Tribunal administratif de Bordeaux, 3 septembre 2021, n° 2104200

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Sur la décision

Référence :
TA Bordeaux, 3 sept. 2021, n° 2104200
Juridiction : Tribunal administratif de Bordeaux
Numéro : 2104200

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE BORDEAUX

N°2104200 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

SOCIETE ORANGE ___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Z X Juge des référés ___________ Le juge des référés

Audience du 31 Août 2021 Ordonnance du 3 septembre 2021 ___________ D

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 et le 30 août 2021, la société Orange, représentée par Me Gentilhomme, demande au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de l’arrêté interruptif de travaux pris à son encontre le 25 juin 2021 par le maire de la commune de Vérac, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l’État une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Orange soutient que :

- l’urgence est caractérisée eu égard à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile ; il n’existe actuellement aucune antenne relais Orange sur la commune de Vérac, et une partie du territoire communal n’a pas accès à la 4G ;

- le maire n’a pas mis en œuvre la procédure de droit de visite et de contrôle à l’égard du propriétaire du terrain d’assiette du projet mais a effectué ses constatations depuis les parcelles voisines ;

- la dalle n’est pas construite au-dessus du terrain naturel avant travaux et ne le sera pas en tout état de cause à l’issue des travaux ;

- l’arrêté ne pouvait être pris au regard des dispositions de l’article R. 421-9 du code de l’urbanisme dans une rédaction qui n’était plus applicable à la date de son édiction ;

- la dalle béton qui supporte le pylône ne constitue pas des fondations profondes et ne crée pas d’emprise au sol ;



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- les travaux étaient interrompus depuis mai 2021 lorsque l’arrêté a été pris ;

- le juge des référés saisi de la légalité de la déclaration préalable, ayant estimé que le projet ne portait pas atteinte au paysage, le maire ne peut légalement invoquer ce motif pour justifier sa décision ;

- l’arrêté, qui a pour objet de satisfaire les intérêts de quelques opposants au projet, est entaché d’un détournement de pouvoir ;

- le mémoire présenté par la commune de Vérac est irrecevable, l’arrêté attaqué étant pris par le maire au nom de l’Etat.

La commune de Vérac a présenté des observations, enregistrées le 21 août 2021.

Par un mémoire enregistré le 24 août 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la couverture du territoire de la commune de Verac par le réseau 4G d’Orange étant déjà assurée à 99%, il n’existe pas d’urgence à suspendre l’exécution de l’arrêté ;

- les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la requête enregistrée le sous le n°2104170 par laquelle la société Orange demande l’annulation de la décision attaquée.

Vu :

- le code de l’urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du 15 septembre 2020 par laquelle la présidente du tribunal a désigné M. X pour exercer les fonctions de juge des référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique tenue en présence de Mme Gioffre, greffier d’audience, le 31 août 2021 à 14h10, M. X a lu son rapport et entendu :

- les observations de Me Gentilhomme, représentant la société Orange, qui reprend ses écritures et soutient que la dalle de support de l’antenne, qui est enterrée, n’avait pas à être mentionnée dans le dossier de déclaration préalable dans la mesure où les ouvrages et parties d’ouvrages souterrains ne sont pas appréhendés, en tant que tels, par le droit de l’urbanisme ;

- les observations de M. Y, représentant la préfète de la Gironde, qui reprend ses écritures et soutient que la construction n’est pas conforme à la déclaration préalable qui ne mentionne pas de fondations profondes ;

- les observations de Mme A-B, représentant la commune de Vérac, qui soutient que la dalle dépasse du niveau du sol, les amas de terre autour de la dalle provenant des parcelles de terrain voisines, et que l’équipe municipale a été inquiétée par le changement de taille du projet.

La clôture de l’instruction a eu lieu à l’issue de l’audience, en application de l’article R. 522-8 du code de justice administrative.



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Une note en délibéré, présentée pour la société Orange, a été enregistrée le 1er septembre 2021.

Sur la recevabilité des écritures de la commune de Vérac :

1. Lorsqu’il exerce le pouvoir d’interruption des travaux qui lui est attribué par l’article L. 480-2 du code de l’urbanisme, le maire agit en qualité d’autorité de l’Etat. Il en résulte que la commune n’est pas partie au litige portant sur la légalité d’un arrêté interruptif de travaux. Il est en revanche loisible au juge administratif, dans le cadre de ses pouvoirs d’instruction, de l’appeler en la cause en qualité d’observateur. Par suite, les observations présentées dans la présente instance par la commune de Vérac sont recevables, et la fin de non-recevoir opposée par la société Orange doit être écartée.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

2. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (…) ».

3. Par un arrêté du 4 août 2018, le maire de Verac ne s’est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 28 juillet 2018 par la SA Orange en vue de l’édification d’une antenne relais de téléphonie mobile, portant sur une surface projetée de 4m². Par un jugement du 12 novembre 2020, le tribunal a annulé un arrêté du 30 octobre 2018 par lequel le maire de Vérac avait retiré cette décision de non-opposition. Mais sur le fondement d’un procès-verbal d’infraction dressé le 18 juin 2021, le maire de Vérac a, par un arrêté du 25 juin 2021, mis en demeure la société Orange d’interrompre immédiatement les travaux au motif que ceux-ci faisaient apparaître une dalle d’environ 18m² au-dessus du niveau du terrain naturel, soit une emprise au sol supérieure à 5m² qui aurait exigé le dépôt d’un permis de construire. La société Orange demande au juge des référés de suspendre l’exécution de cet arrêté.

4. D’une part, la condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d’une demande tendant à la suspension d’une telle décision, d’apprécier concrètement, compte-tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue.

5. Pour justifier de l’urgence à la reprise des travaux de construction de son antenne relais, la société Orange se prévaut de l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile et à ses intérêts propres au regard des engagements qu’elle a pris vis-à-vis de l’Etat quant à la couverture du territoire par son réseau 4G. Elle produit au soutien de ses allégations des cartes dont il ressort que le territoire de la commune, dans sa partie nord-est où doit être implantée l’antenne relais, n’est pas couvert par son réseau 4G. Si la



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préfète de la Gironde produit en défense des cartes issues des sites internet data.gouv.fr et de la société requérante elle-même, qui indiquent que la commune de Vérac serait couverte totalement ou à 99% par le réseau 4G, ces cartes globales, données à titre d’information et issues de simulations informatiques, ne présentent pas le niveau de précision des cartes produites à l’instance par l’opérateur. En outre, il ne ressort pas des cartes extraites du site de l’agence nationale des fréquences que les antennes relais de la société Orange qu’elles recensent, situées sur le territoire des communes alentour, permettraient de desservir la population de la commune de Vérac dans des conditions satisfaisantes, ce que, au demeurant, la commune ne conteste pas dans ces observations. Dans ces conditions, la société Orange justifie de l’existence d’une situation d’urgence.

6. D’autre part, en l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que la dalle de béton servant de support à l’antenne relais est édifiée au niveau du sol et qu’en conséquence, même d’une profondeur d’un mètre environ, elle ne crée aucune emprise au sens de l’article R. 421-9 du code de l’urbanisme et est, alors même qu’elle n’apparaît pas dans le dossier de demande, conforme à la déclaration préalable est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté attaqué. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’ordonner la suspension de l’exécution de l’arrêté interruptif de travaux pris par le maire de Vérac le 25 juin 2021 jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.

7. Pour l’application des dispositions de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, aucun des autres moyens soulevés n’est de nature à justifier la suspension de l’acte attaqué.

Sur les conclusions relatives aux frais de l’instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 1 000 euros à la société Orange au titre des frais qu’elle a exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : L’exécution de l’arrêté du maire de Vérac en date du 25 juin 2021 est suspendue jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.

Article 2 : L’Etat versera à la société Orange une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



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Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Orange et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera transmise, pour information, à la préfète de la Gironde (direction départementale des territoires et de la mer), à la commune de Vérac et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Libourne.

Fait à Bordeaux, le 3 septembre 2021.

Le juge des référés, La greffière,

J. X C. GIOFFRE

La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme, la greffière,

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