Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 3 juillet 2003, n° 3682

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le délai de prescription de 3 ans stipulé à l’article R 145-17 CSS doit être compté à partir de la date de réception par la SAS du conseil régional du mémoire de l’auteur de la plainte, indiquant préciséments les faits objets des pousuites, dès lors que la plainte ne comporte ni conclusion ni exposé détaillé des faits

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Sur la décision

Référence :
CNOM, sect. des assurances soc., 3 juill. 2003, n° 3682
Numéro(s) : 3682
Dispositif : Délai de prescription décompté à la date d'enregistrement du mémoire

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 3682 Dr Marianne K Séance du 21 mai 2003 Lecture du 3 juillet 2003
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, enregistrés au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins le 26 juillet 2002 le 12 décembre 2002, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Marianne K, qualifiée en médecine générale, tendant à ce que la section annule une décision, en date du 6 juin 2002, lue le 18 juillet 2002, par laquelle la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine, statuant sur la plainte conjointe de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy, dont le siège est 9, boulevard Joffre – 54047 NANCY CEDEX et du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nancy, dont l’adresse postale est 9, boulevard Joffre – 54047 NANCY, lui a infligé la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de six mois dont trois mois avec le bénéfice du sursis et publication, par les motifs que la composition de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine ne répond pas aux exigences de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales selon lesquelles toute personne a droit à un procès équitable rendu par un tribunal indépendant et impartial ; qu’ainsi, le médecin-conseil siégeant comme représentant des organismes de sécurité sociale se trouve placé sous l’autorité hiérarchique directe de l’auteur de la plainte ; que la plainte « à titre conservatoire » du 25 janvier 2001 aboutit à un détournement de procédure, ne lui a été transmise qu’au bout d’un an, en violation du principe du contradictoire, efface la prescription, les manipulations du registre d’ordre de la section constituant une infraction pénale, compte étant tenu des dispositions des articles R 145-23 alinéa 2 et L 162-35 du code de la sécurité sociale ; que cette plainte n’est pas signée par le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie, M. Molon, mais par le directeur adjoint, Mme Paulus, qui ne justifie pas d’un mandat ; que les dispositions de l’article R 315-1-2 du code de la sécurité sociale relatives à la notification des griefs dans le cas d’une analyse d’activité ont été méconnues ; que, sur le fond, le Dr K établit pour chaque patient un interrogatoire précis dont le but est de donner un traitement homéopathique et d’évaluer les déséquilibres alimentaires ainsi que les éventuelles carences ou subcarences ; que chacun des dossiers des trente sept patients est examiné en annexes V-A ; que la charge de la preuve incombe à la caisse et au médecin-conseil quant à la non fiabilité des traitements ; que cette preuve n’est pas rapportée au regard des données actuelles de la science ; qu’il s’agisse de l’hydrothérapie du colon, technique pratiquée couramment dans les pays européens et au Canada, de la prescription d’auto-vaccins intestinaux qui a toujours existé en homéopathie, des prescriptions d’immunothérapie qui sont aussi admissibles que le protocole thérapeutique conventionnel du cancer de la prostate ; qu’aucune preuve n’est apportée au regard des bilans biologiques non médicalement justifiés, qu’il s’agisse des analyses sériques (paramètres bien définis dont la cotation est prévue à la nomenclature des actes de biologie médicale, dosages enzymatiques et protéiques, profil en acides gras, typages lymphocitaires, Epstein Barr virus et réactivation), qu’il s’agisse de l’examen des selles qui figure à la nomenclature ; qu’enfin, il n’y a pas eu d’atteinte à la liberté de choix du laboratoire d’analyses par le patient, compte-tenu de la spécificité des analyses, le Dr K n’effectuant pas elle-même les prélèvements et ne se chargeant donc pas de leur acheminement, l’accusation de compérage n’étant pas établie, puisqu’elle ne reçoit aucune contrepartie du laboratoire Barbier ; que la caisse primaire d’assurance maladie manifeste un parti pris à l’égard des homéopathes ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 13 janvier 2003, le mémoire en défense présenté par la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy et par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nancy qui tend au rejet de la requête et au maintien de la sanction, par les motifs que la composition de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine n’était pas irrégulière, aucun lien de subordination n’existant entre le plaignant et le médecin-conseil assesseur siégeant à l’audience ; que la plainte conjointe à titre conservatoire a bien été déposée le 22 janvier 2001 (accusé de réception de l’annexe 1), le traitement de cette plainte par le secrétariat de la section des assurances sociales ne concernant pas les organismes sociaux ; que l’article R 122-3-2° du code de la sécurité sociale prévoit que le directeur adjoint peut signer la plainte, en cas d’absence du directeur ; que le raisonnement sur la prescription des faits a pour but « d’enterrer » le dossier ; que l’arrêt du Conseil d’Etat du 6 juin 2001 (210-885), rappelle que la saisine de la juridiction ordinale est autonome, s’agissant des conditions de l’analyse d’activité de l’article R 315-1 ; que, sur le fond, l’examen du relevé individuel d’activité et de prescriptions 1998 du Dr K s’écarte de la moyenne du médecin lorrain moyen ; que les avis des experts relèvent que la plupart des prescriptions de bilans biologiques ne sont pas médicalement justifiées ; que les thérapeutiques pratiquées sont dangereuses ; que le Dr K remet aux patients les tubes et les boîtes de prélèvement ainsi que l’emballage pré-identifié à l’adresse du laboratoire Barbier de METZ ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 13 mai 2003, le mémoire en réplique présenté pour Mme le Dr K qui s’efforce de réfuter l’argumentation en défense présentée par les plaignants en maintenant ses conclusions en annulation de la décision attaquée auxquelles elle ajoute une demande tendant à la condamnation de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy à payer une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative ; le Dr K précisant que l’arrêt du Conseil d’Etat du 29 mai 2002 doit être compris en lisant le commentaire de M. Serge PETIT, conseiller à la Cour de cassation ; que la prescription n’est pas invoquée dans le seul but « d’enterrer » le dossier ; que le directeur de la caisse n’a pas donné mandat à son directeur adjoint pour agir en justice (article L 122-1 et R 123-3-2 du code de la sécurité sociale) ; que les dispositions de l’article R 315-1-2 du même code ont bien été méconnues s’agissant de la notification des griefs ; qu’au fond, les seuls avis de deux référents universitaires du CHU de Nancy ne peuvent suffire à justifier la plainte ; que le principe de la liberté de choix du laboratoire a bien été respecté ;

Vu, enregistré le 20 mai 2003, le mémoire présenté par le médecin-conseil chef service de l’échelon local et le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy maintenant les observations antérieures ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale et notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;

Vu l’article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Vu la loi n°95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins ;

Vu le code de déontologie médicale ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Après avoir entendu en séance publique :

 – Le Dr COLSON en la lecture de son rapport ;

 – Me JAQUET, avocat, en ses observations pour le Dr Marianne K, qui n’était pas présente ;

 – Le Dr SIMONIN, médecin-conseil chef de service adjoint, en ses observations pour la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy et le service médical ;

Le défenseur du Dr K ayant eu droit à la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, Sur la composition de la section des assurances sociale du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine Considérant qu’il ressort des dispositions combinées des articles L 145-6 et R 145-4 du code de la sécurité sociale que la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins est présidée par un membre du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel et comprend deux assesseurs représentant l’Ordre des médecins, nommés sur proposition du conseil régional de l’Ordre des médecins par le Préfet de région, et deux assesseurs, médecins-conseils représentant les organismes d’assurance maladie également nommés par le Préfet de région ;

Considérant qu’eu égard à la nature des contestations portées devant la section des assurances sociales, aux conditions de désignation des assesseurs ainsi qu’aux modalités d’exercice de leurs fonctions qui les soustraient à toute subordination hiérarchique, les membres de cette juridiction bénéficient de garanties leur permettant de porter, en toute indépendance, une appréciation personnelle sur le comportement professionnel des médecins poursuivis devant la section des assurances sociales ; qu’en outre les règles générales de procédure s’opposent à ce qu’un membre d’une juridiction administrative puisse participer au jugement d’un recours relatif à une décision dont il est l’auteur et à ce que l’auteur d’une plainte puisse participer au jugement rendu à la suite du dépôt de celle-ci ;

Considérant qu’il suit de là que le Dr Marianne K n’est pas fondée à soutenir que la section des assurances sociales ne satisfait pas à l’exigence d’impartialité et d’indépendance des juridictions appelées à décider soit de contestations sur des droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation pénale dirigée contre une personne, rappelée au premier paragraphe de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Sur la recevabilité de la plainte, en tant qu’elle émane du directeur de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy Considérant qu’en admettant que Mme Frédérique Paulus, directrice adjointe de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy, n’ait pas eu compétence pour signer la plainte « à titre conservatoire » enregistrée le 25 janvier 2001 et la plainte motivée enregistrée le 12 juillet 2001, le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy, M. Henri Molon, a pu signer valablement, comme il l’a fait, le mémoire en réplique, enregistré le 28 mars 2002 ; que, par cette signature, il doit être regardé comme s’étant approprié les conclusions et les moyens de la plainte ;

Considérant que la fin de non recevoir soulevée par le Dr K doit donc être écartée ;

Considérant que la plainte, en tant qu’elle émane du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nancy, est en tout état de cause recevable, en application des dispositions de l’article R 145-18 du code de la sécurité sociale qui donne aux médecins-conseils chefs des services d’échelons locaux un pouvoir propre de saisine ;

Sur la régularité de la procédure de saisine Considérant que, si le service du contrôle médical, à l’issue du contrôle de l’activité d’un professionnel de santé effectué dans les conditions fixées par le IV de l’article L 315-1 du code de la sécurité sociale, doit, en application de l’article R 315-1-2 du même code, informer le praticien poursuivi de ses conclusions, et, au cas où a été constaté le non-respect des règles régissant la couverture des prestations à la charge des organismes de sécurité sociale, en aviser la caisse primaire d’assurance maladie, qui notifie alors les griefs retenus au praticien en cause, ces dispositions n’impliquent pas que la saisine de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins réalisée sur le fondement de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale, même si elle intervient à la suite de l’analyse de l’activité d’un professionnel de santé effectuée sur le fondement du IV de l’article L 315-1 du même code, doive être précédée de la notification des griefs prévue à l’article R 315-1-2, le respect des droits de la défense étant alors assuré par l’application des règles de la procédure juridictionnelle ; que, dès lors, le Dr Marianne K n’est pas fondée à soutenir que les dispositions de l’article R 315-1-2 auraient été méconnues et que, de ce fait, la saisine de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine aurait été irrégulière ;

Sur la composition de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine le jour de l’audience du 6 juin 2002 au cours de laquelle la plainte dirigée contre le Dr Marianne K a été examinée ;

Considérant que le médecin-conseil chef du service médical, auteur de la plainte, ne dispose d’une autorité que sur les praticiens conseils de son échelon local ; qu’il n’a aucun pouvoir hiérarchique sur les praticiens conseils de l’échelon régional du service médical qui sont désignés par le médecin-conseil régional pour siéger dans les sections des assurances sociales des conseils régionaux des différents ordres ; que, dans la présente affaire, le Dr Gérard Winter, médecin-conseil chef de service de l’échelon local du service médical de Nancy et auteur de la plainte, n’a aucune autorité sur le Dr André Zerr ; qui siégeait comme assesseur à l’audience du 6 juin 2002, jour de comparution du Dr K ; qu’ainsi l’absence de lien de subordination entre le plaignant et le médecin-conseil assesseur siégeant à l’audience de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins où a été évoquée l’affaire du Dr K, établit bien que la formation de cette juridiction était conforme à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Sur la prescription Considérant que le délai de trois ans, stipulé par l’article R 145-17 du code de la sécurité sociale doit être décompté à partir de la date de réception par le secrétariat de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins, du mémoire de l’auteur de la plainte, indiquant précisément les faits objets des poursuites ; qu’en l’espèce, le délai de trois ans doit être décompté en se référant au mémoire enregistré le 12 juillet 2001, dès lors que la « plainte conservatoire » parvenue au secrétariat le 24 janvier 2001, ainsi qu’il ressort de l’avis de réception de l’envoi recommandé adressé par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nancy, et enregistrée le 25 janvier 2001 ne comportait ni conclusion, ni exposé détaillé des faits ;

Considérant qu’il s’ensuit que doivent être écartés des débats tous les faits antérieurs au 12 juillet 1998, c’est à dire tous les dossiers n° 4, 8, 11, 12, 14, 15, 17, 21 et 23 et, dans les autres dossiers, les pièces relatives aux actes accomplis avant le 12 juillet 1998 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’argumentation du Dr Marianne K relative à la tenue du registre d’ordre par le secrétariat de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine, aux dispositions de l’article R 145-23 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, lequel concerne le délai de saisine d’office et de l’article L 162-35 du même code, lequel concerne la justification des motifs de dépassement du tarif conventionnel, ou tendant à écarter les faits antérieurs au 28 mars 1999, compte-tenu de la signature du mémoire en réplique par le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie le 28 mars 2002, la plainte ayant été, en tout état de cause, également signée, dès l’origine par le médecin-conseil compétent pour ce faire, doit être rejetée ;

Considérant qu’il n’appartient pas, enfin, à la juridiction ordinale, de donner acte au Dr Marianne K de son intention d’exercer des poursuites pénales contre la section des assurances sociales du conseil régional de Lorraine ;

Sur la motivation de la décision attaquée Considérant que les premiers juges, qui ont répondu à chacun des griefs qui étaient soulevés dans la plainte, n’étaient pas tenus de discuter chacune des publications de la littérature médicale produite au dossier ; que leur décision doit être regardée comme suffisamment motivée ;

Sur les griefs Considérant que, contrairement à ce que soutient le Dr Marianne K, son relevé individuel d’activité et de prescription (RIAP) de l’année 1998 fait apparaître un ratio « prescriptions de biologie » sur consultation plus élevé que le ratio moyen des généralistes de la région Lorraine ; que ce constat a conduit la caisse à s’interroger sur les pratiques médicales de l’intéressée, seuls les faits postérieurs au 12 juillet 1998 et concernant vingt huit patients sur trente sept, pouvant être retenus ;

Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’instruction que le Dr Marianne K a prescrit, pour certains patients, des séances d’hydrothérapie du colon, c’est à dire des lavements, à l’issue d’un examen des selles, et leur a remis un document vantant les effets bénéfiques de cette thérapeutique, à savoir « détoxination de l’organisme, prévention du cancer du colon, action bénéfique sur le système immunitaire », et précisant les indications du lavage colique, à savoir constipation chronique, colites, diverticulités, et également otites et sinusites, voire même sclérose en plaques, cancer, SIDA ; que d’autre part, elle a également prescrit, pour certains patients, des auto-vaccins intestinaux préparés à partir de leurs selles, dont elle estime qu’il s’agit d’ « isothérapie », laquelle consiste à se servir des propres sécrétions du malade pour en faire une dilution homéopathique qui lui est ensuite administrée ; qu’enfin, pour un patient atteint d’un néoplasme prostatique, elle a prescrit une préparation d’immunothérapie homéopathique d’ADN et d’ARN ; qu’en définitive, ni l’hydrothérapie colique, ni les auto-vaccins, ni l’immunothérapie, n’ont fait l’objet d’une validation scientifique ; qu’ainsi, le Dr Marianne K a proposé à ses patients des remèdes insuffisamment éprouvés et non conformes aux données actuelles de la science, la littérature médicale ne permettant pas d’établir le contraire ;

Considérant, en second lieu, que le Dr Marianne K a prescrit systématiquement des examens biologiques comportant une trentaine d’analyses sériques, dont certaines figurent à la nomenclature des actes de biologie médicale ; que ces prescriptions stéréotypées révèlent des anomalies de pratique médicale, à savoir dosage des alipoprotéines A et B, sans dosage du cholestérol, dosage en routine de la lipoprotéine, demande fréquente de « bilan nutritionnel et antiradicalaire » dont l’intérêt médical est discuté, profil en acide gras sans justification, typage lymphocitaire ou Epstein Barr virus et réactivation dans des cas qui ne relèvent pas de ces examens ; que les examens de selles par ailleurs pratiqués et comportant parfois systématiquement un fécalogramme, une coproculture, une parasitologie, ne sont pas justifiés par les pathologies présentées par les patients ; qu’ainsi, il apparaît que le Dr Marianne K prescrivait des examens biologiques non médicalement justifiés, c’est à dire sans réel rapport avec l’état de ses patients et sans que l’utilité en soit établie ;

Considérant, en troisième lieu, que le choix du laboratoire d’analyses médicales pour l’examen des selles et le bilan biologique émanait, dans tous les cas, d’après les déclarations des patients, du Dr Marianne K, laquelle leur remettait en effet les tubes et boîtes de prélèvement, ainsi que l’emballage préidentifié à l’adresse du laboratoire Barbier de Metz ; que les patients n’avaient plus qu’à affranchir et à poster le paquet une fois le prélèvement effectué ; qu’ainsi, même si le grief de compérage au sens de l’article 23 du code de déontologie médicale n’est pas établi au vu des pièces du dossier, le Dr Marianne K a cependant porté atteinte au principe du libre choix du malade ;

Considérant, en dernier lieu, que le principe de la liberté de prescription thérapeutique inscrit à l’article 8 du code de déontologie médicale dont se prévaut le Dr Marianne K trouve sa limitation dans les autres dispositions dudit code ;

Considérant que le Dr Marianne K doit être regardée comme ayant méconnu les obligations de sa profession ; que les faits qui lui sont reprochés sont des fautes au sens de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale susceptibles de justifier l’application de l’une des sanctions énumérées à l’article L 145-2 du même code ; qu’ils sont, à raison de leur gravité et de leur répétition, contraires à l’honneur et à la probité et ne peuvent donc bénéficier de l’amnistie édictée par l’article 11 de la loi du 6 août 2002 ;

Sur la sanction Considérant que, dans les circonstances de l’affaire, il convient de maintenir la sanction prononcée par les premiers juges et de rejeter l’appel du Dr Marianne K ;

Sur les conclusions du Dr K tendant à l’application de l’article L 761-1 du code de justice administrative Considérant que les conclusions du Dr K tendant à l’application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative, qui n’est pas applicable aux juridictions disciplinaires, doivent être regardées comme tendant à l’application de l’article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée ;

Considérant que, dans les circonstances de l’affaire, il n’y a pas lieu de condamner la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy à verser au Dr K la somme de 2 000 euros qu’elle réclame, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Sur les frais de l’instance Considérant que les frais de l’instance doivent être mis à la charge du Dr Marianne K, en application de l’article R 145-28 du code de la sécurité sociale ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article 1er : La sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de six mois, dont trois mois avec le bénéfice du sursis, dans les conditions prévues par l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale et publication pendant trois mois, prononcée à l’encontre du Dr Marianne K, par la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine, par sa décision rendue 18 juillet 2002, prendra effet, pour la partie non assortie du sursis, le 1er novembre 2003 à 0 heure et cessera de produire effet le 31 janvier 2004 à minuit.

Article 2 : La publication de cette sanction sera assurée par les soins de la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy, pendant une durée de trois mois, à compter du 1er novembre 2003, par affichage, dans ses locaux administratifs ouverts au public.

Article 3 : Les conclusions du Dr K tendant au remboursement des frais de procédure sur le fondement de l’article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Les frais de la présente instance s’élevant à 119 euros seront supportés par le Dr Marianne K et devront être versés dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme le Dr Marianne K, à la caisse primaire d’assurance maladie de Nancy, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Nancy, à la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des médecins de Lorraine, au conseil départemental de l’Ordre des médecins de Meurthe-et-Moselle, au directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Lorraine, au chef du service régional de l’inspection du travail, de l’emploi et de la politique sociale agricoles de Lorraine, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé de l’agriculture.

Délibéré dans la même composition qu’à l’issue de l’audience du 21 mai 2003, où siégeaient M. ALLUIN, Conseiller d’Etat honoraire, président ; M. le Dr COLSON, membre titulaire, et M. le Dr GAY, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr ANSART et M. le Dr DUCLOS, membres suppléants, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Lu en séance publique le 3 juillet 2003.

LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

G. ALLUIN
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER

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