Conseil de prud'hommes de Paris, 30 avril 2021, n° F 19/07264

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cons. prud’h. Paris, 30 avr. 2021, n° F 19/07264
Juridiction : Conseil de prud'hommes de Paris
Numéro(s) : F 19/07264

Sur les parties

Texte intégral

CONSEIL DE PRUD’HOMMES

DE PARIS

27 Rue G Blanc

[…]

Tél : 01.40.38.52.00

SECTION

Encadrement chambre 3

N° RG F 19/07264 No ostalis

3521-X-B7D-JMRW5

NOTIFICATION par

LR/AR du :

Délivrée au demandeur le :

au défendeur le :

COPIE EXÉCUTOIRE délivrée à :

le :

RECOURS n

fait par :

le :

par L.R. au S.G.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT

Contradictoire en premier ressort

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021 En présence de Madame U V, Greffier

Débats à l’audience du 16 février 2021

Composition du bureau de jugement lors des débats et du délibéré :

Monsieur P T, Président Conseiller (S) Monsieur Jean-G RINGUEDÉ, Assesseur Conseiller (S) Monsieur Philippe POUTHÉ, Assesseur Conseiller (E) Madame Océane FUSEAU, Assesseur Conseiller (E)

Assistés lors des débats de Madame U V, Greffier

ENTRE

S.A. L’OREAL

[…]

[…]

Représentée par Me Olivier BLUCHE (Avocat au barreau de PARIS – K30)

DEMANDEUR

ET
M. R-S X

[…]

[…]

Représenté par Me Quentin DE MARGERIE (Avocat au barreau de PARIS) substituant Me Hervé TEMIME (Avocat au barreau de PARIS)

DEFENDEUR



N° RG F 19/07264 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5

PROCÉDURE

Saisine du conseil de prud’hommes de Paris le 02/08/2019.

Convocation de la partie défenderesse à l’audience de conciliation du 03/03/2020, par lettre recommandée dont l’accusé réception a été retourné au greffe avec signature en date du

04/09/2019.

Le bureau de conciliation et d’orientation. en application des articles R. 1454-14 et 15 du

Code du travail, a rendu une ordonnace.

En l’absence de conciliation, les parties ont été renvoyées devant le bureau de jugement du 02/09/2020. L’affaire ne pouvant être entendue (avocat cas contact covid) lors de ce bureau de jugement, elle a été renvoyée au 16/02/2021.

Débats à l’audience de jugement du 16/02/2021 au cours de laquelle les conseils des parties ont déposé des conclusions, visées par le greffe.

Les parties ont été avisées de la date et des modalités du prononcé.

CHEFS DE LA DEMANDE

Condamner Monsieur X à verser à la société L’OREAL SA les sommes

et indemnités suivantes :

- Remboursement des indemnités de non concurrence perçues 306 666.72 €

- Dommages et intérêts prévus à la clause pénale stipulée à l’article 11 du contrat de travail de Monsieur X 724 000.00 €

10 000.00 €

- Article 700 du Code de Procédure Civile

- Intérêts au taux légal

- Exécution provisoire article 515 C.P.C.

- Dépens

R-S X, partie défenderesse

- Débouter L’OREAL de l’intégralité de ses demandes. fins et conclusions

35 000,00 €

- Article 700 du Code de Procédure Civile

- Dépens

**

LES FAITS Le 1er septembre 1998, Monsieur R-S X a été engagé par la société L’OREAL SA, par contrat de travail écrit à durée indéterminée, avec le statut cadre. Il a évolué dans différentes fonctions jusqu’au 1er septembre 2016, date à laquelle il a pris les fonctions de Directeur Général L’OREAL Paris, avec le statut de cadre dirigeant. Le salaire mensuel fixe brut du salarié était en dernier lieu de 38.333.34€. outre des rémunérations et avantages variables, bonus annuel, stock-options ou actions gratuites. intéressement et participations et autres avantages en nature. La Convention collective nationale applicable à ce contrat de travail est celle des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952, brochure n° 3108.

Par courrier du 22 février 2019, Monsieur X a démissionné de ses fonctions. il était soumis à un préavis de trois mois. Le 1er avril 2019, la société L’OREAL a accusé réception de la démission de Monsieur X et lui a rappelé les termes de

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l’article 11 du contrat de travail relatif à la clause de non-concurrence devant entrer en vigueur à l’issue du préavis, soit à compter du 25 mai 2019 et jusqu’au 24 mai 2020. en contrepartie d’une indemnité de 25 555.56€ devant être versée mensuellement.

Par contrat de travail conclu avec la société LVMH Moët Hennessy G H le 23 avril 2019, Monsieur X était embauché en qualité de Directeur, avec une date d’effet devant intervenir au plus tard au 1er septembre 2019. La prise de fonction effective est intervenue le 29 mai 2019, un détachement auprès de la Direction générale de G H a été prévu au contrat de travail en qualité de Chargé de Missions

Stratégiques. La société L’OREAL SA considérant que Monsieur X a violé la clause de non-concurrence, elle l’a mis en demeure de cesser toute activité professionnelle avec la société G H par courrier recommandé avec accusé de réception du 5 juillet 2019. Le salarié conteste une violation de la clause de non concurrence et la validité de celle-ci.

C’est ainsi que la SA L’OREAL a saisi le Conseil de prud’hommes de Paris. Faute d’un accord entre les parties lors du bureau de conciliation et d’orientation, elles se sont présentées pour être entendues devant le bureau de jugement du 16 février 2021 de la troisième chambre de la section encadrement du Conseil de céans.

PRETENTIONS DES PARTIES

A l’appui de sa procédure la SA L’OREAL expose que Monsieur R-S X a violé la clause de non-concurrence prévue au contrat de travail conclu avec la SA L’OREAL. maison mère du Groupe L’ORÉAL, leader mondial de l’industrie cosmétique. organisé autour trois activité majeures, la recherche et l’innovation, la production industrielle, et la distribution qui s’appuie sur un portefeuille unique de marques françaises et internationales. Elle précise que parmi ses produits phares, figurent notamment les parfums de luxe : Lancôme, P Q-L, A B, C D, E F, […], […], Y, et Mugler: qu’elle est en outre fabriquant ou distributeur de dizaines d’autres marques de parfums et cosmétiques.

Elle indique que Monsieur X a évolué au sein du Groupe, en France et à l’étranger. occupant onze postes différents, jusqu’à être nommé, à compter du 1er septembre 2016, Directeur Général L’OREAL Paris, statut cadre dirigeant, l’un des postes les plus élevés dans le Groupe ; qu’il était membre du Comité de direction des produits grand public, membre du comité de conjoncture qui rassemble les dirigeants du Groupe et donne accès à des informations stratégiques et globales sur les différentes divisions : des produits de masse aux produits de luxe, en passant par les produits professionnels, ainsi que sur les enjeux corporate. Elle fait valoir que Monsieur R-S X a acquis dans ses différents postes une connaissance précise et une expertise des produits et métiers du groupe L’OREAL.

La SA L’OREAL soutient que le Groupe LVMH est présent dans cinq secteurs d’activité, notamment les parfums et la cosmétique, activité vers laquelle le Groupe LVMH a accru sa diversification. Elle précise que la société LVMH Moët Hennessy G H est la tête du groupe LVMH et que c’est à ce niveau que se décide toute la stratégie du groupe, que se fait la consolidation financière et que se font les recrutements des dirigeants clés pour le groupe. Elle indique que le commerce de produits de parfumerie et cosmétique et plus généralement de produits se rattachant à l’hygiène, à l’esthétique et aux soins est une activité déclarée expressément dans les statuts de la société LVMH Moët Hennessy G H, avec 124 filiales et des filiales de distribution telles que Sephora. qu’elle se présente comme un acteur mondial majeur dans le parfum, le maquillage et le soin, et qu’il s’agit d’une source majeure de revenus et un axe de développement commercial du groupe LVMH si l’on se réfère au chiffre d’affaires de cette activité, au résultats. en milliards

d’euros. et à leur progression, ce qui représente 40% du chiffre d’affaires et 18% du bénéfice de la société LVMH Moët Hennessy G H.

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La SA L’OREAL fait valoir que la société G H O dans laquelle Monsieur X a été détaché, commercialise, elle aussi. des produits de parfumerie et de cosmétique, ce qui résulte de ses statuts, de l’extrait Kbis du registre du commerce et des sociétés, du recrutement d’un maître parfumeur particulièrement réputé, d’une vaste campagne de publicité destinée à sa collection de parfums, de la vaste étendue des produits de parfumerie présentés sur son site internet.

Le demandeur soutient que, pour faire face à la croissance exponentielle de ses activités dans les parfums et cosmétiques, la société LVMH Moët Hennessy G H recrute au plus haut niveau chez ses concurrents des dirigeants ayant une expertise dans le secteur. avec un processus agressif de débauchage, au mépris des clauses de non-concurrence et également au moyen de conditions financières qui attestent de la déloyauté du procédé et que rien ne justifierait de tels recrutements, avec de telles conditions, s’il s’agissait de les faire travailler dans un domaine pour lequel ils n’ont aucune expérience.

La SA L’OREAL précise qu’elle a appris le 29 mai 2019 par la presse spécialisée que Monsieur X avait rejoint la société française G H O en tant que cadre dirigeant, membre du comité de direction, basé à Paris, ce qui lui a été confirmé par l’intéressé le 3 juin 2019, celui-ci prétendant respecter parfaitement son obligation de non-concurrence. Il ajoute qu’il s’agit là d’une manoeuvre puisque G H O n’a jamais été l’employeur de Monsieur X, qu’il n’y a d’ailleurs aucun document contractuel pour le confirmer. mais que, quoi qu’il en soit. G H O a également une activité de commercialisation de produits de parfumerie visée par la clause de non-concurrence. Elle dit qu’elle a mis en demeure Monsieur X de cesser toute activité professionnelle avec le groupe LVMH fabriquant ou commercialisant des produits de parfumerie ou cosmétique, et qu’en rejoignant en France. premier pays cité par la clause de non-concurrence, pour un poste basé à Paris, une société fabriquant et commercialisant des parfums et cosmétiques Monsieur X a violé son obligation de non-concurrence, quand bien même aurait-il été détaché en qualité de Chargé de mission stratégique auprès de la Direction générale de G H O, commercialisant des parfums et eaux de Cologne, et affecté à des fonctions de General manager Benelux & Nordics, affectation artificielle avec des ventes en pleine expansion, la clause précisant qu’il lui était interdit d’entrer au service d’une entreprise étudiant, fabriquant ou vendant des parfums, des eaux de Cologne ou des cosmétiques, quel que soit le poste occupé. Elle a demandé à Monsieur X, devant la formation de référé du conseil de prud’hommes de Paris. puis devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes de Paris, de produire une version intégrale de son contrat de travail, de la lettre d’offre du 20 février 2019. de ses avenants éventuels. des contres lettres ou side letters, ainsi que ses bulletins de paie.

La SA L’OREAL soutient que la clause de non-concurrence est licite parce qu’elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, qu’elle n’est pas une atteinte à la liberté du travail parce que, de formation supérieure en management, Monsieur X pouvait parfaitement exercer ses talents au service d’une société n’ayant aucune activité ni aucun intérêt dans les parfums et cosmétiques, au regard de ses fonctions de Directeur Général L’OREAL Paris, qu’elle est limitée dans l’espace. le nombre de pays visés ne paraissant pas excessif, au regard du caractère international de l’activité de l’employeur sur des produits strictement définis, limitée dans le temps à une année, avec le versement d’une indemnité mensuelle des deux tiers de ses appointements mensuels. Elle indique qu’elle a versé chaque mois à Monsieur X la somme de 25.555,56 €. en contrepartie de l’obligation de non-concurrence. Elle ajoute que la perception par Monsieur X de l’indemnité de non concurrence est un commencement d’exécution de la clause de non-concurrence valant confirmation de sa validité.

En défense, Monsieur X fait valoir que le groupe L’OREAL est le premier groupe mondial de l’industrie cosmétique, implanté dans 150 pays, et que ses marques sont réparties en quatre divisions opérationnelles, les produits grand public, les produits professionnels, la cosmétique active et L’OREAL luxe : qu’au sein des produits grand



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public la marque la plus importante est L’OREAL Paris diffusant des gammes de cosmétiques (Elseve, Studio Line, men Expert, etc.), dans les domaines des soins et de l’hygiène pour cheveux, de la coloration, du maquillage, des soins de la peau et du soin pour hommes, mais que L’OREAL Paris ne commercialise aucun parfum, ni aucun produit de luxe, parce que c’est au sein de sa division luxe que L’OREAL développe son activité de parfumeur sous diverses marques. Il affirme qu’il a occupé de nombreux postes successifs, tous au sein de la division grand public mais n’a jamais travaillé dans la division luxe et que le ler novembre 2016 il a été nommé Directeur Général de la marque

L’OREAL Paris au niveau mondial.

Monsieur X indique que le groupe LVMH Moët Hennessy G H est le plus important groupe mondial de luxe organisé autour de six pôles d’activité : les vins et spiritueux, la mode et la maroquinerie, les parfums et cosmétiques, les montres et la joaillerie, la distribution sélective, l’hôtellerie. et les autres activités ; qu’au sein du pôle mode et maroquinerie de LVMH Moët Hennessy G H, G H est une maison de maroquinerie de luxe et de prêt à porter dont la gamme réduite de produits de parfumerie, vendus exclusivement dans ses propres magasins, compte pour une part marginale de son chiffre d’affaires. que G H est aujourd’hui elle-même organisée en plusieurs segments distincts dont la mode et maroquinerie, la joaillerie et la parfumerie.

Monsieur X expose qu’il a présenté sa démission le 22 février 2019, que l’ensemble des plus hauts dirigeants de L’OREAL a activement cherché à le faire revenir sur sa décision, y compris en lui proposant des conditions salariales plus avantageuses. notamment à trois reprises avec le président directeur général du groupe L’OREAL. qu’il a, à cette occasion, fait part d’une offre d’emploi du groupe LVMH, la société L’ORÉAL étant ainsi parfaitement informée du futur emploi. Il indique avoir porté à la connaissance de son futur employeur la clause de non-concurrence, et que dans ces conditions il avait été convenu d’emblée avec la société LVMH Moët Hennessy G H, de rejoindre la maison G H, laquelle ne commercialisant aucun produit concurrençant la marque L’OREAL Paris, détaché dès l’embauche auprès de la société G H O, en qualité de directeur des missions stratégiques auprès de la direction générale pour la mode et la maroquinerie uniquement, avec trois périodes, une prise de contact en immersion, un poste de « general manager » pour la région Benelux et pays nordiques, une intégration des équipes modes et maroquinerie à Paris auprès de I J, directrice générale adjointe de G H; un avenant au contrat de travail devant être établi afin de proposer, le cas échéant, un nouveau poste au sein de LVMH Moët Hennessy G H. Il précise qu’au jour de l’audience. il est toujours directeur de missions stratégiques pour la mode et la maroquinerie ; et il indique dans ses écritures qu’il est délié de toute obligation vis-à-vis de L’OREAL.

Monsieur X précise que le 3 juin 2019, il a confirmé à la société L’OREAL qu’il respectait parfaitement ses obligations. Il fait référence à l’ordonnance de la formation de référé du conseil de prud’hommes de Paris qui a débouté la société L’OREAL de toutes ses demandes de production de documents, ainsi qu’à l’ordonnance du bureau de conciliation qui a également débouté la société L’OREAL. Il indique qu’il n’entendait pas solliciter la poursuite du versement mensuel de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence au regard de la nullité de la clause et que tout versement effectué par L’OREAL n’engageait qu’elle. et ne vaudrait aucunement ratification de sa propre part.

Monsieur X soutient qu’il n’a pas violé la clause de non-concurrence puisque selon son contrat de travail, il a été détaché à temps complet auprès de la maison G H, en qualité de directeur de missions stratégiques pour exclusivement la mode et la maroquinerie, pour une durée minimale de 24 mois, ce qui est attesté par le président et le directeur des ressources humaines de la société G H, de la communication interne et externe, pour des fonctions concrètes de general manager pour la région Benelux et de pays nordiques, basé à Bruxelles avec location d’un appartement; puis en tant que responsable des métiers maroquinerie homme et voyage, prêt à porter ; que les allégations de la société L’OREAL sur une dissimulation des véritables conditions contractuelles de



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l’engagement chez LVMH ne reposent sur rien. Monsieur X fait valoir que son embauche par la société LVMH Moët Hennessy G H. n’est d’aucune incidence sur la situation, celle-ci ne résultant que de pures raisons d’organisation interne et n’avait aucunement à être divulgué à des tiers, signalant qu’il a spontanément produit le contrat de travail le liant à la société LVMH Moët Hennessy G H, ce qui établi

l’absence de toute volonté de dissimulation.

Monsieur X affirme que son activité chez son nouvel employeur ne concurrence aucune des activités du groupe L’OREAL. ni celles dont il avait la charge lorsqu’il y travaillait. Il invoque que, s’agissant d’une restriction à la liberté fondamentale du travail, la société L’OREAL doit nécessairement faire constater une situation objective de concurrence entre les nouvelles activités du salarié susceptibles de nuire à la société L’OREAL et celles, réelles, de son ancien employeur pour faire application de la clause, s’opposant là au fait que le simple fait de rejoindre un concurrent de la société L’OREAL caractérise une violation de la clause, sans établir qu’il occuperait chez ce concurrent des fonctions concurrençant effectivement l’activité de l’ancien employeur, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisqu’il n’a pas rejoint l’une des sociétés de la division parfums et cosmétiques de la société LVMH Moët Hennessy G H. Il ajoute qu’alors que la raison d’être de la clause de non-concurrence qui est d’éviter que la situation de concurrence ne constitue un avantage anormal du nouvel employeur sur l’ancien, ne trouve pas application puisqu’il a été détaché exclusivement sur le segment mode et maroquinerie. distincte de la catégorie parfum du O. Il complète cette argumentation en précisant qu’il n’a jamais exercé la moindre activité liée aux parfums, seulement dans le secteur de la cosmétique de L’OREAL Paris, alors que les activités parfumerie sont développées par la division L’OREAL luxe et que la division produits grands publics de L’OREAL et la maison G H ne développent ni ne commercialisent aucun produit commun, et ne

sont pas concurrents.

Monsieur X fait valoir que si par extraordinaire la clause avait vocation à s’appliquer au présent litige. le caractère illicite de la clause de non-concurrence devrait être relevé. Il conteste une exécution positive de la clause au motif qu’il a demandé l’interruption du versement de l’indemnité de non-concurrence dès qu’il a eu connaissance de la nullité affectant cette clause et que la prescription de l’action relative à la clause

n’était pas acquise le délai de prescription de l’action n’étant pas expiré.

Monsieur X soulève que la clause de non-concurrence n’est pas indispensable à la protection des intérêts légitimes de la société L’OREAL parce qu’elle interdit de manière extrêmement large l’intégralité des produits commercialisés par la société L’OREAL. restriction bien plus large que le strict nécessaire interdisant notamment les parfums alors que l’intéressé n’a pas exercé de fonctions dans la division L’OREAL

luxe.

Il soutient que la clause de non-concurrence est nulle parce qu’elle l’empêche totalement d’exercer une activité semblable, où que ce soit dans le monde puisqu’elle s’applique, aux pays suivants : la France, le Royaume Uni. l’Allemagne. l’Italie. l’Espagne, la Suisse, les Etats-Unis, le Canada, la Chine, le Brésil, ainsi qu’aux autres pays sur lesquels l’activité de Monsieur R-S X aura porté au cours des deux années précédant son dernier jour de travail, effectif au sein de la Société, faisant référence au responsable d’une gamme de produit à l’échelle mondiale qui était empêché de travailler sur la totalité de son dernier secteur, étendue trop large et imprécise, ce qui est le cas de L’OREAL Paris, marque distribuée dans le monde entier. Selon Monsieur X la clause est nulle faute de limitation dans l’espace.

Il ajoute que la clause de non-concurrence doit laisser au salarié à qui elle est opposée la possibilité d’exercer une activité conforme à sa formation et à son expérience professionnelle sans qu’il puisse être exigé de lui qu’il se reconvertisse; et qu’il revient au juge de limiter l’application de la clause de non concurrence, dans le temps, l’espace ou autre, de manière à ne pas porter une atteinte injustifiée à la liberté du travail du salarié, et

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ce quand bien même ce dernier serait un cadre de haut niveau. Il expose qu’il a effectué l’intégralité de sa carrière professionnelle dans le secteur des cosmétiques, que l’interdiction de rejoindre toute entreprise étudiant, fabriquant ou commercialisant des cosmétiques, dans le monde entier. l’empêche de faire valoir normalement ses qualifications et son expérience professionnelle, et partant, d’exercer une activité conforme à celles qu’il exerçait. ce qu’il dit confirmé par le fait que son poste chez G H. Directeur de mission stratégiques auprès de la Direction Générale, le place à un niveau hiérarchique moindre que celui qu’il occupait en dernier lieu chez L’OREAL. Pour cette raison la clause de non-concurrence est selon lui nulle.

Monsieur X conteste la demande relative à la clause pénale, parce que la clause de non-concurrence est nulle, n’a pas été violée, surabondamment il fait observer qu’elle est surévaluée parce qu’elle n’indique pas que le bonus devait entrer en ligne de compte, ou tout autre forme de rémunération variable et qu’elle ne vise donc que sa rémunération fixe, de la même façon qu’a été calculée l’indemnité de non-concurrence, ne pouvant dés lors excéder la somme de 460 000€. Il conteste le remboursement de l’indemnité de non-concurrence au motif qu’il a respecté cette clause de non-concurrence. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le conseil, conformément à l’article 455 du Code de Procédure civile renvoie aux conclusions déposées, visées par le greffier le 16 février 2021 et soutenues à l’audience, ainsi qu’aux prétentions orales telles qu’elles sont rapportées ci-dessus.

DISCUSSION ET MOTIF DE LA DECISION

Le Conseil après en avoir délibéré conformément à la loi a prononcé, par mise à disposition au greffe, le 30 avril 2021, le jugement suivant :

Sur la validité de la clause de non-concurrence

Le 1er septembre 1998, Monsieur R-S X a été engagé par la société L’OREAL SA, par contrat de travail écrit à durée indéterminée, avec le statut cadre. Il a évolué dans différentes fonctions jusqu’au 1er septembre 2016, date à laquelle il a pris les fonctions de Directeur Général L’OREAL Paris, avec le statut de cadre dirigeant. Un contrat de travail a été conclu à cette date, avec une clause de non-concurrence. Par courrier daté du 22 février 2019, Monsieur X a démissionné de ses fonctions, il était soumis à un préavis de trois mois.

Le 29 mai 2019, Monsieur X a été embauché par la société LVMH Moët Hennessy G H, selon contrat de travail en date du 23 avril 2019.

La société L’OREAL soulève la violation de l’obligation de non-concurrence, résultant de la clause énoncée à Article 11 du contrat de travail du 1er septembre 2016 liant Monsieur R-S X et la SA L’OREAL. Monsieur X soulève l’illicéité de cette clause.

Il convient en premier lieu d’analyser la licéité de cette clause ainsi rédigée :

«En raison du marché extrêmement concurrentiel dans lequel la Société évolue des connaissances, notamment de nature commerciale, financière, scientifique, industrielle ou marketing, concernant les activités, opérations et études de la société, ou d’une autre Société du Groupe L’OREAL. acquises par Monsieur R-S X dans l’exercice de son emploi, Monsieur R-S X sera tenu, à l’égard de la Société, par une clause de non-concurrence. En cas de départ de la Société intervenant pour quelque cause que ce soit (exception faite du départ, de la mise à la retraite ou de la rupture de la période d’essai). Monsieur R-S X s’engage à ne pas entrer au service d’une entreprise étudiant, fabriquant ou vendant des produits identiques ou similaires à ceux étudiés, fabriqués ou vendus par la Société, c’est à 'est-à-dire des produits cosmétiques et

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d’hygiène corporelle, figurant en particulier à l’Article I de l’Arrêté du 30 juin 2000. couleurs accessoires (packaging. hrosses…) et composants, ainsi que les produits s’interdit plus nutri-cosmétiques. Monsieur X généralement de s’intéresser, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit.R-S

y compris, notamment, en conseil ou en capital, (sauf opération boursière courante), à une activité de ce genre, existante ou en cours de création. Cette clause de non-concurrence s’applique aux pays suivants: la France, le Royaume Uni, l’Allemagne. l’Italie. l’Espagne, la Suisse, les Etats-Unis, le Canada, la Chine, le Brésil, ainsi qu’aux autres pays sur lesquels l’activité de Monsieur R-S X aura porté au cours des deux années précédant son dernier jour de travail effectif au sein de la Société. Si Monsieur R-S X en émet le souhait, la liste des pays sur lesquels son activité aura porté au cours de ces deux dernières années lui sera remise, dans les 12 jours ouvrés de la réception de la demande. En contrepartie, et pendant la durée de cette clause de non-concurrence qui est de 12 MOIS à compter de la date d’expiration de son contrat de travail, la Société devra lui verser une indemnité mensuelle correspondant aux DEUX TIERS de ses appointements

mensuels. Pendant cette même période. Monsieur X s’engage à faire connaître, sous un délai de 8 jours, à la Société, lorsqu’elle lui en fera la demande. le nom et l’adresse de son nouvel employeur. La Société se réserve la possibilité de porter l’existence et les modalités de la présente clause de non-concurrence à la connaissance du nouvel

employeur. Monsieur R-S X devra informer toute personne intéressée de la présente clause de non-concurrence préalablement à tout engagement, salarié ou non. Toute violation de la clause de non-concurrence libèrera la Société du versement de la contrepartic financière à l’obligation de non-concurrence prévue ci-dessus. A compter de cette violation, Monsieur R-S X sera redevable envers la

Société du remboursement des sommes qu’il aurait pu percevoir à ce titre. En outre, toute violation de la clause de non-concurrence rendra automatiquement Monsieur R-S X redevable envers la Société d’une pénalité fixée dès à présent forfaitairement à douze mois de salaire, sans qu’il soit besoin d’une mise en demeure d’avoir à cesser l’activité concurrentielle. Le paiement de cette pénalité forfaitaire ne porte pas atteinte au droit que la Société se réserve expressément de poursuivre Monsieur R-S X et/ou son nouvel employeur en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle jusqu’au terme de la clause de non-concurrence prévu à la présente clause. La Société se réserve expressément la faculté de renoncer au bénéfice de cette clause à tout moment, notamment dans l’hypothèse où elle deviendrait sans intérêt pour elle. A l’expiration de son contrat de travail et si cette clause de non-concurrence subsiste.

Monsieur R-S X accepte d’ores et déjà que cette disposition particulière figure sur le certificat de travail qui lui sera remis. » ;

Selon l’article L.1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun. Les clauses du contrat de travail sont librement convenues par les parties, dans les limites des libertés fondamentales, du Code du travail, de la convention collective et de la jurisprudence applicable. Dans ces limites. le salarié et l’employeur sont libres de négocier divers avantages et obligations qui découleront du contrat de travail ainsi conclu. notamment les obligations réciproques d’une clause de non-concurrence, et les modalités de ses limites, ces dispositions du contrat engagent les cocontractants.

L’objet de la clause de non-concurrence est d’interdire à l’ancien salarié l’exercice d’une activité professionnelle concurrente qui porterait atteinte à son ancien employeur, mais il convient de veiller à ce qu’elle ne porte pas atteinte à la liberté du travail : elle n’est done licite, que sous le double visa du principe fondamental du libre exercice d’une activité professionnelle et de l’article L.1121-1 du Code du travail selon lequel : «< nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions



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qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Pour respecter ce principe et cet article, la clause doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, elle doit être limitée dans le temps et dans l’espace; elle doit tenir compte des spécificités du salarié et de son emploi, des particularités de l’entreprise. de la nature des tâches à accomplir, être proportionnée au but recherché, donner la possibilité pour le salarié d’exercer ailleurs un emploi, elle doit comporter l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives. En l’espèce, l’appréciation de la licéité de la clause de non-concurrence doit se faire au regard de l’activité de L’OREAL Paris, leader mondial des cosmétiques et produits d’hygiène corporelle, son secteur d’activité; de la formation supérieure en management de Monsieur X, de ses missions au sein de la SA L’OREAL.

Cette clause de non-concurrence doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, ceux-ci étant ainsi défini :

«En raison du marché extrêmement concurrentiel dans lequel la Société évolue, des connaissances, notamment de nature commerciale, financière, scientifique, industrielle ou marketing, concernant les activités, opérations et études de la société, ou d’une autre Société du Groupe L’OREAL. acquises par Monsieur R-S X dans l’exercice de son emploi ».

En raison des nombreuses années passées dans l’entreprise, des onze affectations au sein du groupe, sur trois pays différents, de ses postes de dirigeant, en France et à l’international, de sa participation à des comités de direction du Groupe L’OREAL. Monsieur X était amené à connaître largement et en profondeur la SA L’OREAL. ses aspects commerciaux, financiers, scientifiques, industriels, marketing, ses activités, ses opérations et les études du groupe, il devait l’être encore plus à compter du 1er septembre 2016 avec ses nouvelles fonctions de Directeur Général. L’intérêt de la clause de non-concurrence, relative au secteur d’activité des cosmétiques et de l’hygiène corporelle défini par l’article 1 de l’arrêté du 30 juin 2000, est particulièrement légitimé par l’enjeu financier considérable que la connaissance de cette entreprise multinationale à ce niveau engendrait, par le risque économique qui pouvait résulter du départ à la concurrence d’un tel cadre dirigeant; dès lors la présente clause de non-concurrence était indispensable à la protection des intérêts de la SA L’OREAL.

L’obligation de non-concurrence doit être limitée dans le temps et l’espace pour ne pas porter atteinte à la liberté du travail. En l’espèce la restriction de l’application de la clause dans le temps était réduite à une seule année, ce qui est une durée tout à fait raisonnable, la clause limitait régulièrement dans le temps la restriction à l’emploi. Elle doit respecter le principe du libre exercice d’une activité professionnelle et ne pas apporter à ce droit une restriction qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché. Elle doit tenir compte de la spécificité de l’emploi de Monsieur X, Directeur Général d’une activité couvrant le monde entier. L’appréciation de la limitation dans l’espace doit être faite au regard de l’objet de la clause de non-concurrence, de la possibilité donnée au salarié de retrouver un emploi, de l’activité de l’entreprise. leader dans son domaine, elle doit être proportionnée au risque concurrentiel, et aux larges fonctions du salarié. La limitation géographique déterminée par la clause de non-concurrence est la suivante : « Cette clause de non-concurrence s’applique aux pays suivants : la France, le Royaume Uni, l’Allemagne. l’Italie, l’Espagne. la Suisse, les Etats-Unis, le Canada, la Chine, le Brésil, ainsi qu’aux autres pays sur lesquels l’activité de Monsieur R-S X aura porté au cours des deux années précédant son dernier jour de travail effectif au sein de la Société. »>.

L’objet de la clause de non-concurrence est de ne pas entrer au service d’une entreprise étudiant, fabriquant ou vendant des produits identiques ou similaires à ceux étudiés,

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N° RG F 19/07264 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5 fabriqués ou vendus par la société. Elle fait état d’un nombre limité de pays dans lesquels le salarié ne peut entrer au service d’une entreprise concurrente, certes des pays importants. mais en rapport avec les fonctions de Monsieur X, et. au delà de ces pays cités, limitée au pays sur lesquels son affectation managériale aurait porté au cours des deux dernières années. En l’espèce. l’impossibilité d’entrer au service d’une entreprise pour une affectation dans les pays définis par la clause, laissait à Monsieur X la possibilité de travailler dans de nombreux pays du monde et dans tous les pays dans des activités non concurrentielles. Dans cette rédaction la limitation géographique à ces pays définis est proportionnée à l’activité internationale de l’entreprise. adaptée aux fonctions spécifiques de direction générale du salarié, à ses possibilités de retrouver un emploi. Monsieur X a reçu une formation supérieure de management, il a exercé des fonctions de management, de haut cadre dirigeant et de direction générale dans un grand groupe international. Il disposait de toutes les capacités généralistes de management et du réseau pour diriger ou exercer des fonctions de haut niveau dans des entreprises importantes de secteurs d’activité différents en France et à l’étranger, ce qu’il documente lui-même puisqu’il indique avoir été détaché dès son embauche par la société LVMH Moët Hennessy G H pour travailler sur des activités éloignées de la cosmétique et de la parfumerie: la maroquinerie et le prêt à porter. Dès lors, la clause de non-concurrence est régulièrement limitée dans l’espace et ne porte pas atteinte à la possibilité pour le salarié

de retrouver un emploi. L’obligation de non-concurrence doit être compensée par une contrepartie financière. Pendant l’année d’application de la clause de non-concurrence, il a été convenu de verser au salarié les 2/3 de la rémunération mensuelle de Monsieur X, soit la somme de 25.555,56€ par mois. en contrepartie de l’obligation de non-concurrence. l’existence de cette contrepartie nécessaire à la licéité de la clause est réelle, ce qui n’est pas

contesté par le défendeur. La limitation de la clause de non-concurrence tient compte des spécificités de l’activité de la SA L’OREAL et de l’emploi de Monsieur X, en se limitant au domaine des cosmétiques et de l’hygiène corporelle défini par l’article 1 de l’Arrêté du 30 juin 2000. en restreignant par son objet ses possibilités d’entrer au service d’une entreprise concurrente sur la zone géographique spécifiée pendant seulement un an, tout en l’indemnisant aux deux tiers de sa rémunération. Elle n’interdisait pas au salarié toute activité professionnelle, lui laissant la possibilité d’exercer pendant cette période des fonctions de cadre dirigeant conforme à sa formation et ses compétences dans un autre secteur que la parfumerie et cosmétique. La clause de non-concurrence n’a pas apporté de restriction absolue à la liberté de travail de Monsieur X. elle n’est pas excessive, elle est proportionnée aux enjeux de cette restriction, elle est justifiée par des intérêts légitimes de l’entreprise, elle ne viole ni le principe de liberté du travail, ni les dispositions de l’article L.1121-1 du Code du travail. Le conseil de céans juge que la clause de non-concurrence prévue au contrat de travail de Monsieur X avec la SA

L’OREAL est licite.

Sur la violation de la clause de non-concurrence

Selon l’article L.1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun. Le contenu du contrat de travail est librement fixé par les parties, dans les limites des libertés fondamentales, du Code du travail, de la convention collective et de la jurisprudence applicable. Le salarié et l’employeur sont libres de négocier divers avantages et obligations qui découlent du contrat de travail ainsi conclu, notamment les obligations réciproques d’une clause de non-concurrence. La clause de non-concurrence est licite, elle

a été convenue par les parties dans les termes suivants qui les engagent :

« Monsieur R-S X s’engage à ne pas entrer au service d’une entreprise étudiant, fabriquant ou vendant des produits identiques ou similaires à ceux étudiés, fabriqués ou vendus par la Société, c’est-à-dire des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, figurant en particulier à l’Article 1 de l’Arrêté du 30 juin 2000.

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N° RG F 19/07264 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5 couleurs accessoires (packaging, brosses…) et composants, ainsi que les produits nutri-cosmétiques. Monsieur R-S X s’interdit plus généralement de s’intéresser, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit. y compris, notamment, en conseil ou en capital, (sauf opération boursière courante), à une activité de ce genre, existante ou en cours de création. »>.

Les produits visés par la clause de non-concurrence sont les suivants :

«La liste des catégories de produits cosmétiques mentionnée au c de l’article R. 5263 du code de la santé publique est fixée comme suit :

- crèmes, émulsions, lotions, gels et huiles pour la peau (mains, visage, pieds, notamment);

- masques de beauté, à l’exclusion des produits d’abrasion superficielle de la peau par voie

chimique:

-fonds de teint (liquides, pâtes, poudres):

- poudres pour maquillage, poudres à appliquer après le bain, poudres pour l’hygiène

corporelle et autres poudres:

- savons de toilette, savons déodorants et autres savons ;

- parfums. eaux de toilette et eaux de Cologne :

-préparations pour le bain et la douche (sels, mousses, huiles, gel et autres préparations);

- dépilatoires :

- déodorants et antisudoraux ;

- produits de soins capillaires :

- teintures capillaires et décolorants :

- produits pour l’ondulation, le défrisage et la fixation;

- produits de mise en plis :

- produits de nettoyage (lotions, poudres, shampooings);

- produits d’entretien pour la chevelure (lotions, crèmes, huiles):

- produits de coiffage (lotions, laques, brillantines);

- produits pour le rasage (savons, mousses, lotions et autres produits):

- produits de maquillage et démaquillage du visage et des yeux:

- produits destinés à être appliqués sur les lèvres ;

- produits pour soins dentaires et buccaux;

- produits pour les soins et le maquillage des ongles;

- produits pour les soins intimes externes:

- produits solaires ;

- produits de bronzage sans soleil :

- produits permettant de blanchir la peau :

- produits antirides. » ; Selon la clause de non-concurrence, Monsieur X s’est engagé à ne pas entrer au service d’une entreprise en France, étudiant, fabriquant ou vendant des produits identiques ou similaires à ceux étudiés, fabriqués ou vendus par la Société, c’est-à-dire des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, figurant en particulier à l’Article 1 de l’Arrêté du 30 juin 2000. couleurs accessoires (packaging, brosses…) et composants, notamment les parfums, eaux de toilette et eaux de Cologne; ainsi que les produits nutri-cosmétique. Pour l’appréciation du secteur d’activité visé par la clause, l’existence de divisions opérationnelles au sein de la SA L’OREAL (grand public, luxe. produits professionnels. cosmétique active) est sans conséquence compte tenu de sa rédaction. le salarié s’étant engagé à ne pas entrer au service d’une entreprise concurrente, mais aussi parce que l’exercice des fonctions de Monsieur X au sein de la SA L’OREAL ne pouvait être cloisonné compte tenu de l’appréhension nécessairement globale des fonctions de direction générale dans l’entreprise, des questions de nature commerciale, financière, scientifique, industrielle ou marketing, concernant les activités, opérations et études de la société de la marque mondiale « L’OREAL Paris ». Cette interdiction d’entrer au service d’une entreprise concurrente, répondait en l’espèce à la nécessité de protéger les intérêts de l’entreprise. en raison des particularités de la fonction de dirigeant de Monsieur X, à même de faire partager par sa seule entrée au service de la nouvelle entreprise tous les savoir-faire de tous ces produits acquis directement ou indirectement

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dans sa fonction de dirigeant de haut niveau chez son ancien employeur, en matière de stratégie commerciale, développement et orientations futures, savoir-faire techniques et investissements, clients, produits, notamment. à apporter un avantage concurrentiel très important à la nouvelle entreprise à même de créer ou de développer l’exploitation de ces gammes de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle.

Il résulte du contrat de travail conclu le 23 avril 2019 entre Monsieur X et la société LVMH Moët Hennessy G H, qu’il est entré au service de cette société le 1er septembre 2019, et qu’il a convenu avec elle, dès le 23 avril 2019, d’intérêts et d’un lien de dépendance, définis dans le contrat de travail comme suit : qualité de Directeur, cadre dirigeant LVMH Moët Hennessy G H, sans période d’essai. basé à Paris,

véhicule de fonction.

application de la convention collective de la société LVMH Moët Hennessy G H (vins spiritueux et champagnes),

clause de non-concurrence le liant directement à cette même société. la société

LVMH Moët Hennessy G H, eu égard à l’accès aux informations à caractère secret concernant LVMH Moët Hennessy G H: stratégie commerciale, développement et orientations futures, savoirs faires techniques et investissements, clients, produits..) et les clients du Groupe qui seraient de nature à nuire gravement aux intérêts légitimes de la société LVMH Moët Hennessy G H,

perception contractuelle d’un bonus annuel et d’un bonus moyen-terme dont le montant devait être déterminé en fonction de sa performance et de l’atteinte des objectifs définis annuellement, notamment par la société (LVMH Moët Hennessy G H). versé dès l’année 2019. prorata temporis.

éligibilité dès l’année 2019 au programme d’actions gratuites de performance du Groupe LVMH (ou tout mécanisme substitutif décidé par la Direction Générale du groupe et /ou le Conseil d’Administration (LVMH Moët Hennessy G H),

prise en charge par la société LVMH Moët Hennessy G H de la perte d’intéressement long terme et bonus L’OREAL.

clause de secret professionnel concernant les stratégies du groupe sur les produits, les ventes, les coûts, les profits, les prix, les organigrammes, les clients. les fournisseurs et les éventuelles acquisitions,

respect de l’obligation de non concurrence devant être examinée en premier lieu au regard de la société LVMH Moët Hennessy G H, mais aussi de ses filiales auxquelles Monsieur X est intéressé financièrement par sa rémunération,

lien opérationnel avec la société LVMH Moët Hennessy G H par le parcours de connaissance opérationnelle du groupe LVMH prévu au contrat.

Monsieur X a été rémunéré par la société LVMH Moët Hennessy G H pendant toute la période d’application de la clause de non-concurrence. Le détachement de Monsieur X au sein de la société filiale G H, sans avenant au contrat de travail ou convention tripartite. la prise en charge de son salaire par cette société soit sans effet sur l’application de la clause de non-concurrence au regard de la société LVMH Moët Hennessy G H à laquelle il est resté lié par le lien contractuel d’intérêts et de dépendance pendant la période de restriction de la clause de non-concurrence. Monsieur X est entré au service de la société LVMH Moët

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N° RG F 19/07264 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5

Hennessy G H, c’est à dessein que la société LVMH Moët Hennessy G H a embauché Monsieur X, a crée avec lui dès son embauche des liens

contractuels de dépendance et d’intérêts.

L’activité concurrente de la société LVMH Moët Hennessy G H vis-à-vis de la SA L’OREAL. telle que définie par l’article 1 de l’arrêté du 30 juin 2000, doit être établie. La SA L’OREAL produit et commercialise des cosmétiques et produits d’hygiène corporelle, notamment des parfums, avec des marques telles que Lancôme, P Q L, A B, C L, E F, etc. La société LVMH Moët Hennessy G H exploite au travers de ses filiales des enseignes de distribution. telle que SEPHORA, des cosmétiques et produits d’hygiène corporelle, et notamment des parfums, exploitant des marques telles que Guerlain, M N, Givenchy, etc. LVMH Moët Hennessy G H est la société dans laquelle la consolidation financière du groupe se fait, elle déclare dans ses statuts une activité de commerce de tous produits pharmaceutiques, de parfumerie et de cosmétique, de distribution sélective et plus généralement, de produits se rattachant à l’hygiène, à l’esthétique et aux soins. Ses résultats sont notamment constitués des produits des activités relevant de l’article 1 de l’Arrêté du 30 juin 2000 définissant les produits cosmétiques, parfums et eaux de Cologne, ce qui représente sur ces produits un chiffre d’affaires et des résultats en milliards d’euros, et une part très significative de l’ensemble des activités relevant de la société LVMH Moët

Hennessy G H, ces données sont établies par les documents financiers produits. L’activité concurrente de la société LVMH Moët Hennessy G H est corroborée par le développement très important des activités cosmétiques et parfums du groupe LVMH Moët Hennessy G H, leur part croissante dans la progression financière du groupe, la volonté affichée de lancer une activité avec une nouvelle marque sur le thème de la beauté, activités en rapport direct avec les fonctions exercées par Monsieur X au sein de la SA L’OREAL. La société LVMH Moët Hennessy G H se présente comme un acteur mondial majeur dans le parfum, le maquillage et le soin. La société LVMH Moët Hennessy G H exerce bien une activité concurrente à celle de la SA L’OREAL, Monsieur X est entré au service en France de la société LVMH Moët Hennessy G H, entreprise concurrente, en a retiré des intérêts directs et importants, il a violé la clause de non-concurrence, ce qui l’oblige à

l’égard de la SA L’OREAL.

Sur la clause pénale pour violation de la clause de non-concurrence

La clause de non-concurrence s’impose à Monsieur X en raison de sa

violation:

< Toute violation de la clause de non-concurrence libèrera la Société du versement de la contrepartie financière à l’obligation de non-concurrence prévue ci-dessus. A compter de cette violation, Monsieur R-S X sera redevable envers la

Société du remboursement des sommes qu’il aurait pu percevoir à ce titre. En outre, toute violation de la clause de non-concurrence rendra automatiquement Monsieur R-S X redevable envers la Société d’une pénalité fixée dès à présent forfaitairement à douze mois de salaire, sans qu’il soit besoin d’une mise en demeure d’avoir à cesser l’activité concurrentielle. ».

Monsieur X a violé la clause de non-concurrence, il est redevable d’une pénalité au profit de la SA L’OREAL. La pénalité pour violation de la clause de non-concurrence a été fixée forfaitairement à douze mois de salaire, sans autre précision.

Cette disposition devant s’analyser strictement, le salaire à prendre en compte doit être limité au salaire fixe de Monsieur X d’un montant annuel brut de 460.000€.

Monsieur X sera condamné au versement de cette somme à la SA

L’OREAL. à titre de pénalité pour violation de la clause de non-concurrence.

Le salarié ne peut prétendre percevoir la contrepartie de la clause de non-concurrence dès lors qu’il est établi qu’il a violé cette clause. La clause de non-concurrence a été violée

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N° RG F 19/07264 – N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5 pendant toute la durée de l’obligation. l’indemnité de non-concurrence a été indument versée. Monsieur X sera condamné à rembourser à la SA L’OREAL la somme versée de 306.666.72€, à titre de remboursement des indemnités de

non-concurrence indument perçues.

Sur la demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée, il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En application de l’article 700 du code de procédure civile. compte tenu de l’absence d’éléments soumis aux débats sur cette demande. il apparaît équitable. de condamner le salarié qui succombe au paiement de la somme de 1.000 € au titre des frais exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Sur l’exécution provisoire Selon l’article 515 du code de procédure civile, hors les cas où elle est de droit, l’exécution provisoire peut être ordonnée à la demande des parties, à chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire. En l’espèce la partie demanderesse n’apporte pas d’information particulière justifiant cette exécution provisoire, elle sera

déboutée de cette demande.

Il convient de mettre à la charge de la partie qui succombe les dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Conseil statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort:

DIT les demandes recevables :

DIT que la clause de non-concurrence est licite;

DIT que Monsieur R S X a violé la clause de non-concurrence

le liant à la SA L’OREAL:

CONDAMNE Monsieur R S X à verser à la société SA

L’OREAL les sommes suivantes :

306 666,72 € au titre du remboursement des indemnités de non concurrence perçues:

460 000 € à titre de dommages et intérêts prévus par la clause pénale : 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile:

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE Monsieur R S X aux dépens.

LE PRÉSIDENT, LA GREFFIÈRE en charge de la mise à disposition, P T U V

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EXPÉDITION […]

N° R.G.: N° RG F 19/07264- N° Portalis 3521-X-B7D-JMRW5

S.A. L’OREAL

C/
M. R-S X

Jugement prononcé le : 30 Avril 2021

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le président et le greffier.

La présente expédition (en 15 pages) revêtue de la formule exécutoire est délivrée le 07 Mai 2021 par le directeur de greffe adjoint du tribunal judiciaire à :

S.A. L’OREAL

P/Le directeur de greffe adjoint D

Adjointe administrative U R DE PARIS P

E

D

Michelle BONHEUR20

2018-006

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Conseil de prud'hommes de Paris, 30 avril 2021, n° F 19/07264