Conseil d'État, Juge des référés, 24 février 2022, 461075, Inédit au recueil Lebon

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Conclusions du rapporteur public · 17 octobre 2022

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Sur la décision

Référence :
CE, juge des réf., 24 févr. 2022, n° 461075
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 461075
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Date de dernière mise à jour : 21 avril 2022
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045244785
Identifiant européen : ECLI:FR:CEORD:2022:461075.20220224

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3, 17 et 21 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société E-Pango demande au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l’exécution de la délibération n° 2022-25 de la Commission de régulation de l’énergie du 20 janvier 2022 portant décision relative aux règles relatives à la programmation, au mécanisme d’ajustement et au dispositif de responsable d’équilibre ainsi que ses effets ;

2°) de mettre à la charge de la Commission de régulation de l’énergie la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la condition d’urgence est satisfaite en ce que la délibération litigieuse, en renforçant les prérogatives de Réseau transport d’électricité (RTE) vis-à-vis des responsables d’équilibre défaillants, a pour effet de créer une situation qui met gravement en péril ses activités, dans un contexte déjà particulièrement difficile et marqué par la crise des prix de l’électricité, et en ce que l’application des nouvelles règles par RTE a conduit à la résiliation de son accord de participation en qualité de responsable d’équilibre, à la révocation de son statut de membre du marché spot France, lui interdisant d’opérer sur le marché français et européen, et l’expose à des sanctions financières ainsi qu’au risque d’être dans l’impossibilité d’exercer son activité de fournisseur d’électricité au détriment de ses clients ; qu’il n’y a pas d’intérêt public faisant obstacle à la suspension, seul les intérêts financiers de RTE, société privée, étant en jeu, et ce du fait de sa propre négligence dans la gestion des risques ;

— il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

— elle est entachée d’un vice de procédure ayant été prise en méconnaissance des règles de consultation prévues par l’article B. 5 de la section 2 des règles MA-RE, relative au dispositif de responsable d’équilibre, ce qui a privé les parties intéressées, dont les responsables d’équilibre comme elle, du bénéfice de leur droit à l’information et de leur faculté de présenter des observations et des propositions sur la nouvelle version des règles, et alors que la Commission ne peut faire évoluer les règles de façon discrétionnaire ;

— la délibération litigieuse méconnaît le principe de sécurité juridique, faute de comporter des mesures transitoires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2022, la Commission de régulation de l’énergie conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas propres à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2022, la société Réseau transport d’électricité conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la société E-Pango au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas propres à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l’équilibrage du système électrique ;

— le code de l’énergie ;

— le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, la société E-Pango, et d’autre part, la société Réseau transport d’électricité et la Commission de régulation de l’énergie ;

Ont été entendus lors de l’audience publique du 22 février 2022, à 10 heures 30 :

— Me Krivine, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société E-Pango ;

— les représentants de la société E-Pango ;

— les représentants de la Commission de régulation de l’énergie ;

— Me Piwnica, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société Réseau transport d’électricité ;

— les représentants de la société Réseau transport d’électricité ;

à l’issue de laquelle le juge des référés a clos l’instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ».

2. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue. L’urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’affaire, à la date à laquelle le juge des référés se prononce.

3. Aux termes de l’article L. 321-10 du code de l’énergie, « le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité assure à tout instant l’équilibre des flux d’électricité sur le réseau ainsi que la sécurité, la sûreté et l’efficacité de ce réseau, en tenant compte des contraintes techniques pesant sur celui-ci ». En vertu de l’article L. 321-15 de ce code, chaque producteur d’électricité raccordé aux réseaux publics de transport ou de distribution et chaque consommateur d’électricité, pour les sites pour lesquels il a exercé son droit prévu à l’article L. 331-1, « est responsable des écarts entre les injections et les soutirages d’électricité auxquels il procède ». Dans ce cadre, il doit conclure un contrat avec le gestionnaire du réseau public de transport, afin de définir les modalités selon lesquelles lui sont financièrement imputés les écarts entre les injections et les soutirages d’électricité auxquels il procède sur le réseau. Il peut toutefois contracter à cette fin avec un « responsable d’équilibre », qui prend alors en charge les écarts ou demander à l’un de ses fournisseurs de le faire. Ainsi, le responsable d’équilibre s’engage auprès du gestionnaire du réseau de transport à supporter le coût financier de tout écart négatif et, en cas d’écart positif, peut bénéficier d’une rémunération accordée par ce gestionnaire, conformément à l’article L. 321-14 de ce code, pour l’ensemble des sites de consommation qui, en vertu d’un contrat conclu avec lui, sont rattachés à son « périmètre d’équilibre ».

4. L’article L. 321-10 du code de l’énergie dispose, en outre, que « les règles de présentation des programmes et des propositions d’ajustement et les critères de choix entre les propositions d’ajustement () sont approuvés par la Commission de régulation de l’énergie ». L’article L. 321-14 du même code prévoit que « les méthodes de calcul des écarts et des compensations financières » mentionnées au point 3 « sont approuvées par la Commission de régulation de l’énergie ». En application de ces dispositions, par une délibération du 1er juillet 2021, la Commission de régulation de l’énergie a approuvé la dernière version des règles relatives à la programmation, au mécanisme d’ajustement et au dispositif de responsable d’équilibre, dites « règles MA-RE », qui est entrée en vigueur le 1er septembre 2021.

5. Par une délibération du 20 janvier 2022, intervenue à la suite d’une alerte de Réseau transport d’électricité (RTE), en sa qualité de gestionnaire du réseau de transport d’électricité, la Commission a pris une décision ayant « pour objet de réviser temporairement les règles MA-RE afin de mieux encadrer le cas où un responsable d’équilibre est défaillant ». Dans un contexte de crise des prix de l’électricité et afin de permettre à RTE d’agir plus rapidement lorsque l’encours d’un responsable d’équilibre se creuse et de limiter la dette que peut lui laisser un responsable d’équilibre défaillant, des modifications ont ainsi été introduites, au sein de la section 2 des règles MA-RE relatives au dispositif de responsable d’équilibre, au point C.4. qui porte sur la sécurisation financière du dispositif de responsable d’équilibre et qui prévoit que les responsables d’équilibre doivent disposer d’une garantie financière prenant la forme d’une garantie bancaire et, le cas échéant, d’un dépôt de liquidités auprès de la société RTE, ainsi qu’au point C.7. qui concerne la résiliation du contrat de participation. Les nouvelles règles prévoient ainsi une diminution du délai entre le constat de la défaillance d’un responsable d’équilibre, c’est-à-dire le dépassement de son encours autorisé, et la résiliation du contrat de participation conclu avec celui-ci, une diminution du délai de validité du dépôt de liquidité avant réception d’une garantie bancaire, une réduction du délai de paiement des factures pour les responsables d’équilibre défaillants et une augmentation de la garantie financière exigible pour un responsable d’équilibre défaillant. Il est enfin précisé que cette version des règles MA-RE est temporaire, RTE étant invité à saisir formellement la Commission d’évolutions visant à renforcer la sécurisation financière du dispositif de responsable d’équilibre, après avoir mené une consultation des acteurs.

6. La société E-Pango a demandé l’annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 20 janvier 2022 de la Commission de régulation de l’énergie. Sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, elle en demande la suspension de l’exécution.

7. Pour justifier de l’urgence, la société requérante fait valoir que la délibération litigieuse, en renforçant les prérogatives de RTE vis-à-vis des responsables d’équilibre défaillants, a pour effet de créer une situation qui mettrait gravement en péril ses activités. Elle se prévaut à ce titre de la résiliation de son accord de participation en qualité de responsable d’équilibre prononcée depuis et de la révocation de son statut de membre du marché spot France intervenue en conséquence, ainsi que du risque de suspension de son autorisation d’exercice de son activité de fournisseur d’électricité.

8. Toutefois, d’une part, s’il est vrai que l’application de la délibération litigieuse, notamment par la diminution des délais de procédure et l’augmentation de la garantie exigible des responsables d’équilibre qu’elle comporte, a pu accentuer les difficultés rencontrées par la société pour faire face à ses engagements en sa qualité de responsable d’équilibre, il résulte de l’instruction et notamment des éléments avancés à l’audience par RTE, que pour l’heure, les autres responsables d’équilibre ont pu s’adapter aux nouvelles modalités ainsi définies, qui ne concernent pas la substance même des garanties exigées, et, surtout, que les difficultés dont fait état la société sont antérieures à la délibération contestée et se sont poursuivies depuis. Celles-ci trouvent notamment leur origine dans le dépassement récurrent de ses encours, qui n’a cessé de s’aggraver depuis le mois de décembre 2021. A cet égard, sous l’empire des règles MA-RE en vigueur avant l’intervention de la délibération litigieuse, la société E-Pango avait fait l’objet de deux mises en demeure de régulariser sa situation, les 6 décembre 2021 et 20 janvier 2022, et d’une première notification d’une mesure de résiliation de son contrat de participation, le 24 décembre 2021, non suivie d’effet. Par ailleurs, début février 2022, son encours était de plus de 8,3 millions d’euros, pour une garantie bancaire de 2,8 millions d’euros.

9. D’autre part, la Commission de régulation de l’énergie et RTE font valoir l’extrême tension résultant de l’actuelle crise des prix de l’électricité, justifiant de renforcer sans attendre les modalités du dispositif de sécurisation financière afin de prémunir la société RTE, en sa qualité de gestionnaire du réseau de transport d’électricité, des risques de faillite de certains responsables d’équilibre dans des conditions empêchant le recouvrement des coûts des écarts. Il résulte de l’instruction et des échanges au cours de l’audience que l’adoption de la délibération litigieuse a été notamment motivée par la mise en liquidation judiciaire ou le placement en redressement judiciaire de deux responsables d’équilibre en décembre 2021 et janvier 2022 et l’existence de risques financiers estimés à plusieurs dizaines de millions d’euros, sans qu’une négligence de RTE soit caractérisée. Dans ce contexte, la délibération litigieuse doit permettre d’éviter l’aggravation de l’exposition financière du gestionnaire du réseau de transport d’électricité et de protéger les utilisateurs du réseau, sur lesquels les pertes sont susceptibles d’être répercutées, dans le cadre défini par le 2 de l’article 44 du règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l’équilibrage du système électrique.

10. Dans ces conditions et eu égard à l’intérêt public qui s’attache au bon fonctionnement et à la sécurisation du dispositif d’équilibre des flux d’électricité sur le réseau, et alors que la délibération contestée n’est que provisoire, d’un objet limité, et que les travaux de concertation pour l’élaboration de règles pérennes ont débuté, la condition d’urgence ne peut être regardée comme remplie. Dès lors, la requête de la société E-Pango doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n’y pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société RTE à ce titre.

O R D O N N E :

— -----------------

Article 1er : La requête de la société E-Pango est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société RTE au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société E-Pango, à la Commission de régulation de l’énergie et à la société Réseau transport d’électricité.

Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique.

Fait à Paris, le 24 février 202 Signé : Anne Courrèges

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