Cour de cassation, Chambre civile 1, 4 mai 2017, 16-13.645, Publié au bulletin

  • Absence de fraude dans la saisine du tribunal étranger·
  • Conditions de régularité internationale·
  • Effets internationaux des jugements·
  • Compétence du tribunal étranger·
  • Reconnaissance ou exequatur·
  • Conflit de juridictions·
  • Détermination·
  • Conditions·
  • Mariage·
  • Fraudes

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Pour accorder l’exequatur hors de toute convention internationale, le juge français doit s’assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger, fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l’ordre public international de fond et de procédure et l’absence de fraude.

Viole les articles 3 du code civil et 509 du code de procédure civile la cour d’appel qui retient l’existence d’une fraude alors que le litige présentait des liens caractérisés avec Israël, en raison de la double nationalité française et israélienne du requérant, lequel n’avait pas saisi la juridiction étrangère pour faire échec à une décision ou à une procédure engagée en France

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Commentaires5

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www.motte-suraniti-avocat.com · 14 décembre 2019

L'absence de fraude dans l'exequatur du jugement étranger : une condition d'application restreinte Parmi les trois conditions de droit commun nécessaires à l'obtention de l'exequatur d'un jugement étranger, fixées par la jurisprudence Cornelissen, l'absence de fraude dans l'obtention du jugement étranger doit s'interpréter strictement. C'est ce que la Cour de cassation a récemment rappelé dans deux dossiers traités par notre cabinet. Les défendeurs à une procédure d'exequatur ont tendance à englober dans l'argument de la fraude des moyens plus divers les uns que les autres, …

 

Noémie Assuied · Gazette du Palais · 3 octobre 2017

Aude Dorange · Actualités du Droit · 7 juin 2017
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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-13.645, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-13645
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 11 janvier 2016
Précédents jurisprudentiels : A rapprocher :
1re Civ., 17 décembre 2014, pourvoi n° 13-21.365, Bull. 2014, I, n° 211 (rejet), et les arrêts cités
1re Civ., 17 décembre 2014, pourvoi n° 13-21.365, Bull. 2014, I, n° 211 (rejet), et les arrêts cités
Textes appliqués :
articles 3 et 509 du code de procédure civile
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000034653630
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2017:C100533
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

CIV. 1

LM

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 4 mai 2017

Cassation

Mme X…, président

Arrêt n° 533 FS-P+B

Pourvoi n° N 16-13.645

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Daniel Y…, domicilié […],

contre l’arrêt rendu le 12 janvier 2016 par la cour d’appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige l’opposant au procureur général près la cour d’appel de Paris, domicilié en son parquet général […],

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 21 mars 2017, où étaient présents : Mme X…, président, M. Z…, conseiller rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, M. Reynis, Mme Reygner, M. Vigneau, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mme Auroy, conseillers, M. Mansion, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, conseillers référendaires, M. A…, avocat général, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z…, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y…, l’avis de M. A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 3 du code civil et 509 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué et les productions, qu’un jugement du 11 juillet 2010, rendu par le tribunal rabbinique de Jérusalem, a dit M. Y… veuf de Allegra B… qu’il avait épousée religieusement au Brésil ; qu’ayant saisi une juridiction française, par acte du 20 septembre 2010, pour que son mariage soit reconnu valable, celle-ci a déclaré irrecevable sa demande, faute d’une transcription en France de l’acte étranger ; que, par acte du 13 juin 2014, M. Y… a demandé l’exequatur du jugement israélien ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l’arrêt retient que constitue une fraude le fait d’obtenir à l’étranger une décision dans la perspective de l’invoquer ultérieurement en France alors qu’aucun juge français n’aurait rendu une décision en ce sens ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le litige présentait des liens caractérisés avec Israël du fait de la double nationalité française et israélienne de M. Y… et que ce dernier n’avait pas saisi la juridiction étrangère pour faire échec à une décision ou à une procédure engagée en France, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 janvier 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne le Trésor public aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y… ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. Y…

LE MOYEN FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté Monsieur Y… de sa demande d’exequatur du jugement rendu le 11 juillet 2010 par le Tribunal rabbinique de district de Jérusalem,

AUX MOTIFS QU'« aucune convention en matière de coopération judiciaire n’ayant été conclue entre la République française et l’Etat d’Israël, le juge français, pour accorder l’exequatur à une décision de justice rendue dans ce pays, doit s’assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger, fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l’ordre public international de fond et de procédure et l’absence de fraude à la loi ; que le caractère laïc ou religieux du mariage est une condition de forme dont la validité s’apprécie au regard de la loi du lieu de célébration de l’union ; que le mariage rabbinique invoqué par l’appelant a été célébré au Brésil dont le code civil prévoit en ses articles 1511 à 1516 que le mariage religieux est valable à condition qu’il soit enregistré dans le registre civil ; qu’il est constant que tel n’a pas été le cas, sans que le décès d’Allegra B…, survenu trois ans après le mariage religieux, ait été un obstacle à l’enregistrement ; que, d’autre part, au regard de la loi française, loi du for, la célébration religieuse doit, pour être valable, avoir été précédée du mariage civil ; qu’il résulte de ce qui précède qu’un tribunal français n’aurait pu reconnaître la validité du mariage en cause; que c’est du reste en ce sens que s’est prononcé le tribunal de grande instance de Paris dans un jugement du 22 novembre 2011 déclarant irrecevable, faute de transcription, la demande de M. Y… de constatation de la validité du mariage religieux ; que constitue une fraude le fait d’obtenir à l’étranger une décision dans la perspective de l’invoquer ultérieurement en France alors qu’aucun juge français n’aurait rendu un jugement dans le même sens » ;

ALORS D’UNE PART QUE constitue une fraude à un jugement français le fait d’invoquer en France un jugement étranger apparemment régulier, mais obtenu uniquement en vue de son efficacité en France, alors qu’un juge français, directement saisi, n’aurait pas apporté la même solution au litige ; que pour refuser, sur le fondement de la fraude, l’exequatur du jugement rendu le 11 juillet 2010 par le Tribunal rabbinique de district de Jérusalem, la Cour d’appel a considéré que constitue une fraude le fait d’obtenir à l’étranger une décision dans la perspective de l’invoquer ultérieurement en France alors qu’aucun juge français n’aurait rendu un jugement dans le même sens ; qu’en jugeant ainsi inutile de vérifier que l’obtention du jugement étranger avait eu pour unique but d’échapper à la solution qu’aurait adoptée un juge français s’il avait été directement saisi, alors que le simple fait d’échapper volontairement à la solution qu’aurait consacrée un jugement français ne suffit pas à constituer la fraude, la Cour d’appel, qui s’est fondée sur une définition erronée de la fraude au jugement, amputée de l’un de ses éléments essentiels, a violé l’article 3 du code civil, ensemble l’article 509 du code de procédure civile ;

ALORS D’AUTRE PART QUE constitue une fraude à un jugement français le fait d’invoquer en France un jugement étranger apparemment régulier, mais obtenu uniquement en vue de son efficacité en France, alors qu’un juge français, directement saisi, n’aurait pas apporté la même solution au litige ; que pour refuser, sur le fondement de la fraude, l’exequatur du jugement rendu le 11 juillet 2010 par le tribunal rabbinique de district de Jérusalem, la cour d’appel s’est contentée d’affirmer qu’un tribunal français, directement saisi, n’aurait pas apporté la même solution au litige ; qu’en s’abstenant ainsi de vérifier, au regard des circonstances de l’espèce, que le jugement étranger avait été obtenu uniquement en vue de son efficacité en France, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 du code civil et 509 du code de procédure civile ;

ALORS, encore, QUE pour refuser, sur le fondement de la fraude, l’exequatur du jugement rendu le 11 juillet 2010 par le tribunal rabbinique de district de Jérusalem, la Cour d’appel a considéré qu’un tribunal français, directement saisi, n’aurait pas apporté la même solution au litige, ni la loi brésilienne, applicable en tant que loi du lieu de célébration du mariage, ni la loi française, loi du for, ne validant un mariage célébré uniquement en la forme religieuse ; qu’en statuant ainsi, sans envisager, au besoin d’office, un éventuel renvoi opéré par la loi brésilienne à la loi mosaïque, loi personnelle de l’intéressé, laquelle tenait le mariage pour valable, la cour d’appel a méconnu son office et privé sa décision de base légale au regard des articles 3 du code civil et 509 du code de procédure civile ;

ALORS, enfin et en toute hypothèse, QUE pour refuser, sur le fondement de la fraude, l’exequatur du jugement rendu le 11 juillet 2010 par le Tribunal rabbinique de district de Jérusalem, la Cour d’appel a considéré qu’un tribunal français, directement saisi, n’aurait pas apporté la même solution au litige, ni la loi brésilienne, applicable en tant que loi du lieu de célébration du mariage, ni la loi française, loi du for, ne validant un mariage célébré uniquement en la forme religieuse ; qu’en statuant ainsi, sans tenir compte du fait qu’un tribunal français, directement saisi, aurait certainement validé ce mariage sur le fondement du droit au respect de la vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 du code civil, 509 du code de procédure civile et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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