Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 décembre 2020, 20-83.377, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 16 déc. 2020, n° 20-83.377
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-83.377
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Montpellier, 12 février 2020
Textes appliqués :
Article 706-30-1 du code de procédure pénale.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042746560
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:CR03085
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Texte intégral

N° R 20-83.377 F-D

N° 3085

GM

16 DÉCEMBRE 2020

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,

DU 16 DÉCEMBRE 2020

M. A… H… a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Montpellier, en date du 13 février 2020, qui, dans l’information suivie contre lui du chef d’infraction à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur sa demande d’annulation d’actes ou de pièces de la procédure.

Par ordonnance en date du 17 août 2020, le président de la chambre criminelle a prescrit l’examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. A… H…, et les conclusions de Mme Philippe, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 2 décembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et M. Mareville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 4 mai 2018, deux personnes, dont M. A… H…, ont été victimes de tirs par arme à feu.

3. Une perquisition a permis la découverte, dans le coffre d’un véhicule dont M. H… avait l’usage, de marchandises dont la procédure indique qu’elles sont d’un poids de 12 kg et qu’il s’agit d’herbe de cannabis.

4. Les produits, saisis, ont été placés sous scellés.

5. Ils ont ensuite fait l’objet d’une pesée dans les locaux de la gendarmerie.

6. Une information a été ouverte le 17 mai 2018 des chefs de tentative d’assassinat, vol avec arme et de trafic de stupéfiants, notamment.

7. Le 3 juillet 2018, le juge d’instruction a ordonné la destruction des scellés susvisés. Celle-ci a été effectuée le 19 juillet 2018.

8. M. H… a été mis en examen le 12 juin 2019.

9. Le 31 octobre 2019, il a fait déposer une requête aux fins d’annulation du procès-verbal de pesée des produits litigieux, et de tous actes mentionnant les scellés qui ont été détruits.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté le moyen tiré de la nullité des opérations de pesées, alors « qu’il résulte de l’article 706-30-1 du Code de procédure pénale que la pesée de produits stupéfiants ne peut être réalisée qu’en présence de la personne qui détenait les substances, ou, à défaut, en présence de deux témoins requis par le juge d’instruction ou par un officier de police judiciaire ; que la signature par eux du procès-verbal des opérations de pesée est la seule formalité de nature à établir le respect de ces dispositions ; qu’en rejetant le moyen tiré de la nullité des opérations de pesées des scellés 14/VL et 15/VL, dont la possession a été attribuée à M. H…, lorsqu’elle constatait d’une part qu'« il est incontestable que ce procès-verbal [de pesée] n’est pas signé par les deux témoins ni par aucun des mis en examen » (arrêt, p. 10), ce dont il résulte l’impossibilité de s’assurer de l’existence d’une pesée contradictoire des substances saisies, et d’autre part que ces substances ont été détruites, ce qui suffit à établir le grief de M. H…, la chambre de l’instruction n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les dispositions susvisées. »

Réponse de la Cour

11. Pour écarter le moyen de nullité, pris du défaut de signature, par les témoins requis, du procès-verbal de pesée, l’arrêt attaqué relève que le procès-verbal établi par les enquêteurs précise qu’ils ont été accompagnés lors des opérations de perquisition par MM. G… P… et F… M…, témoins régulièrement requis qui ont signé l’ensemble des procès-verbaux ainsi que les fiches de placement sous scellé numérotés.

12. Les juges ajoutent qu’au cours de cette perquisition, il a été découvert plusieurs sacs poubelle contenant des sachets d’herbe de cannabis pour un poids total de 7,350 kg et 4,850 kg, que le même jour les enquêteurs ont établi un procès-verbal mentionnant les opérations de pesée de ces sacs, lequel précise que les scellés ont été conditionnés sur les lieux de commission des faits en présence de deux témoins.

13. Ils indiquent que ce procès-verbal n’est pas signé par les deux témoins ni par aucune des personnes mises en examen, mais qu’il apparaît à la lecture de celui-ci, combinée avec les mentions figurant dans le procès-verbal de perquisition, que les témoins ont bien assisté tant à la mise sous scellé qu’à la pesée des sacs conditionnés.

14. Ils retiennent que les mentions du procès-verbal, si elles permettent de comprendre que celui-ci a été rédigé dans les locaux de la gendarmerie, n’établissent nullement que les opérations de pesée ont été réalisées en l’absence des témoins, qu’il apparaît au contraire que ces derniers étaient présents lors du conditionnement, ont signé les procès-verbaux et les fiches de scellés sur lesquelles figurent l’intitulé des scellés et le poids, comme en atteste l’inventaire des pièces à conviction dressé par les enquêteurs.

15. Il en déduisent que les témoins ont nécessairement assisté à la pesée.

16. En prononçant ainsi, et dès lors qu’il est établi que les procès-verbaux et les fiches de scellés ont été signés par les témoins requis, la chambre de l’instruction a justifié sa décision.

17. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

18. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il n’a pas tiré les conséquences du moyen de nullité des opérations de destruction des scellés qu’elle a déclaré bien fondé, alors :

« 1°/ qu’il résulte de l’article 706-30-1 du code de procédure pénale la nécessité pour le juge d’instruction de conserver un échantillon des produits saisis, dont il a ordonné la destruction, afin de permettre, le cas échéant, qu’ils fassent l’objet d’une expertise ; que l’absence d’échantillonnage, dont il résulte l’impossibilité de contrôler la nature du produit saisi à un quelconque stade de la procédure, emporte nécessairement la nullité de toutes les pièces de la procédure qui en font mention ; qu’en déclarant n’y avoir lieu à annulation ou cancellation d’actes de la procédure relatifs aux opérations de destruction lorsqu’elle constatait pourtant expressément d’une part qu’ « il n’est pas contestable qu’aucune des pièces de la procédure ne permet de démontrer qu’un échantillon aurait été réalisé avant destruction », et d’autre part qu’ « il est tout aussi incontestable que la destruction des scellés sans échantillonnage ne permet plus aux mis en examen de solliciter une éventuelle expertise », ce dont il résulte nécessairement un grief pour M. H…, la chambre de l’instruction n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les dispositions susvisées ;

2°/ qu’ en se bornant à déclarer, pour rejeter la requête en nullité de M. H…, qu'« il apparaît qu’aucune annulation, retrait ou cancellation ne puisse réparer l’irrégularité » (arrêt, p. 11), la chambre de l’instruction, à qui il revenait nécessairement de tirer les conséquences de la méconnaissance des dispositions de l’article 706-30-1 du code de procédure pénale qu’elle constatait expressément, en dépit de l’impossibilité de replacer les parties dans la situation dans laquelle elles se trouvaient avant la réalisation de l’acte irrégulier, s’est prononcée par des motifs inopérants et n’a pas justifié sa décision au regard des articles 171, 706-30-1, 802 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 706-30-1 du code de procédure pénale :

19. Selon ce texte, le juge d’instruction, lorsqu’il ordonne la destruction de substances stupéfiantes, doit conserver un échantillon de ces produits afin de permettre, le cas échéant, qu’ils fassent l’objet d’une expertise.

20. Pour écarter le moyen de nullité pris de l’absence de conservation d’un échantillon avant destruction de produits stupéfiants saisis, l’arrêt attaqué relève qu’aucune des pièces de la procédure ne permet de démontrer qu’un échantillon aurait été réalisé avant destruction.

21. Les juges ajoutent que la destruction des scellés sans échantillonnage ne permet plus à la personne mise en examen de solliciter une éventuelle expertise.

22. Ils retiennent que cette irrégularité ne peut pas avoir pour conséquence d’entraîner l’annulation de la totalité de la procédure, puisque seules les opérations de destruction sont entachées d’irrégularité.

23. Ils en concluent que l’annulation et le retrait de la procédure ne permettraient pas de modifier les conséquences de l’irrégularité commise, dès lors qu’ils ne permettraient pas d’effacer l’opération elle-même, qui elle seule porte atteinte aux droits de la défense.

24. En se déterminant ainsi, alors que l’absence de conservation d’un échantillon des produits stupéfiants fait nécessairement grief à la personne mise en examen, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé.

25. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Montpellier, en date du 13 février 2020, mais en ses seules dispositions ayant trait au moyen de nullité pris de l’absence de conservation d’un échantillon, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Montpellier, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize décembre deux mille vingt.

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Textes cités dans la décision

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