Conseil d'État, 6ème chambre, 17 février 2023, 460798, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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www.bctg-avocats.com · 22 mars 2023

A la une Loi d'accélération de la production d'énergies renouvelables du 11 mars 2023. LOI n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (1) – Légifrance (legifrance.gouv.fr) Le Conseil constitutionnel a finalement validé les principales dispositions contestées par certains parlementaires, rejetant les critiques liées à une rupture d'égalité en faveur des producteurs d'ENR, notamment s'agissant de la notion de « raison impérative d'intérêt public majeur » (RIIPM). Seules certaines dispositions marginales ont été déclarées non-conformes à …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 6e chs, 17 févr. 2023, n° 460798
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 460798
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Nancy, 24 novembre 2021, N° 19NC01845, 19NC01846
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 28 août 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000047191942
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2023:460798.20230217

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

L’association de défense de l’environnement à Tiercelet (ADET 54), M. A M, M. P F, M. D C, M. B N, M. L de Keghel, M. B G, M. H I, M. E J, M. O K et la société d’économie mixte immobilière (SEMI) de la commune de Villerupt ont demandé au tribunal administratif de Nancy l’annulation de l’arrêté du 9 octobre 2014 du préfet de Meurthe-et-Moselle délivrant à la société de développement et de gestion des énergies renouvelables (SODEGER) Haut Lorraine l’autorisation d’exploiter sept éoliennes et un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Bréhain-la-Ville (Meurthe-et-Moselle). Par un jugement n° 1501112 du 29 juillet 2016, le tribunal administratif a fait droit à leur demande et annulé cet arrêté.

Par un arrêt nos 16NC02173, 16NC02191 du 14 décembre 2017, la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté les appels de la SODEGER Haut Lorraine et de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, formés contre ce jugement.

Par une décision n° 417928 du 7 juin 2019, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a annulé l’arrêt de la cour et renvoyé l’affaire à celle-ci.

Par un nouvel arrêt nos 19NC01845, 19NC01846 du 25 novembre 2021, la cour administrative d’appel de Nancy a, d’une part, sursis à statuer sur les requêtes de la SODEGER Haut Lorraine et de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat jusqu’à l’expiration d’un délai de quatre mois, courant à compter de la notification de son arrêt, imparti à la SODEGER Haut Lorraine ou à l’Etat pour notifier, après avis régulièrement émis par l’autorité environnementale, une autorisation environnementale modificative, d’autre part, suspendu l’exécution de l’arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 9 octobre 2014, devenu autorisation environnementale, jusqu’à l’édiction de cette autorisation environnementale modificative.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 25 janvier, 25 avril, 18 novembre et 29 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’ADET 54 et autres demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter les appels de la SODEGER Haut Lorraine et de la ministre ;

3°) de mettre à la charge de la SODEGER Haut Lorraine une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

— le code de l’environnement ;

— l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

— l’arrêté du 23 avril 2007 du ministre de l’agriculture et de la pêche et de la ministre de l’écologie et du développement durable, fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

— l’arrêté du 29 octobre 2009 du ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

— l’arrêté ministériel du 26 août 2011 de la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent ;

— l’arrêté du 26 août 2011 de la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement relatif aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent au sein d’une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement ;

— le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d’Etat,

— les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Munier-Apaire, avocat de l’association de défense de l’environnement à Tiercelet (ADET 54) et autres, et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société de développement et de gestion des énergies renouvelables (SODEGER) Haut Lorraine ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 octobre 2014, pris au titre de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement, le préfet de Meurthe-et-Moselle a autorisé la société de développement et de gestion des énergies renouvelables (SODEGER) Haut Lorraine à exploiter un parc composé de sept éoliennes d’une hauteur de 149,50 mètres en bout de pale et d’un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Bréhain-la-Ville. A la demande de l’association de défense de l’environnement à Tiercelet (ADET 54), de la société d’économie mixte immobilière de la commune de Villerupt et de plusieurs personnes physiques, le tribunal administratif de Nancy a, par un jugement du 29 juillet 2016, annulé cet arrêté. Par une décision du 7 juin 2019, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a annulé l’arrêt du 14 décembre 2017 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté les appels de la SODEGER Haut Lorraine ainsi que du ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, contre ce jugement. L’ADET 54 et autres se pourvoient en cassation contre l’arrêt du 25 novembre 2021 de la cour administrative d’appel de Nancy qui, statuant sur renvoi après cassation, a sursis à statuer sur les appels formés par la SODEGER Haut Lorraine et le ministre de l’écologie, de l’énergie et de la mer jusqu’à l’expiration d’un délai de quatre mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à la SODEGER Haut Lorraine ou à l’Etat pour notifier à la cour, après avis régulièrement émis par l’autorité environnementale, une autorisation environnementale modificative.

2. En premier lieu, l’article R. 512-6 du code de l’environnement, dans sa rédaction applicable en l’espèce, prévoit que toute demande de mise en service d’une installation classée pour la protection de l’environnement soumise à autorisation doit être accompagnée, notamment, de l’étude d’impact prévue à l’article L. 122-1 du même code. Le contenu de cette étude est défini à l’article R. 122-5 du même code qui, dans sa rédaction applicable en l’espèce, prévoit qu’il : « est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d’être affectée par le projet, à l’importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l’environnement ou la santé humaine », et complété par l’article R. 512-8 du même code, également dans sa rédaction en l’espèce, qui dispose que ce contenu « doit être en relation avec l’importance de l’installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l’environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. »

3. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que pour écarter le moyen tiré de l’insuffisance du volet avifaunistique de l’étude d’impact du projet de parc éolien porté par la SODEGER Haut Lorraine, la cour a retenu, d’une part, que si le recensement des oiseaux en migration initialement établi par le bureau d’étude sollicité par le pétitionnaire était sensiblement inférieur à celui établi dans le cadre d’une étude complémentaire ultérieure qui n’a pas été soumise à enquête publique, l’autorité administrative avait, pour sa part, statué au regard des résultats de cette étude complémentaire, dont le caractère insuffisant n’était pas démontré. D’autre part, elle a retenu que les conclusions des études initiales et complémentaires étaient en revanche convergentes sur le fait que le lieu d’implantation du projet n’était pas situé sur d’importants couloirs de passage des oiseaux, alors que l’enquête publique avait en pratique donné lieu à des observations relatives au risque de collision avec les éoliennes et au fait que le parc se situait sur une aire de migration de plusieurs espèces, de sorte que l’insuffisance des relevés initiaux n’avait pas, dans les circonstances de l’espèce, été de nature à priver le public d’une information au vu de laquelle il aurait pu faire valoir des observations différentes, plus nombreuses ou plus étayées quant aux risques éventuels du projet pour l’avifaune, ni de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative. Ce faisant, la cour, qui n’était pas tenue de répondre à l’ensemble des arguments développés devant elle, a suffisamment motivé son arrêt.

4. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 515-46 du code de l’environnement : « L’exploitant d’une installation produisant de l’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent ou, en cas de défaillance, la société mère est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site, dès qu’il est mis fin à l’exploitation, quel que soit le motif de la cessation de l’activité. Dès le début de la production, puis au titre des exercices comptables suivants, l’exploitant ou la société propriétaire constitue les garanties financières nécessaires. () »

5. Par ailleurs, d’une part, aux termes de l’article R. 515-101 du code de l’environnement, qui reprend à l’identique les dispositions de l’article R. 553-1 du même code applicable antérieurement : « I. – La mise en service d’une installation de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l’article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l’exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l’article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d’actualisation de ce montant sont fixés par l’arrêté d’autorisation de l’installation. / II. – Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe, en fonction de l’importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. / () » D’autre part, aux termes de l’article R. 515-106 du même code, dans sa rédaction applicable en l’espèce, qui reprend à l’identique les dispositions de l’article R. 553-6 du même code applicables antérieurement : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d’un site après exploitation comprennent : / 1° Le démantèlement des installations de production ; / 2° L’excavation d’une partie des fondations ; / 3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l’état ; / 4° La valorisation ou l’élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions techniques de remise en état. "

6. En application de ces dispositions, la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, a pris un arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent, applicable à la date de l’intervention de l’arrêté préfectoral attaqué, et qui précisait, jusqu’à son abrogation par l’arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent au sein d’une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement, notamment les modalités de calcul et d’actualisation des garanties financières que le pétitionnaire doit constituer dès la mise en service de son installation ainsi que la teneur des opérations de démantèlement. Par ailleurs, la ministre a adopté un second arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent au sein d’une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement, qui a été modifié suite à l’intervention de l’arrêté du 22 juin 2020 précité notamment pour intégrer des dispositions destinées à remplacer les dispositions abrogées de l’autre arrêté du 26 août 2011. L’article 29 de cet arrêté, applicable en l’espèce, précise ainsi la teneur des opérations de démantèlement et de remise en état prévues à l’article R. 515-106 du code de l’environnement et ses articles 30 et suivants, ainsi que leurs annexes, précisent désormais les modalités de calcul des garanties financières mentionnées à l’article R. 515-101 du même code.

7. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que sur le fondement des dispositions de l’article R. 553-1 du code de l’environnement et de l’arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent alors applicables, l’article 5 de l’arrêté préfectoral du 9 octobre 2014 attaqué a fixé le montant initial des garanties financières devant être constituées par la SODEGER Haut Lorraine à 350 000 euros et précisé que ce montant devait être réactualisé par l’exploitant conformément à la formule mentionnée dans l’arrêté du 26 août 2011 précité. En revanche, s’agissant de la teneur même des opérations de démantèlement et de remise en état, l’article 13 de l’arrêté préfectoral du 9 octobre 2014 attaqué se borne à prévoir que l’exploitant doit remettre le site de l’installation en état « conformément aux dispositions de l’arrêté ministériel du 26 août 2011 ».

8. Il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que pour juger que les moyens tirés d’une insuffisance des mesures de démantèlement et de remise en état prévues par l’arrêté préfectoral attaqué et d’une méconnaissance des dispositions de l’article R. 515-506 du code de l’environnement par celles de l’arrêté du 26 août 2011 précisant la teneur de ces opérations de démantèlement et de remise en état prévues par cet article étaient inopérants à l’encontre de l’arrêté préfectoral attaqué, la cour administrative d’appel a retenu que les dispositions de l’article R. 515-106 et de l’arrêté du 26 août 2011 relatives aux opérations de démantèlement et de remise en état n’étaient applicables à l’installation autorisée que dans l’hypothèse d’une mise à l’arrêt définitif de celle-ci, et n’avaient donc pas vocation à s’appliquer dans le cadre de l’arrêté par lequel l’autorité administrative délivre une autorisation unique portant sur la construction et l’exploitation d’un parc éolien. En statuant ainsi, alors qu’elle n’était saisie d’aucune argumentation mettant en cause le montant des garanties financières demandées au pétitionnaire ainsi que les modalités de réactualisation de celles-ci, la cour qui, contrairement à ce qui soutenu, n’a pas omis de se prononcer sur l’un des moyens soulevés devant elle sur ce point, n’a pas commis d’erreur de droit.

9. En troisième lieu, d’une part, en vertu des dispositions de l’article R. 512-3 du code de l’environnement applicables en l’espèce, toute demande de mise en service d’une installation classée pour la protection de l’environnement soumise à autorisation doit mentionner « 5° Les capacités techniques et financières de l’exploitant », cette demande devant figurer dans le dossier soumis à enquête publique en vertu des dispositions de l’article R. 123-8 du même code. D’autre part, aux termes de l’article L. 181-18 du code de l’environnement : " I.- Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu’un vice n’affecte qu’une phase de l’instruction de la demande d’autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et demander à l’autorité administrative compétente de reprendre l’instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d’irrégularité ; / 2° Qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / () "

10. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué, non contestées sur ce point en cassation, que le dossier initialement constitué par la société pétitionnaire et soumis à enquête publique ne satisfaisait pas à l’exigence de justification de ses capacités financières fixée au 5 ° de l’article R. 512-3 du code de l’environnement. Toutefois, la cour a, par une appréciation souveraine, relevé que différentes modalités avaient été mises en œuvre pour informer le public sur les capacités financières dont justifiait le pétitionnaire, notamment un avis d’information des habitants détaillé adressé aux communes concernées par l’enquête publique, l’insertion d’annonces légales dans trois journaux locaux, un affichage en mairie et sur le site d’implantation du parc éolien. Elle a également estimé, par une appréciation souveraine, que l’information donnée au public à travers ces différentes mesures avait permis au public de comprendre l’origine, l’objet et les modalités de la nouvelle consultation organisée. En retenant également qu’il n’était pas allégué que les communes concernées n’auraient pas procédé aux mesures de diffusion ou d’affichage correspondantes alors que les requérants se bornaient à soutenir qu’il n’était pas établi que l’affichage ait eu lieu dans toutes les autres mairies des communes inscrites dans le périmètre de l’enquête publique, la cour ne s’est pas méprise sur la portée de leurs écritures.

11. En quatrième lieu, aux termes de l’article L. 515-44 du code de l’environnement : « () / Les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres sont soumises à autorisation au titre de l’article L. 511-2, au plus tard le 12 juillet 2011. La délivrance de l’autorisation d’exploiter est subordonnée au respect d’une distance d’éloignement entre les installations et les constructions à usage d’habitation, les immeubles habités et les zones destinées à l’habitation définies dans les documents d’urbanisme en vigueur au 13 juillet 2010 et ayant encore cette destination dans les documents d’urbanisme en vigueur, cette distance étant, appréciée au regard de l’étude d’impact prévue à l’article L. 122-1. Elle est au minimum fixée à 500 mètres. L’autorisation d’exploiter tient compte des parties du territoire régional favorables au développement de l’énergie éolienne définies par le schéma régional éolien mentionné au 3° du I de l’article L. 222-1, si ce schéma existe. » Par ailleurs, aux termes de l’article L. 174-1 du code de l’urbanisme : « Les plans d’occupation des sols qui n’ont pas été mis en forme de plan local d’urbanisme, en application du titre V du présent livre, au plus tard le 31 décembre 2015 sont caducs à compter de cette date, sous réserve des dispositions des articles L. 174-2 à L. 174-5. / La caducité du plan d’occupation des sols ne remet pas en vigueur le document d’urbanisme antérieur. / A compter du 1er janvier 2016, le règlement national d’urbanisme mentionné aux articles L. 111-1 et L. 422-6 s’applique sur le territoire communal dont le plan d’occupation des sols est caduc. »

12. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué, non contestées en cassation sur ces points, que les éoliennes E1 et E2 du projet porté par la SODEGER Haut Lorraine se situent, respectivement, à une distance appréciée au regard de l’étude d’impact de 475 et 430 mètres de la partie la plus proche du plan d’occupation des sols de la commune de Bréhain-la-Ville, tel qu’approuvé le 17 septembre 1980 et modifié les 7 juillet 1984 et 6 octobre 1992. Après avoir relevé que cette zone UB constituait une zone destinée à l’habitation au sens des dispositions de l’article L. 515-44 du code de l’environnement, la cour a retenu qu’il n’était pas établi que cette zone ait conservé cette destination à la date de son arrêt. En se fondant ainsi sur la seule ancienneté du plan d’occupation des sols, sans caractériser les éléments permettant de retenir que la zone litigieuse n’était plus destinée à l’habitation dans les documents d’urbanisme en vigueur, la cour a entaché son arrêt d’erreur de droit. Toutefois, il résulte des dispositions de l’article L. 174-1 du code de l’urbanisme précitées qu’à la date de l’arrêt attaqué, le plan d’occupation des sols de la commune de Bréhain-la-Ville était devenu caduc, de sorte que le zonage opéré par ce plan ne pouvait plus être pris en compte à la date de l’arrêt attaqué. Ce motif, qui n’implique l’appréciation d’aucune circonstance de fait, doit être substitué, ainsi que le demande la SODEGER Haut Lorraine en défense, au motif erroné retenu par l’arrêt attaqué pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 515-44 du code de l’environnement.

13. En dernier lieu, aux termes de l’article L. 411-1 du code de l’environnement : " I. – Lorsqu’un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l’écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d’intérêt géologique, d’habitats naturels, d’espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits: / 1° La destruction ou l’enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d’animaux de ces espèces ou, qu’ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; () / 3° La destruction, l’altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d’espèces () « . Aux termes de l’article L. 411-2 du même code : » I. – Un décret en Conseil d’Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : () / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l’article L. 411-1, à condition qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l’autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : a) Dans l’intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; / b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l’élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d’autres formes de propriété ; / c) Dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement ; / d) A des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ; / e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d’une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d’un nombre limité et spécifié de certains spécimens () ".

14. Il résulte de ces dispositions que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, l’autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant, d’une part, à l’absence de solution alternative satisfaisante, d’autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l’un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d’intérêt public majeur.

15. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus, qui concerne les espèces de mammifères terrestres et d’oiseaux figurant sur les listes fixées par les arrêtés du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection et du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection, impose d’examiner si l’obtention d’une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l’espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l’applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l’état de conservation des espèces protégées présentes.

16. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation « espèces protégées » si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d’évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l’hypothèse où les mesures d’évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l’administration, des garanties d’effectivité telles qu’elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu’il apparaisse comme n’étant pas suffisamment caractérisé, il n’est pas nécessaire de solliciter une dérogation « espèces protégées ».

17. La cour a relevé, d’une part, s’agissant de la grue cendrée, que si une étude complémentaire menée à la demande du pétitionnaire en 2014 avait mis en évidence la présence sensiblement plus importante de spécimens de cette espèce que l’étude d’impact initialement établie, aucune zone de nidification n’avait été identifiée, que le risque estimé de modification des trajectoires de migration lié au projet était faible à modéré et le risque de collision non significatif, au regard de l’altitude de vol de l’espèce et des conditions d’implantation des éoliennes. La cour a également relevé, d’autre part, s’agissant du milan royal, que si cette espèce soulève un fort enjeu de conservation eu égard à son statut de conservation défavorable au niveau national, aucune zone de nidification n’avait été identifiée sur le site et que l’impact sur l’espèce n’était pas démontré. Dans ces conditions, en jugeant que le projet n’impliquait pas d’atteinte suffisamment caractérisée à la grue cendrée et au milan royal, et en déduisant qu’un tel risque ne nécessitait pas de former préalablement une demande de dérogation au titre des dispositions du 4° du I de l’article L. 411-2 du code de l’environnement, la cour n’a ni commis d’erreur de droit, ni donné aux faits de l’espèce une inexacte qualification juridique.

18. Il résulte de tout ce qui précède que l’ADET 54 et autres ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel attaqué. Leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu’être rejetées. Par ailleurs, dans les circonstances de l’espèce, il n’y pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la SODEGER Haut Lorraine sur le même fondement.

D E C I D E :

— -------------

Article 1er : Le pourvoi de l’ADET 54 est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de la SODEGER Haut Lorraine présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’association de défense de l’environnement à Tiercelet (ADET 54), première requérante dénommée, à la société de développement et de gestion des énergies renouvelables Haut Lorraine et au ministre de transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l’issue de la séance du 19 janvier 2023 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d’Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d’Etat-rapporteure.

Rendu le 17 février 2023.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

La rapporteure :

Signé : Mme Rozen Noguellou

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse

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Conseil d'État, 6ème chambre, 17 février 2023, 460798, Inédit au recueil Lebon