Cour de cassation, Chambre sociale, 16 novembre 2022, 21-14.964, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 16 nov. 2022, n° 21-14.964
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 21-14.964
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Colmar, 8 février 2021, N° 20/02718
Textes appliqués :
Article 455 du code de procédure civile.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 22 novembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000046651745
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:SO01199
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

OR

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 16 novembre 2022

Cassation

Mme CAPITAINE, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 1199 F-D

Pourvoi n° Z 21-14.964

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 NOVEMBRE 2022

M. [Z] [V], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-14.964 contre l’arrêt rendu le 9 février 2021 par la cour d’appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l’opposant à l’institution Arpège prévoyance, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [V], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de l’institution Arpège prévoyance, après débats en l’audience publique du 27 septembre 2022 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Colmar, 9 février 2021), M. [V] a été nommé le 20 septembre 2017 directeur général par le conseil d’administration de l’institution Arpège prévoyance, qui l’a engagé, suivant contrat de travail signé le 1er octobre 2017, en qualité de directeur général.

2. Par jugement du 25 mai 2018, le tribunal judiciaire a rejeté la demande de validation de la délibération du conseil d’administration en date du 20 septembre 2017.

3. Le 27 juillet 2018, M. [V] a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [V] fait grief à l’arrêt de déclarer la juridiction prud’homale incompétente matériellement et d’ordonner le renvoi de la procédure devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, alors « que la contradiction de motifs équivaut à l’absence de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a énoncé que ''c’est par des motifs pertinents que la cour adopte, que le Conseil de prud’hommes s’est déclaré matériellement incompétent'', celui-ci ayant retenu que M. [V] ''ne saurait bénéficier du statut de salarié de Arpège Prévoyance et, partant, d’aucun contrat de travail, même en apparence'', tout en décidant par motifs propres que M. [V] ''justifie de l’existence d’un contrat apparent'' ; que dès lors, en se prononçant en ce sens, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, en violation de l’article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 455 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. La contradiction entre les motifs équivaut à un défaut de motifs.

6. Pour déclarer la juridiction prud’homale incompétente, l’arrêt, après avoir expressément adopté les motifs du jugement aux termes duquel les premiers juges ont retenu que les décisions prises lors de la réunion du conseil d’administration du 20 septembre 2017 n’ont pas été validées par le jugement du tribunal de grande instance de Mulhouse du 25 mai 2018, qu’ainsi M. [V] n’a pas été nommé régulièrement directeur général d’Arpège prévoyance et ne peut se prévaloir d’aucun contrat de travail, même en apparence, retient que M. [V] produit aux débats un contrat de travail conclu entre lui-même et l’institution Arpège prévoyance, et des bulletins de salaire établis entre octobre 2017 et juillet 2018, de sorte qu’il justifie de l’existence d’un contrat apparent.

7. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui s’est contredite, n’a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 février 2021, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Nancy ;

Condamne l’institution Arpège prévoyance aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l’institution Arpège prévoyance et la condamne à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [V]

Monsieur [Z] [V] fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu’il s’est déclaré incompétent matériellement pour connaître de cette affaire et en ce qu’il a ordonné le renvoi de la procédure devant le Tribunal Judiciaire de MULHOUSE ;

Alors, de première part, que la contradiction de motifs équivaut à l’absence de motifs ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel a énoncé que « c’est par des motifs pertinents que la Cour adopte, que le Conseil de prud’hommes s’est déclaré matériellement incompétent », celui-ci ayant retenu que Monsieur [V] « ne saurait bénéficier du statut de salarié de (ARPEGE PREVOYANCE) et, partant, d’aucun contrat de travail, même en apparence », tout en décidant par motifs propres que Monsieur [V] « justifie de l’existence d’un contrat apparent » ; que dès lors, en se prononçant en ce sens, la Cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, en violation de l’article 455 du Code de procédure civile ;

Alors, de deuxième part, subsidiairement, qu’il résulte des articles R. 931-3-24 et 26 du Code de la sécurité sociale, que toute convention intervenant directement entre une institution de prévoyance et son directeur général est soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration et que les conventions conclues sans cette autorisation sont nulles; que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel a retenu notamment que celui-ci ne peut se prévaloir d’un contrat de travail qui ne répond pas aux conditions de ces textes dès lors qu’aucune décision du Conseil d’administration n’a validé le contrat de travail dont il se prévaut ; qu’en se prononçant en ce sens, alors qu’il n’était pas contesté que le Conseil d’administration d’ARPEGE PREVOYANCE s’était réuni le 20 septembre 2017 afin d’autoriser la conclusion d’un contrat de travail entre l’Institution et Monsieur [V] en qualité de directeur général, de sorte que les conditions de validité du contrat de travail était réunies lors de la signature du contrat de travail en date du 1er octobre 2017, la Cour d’appel n’a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et violé les dispositions des textes susvisés;

Alors, de troisième part, en tout état de cause, qu’il résulte des articles R. 931-3-24 et R. 931-3-26 du Code de la sécurité sociale que les conventions réglementées qui ont été conclues en l’absence d’une autorisation préalable du conseil d’administration de l’Institution peuvent faire l’objet d’une action en nullité dans les trois ans de sa conclusion, dans l’hypothèse où la conclusion de cette convention aurait eu des conséquences dommageables pour l’Institution ; que la nullité de la convention réglementée ne saurait être déduite du jugement en date du 25 mai 2018 du TGI de MULHOUSE, lequel ne s’est pas prononcé sur une action en nullité de ladite convention ; que partant, en écartant l’existence d’un contrat de travail entre les parties, au motif que Monsieur [V] excipe d’un contrat de travail qui ne répond pas aux conditions des articles R. 931-3-24 et 26 du Code de la sécurité sociale, la Cour d’appel s’est prononcée par des motifs inopérants, en violation des dispositions de ces textes ;

Alors, de quatrième part, en outre, qu’en présence d’un contrat de travail apparent, caractérisé notamment par l’existence de bulletins de salaire et d’un contrat de travail signé des deux parties, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve; que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel a retenu « qu’il n’existe pas de lien de subordination entre l’Institution Arpège Prévoyance et Monsieur [V] Directeur Général salarié, et qu’en effet il n’est versé aux débats aucune directive, ordre, ou expression d’un pouvoir de direction à l’encontre du salarié, dont au demeurant l’Institution n’a jamais reconnu la qualité » ; qu’en se prononçant en ce sens, alors qu’elle avait constaté par motifs propres que ce dernier justifiait de l’existence d’un contrat apparent, de sorte qu’il incombait à l’Institution ARPEGE PREVOYANCE d’en établir le caractère fictif, la Cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses constatations, a inversé la charge de la preuve et violé l’article 1315 du Code civil devenu l’article 1353 du même Code, ensemble l’article L.1221-1 du Code du travail ;

Alors, de cinquième part, en tout état de cause, que Monsieur [V] démontrait qu’il avait poursuivi pour la seule Institution ARPEGE PREVOYANCE l’activité professionnelle qui était la sienne lorsqu’il était directeur salarié du groupe AG2R LA MONDIALE et qu’il dirigeait alors trois structures distinctes dont ARPEGE PREVOYANCE, afin d’en assurer le développement commercial (négociation de contrats, prospection, etc.) la gestion (signature de contrats, validation des paiements, etc.) et la bonne marche, qu’il disposait des délégations bancaires et de signature nécessaires, qu’il était en outre chargé des relations avec l’administrateur provisoire du compte bancaire d’ARPEGE PREVOYANCE nommé en mars 2018 et des relations avec l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution et le coadministrateur provisoire Monsieur [J], recevant des instructions du Président du conseil d’administration d’ARPEGE PREVOYANCE, lequel l’avait d’ailleurs informé du retrait de l’essentiel de ses tâches le 5 juillet 2018, et du groupe AG2R LA MONDIALE, lequel lui adressait encore des directives en août 2018 et septembre 2018 et lui précisait le 18 septembre 2018 qu’il était toujours chargé de représenter ARPEGE PREVOYANCE en sa qualité de gérant de la SCI DU PARC BRAUN et de la SCI DES CHATERELLES ; qu’il s’en déduisait que la preuve de l’existence d’un lien de subordination était rapportée; qu’en se bornant à affirmer « qu’il n’existe pas de lien de subordination entre l’Institution ARPEGE PREVOYANCE et Monsieur [V] Directeur Général salarié et qu’en effet il n’est versé aux débats aucune directive, ordre, ou expression d’un pouvoir de direction à l’encontre du salarié, dont au demeurant l’Institution n’a jamais reconnu la qualité », sans prendre en compte ces conclusions pourtant déterminantes de l’issue du litige, la Cour d’appel a méconnu les termes du litige, en violation de l’article 4 du Code de procédure civile ;

Alors, de sixième part, que l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles la prestation de travail s’est exécutée; que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel a retenu que « si Monsieur [V] a exercé une certaine activité professionnelle, il ne peut soutenir l’avoir exercée dans le cadre d’un contrat de travail, celui-ci ayant été conclu de manière illégale sans aucune volonté de l’Institution de Prévoyance de conclure une telle convention avec lui » ; qu’en se prononçant en ce sens, quand l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend pas de la volonté exprimée par les parties mais des conditions de fait dans lesquelles elle a été exécuté, la Cour d’appel s’est prononcée par des motifs parfaitement inopérants, en violation de l’article L.1221-1 du Code du travail ;

Alors, en tout état de cause, de septième part, qu’en énonçant que « si Monsieur [V] a exercé une certaine activité professionnelle, il ne peut soutenir l’avoir exercée dans le cadre d’un contrat de travail, celui-ci ayant été conclu de manière illégale sans aucune volonté de l’Institution de Prévoyance de conclure une telle convention avec lui », sans exposer en quoi la convention avait été conclue de manière illégale, et alors qu’il n’était pas contesté que Monsieur [V] se prévalait d’un contrat de travail signé par lui-même et par le président du Conseil d’administration de l’Institution ARPEGE PREVOYANCE, la Cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L.1221-1 du Code du travail ;

Alors, de huitième part, que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel retient que « s’agissant de la rémunération, l’intimée expose que Monsieur [V] a fait de manière occulte ouvrir un compte bancaire approvisionné par un dépôt de 50.000 € par le comptable de la BU Arpège Prévoyance (salarié du GIE AG2R Réunica), ce compte découvert en janvier 2018 par les services comptables du groupe, n’ayant pour seul objet que de permettre le versement des « salaires » à Monsieur [V], le comptable de la BU ayant été licencié pour faute grave pour ces faits ; Que Monsieur [V] ne s’explique pas sur cette manoeuvre ; » ; qu’en se prononçant en ce sens, par des motifs impropres à caractériser l’absence de contrat de travail effectif, la Cour d’appel a derechef privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L.1221-1 du Code du travail ;

Alors, de neuvième part, en outre, que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel retient qu'« on ne peut que s’étonner que l’unique salarié de cette institution serait M. [V] » ; qu’en se prononçant en ce sens, par un motif impropre à caractériser l’absence de contrat de travail effectif, la Cour d’appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L.1221-1 du Code du travail ;

Alors de dixième part, que pour écarter l’existence d’un contrat de travail entre les parties et, partant, dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [V], la Cour d’appel retient « qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que l’Institution Arpège Prévoyance rapporte la preuve du caractère fictif du contrat de travail invoqué par Monsieur [Z] [V] et qui résulte en réalité d’un véritable coup de force, de manoeuvres diverses et variées, mais en aucun cas d’une volonté commune des deux parties ; » qu’en se prononçant en ce sens, en s’attachant aux circonstances dans lesquelles la délibération du Conseil d’administration de l’Institution ARPEGE PREVOYANCE ayant validé à l’unanimité la désignation de Monsieur [V] en qualité de directeur général avait été annulée par le jugement du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE en date du 25 mai 2018, sans rechercher si, en pratique, Monsieur [V] avait effectivement exercé du 1er octobre 2017 au mois de septembre 2018 une activité professionnelle de directeur général dans un lien de subordination, la Cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L.1221-1 du Code du travail.

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