CJUE, n° C-551/21, Ordonnance de la Cour, Commission européenne contre Conseil de l'Union européenne, 3 mars 2022

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 3 mars 2022, C-551/21
Numéro(s) : C-551/21
Ordonnance du président de la Cour du 3 mars 2022.#Commission européenne contre Conseil de l'Union européenne.#Intervention – Article 40 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne – Demande présentée par le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité – Intérêt à la solution du litige – Admission.#Affaire C-551/21.
Date de dépôt : 7 septembre 2021
Précédents jurisprudentiels : Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C-144/21, EU:C:2021:757
Cour du 29 juillet 2019, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C-119/19 P, non publiée, EU:C:2019:658
Solution : Demande en intervention : obtention, Recours en annulation
Identifiant CELEX : 62021CO0551
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2022:163
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Sur les parties

Texte intégral

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

3 mars 2022 ( *1 )

« Intervention – Article 40 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne – Demande présentée par le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité – Intérêt à la solution du litige – Admission »

Dans l’affaire C-551/21,

ayant pour objet un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, introduit le 7 septembre 2021,

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet, B. Hofstötter et T. Ramopoulos ainsi que par Mme A. Stobiecka-Kuik, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. A. Antoniadis, F. Naert et B. Driessen, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par :

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, O. Šváb et J. Vláčil ainsi que par Mme K. Najmanová, en qualité d’agents,

République française, représentée par Mme A.-L. Desjonquères et M. J.-L. Carré, en qualité d’agents,

Hongrie, représentée par M. M. Z. Fehér et Mme K. Szíjjártó, en qualité d’agents,

Royaume des Pays-Bas, représenté par Mme M. K. Bulterman et M. J. Langer, en qualité d’agents,

République portugaise, représentée par Mmes M. Pimenta, P. Barros da Costa et M. J. Ramos, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

vu la proposition de M. C. Lycourgos, juge rapporteur,

l’avocate générale, Mme J. Kokott, entendue,

rend la présente

Ordonnance

1

Par sa requête, la Commission européenne demande l’annulation de l’article 2 de la décision (UE) 2021/1117 du Conseil, du 28 juin 2021, relative à la signature, au nom de l’Union européenne, et à l’application provisoire du protocole de mise en œuvre de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la République gabonaise et la Communauté européenne (2021-2026) (JO 2021, L 242, p. 3), et de la désignation par le Conseil de l’Union européenne, par l’intermédiaire de son président et sur la base de cette disposition, de l’ambassadeur du Portugal comme personne habilitée à signer ce protocole.

2

À l’appui de ce recours en annulation, la Commission affirme, notamment, que la pratique du Conseil consistant à faire désigner par son président la personne habilitée à signer un accord international au nom de l’Union européenne porte atteinte à la prérogative de la Commission, conférée à l’article 17, paragraphe 1, TUE, d’assurer, dans les matières ne relevant pas de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), la représentation extérieure de l’Union.

3

Par acte déposé au greffe de la Cour le 6 janvier 2022, le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (ci-après le « haut représentant ») a, sur le fondement de l’article 40 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 130 du règlement de procédure de la Cour, demandé à intervenir dans le litige, au soutien des conclusions de la Commission.

4

À l’appui de sa demande d’intervention, le haut représentant fait valoir, à titre principal, qu’il fait partie des « institutions de l’Union », au sens de l’article 40, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et, à titre subsidiaire, qu’il doit être considéré comme étant un « organe » ou « organisme » de l’Union, au sens de l’article 40, deuxième alinéa, de ce statut et comme justifiant d’un « intérêt à la solution du litige », au sens de cette disposition. À cet égard, le haut représentant fait observer que les appréciations faites par la Cour, dans l’arrêt à intervenir, au sujet de la prérogative invoquée par la Commission s’appliqueront, mutatis mutandis, à la prérogative analogue qu’il détient, en vertu de l’article 27, paragraphe 2, TUE, dans le domaine de la PESC.

5

Par acte déposé au greffe de la Cour le 13 janvier 2022, la Commission a conclu à l’admission de cette demande d’intervention.

6

Par acte déposé au greffe de la Cour le 21 janvier 2022, le Conseil a conclu au rejet de ladite demande d’intervention.

7

Le Conseil estime que le haut représentant n’est pas une « institution de l’Union », au sens de l’article 40, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et que, nonobstant le fait que celui-ci devrait être considéré comme relevant de la notion d’« organe ou organisme de l’Union », au sens de l’article 40, deuxième alinéa, de ce statut, il ne justifie pas d’un « intérêt à la solution du litige », au sens de cette dernière disposition.

8

Le Conseil fait observer, en particulier, que, en l’espèce, le litige ne concerne pas la PESC et que la solution qui y sera apportée par la Cour ne saurait dès lors affecter la situation juridique du haut représentant. La situation de ce dernier par rapport à celle du Conseil serait, au demeurant, différente de celle de la Commission. À cet égard, le Conseil fait valoir que le haut représentant préside, conformément à l’article 27, paragraphe 1, TUE, le Conseil des affaires étrangères et qu’il peut par conséquent lui-même désigner la personne habilitée à conclure un accord international dans le domaine de la PESC. La situation juridique du haut représentant se distinguerait ainsi de celle dans laquelle se trouve la Commission lorsque, comme en l’espèce, un accord international est conclu dans une matière qui ne relève pas de la PESC.

Sur la demande d’intervention

9

L’article 40, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne dispose que les États membres et les institutions de l’Union peuvent intervenir aux litiges soumis à la Cour.

10

Les institutions de l’Union, au sens de cette disposition, ne sont que celles limitativement énumérées à l’article 13, paragraphe 1, TUE (ordonnance du président de la Cour du 29 juillet 2019, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C-119/19 P, non publiée, EU:C:2019:658, point 6 ainsi que jurisprudence citée).

11

Par conséquent, ne figurant pas dans la liste de l’article 13, paragraphe 1, TUE, le haut représentant ne saurait être qualifié d’« institution de l’Union ». Il ne peut, dès lors, se prévaloir d’une telle qualité pour revendiquer le droit d’intervenir dans la présente affaire (ordonnance du président de la Cour du 29 juillet 2019, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C-119/19 P, non publiée, EU:C:2019:658, point 7 ainsi que jurisprudence citée).

12

Dans ces conditions, il y a lieu de vérifier si, en l’espèce, le haut représentant peut être admis à intervenir au litige, au soutien des conclusions de la Commission, en application de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, comme il le soutient à titre subsidiaire.

13

Aux termes de l’article 40, deuxième alinéa, première phrase, de ce statut, le droit d’intervenir à un litige soumis à la Cour appartient « aux organes et aux organismes de l’Union et à toute autre personne », s’ils peuvent justifier d’un « intérêt à la solution du litige ». La seconde phrase de ce deuxième alinéa exclut l’intervention de « personnes physiques et morales » dans les affaires entre États membres, entre institutions de l’Union ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part. Sur le fondement du libellé et de l’économie de cette dernière disposition, il doit être considéré qu’une telle exclusion ne s’applique pas aux « organes et aux organismes de l’Union » (ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C-144/21, EU:C:2021:757, points 6 à 8).

14

Eu égard au mandat, intrinsèquement lié au fonctionnement de l’Union, dont est investi le haut représentant à l’article 27 TUE, et, notamment, au fait que tout en s’appuyant sur le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), conformément à l’article 27, paragraphe 3, TUE, il en est juridiquement distinct, le haut représentant doit être assimilé aux « organes et aux organismes de l’Union » aux fins de l’application de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Par conséquent, compte tenu de la jurisprudence rappelée au point précédent, le haut représentant peut intervenir au litige opposant la Commission au Conseil, à la condition qu’il justifie d’un « intérêt à la solution du litige ».

15

S’agissant de l’existence d’un tel intérêt, il convient de rappeler que la notion d’« intérêt à la solution du litige », au sens de cet article 40, deuxième alinéa, doit s’entendre comme étant un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions présentées, et non comme un intérêt par rapport aux moyens soulevés ou aux arguments invoqués. En effet, les termes « solution du litige » renvoient à la décision finale demandée, telle qu’elle serait énoncée dans le dispositif de l’arrêt à intervenir (ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C-144/21, EU:C:2021:757, point 10).

16

Pour ce qui concerne les demandes d’intervention des organes et des organismes de l’Union, il y a lieu d’appliquer cette condition tenant à l’existence d’un intérêt direct et actuel d’une manière qui reflète la spécificité du mandat qu’un tel demandeur est appelé à exécuter en vertu du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C-144/21, EU:C:2021:757, points 11 et 12).

17

En l’espèce, il importe de relever que l’article 27, paragraphe 2, TUE investit le haut représentant du mandat de représenter l’Union pour les matières relevant de la PESC.

18

La Commission assure, quant à elle, la représentation extérieure de l’Union en dehors de la PESC et des autres cas prévus par les traités, conformément à l’article 17, paragraphe 1, sixième phrase, TUE.

19

En l’espèce, le litige porte, en particulier, sur le point de savoir si la mission d’assurer la représentation extérieure de l’Union, visée à l’article 17, paragraphe 1, sixième phrase, TUE, implique qu’il appartient à la Commission et non au président du Conseil de désigner, en vue de la conclusion d’un accord international au nom de l’Union, la personne habilitée à signer cet accord.

20

L’appréciation, par la Cour, de cette question de droit institutionnel déterminera non seulement la solution du litige en l’espèce, mais pèsera aussi de manière déterminante, mutatis mutandis, sur le choix de la procédure suivie et sur les compétences exercées par le haut représentant lorsqu’un accord international doit être signé dans le domaine de la PESC. En effet, à l’instar de la Commission dans les matières situées en dehors de la PESC, le haut représentant est investi, dans les matières relevant de la PESC, du mandat d’assurer la représentation de l’Union.

21

Certes, en l’espèce, le haut représentant fonde son intérêt à la solution du litige sur la prérogative analogue relative à la représentation de l’Union qu’il détient en matière de PESC, en vertu de l’article 27, paragraphe 2, TUE par rapport à la prérogative que la Commission détient, en vertu de l’article 17, paragraphe 1, TUE, aux fins de la représentation de l’Union dans les domaines qui ne relèvent pas de la PESC, alors que seule cette dernière prérogative est en cause dans la présente affaire. Toutefois, il convient de souligner que cet intérêt du haut représentant à la solution du litige ne repose pas sur le fait qu’il serait dans la même situation que la Commission dans un ou plusieurs cas analogues, mais, ainsi qu’il a été constaté au point précédent, sur le fait que la solution du litige en l’espèce déterminera l’étendue de son rôle et des compétences qu’il tire du droit primaire, s’agissant de la signature de tout accord international conclu par l’Union dans le domaine de la PESC.

22

Compte tenu de cette portée générale de l’intérêt invoqué par le haut représentant ainsi que du fait que ce dernier est, en principe, la seule personne ou entité qui puisse l’invoquer, cet intérêt doit être qualifié de « direct » et « actuel ».

23

L’intérêt direct et actuel que la solution du litige en l’espèce pourra ainsi présenter pour le haut représentant n’est pas infirmé par la circonstance, invoquée par le Conseil, que le haut représentant préside, en vertu de l’article 27, paragraphe 1, TUE, le Conseil des affaires étrangères. À cet égard, il suffit de relever, d’une part, que, ainsi que le Conseil l’a précisé, les décisions autorisant la signature d’un accord international dans le domaine de la PESC ne sont pas toujours prises par le Conseil des affaires étrangères et, d’autre part, que, indépendamment du rôle précis joué par le haut représentant dans le cadre de la conclusion d’un tel accord international, les clarifications apportées par la Cour sur le plan juridique en ce qui concerne la portée de la mission de représentation visée à l’article 17, paragraphe 1, TUE sont susceptibles de préciser la portée du mandat de représentation visé à l’article 27, paragraphe 2, TUE.

24

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’admettre, conformément à l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 131, paragraphe 3, du règlement de procédure, la demande d’intervention du haut représentant au soutien des conclusions de la Commission.

Sur les droits procéduraux de l’intervenant

25

La demande d’intervention étant admise, le haut représentant recevra communication, en application de l’article 131, paragraphe 3, du règlement de procédure, de tous les actes de procédure signifiés aux parties.

26

Cette demande ayant été présentée dans le délai de six semaines prévu à l’article 130 du règlement de procédure, le haut représentant pourra, conformément à l’article 132, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, présenter un mémoire en intervention dans un délai d’un mois suivant la communication visée au point précédent.

27

Enfin, le haut représentant pourra présenter des observations orales si une audience de plaidoiries est organisée.

Sur les dépens

28

Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.

29

En l’espèce, la demande d’intervention du haut représentant étant accueillie, il y a lieu de réserver les dépens liés à son intervention.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

1)

Le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité est admis à intervenir dans l’affaire C-551/21 au soutien des conclusions de la Commission européenne.

2)

Une copie de tous les actes de procédure sera signifiée au haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité par les soins du greffier.

3)

Un délai sera fixé au haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité pour présenter un mémoire en intervention.

4)

Les dépens liés à l’intervention du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sont réservés.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

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