Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 18 mars 2003, 02-82.292, Publié au bulletin

  • Convention européenne des droits de l'homme·
  • Participation à la promotion du produit·
  • Publicité indirecte en faveur du tabac·
  • Protocole additionnel n° 1, article 1·
  • Protocole additionnel no 1, article 1·
  • Publicité illicite en faveur du tabac·
  • Libre circulation des marchandises·
  • Protocole additionnel n° 1·
  • Lutte contre le tabagisme·
  • Mesure d'effet équivalent

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

°

L’interdiction de la propagande et de la publicité directe et indirecte en faveur du tabac ou des produits du tabac, résultant des articles L. 3511-3 et L. 3511-4 du Code de la santé publique, qui frappe aussi bien les produits nationaux que les produits importés des autres Etats membres, est justifiée par la protection de la santé au sens des articles 30 et 46 du Traité instituant la Communauté européenne et proportionnée à l’objectif poursuivi, lequel, eu égard à l’impact de la propagande ou de la publicité interdite sur la consommation de tabac ne peut être atteint par des mesures moins contraignantes (arrêt n° 1).

Les dispositions claires et précises des articles L. 3511-2 et suivants du Code de la santé publique, qui interdisent la propagande et la publicité directe ou indirecte en faveur du tabac ou des produits du tabac ne méconnaissent ni l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ni l’article 1er du protocole additionnel, dès lors qu’elles constituent une mesure nécessaire à la protection de la santé et proportionnée à cet objectif d’intérêt général, justifiant une restriction à la liberté d’expression et au droit de propriété (1).

Constitue un acte de complicité du délit de propagande ou publicité illicite en faveur du tabac le fait de participer à la mise en oeuvre d’actions de promotion de produits utilisant des marques rappelant le tabac ou un produit du tabac. En conséquence, justifie sa décision la cour d’appel qui retient la complicité du délit de publicité illicite en faveur du tabac à l’encontre de prévenus, dirigeants d’entreprises appartenant à un groupe fabriquant, important ou commercialisant du tabac et des produits du tabac, aux motifs que ceux-ci ont participé à l’élaboration, à l’organisation et au financement d’une campagne publicitaire en faveur de vêtements dont la marque rappelle la marque de cigarettes Winston (arrêt n° 1). Ne justifie en revanche pas sa décision la cour d’appel qui considère que ces mêmes dirigeants, qui ont approuvé la stratégie de diversification et de promotion de produits bénéficiaires de la marque de cigarettes Camel et y ont contribué, ne sont ni auteurs ni complices du délit de publicité illicite en faveur du tabac (arrêt n° 2).

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 18 mars 2003, n° 02-82.292, Bull. crim., 2003 N° 69 p. 251
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 02-82292
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin criminel 2003 N° 69 p. 251
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 28 février 2002
Précédents jurisprudentiels : Confère :
(2°).
(1)
Chambre criminelle, 19/11/1997, Bulletin criminel 1997, n° 393 (2°), p. 1317 (rejet).
Chambre criminelle, 21/02/1996, Bulletin criminel 1996, n° 86 (2°), p. 244 (cassation)
Textes appliqués :
1° : 1° : 2° : 3° :

Code de la santé publique L3511-2

Code de la santé publique L3511-3, L3511-4 2° :

Code de la santé publique L3511-3, L3511-4 al. 2, L3512-2

Code pénal 121-3, 121-7

Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales 1950-11-04 art. 10

Protocole additionnel n° 1, art. 1

Traité de Rome art. 30, art. 46

Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007068684
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Sur les parties

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit mars deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de Me BOUTHORS, de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN et THOUVENIN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

— LE COMITE NATIONAL CONTRE LE TABAGISME,

partie civile,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 13ème chambre, en date du 1er mars 2002, qui l’a débouté de ses demandes après relaxe de Klaus X…, Jacques Y… et Patrick Z… du chef de publicité illicite en faveur du tabac ;

Vu les mémoires en demande et en défense produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la convention européenne des droits de l’homme, L. 355-31, alinéa 1, L. 355-24, L. 355-25 et L. 355-31 du Code de la santé publique, L. 121-4, L. 121-6 et L. 121-7 du Code pénal, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

« en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a dit que les infractions de publicité indirecte en faveur du tabac visées à la prévention n’étaient pas imputables aux prévenus, a mis hors de cause le civilement responsable et débouté la partie civile de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

« aux motifs que si les publicités incriminées constituent bien des publicités indirectes en faveur du tabac et si les licences de marque accordées par WBI, filiale du groupe RJY Nabico, société holding du groupe Reynolds Tobacco, interdisent aux publicités de bénéficier de la dérogation instaurée par l’alinéa 2 de l’article L. 355-26 du code de la santé publique, en revanche, les infractions constatées ne sont pas imputables aux prévenus ; que Jacques Y… était à l’époque des faits directeur général de la société RJ Reynolds Tobacco France dont Klaus X… était le président du conseil d’administration ; que Patrick Z…, simple salarié, dirigeait le bureau de représentation de la société WBI Etats-Unis, sis à Boulogne-Billancourt, que les annonceurs des publicités incriminées sont la société de droit suisse Melco Watch et la société de droit italien Oto ; qu’elles ont été diffusées par les sociétés Decaux et Métrobus, les réseaux de distribution cinématographique UGC et Gaumont ; qu’il ne résulte d’aucun élément de la procédure, et qu’il n’est d’ailleurs pas allégué que les prévenus aient participé de quelque façon que ce soit à la conception, à la présentation ou à la diffusion de ces publicités, et qu’ils ne sont donc pas les auteurs de l’infraction visée à la prévention, pas plus qu’il ne peuvent en être considérés comme complices par fournitures de moyens ; que par ailleurs, les documents de politique générale ou de « de stratégie » saisis le 2 février 1995 dans les locaux de la société RJ Reynolds et dans le

bureau de représentation de la société WBI Etats-Unis à Boulogne-Billancourt, élaborés en 1991 et 1992, visent à diversifier et promouvoir les produits bénéficiaires d’une marque tabacole comme les montres Camel Trophy, les vêtements Winston ; que quand bien même les prévenus ont approuvé les documents élaborés par WBI au plan européen, et auraient contribué à leur élaboration, il n’est nullement démontré qu’ils aient donné des instructions aux annonceurs, qui étaient d’ailleurs les fabricants des montres Camel Boots, ou qu’ils aient fait pression sur eux pour que des campagnes publicitaires soient réalisées en France ; qu’il convient dès lors, en réformant le jugement déféré, de relaxer purement et simplement les prévenus et de mettre hors de cause WBl, citée en tant que civilement responsable de Patrick Z…, l’intervention de la société Reynolds Tobacco France (devenue JT International France) devant la cour étant quant à elle sans objet ;

« 1 ) alors que, d’une part, la participation à un plan de fraude en faveur d’une publicité indirecte destinée à promouvoir une marque de cigarettes auprès d’une clientèle ciblée par d’autres objets suffit à tenir les bénéficiaires dudit plan comme les auteurs directs de l’infraction, d’où il suit que la cour n’a pu légalement exonérer les prévenus de toute responsabilité pour des motifs inopérants pris de l’autonomie apparente des campagnes afférentes aux objets destinés à promouvoir indirectement une marque de tabac ;

« 2 ) alors en tout état de cause que faciliter sciemment la préparation ou la consommation d’un délit par aide ou assistance suffit à caractériser la complicité punissable au sens de l’alinéa 1er de l’article 121-7 du Code pénal ; qu’en excluant la complicité reprochée aux prévenus à la faveur de considérations – d’ailleurs insuffisantes – tirées de l’alinéa 2 du texte précité sans autre examen des conditions de la complicité exprimées par l’alinéa 1er, la Cour, qui n’a pas réfuté les énonciations contraires des premiers juges, a derechef privé son arrêt de toute base légale" ;

Vu l’article 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué qu’à la suite d’une campagne publicitaire en faveur des produits dérivés de la marque Camel, réalisée par voie d’affichage et au cinéma entre mai 1993 et mars 1994, le Comité national contre le tabagisme a fait citer Klaus X…, Jacques Y… et Patrick Z… pour publicité illicite en faveur du tabac ; qu’après requalification des faits en complicité de ce délit, les premiers juges sont entrés en voie de condamnation ;

Attendu que, pour infirmer le jugement et relaxer les prévenus, l’arrêt attaqué, après avoir considéré que les faits poursuivis constituent une publicité illicite en faveur du tabac, énonce que Klaus X…, Jacques Y… et Patrick Z… n’en sont ni les annonceurs ni les diffuseurs et qu’il n’ont pas participé à la préparation ou à la diffusion des publicités ; que les juges ajoutent qu’ils ne peuvent être considérés comme complices, faute d’avoir fourni des moyens, donné des instructions ou fait pression sur les annonceurs ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors qu’il résulte de ses propres énonciations que Klaus X…, Jacques Y…, dirigeants de la société RJ Reynolds Tobaco France, et Patrick Z…, représentant du bureau français de la société World Brand International, propriétaire de la marque Camel, ont approuvé la stratégie de diversification et de promotion des produits bénéficiaires de ladite marque et qu’ils y ont contribué, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de PARIS , en date du 1er mars 2002, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de PARIS et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Agostini conseiller rapporteur, MM. Roman, Blondet, Palisse, Le Corroller, Beraudo conseillers de la chambre, Mmes Beaudonnet, Gailly, Salmeron conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Chemithe ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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