Conseil d'État, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 430326, Inédit au recueil Lebon

  • Cotisations·
  • Sécurité sociale·
  • Premier ministre·
  • Conseil constitutionnel·
  • Charge publique·
  • Activité professionnelle·
  • Tiré·
  • Décret·
  • Justice administrative·
  • Pouvoir réglementaire

Chronologie de l’affaire

Commentaires2

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Bornhauser Avocats · 10 décembre 2020

Nous l'avions annoncé sur ce blog : en dépit de deux arrêts contraires du Conseil d'Etat, (CE, 10 juillet 2019, n° 47919 et CE 1 ère Chambre, 29 juillet 2020, n° 430326) rendus sur des recours formés par d'excellents confrères, nous avions décidé de demander au juge judiciaire d'appliquer la réserve d'interprétation du Conseil Constitutionnel du 27 septembre 2018, relative au plafonnement des cotisations PUMA (QPC n° 2018-735). Nous avons été entendus : le tribunal judiciaire d'Ajaccio, par deux décisions du 18 novembre 2020 (n° 19/00323 et n° 19/00324), a jugé que les cotisations …

 

Bornhauser Avocats · 28 août 2020

Le Conseil Constitutionnel juge si la loi qui lui est soumise est conforme à la Constitution. Il peut la censurer et la loi disparaît. Il peut aussi émettre une « réserve d'interprétation constitutionnelle » à son encontre et dans ce cas, le texte législatif demeure en vigueur mais la réserve s'incorpore à lui. Une disposition législative ayant fait l'objet d'une réserve d'interprétation du Conseil n'existe dans l'ordre juridique que pour autant que la réserve est suivie d'effets » (commentaires de CC du 14 décembre 2002 DC). En septembre 2018, nous avions avec d'autres confrères demandé …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CE, 1re ch. jugeant seule, 29 juill. 2020, n° 430326
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 430326
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042175684
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2020:430326.20200729

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 avril et 7 novembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. A… B… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le Premier ministre a implicitement rejeté sa demande du 20 décembre 2018 tendant à l’adoption de nouvelles mesures réglementaires d’application de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale pour les cotisations dues sur les revenus antérieurs au 1er janvier 2019, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018 ;

2°) d’enjoindre au Premier ministre d’adopter dans un délai de trois mois de telles mesures, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 10 000 euros au titre de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – la Constitution, notamment son article 62 ;

 – le code de la sécurité sociale ;

 – la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 ;

 – le décret n° 2016-979 du 19 juillet 2016 ;

 – la décision n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018 du Conseil constitutionnel ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que M. B…, assujetti à la cotisation subsidiaire maladie au titre de l’année 2017 à hauteur de 94 288 euros, a demandé au Premier ministre, par un courrier du 20 décembre 2018, d’adopter les nouvelles mesures réglementaires d’application de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale qu’impliquait selon lui la décision n° 2018-735 QPC du Conseil constitutionnel du 27 septembre 2018 pour les cotisations dues au titre des revenus perçus avant le 1er janvier 2019. Il demande l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de deux mois sur sa demande.

2. Aux termes de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l’article 32 de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, qui a institué une protection universelle maladie : " Les personnes mentionnées à l’article L. 160-1 sont redevables d’une cotisation annuelle lorsqu’elles remplissent les conditions suivantes : / 1° Leurs revenus tirés, au cours de l’année considérée, d’activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à un seuil fixé par décret. En outre, lorsqu’elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, les revenus tirés d’activités professionnelles exercées en France de l’autre membre du couple sont également inférieurs à ce seuil ; / 2° Elles n’ont perçu ni pension de retraite, ni rente, ni aucun montant d’allocation de chômage au cours de l’année considérée. Il en est de même, lorsqu’elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, pour l’autre membre du couple. / Cette cotisation est fixée en pourcentage du montant des revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels, définis selon les modalités fixées au IV de l’article 1417 du code général des impôts, qui dépasse un plafond fixé par décret. (…) Un décret détermine le taux et les modalités de calcul de cette cotisation ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis. / Lorsque les revenus d’activité mentionnés au 1° sont inférieurs au seuil défini au même 1° mais supérieurs à la moitié de ce seuil, l’assiette de la cotisation fait l’objet d’un abattement dans des conditions fixées par décret. Cet abattement croît à proportion des revenus d’activité, pour atteindre 100 % à hauteur du seuil défini audit 1°. (…) ".

3. Par sa décision n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré les première et dernière phrases du quatrième alinéa de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale conformes à la Constitution sous la réserve suivante : « (…) la seule absence de plafonnement d’une cotisation dont les modalités de détermination de l’assiette ainsi que le taux sont fixés par voie réglementaire n’est pas, en elle-même, constitutive d’une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques. Toutefois, il appartient au pouvoir réglementaire de fixer ce taux et ces modalités de façon à ce que la cotisation n’entraîne pas de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ».

4. Les réserves d’interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel assortit la déclaration de conformité à la Constitution d’une disposition législative sont revêtues de l’autorité absolue de la chose jugée et lient tant les autorités administratives que le juge pour l’application et l’interprétation de cette disposition.

5. Aux termes du I de l’article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la cotisation prévue à l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale : " Le montant de la cotisation mentionné à l’article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d’activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes : / 1° Si les revenus tirés d’activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : / Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) / Où : / A est l’assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l’article L. 380-2 ; / D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ; / 2° Si les revenus tirés d’activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale : / Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) × 2 × (1-R/ S) / Où : / R est le montant des revenus tirés d’activités professionnelles ; / S, qui correspond au seuil des revenus tirés d’activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale ". Ces dispositions prévoient ainsi que la cotisation subsidiaire maladie est due par les assurés dont les revenus tirés d’activités professionnelles sont inférieurs à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale et qu’elle s’applique, au taux de 8 %, à la part des revenus du patrimoine excédant 25 % du même plafond. En outre, l’abattement d’assiette prévu en application du cinquième alinéa de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale équivaut à appliquer aux revenus du patrimoine un taux de cotisation décroissant de façon linéaire de 8 à 0 % en fonction du montant des revenus professionnels lorsque ceux-ci sont compris entre 5 et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.

6. En fixant, dans le cadre déterminé par les dispositions de l’article L. 380-2 précité, le seuil de revenus professionnels prévu au deuxième alinéa de cet article, en deçà duquel la cotisation est due, à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3 922,80 euros en 2017, le montant des revenus du patrimoine mentionné au quatrième alinéa du même article, au-delà duquel s’applique le prélèvement, à 25 % de ce même plafond, soit 9 807 euros en 2017, et le taux de la cotisation en cause à 8 %, le pouvoir réglementaire a défini les modalités de calcul de cette cotisation dans des conditions qui n’entraînent pas de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques. Par suite, l’article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 précité, ne méconnaissait pas le principe d’égalité devant les charges publiques garanti par l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et des citoyens de 1789, pas plus que les dispositions de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu’interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n’impliquait pas l’adoption de mesures réglementaires pour le passé.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. B… n’est pas fondé à soutenir que le Premier ministre était tenu de modifier les mesures réglementaires d’application des dispositions de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale relatives à la cotisation subsidiaire maladie pour les périodes d’assujettissement antérieures au 1er janvier 2019. Par suite, ses conclusions à fin d’injonction ne peuvent qu’être également rejetées.

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B… est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A… B…, au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Conseil d'État, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 430326, Inédit au recueil Lebon