l’appel incident, du jugement du 23 décembre 2022 en tant qu’il a écarté la fin de non-recevoir qu’elle avait soulevée et au rejet de la demande présentée devant le tribunal administratif comme irrecevable ou au rejet de la requête comme non fondée et à ce que le versement de la somme de 5 000 euros soit mis à la charge de l’association requérante, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la demande de première instance est irrecevable en raison de sa tardiveté et qu’en outre, aucun des moyens soulevés en appel par l’association requérante n’est fondé.

Par un mémoire enregistré le 10 octobre 2023, le ministre de la culture conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu’elle s’associe aux écritures en défenses de la société SAS GA Education.

La requête a été communiquée au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris qui n’a pas produit d’observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code du patrimoine ;

— le code de l’urbanisme ;

— l’arrêté du 9 novembre 2007 précisant les conditions d’affichage de l’autorisation de travaux sur immeuble classé au titre des monuments historiques ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin,

— les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

— et les observations de Me Basset, avocat de la commune de Ferrières-en-Brie.

Considérant ce qui suit :

1. La société SARL Le Château, devenue SAS le Château puis SAS GA Education, a présenté, le 22 novembre 2018, une demande d’autorisation de travaux sur monument historique portant sur le parc du château de Ferrières-en-Brie (Seine-et-Marne), pour y construire un hôtel 5 étoiles le long de la rue du Château. Par une décision du 16 janvier 2019, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris lui a accordé cette autorisation. L’association requérante relève appel du jugement du 23 décembre 2022 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision préfectorale du 16 janvier 2019.

2. Aux termes du premier alinéa de l’article L. 621-9 du code du patrimoine : « L’immeuble classé au titre des monuments historiques ne peut être détruit ou déplacé, même en partie, ni être l’objet d’un travail de restauration, de réparation ou de modification quelconque, sans autorisation de l’autorité administrative. ». Aux termes de l’article R. 621-16 de ce code : « L’autorisation de travaux sur un immeuble classé, prévue à l’article L. 621-9, est affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins du bénéficiaire, dès la notification de l’autorisation, pendant toute la durée du chantier. / Un arrêté du ministre chargé de la culture règle les formes de l’affichage. ». Selon l’article 1er de l’arrêté du 9 novembre 2007 précisant les conditions d’affichage de l’autorisation de travaux sur immeuble classé au titre des monuments historiques : « L’affichage de l’autorisation prévue à l’article 24 du décret du 30 mars 2007 susvisé dont chacun des côtés est supérieur à 80 centimètres. / Ce panneau indique le nom ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom du maître d’œuvre, la date de l’autorisation et la nature des travaux sur le monument. Il indique également que le dossier peut être consulté à la direction régionale des affaires culturelles ou au service départemental de l’architecture et du patrimoine. Il mentionne les voies et délais de recours. / Ces renseignements doivent demeurer lisibles de la voie publique pendant toute la durée du chantier. ».

3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d’aménager ou un permis de démolir. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable.

4. D’une part, il ressort des pièces du dossier, notamment de huit constats d’huissier établis entre le 21 janvier et le 21 mai 2019, que la décision attaquée a été affichée sur la grille extérieure du parc du château de Ferrières-en-Brie de manière continue au cours de cette période.

5. D’autre part, en imposant que figurent sur le panneau d’affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, l’article R. 621-16 du code du patrimoine et l’article 1er de l’arrêté du 9 novembre 2007 ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d’apprécier l’importance et la consistance du projet, le délai de recours contentieux ne commençant à courir qu’à la date d’un affichage complet et régulier. Il s’ensuit que si les mentions prévues par l’article 1er de l’arrêté du 9 novembre 2007 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d’affichage, une erreur affectant l’une d’entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d’apprécier l’importance et la consistance du projet. La circonstance qu’une telle erreur puisse affecter l’appréciation par les tiers de la légalité du permis est, en revanche, dépourvue d’incidence à cet égard, dans la mesure où l’objet de l’affichage n’est pas de permettre par lui-même d’apprécier la légalité de l’autorisation de construire.

6. Il ressort des pièces du dossier que l’affichage a été réalisé sur un panneau normalisé d’affichage d’un permis de construire, de plus de 80 centimètres de hauteur, mentionnant la superficie et la hauteur de la construction projetée, le numéro et la date de délivrance de l’autorisation, le nom de l’architecte du projet, la superficie du terrain d’assiette ainsi que les mentions des voies et délais de recours, et indiquant que le dossier pouvait être consulté en mairie de Ferrières-en-Brie. Si ces mentions du panneau ne précisaient pas que l’autorisation de travaux portait sur un monument historique, elles étaient néanmoins accompagnées de l’apposition d’une copie de l’arrêté d’autorisation attaqué du 16 janvier 2019 comportant effectivement cette information. En outre, si les mentions du panneau n’indiquaient pas que le dossier pouvait être consulté à la direction régionale des affaires culturelles, elles précisaient, ainsi qu’il a déjà été dit, la possibilité d’y procéder en mairie, laquelle est située à proximité directe du site d’implantation du projet, tandis que la direction régionale en est éloignée de plus de 50 kilomètres. Enfin, si le panneau d’affichage comportait la mention « droit de recours : Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain du présent panneau » et celle de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme, alors que ces dispositions ne sont pas applicables à une autorisation de travaux sur un monument historique, ces deux informations, quoiqu’erronées, n’ont pas été de nature à induire en erreur les tiers sur leur droit de former un recours juridictionnel. Par suite, le panneau d’affichage ayant, d’une part, été apposé sur le terrain de manière visible depuis l’extérieur et en continu du 21 janvier au 21 mai 2019 et, d’autre part, comporté l’ensemble des mentions permettant aux tiers d’apprécier l’importance et la consistance du projet, la demande de première instance, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Melun le 20 avril 2019, soit près de 16 mois après le début de l’affichage du projet, était tardive et, par suite, irrecevable.

7. Il résulte de ce qui précède que l’association Renard n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont, bien qu’en se fondant sur d’autres motifs, rejeté sa demande.

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’État et de la société SAS GA Education la somme que demande l’association Renard, partie perdante à l’instance, en application de ces dispositions. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’association requérante le versement à la société SAS GA Education et à la commune de Ferrières-en-Brie des sommes que celles-ci réclament sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’association Renard est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Ferrières-en-Brie et par la société SAS GA Education au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association Renard (Rassemblement pour l’Etude de la Nature et l’Aménagement de Roissy-en-Brie et son District), à la ministre de la culture, à la société SAS GA Education, au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris et à la commune de Ferrières-en-Brie.

Délibéré après l’audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

— M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

— Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,

— M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.

La rapporteure,Le président,

I. JASMIN-SVERDLINS. DIÉMERT

La greffière

Y. HERBER

La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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CAA de PARIS, 1ère chambre, 1 février 2024, 23PA00809, Inédit au recueil Lebon