Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 15 mai 1997, 96-81.496, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

°

La décision de la juridiction d’instruction statuant sur la recevabilité d’une constitution de partie civile qui ne porte que sur l’exercice des droits réservés à la partie civile au cours de la procédure d’information n’acquiert aucune autorité de chose jugée quant à l’exercice de l’action civile devant la juridiction de jugement.

En conséquence, l’arrêt de la chambre d’accusation ayant déclaré irrecevable la constitution d’une partie civile ne s’oppose pas à ce que la même personne se constitue à nouveau devant la juridiction de jugement(1).

Les fédérations sportives et leurs organes délégataires, légalement chargés, en vertu de l’article 16 de la loi du 16 juillet 1984, de veiller au respect des règles techniques et déontologiques de leurs disciplines, sont recevables à se constituer partie civile dans les poursuites exercées contre les dirigeants des groupements sportifs qui leur sont affiliés et de leurs licenciés, à l’égard desquels ils exercent un pouvoir disciplinaire, pour des infractions portant atteinte aux intérêts matériels et moraux du sport professionnel.

Tel est le cas d’abus de confiance et de faux commis dans la gestion d’un groupement sportif et se rapportant notamment au transfert et au droit à l’image des joueurs(2).

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 15 mai 1997, n° 96-81.496, Bull. crim., 1997 N° 185 p. 603
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 96-81496
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin criminel 1997 N° 185 p. 603
Décision précédente : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 novembre 1995
Précédents jurisprudentiels : Confère :
(1°). (1)
(2°). (2)
Chambre criminelle, 04/02/1997, Bulletin criminel 1997, n° 45, p. 133 (rejet et cassation partielle).
Chambre criminelle, 10/06/1970, Bulletin criminel 1970, n° 193 (4), p. 461 (irrecevabilité), et les arrêts cités.
Chambre criminelle, 13/04/1967, Bulletin criminel 1967, n° 119 (4), p. 271 (rejet)
A rapprocher :
Chambre criminelle, 06/07/1994, Bulletin criminel 1994, n° 267 (2), p. 660 (rejet).
A comparer :
Chambre criminelle, 09/11/1965, Bulletin criminel 1965, n° 223 (3), p. 505 (irrecevabilité et rejet).
Textes appliqués :
1° : 2° :

Code de procédure pénale 87, 423

Loi n° 84-610 1984-07-16 art. 16

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007070996
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

CASSATION sur les pourvois formés par :

— la Ligue nationale de football,

— la Fédération française de football,

parties civiles,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 22 novembre 1995, qui a déclaré irrecevable leur constitution de partie civile dans la procédure suivie contre Alain X…, Eric Y…, Rolland Z…, Raphaël A…, Marcel B…, Alain C…, Luciano D…, Anté E… et André F…, déclarés coupables de faux, usage de faux, abus de confiance, complicité de ces délits et recel de fonds provenant d’abus de confiance.

LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit, commun aux deux demanderesses ;

Sur les faits et la procédure :

Attendu qu’il résulte de l’arrêt et du jugement qu’en 1988 et 1989, Alain X…, président du Sporting-Club de Toulon et du Var, Eric Y…, directeur administratif, et Rolland Z…, directeur sportif, avec la complicité du trésorier du club et le concours de plusieurs particuliers ou dirigeants de sociétés, ont établi de fausses conventions relatives au « droit à l’image » des joueurs ou au transfert de certains d’entre eux dans d’autres équipes sportives et des factures faisant état de prestations fictives, et en ont fait usage, permettant ainsi notamment à Rolland Z… de détourner, au préjudice du Sporting-Club, une somme totale de 13 679 000 francs destinée, selon lui, à alimenter une « caisse noire » ;

Que, par des dispositions du jugement devenues définitives, les prévenus ont été déclarés coupables de faux, usage de faux, abus de confiance, complicité de ces délits et recel de fonds provenant d’abus de confiance ;

Qu’en outre le jugement, frappé d’appel en ses seules dispositions civiles, a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la Fédération française de football et de la Ligue nationale de football ;

En cet état :

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 87, 423, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

«  en ce que l’arrêt attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la Fédération française de football ;

«  aux motifs que la Fédération française de football s’est constituée partie civile devant le juge d’instruction le 4 octobre 1990 ; que, par ordonnance du 24 juin 1991, le juge d’instruction a déclaré cette constitution de partie civile irrecevable ; que, par arrêt du 13 février 1992, la chambre d’accusation a confirmé cette ordonnance ; que, par ordonnance du 11 janvier 1993, le président de la chambre criminelle de la Cour de Cassation a donné acte à la Fédération française de football de son désistement de pourvoi contre l’arrêt de la chambre d’accusation et dit n’y avoir lieu à statuer sur le pourvoi, considéré comme non avenu ; que l’arrêt de la chambre d’accusation confirmatif de l’ordonnance du 24 juin 1991 est définitif ; qu’il y a autorité de chose jugée ; qu’en vertu de cette chose jugée constatant l’absence totale du droit de la Fédération française de football à établir l’existence d’un dommage, ladite fédération n’est pas recevable à se constituer partie civile devant la juridiction de jugement ;

« alors qu’appelé à se prononcer sur la recevabilité d’une constitution de partie civile, le juge d’instruction se doit uniquement d’examiner si les circonstances sur lesquelles elle s’appuie lui permettent de considérer comme possible l’existence du préjudice, ainsi que sa relation directe avec une infraction pénale, qu’il s’ensuit que sa décision sur ce point ne saurait avoir autorité de chose jugée et faire obstacle à la constitution devant la juridiction de jugement d’une partie civile dont l’action aurait été déclarée irrecevable au cours de l’instruction » ;

Vu lesdits articles ;

Attendu que la décision de la juridiction d’instruction statuant sur la recevabilité d’une constitution de partie civile qui ne porte que sur l’exercice des droits réservés à la partie civile au cours de la procédure d’information n’acquiert aucune autorité de chose jugée quant à l’exercice de l’action civile devant la juridiction de jugement ;

Attendu que, pour confirmer l’irrecevabilité de la constitution de partie civile de la Fédération française de football, l’arrêt attaqué relève que l’action civile de cette association avait été déclarée irrecevable, en cours d’information, par un arrêt du 13 février 1992 de la chambre d’accusation, qui a acquis l’autorité de la chose jugée ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi la cour d’appel a méconnu les textes et le principe susénoncés ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation de la promotion des activités physiques, 1er du décret n° 90-347 du 13 avril 1990 fixant les conditions particulières pour l’attribution de la délégation du ministre chargé des sports ou fédérations gérant les activités sportives de caractère professionnel, 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

«  en ce que l’arrêt attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la Ligue nationale de football ;

«  aux motifs qu’aux termes de l’article 2 du Code de procédure pénal et sauf dérogation législative l’action civile ne peut être exercée devant les juridictions répressives que par celui qui a subi un préjudice personnel prenant directement sa source dans l’infraction poursuivie ; que cette association, régie par la loi de 1901, qui dispose de la personnalité morale de droit privé et a obtenu l’agrément du ministère des sports pour exercer des missions de service public, ne tient pas de la loi une autorisation particulière pour exercer, par dérogation aux règles de droit commun, les droits reconnus à la partie civile dans les domaines correspondant à son objet social ; que le préjudice moral qu’elle invoque ne se distingue pas du préjudice résultant du trouble que les infractions poursuivies causent aux intérêts généraux de la société et dont la réparation est assurée par l’exercice même de l’action publique ; qu’en effet, « l’atteinte à la considération du football » invoquée par la partie civile n’est pas une atteinte à son intérêt personnel mais à celui de la société, le football étant un sport qui, comme tout sport, constitue un élément de patrimoine social ;

«  alors que la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 ayant expressément conféré aux fédérations sportives agréées par le ministre chargé des sports et qui participent à l’exécution d’une mission de service public, non seulement un pouvoir disciplinaire à l’égard des groupements sportifs qui leur sont affiliés et de leurs licenciés, mais également la mission de faire respecter les règles déontologiques de leur discipline, il s’ensuit que ces fédérations sont nécessairement recevables à se constituer partie civile pour des faits qui, en portant atteinte au principe de la loyauté dans la pratique des sports, leur occasionnent ainsi un préjudice moral distinct du préjudice social ; que, dès lors, la Ligue nationale de football, qui, conformément aux dispositions du décret du 13 avril 1990 pris en application de la loi susvisée, a reçu délégation de la Fédération française de football pour la gestion et l’organisation des compétitions de première et deuxième division et dont les statuts prévoient qu’elle doit agir pour « la défense des intérêts matériels et moraux du football professionnel », avait qualité pour se porter partie civile à raison du discrédit ainsi jeté sur les organisations sportives de football par les pratiques frauduleuses de certains de leurs membres à l’occasion de transfert de joueurs » ;

Vu lesdits articles ;

Attendu que les fédérations sportives et leurs organes délégataires, légalement chargés, en vertu de l’article 16 de la loi du 16 juillet 1984, de veiller au respect des règles techniques et déontologiques de leurs disciplines, sont recevables à se constituer partie civile dans les poursuites exercées contre les dirigeants des groupements sportifs qui leur sont affiliés et de leurs licenciés, à l’égard desquels ils exercent un pouvoir disciplinaire, pour des infractions portant atteinte aux intérêts matériels et moraux du sport professionnel ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de la Ligue nationale de football, l’arrêt attaqué énonce que cette association, qui dispose de la personnalité morale et a reçu l’agrément du ministère des Sports pour exercer des missions de service public, ne tient pas de la loi une autorisation particulière pour exercer, par dérogation au droit commun, les droits reconnus à la partie civile, dans les domaines correspondant à son objet social ;

Que les juges ajoutent que le préjudice moral invoqué, qui consisterait en une atteinte à la considération du football, ne se distingue pas du trouble que les infractions poursuivies causent aux intérêts généraux de la société et dont la réparation est assurée par l’exercice même de l’action publique ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors que des faux, abus de confiance et délits connexes commis, comme en l’espèce, par les dirigeants d’un groupement sportif, dans le cadre de sa gestion, et se rapportant notamment au transfert et au droit à l’image des joueurs, sont de nature à porter directement atteinte aux intérêts que les fédérations sportives sont chargées de défendre, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée des textes et du principe ci-dessus rappelés ;

Que, dès lors, la cassation est à nouveau encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l’arrêt susvisé de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 22 novembre 1995 ;

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi :

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Montpellier.

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