Cour de cassation, Chambre civile 3, 4 mars 2021, 20-12.253, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. civ., 4 mars 2021, n° 20-12.253
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-12.253
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 18 novembre 2019, N° 18/02984
Textes appliqués :
Article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime.

Article L. 222-2 du code de l’expropriation.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043253158
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:C300206
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 4 mars 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 206 F-D

Pourvoi n° H 20-12.253

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021

1°/ M. Q… E…,

2°/ Mme L… T…, épouse E…,

tous deux domiciliés […] ,

ont formé le pourvoi n° H 20-12.253 contre l’arrêt rendu le 19 novembre 2019 par la cour d’appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant à la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) Auvergne Rhône-Alpes, venant aux droits de la SAFER Rhône-Alpes, dont le siège est […] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. et Mme E…, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la SAFER Auvergne Rhône-Alpes, après débats en l’audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 19 novembre 2019), en 1995 et 1996, la société des Autoroutes Paris Rhin-Rhône (la SAPRR), concessionnaire de l’Etat, a acquis, après déclaration d’utilité publique, de U… E… et de son épouse des parcelles de terres qu’exploitait leur fils Q….

2. Par acte du 23 décembre 1998, la SAPRR a consenti à M. Q… E… une convention d’occupation de ces parcelles afin d’y poursuivre son activité agricole dans l’attente de leur affectation définitive.

3. Par acte du 4 décembre 2012, M. E… et son épouse ont consenti à la SAPRR une promesse unilatérale d’achat de ces terres, elles-mêmes regroupées en un tènement cadastré […] , ainsi que d’autres parcelles ayant appartenu aux parents de M. E… avant les acquisitions justifiées par l’aménagement autoroutier, mais pour la construction duquel elles ne se sont pas avérées indispensables.

4. Lors de la réitération de cette promesse par acte authentique, le notaire instrumentaire a notifié la vente à la société d’aménagement foncier et d’établissement rural Auvergne Rhône-Alpes (la SAFER).

5. Par lettre du 3 septembre 2013, la SAFER a exercé son droit de préemption.

6. M. et Mme E… ont demandé à la SAFER l’attribution en pleine propriété de l’ensemble des parcelles. Leur candidature à la rétrocession de la parcelle […] a été rejetée.

7. Par acte du 27 décembre 2013, M. et Mme E… ont assigné la SAFER en annulation de la décision de préemption et de la décision de rétrocession prise en faveur d’un tiers .

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. M. et Mme E… font grief à l’arrêt de rejeter leurs demandes d’annulation de la décision de préemption de la SAFER du 3 septembre 2013 et de la décision de rétrocession du 8 novembre 2013 rejetant l’attribution de la parcelle cadastrée […] , alors « que ne peuvent faire l’objet d’un droit de préemption les acquisitions réalisées par les agriculteurs à titre principal expropriés ; que les cessions amiables consenties après déclaration d’utilité publique produisent les mêmes effets que l’ordonnance d’expropriation qui éteint par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les immeubles expropriés ; qu’en l’espèce, M. E… faisait valoir qu’il avait la qualité d’agriculteur exproprié, les parcelles qu’il exploitait ayant été acquises à l’amiable en 1995 et 1996 par la société des autoroutes Paris Rhin-Rhône après déclaration d’utilité publique dans le cadre d’une opération d’expropriation ; qu’en retenant, pour considérer que M. E… ne bénéficiait pas de l’exemption du droit de préemption, que la preuve d’une expropriation n’était pas rapportée, une vente amiable ayant été réalisée au profit de la société des autoroutes Paris Rhin-Rhône, seule l’indemnité ayant été calculée comme en matière d’expropriation, sans rechercher s’il ne résultait pas des actes de vente versés aux débats et expressément invoqués, que les cessions amiables avaient eu lieu à la suite de la déclaration d’utilité publique prise par arrêté du 11 janvier 1994, dans le cadre de l’opération d’expropriation menée par la SAPRR en sa qualité de concessionnaire de l’Etat pour la construction de l’autoroute A39, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l’article L. 222-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique .»

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime et l’article L. 222-2 du code de l’expropriation :

9. Selon le premier de ces textes, ne peuvent faire l’objet d’une préemption par une SAFER les acquisitions réalisées par les agriculteurs à titre principal expropriés.

10. Selon le second, l’ordonnance d’expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés et il en est de même des cessions amiables consenties après déclaration d’utilité publique.

11. Pour dénier à M. E… la qualité d’agriculteur exproprié, exempté du droit de préemption de la SAFER lors d’acquisitions lui permettant de reconstituer son fonds, l’arrêt retient que la preuve d’une expropriation n’est pas rapportée, dès lors que les pièces versées aux débats établissent qu’une vente amiable, et non une expropriation, a été réalisée au profit de la SAPRR, seule l’indemnisation de l’exploitant évincé ayant été calculée comme en matière d’expropriation.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les cessions des parcelles agricoles exploitées par M. E…, que les parents de celui-ci avaient consenties à la SAPRR en vue de la construction d’une autoroute, n’avaient pas eu lieu après déclaration d’utilité publique, de sorte qu’elles produisaient les mêmes effets qu’une ordonnance d’expropriation, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 19 novembre 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Lyon autrement composée ;

Condamne la SAFER Auvergne Rhône-Alpes aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SAFER Auvergne Rhône-Alpes et la condamne à payer à M. et Mme E… la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. et Mme E…

Le moyen reproche à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté M. et Mme E… de leurs demandes tendant à l’annulation de la décision de préemption de la Safer Auvergne Rhône Alpes du 3 septembre 2013 et de sa décision de rétrocession du 8 novembre 2013 en ce qu’elle a rejeté la demande des époux E… d’attribution de la parcelle cadastrée section […] sise à […] ;

AUX MOTIFS QUE

« Sur la décision de préemption :

Attendu que les appelants allèguent que la décision de préemption a affaibli leur exploitation déjà de taille modeste, 13 ha environ, en réduisant sa surface, alors qu’à la même époque l’autorité préfectorale avait fixé à 52 ha l’unité de référence pour garantir la viabilité d’une exploitation agricole, qu’ils critiquent la légalité de la décision de préemption de la parcelle […] en vue de sa rétrocession au GAEC DE CHAREYZIAT alors que cette structure exploite 336 ha soit une moyenne de 110 ha par associés et n’a souffert d’aucune expropriation lors de la création de l’autoroute A 39,

Attendu que la SAFER réplique que sa décision, qui se réfère à un ou plusieurs des objectifs légaux définis par l’article L 143-2 du code rural et qui porte sur cinq parcelles n’a pas été de nature à modifier à elle seule la taille de l’exploitation agricole des époux E…,

Attendu qu’il résulte de l’article L.143-3 :

« A peine de nullité, la société d’aménagement foncier et d’établissement rural doit justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à l’un ou à plusieurs des objectifs ci-dessus définis, et la porter à la connaissance des intéressés. »

Attendu que la SAFER a régulièrement visé dans sa décision de préemption du bien litigieux deux objectifs rentrant dans le cadre de l’article L 143. 2 du code rural :

— l’agrandissement et l’amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes conformément à l’article L331-2,

— l’installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs,

Attendu que la décision précise que des décisions d’agrandissement et d’amélioration du parcellaire existent et qu’à titre d’exemple, on peut citer le GAEC laitier de 3 associés exploitant un terrain contiguë, dont le siège social se trouve à proximité des parcelles faisant l’objet de la préemption et qui exploite des terrains joignant la parcelle principale concernée, qu’étant donnée la situation stratégique des terrains l’acquisition par un associé de ce GAEC permettrait de le sécuriser, d’améliorer la structure de son parcellaire et de contribuer à la pérennité de l’exploitation,

Attendu que cette motivation comportant des données concrètes permettant de vérifier la réalité de l’objectif légal est de nature à permettre aux époux E… de s’assurer in concreto de la réalité et de la sincérité de la priorité donnée à un projet concurrent non précisément dénommé qui s’inscrirait dans cet objectif,

qu’elle est conforme aux objectifs légaux de la préemption,

Attendu que l’article L 143 – 2 2° du code rural, qui dans sa nouvelle rédaction fait référence à la notion de viabilité économique des exportations [lire exploitations] agricoles, n’était pas en vigueur au moment des faits litigieux, de sorte que rien n’interdisait à la SAFER d’agrandir l’exportation [lire exploitation] agricole de la taille la plus importante au regard des autres critères énoncés par les textes,

Attendu que M, E… prétend avoir la qualité d’exploitant exproprié et remplir les conditions de l’article L 143 -4 du code rural qui l’exempte de préemption, Attendu qu’il n’est pas rapporté la preuve que les auteurs de M. E… ont fait l’objet d’une expropriation, aucun jugement n’étant produit, que les pièces versées démontrent au contraire qu’une vente amiable a été réalisée au profit de la société des autoroutes Paris Rhin-Rhône SAPRR, seule l’indemnité étant calculée « comme en matière d’expropriation »,

Attendu que les appelants ne peuvent dès lors être exemptés du droit de préemption de la SAFER en application de l’article précité,

Attendu que M. E… fait état d’un bail rural le liant à la société d’autoroute, qui empêcherait la préemption en application de l’article L 143-6 du code rural, la contrepartie onéreuse consistant selon lui dans le paiement de tous les frais auxquels pourrait donner ouverture l’occupation notamment d’enregistrement et d’impôts fonciers,

Attendu qu’au soutien de son allégation, il verse la pièce 4 intitulée « convention d’occupation »,

Attendu qu’il résulte de ce document qu’il s’agit d’une convention émanant de la société des autoroutes Paris Rhin-Rhône SAPRR, concessionnaire de l’état, « à titre gratuit » en vue d’une « occupation » (et non d’une exploitation) dans l’attente de la régularisation de la situation juridique de ces terrains" et portant sur des parcelles appartenant encore au domaine public, et non d’un bail rural au sens de l’art, L. 411-1 du code rural, dont les éléments constitutifs ne sont pas réunis,

que dès lors l’article L 143-6 du code rural sus visé ne peut recevoir application,

Attendu que les époux E… sont donc, au vu de ces éléments, déboutés de leur demande en annulation de la décision de préemption de la SAFER, » (arrêt, p. 4, Sur la décision de préemption, à p. 6, al. 3) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

« La décision de préemption de la SAFER est motivée expressément par référence à deux des objectifs fixées par la loi, à savoir l’agrandissement et l’amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes d’une part et l’installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs d’autre part,

Evoquant en particulier l’existence de demandes d’agrandissement et d’amélioration du parcellaire émanant des exploitations locales, la SAFER a, dans sa décision de préemption, cité (sans le nommer précisément), à titre d’exemple, le GAEC, dont le siège principal se trouve à proximité des parcelles faisant l’objet de la préemption, et qui exploite des terrains joignant la parcelle principale concernée par cette décision.

M. et Mme E… ne peuvent valablement prétendre qu’ils bénéficient du statut de preneur à bail de la parcelle […] alors que la convention stipulait expressément qu’elle était accordée à titre gratuit.

Par ailleurs, M. et Mme E… sont mal venus à se plaindre de la trop faible superficie de leur exploitation, selon eux inférieure au plancher admis par la Mutualité Sociale Agricole pour être assujettis à la caisse d’assurance en qualité de chef d’exploitation, alors qu’ils reconnaissent eux-mêmes avoir donné une partie de leurs biens à leurs enfants, réduisant ainsi volontairement la surface de leur exploitation.

Il apparaît dans ces conditions que la décision de préemption est régulière. La demande d’annulation de cette décision est en conséquence non fondée. Elle sera rejetée. » (jugement, p. 2, dernier al., à p. 3, al. 5) » ;

1°) ALORS QUE ne peuvent faire l’objet d’un droit de préemption les acquisitions réalisées par les agriculteurs à titre principal expropriés ; que les cessions amiables consenties après déclaration d’utilité publique produisent les mêmes effets que l’ordonnance d’expropriation qui éteint par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les immeubles expropriés ; qu’en l’espèce, M. E… faisait valoir qu’il avait la qualité d’agriculteur exproprié, les parcelles qu’il exploitait ayant été acquises à l’amiable en 1995 et 1996 par la société des autoroutes Paris Rhin Rhône après déclaration d’utilité publique dans le cadre d’une opération d’expropriation ; qu’en retenant, pour considérer que M. E… ne bénéficiait pas de l’exemption du droit de préemption, que la preuve d’une expropriation n’était pas rapportée, une vente amiable ayant été réalisée au profit de la société des autoroutes Paris Rhin-Rhône, seule l’indemnité ayant été calculée comme en matière d’expropriation, sans rechercher s’il ne résultait pas des actes de vente versés aux débats et expressément invoqués, que les cessions amiables avaient eu lieu à la suite de la déclaration d’utilité publique prise par arrêté du 11 janvier 1994, dans le cadre de l’opération d’expropriation menée par la Saprr en sa qualité de concessionnaire de l’Etat pour la construction de l’autoroute A39, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l’article L. 222-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

2°) ALORS QUE le droit de préemption de la SAFER ne peut s’exercer contre le preneur en place ; que constitue un bail rural soumis au statut du fermage la convention qui met à la charge de l’exploitant de biens à usage agricole les charges incombant normalement au propriétaire, telles l’impôt foncier ; qu’en écartant la qualification de bail rural au motif que la convention conclue entre la société des autoroutes Paris Rhin Rhône et M. E… mentionnait une occupation de parcelles à titre gratuit sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si l’obligation stipulée à la charge de M. E… d’acquitter l’impôt foncier ne caractérisait pas la contrepartie onéreuse à la mise à disposition, faisant obstacle au droit de préemption de la Safer, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 411-1 et L. 143-6 du code rural et de la pêche maritime ;

3°) ALORS QUE le droit de préemption de la SAFER ne peut s’exercer contre le preneur en place ; que toute mise à disposition à titre onéreux d’un immeuble à usage agricole pour exercer une activité agricole définie à l’article L 311-1 du code rural et de la pêche maritime est régie par les dispositions relatives au bail rural ; qu’ayant constaté que la parcelle litigieuse était mise à disposition de M. E…, dont il était constant qu’il l’exploitait en sa qualité d’agriculteur, la cour d’appel qui, pour écarter la qualification de bail rural faisant obstacle au droit de préemption de la Safer, a retenu que la convention avait été conclue en vue d’une occupation et non d’une exploitation, a violé les articles L 143-6 et L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime ;

4°) ALORS QUE sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public ; qu’en retenant, pour écarter la qualification de bail rural faisant obstacle au droit de préemption de la Safer , que la convention conclue entre la société des autoroutes Paris Rhin Rhône et M. E… portait sur des parcelles appartenant au domaine public sans expliquer, ainsi qu’elle y était invitée, comment ces parcelles auraient pu appartenir au domaine public quand elles avaient été affectées à l’exploitation agricole de M. E…, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-6 et L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l’article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

5°) ALORS, en toute hypothèse, QUE la société d’aménagement foncier et d’établissement rural doit, à peine de nullité, justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à l’un ou plusieurs des objectifs légaux et la porter à la connaissance des intéressés ; qu’est nulle la décision de préemption dont la motivation révèle une inadéquation manifeste de la préemption au regard des objectifs qui lui sont assignés ; qu’en l’espèce, les époux E… faisaient valoir qu’il ressortait de la motivation de la décision de préemption une inadéquation manifeste entre les faits et les objectifs légaux assignés au droit de préemption, la préemption ayant pour effet d’affaiblir une exploitation existante de moins de 14 ha au profit d’une exploitation en comptant près de 336 qui n’avait nul besoin d’être renforcée ; qu’en retenant, pour débouter les époux E… de leur demande d’annulation de la décision de préemption de la Safer, que la motivation comportant des données concrètes permettant de vérifier la réalité de l’objectif légal poursuivi, rien n’interdisait à la Safer d’agrandir l’exploitation agricole de la taille la plus importante au regard des autres critères énoncés par les textes, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si la motivation n’était pas en inadéquation manifeste au regard de l’objectif assigné à la préemption, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-2, dans sa rédaction applicable antérieure à la loi du 13 octobre 2014, et L. 143-3 du code rural et de la pêche maritime.

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