Tribunal administratif de Bordeaux, 23 novembre 2022, n° 2206075

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Bordeaux, 23 nov. 2022, n° 2206075
Juridiction : Tribunal administratif de Bordeaux
Numéro : 2206075
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 26 novembre 2022

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2022, M. B A, représenté par la société Fidal, avocat, demande au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution, d’une part, de la décision du 7 novembre 2022 par laquelle la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine a prononcé à son encontre les sanctions d’une amende administrative de 1 500 euros et de suspension de la licence pour la pêche en milieux estuariens et des poissons amphihalins (CMEA) – droit de pêche spécifique (DPS) « civelle », en sa qualité de capitaine du navire « HELENA », ainsi que la sanction de sept points de pénalité au titre de l’infraction d’obstacle à saisie, d’autre part, de la décision du 14 novembre 2022 de cette autorité fixant la période de suspension de la licence du 1er décembre au 15 décembre 2022.

M. A soutient que :

— à l’occasion du contrôle de son navire « HELENA », le 17 décembre 2021, il a été relevé qu’il exerçait une activité de pêche à la civelle dans une zone interdite ;

— s’il a accepté de remettre à l’eau le produit de la pêche, il s’est opposé à la saisie de ses filets, qui constituent ses outils de travail de pêche maritime ;

— la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine lui a infligé des sanctions par décision du 29 juillet 2022 ;

— toutefois, à la suite de son recours gracieux, cette autorité a, par décision du 2 novembre 2022, annulé les sanctions initiales et a, par une nouvelle décision du 7 novembre 2022, prononcé de nouvelles sanctions, dont la suspension de la licence pendant une durée de quinze jours qui a été fixée par décision du 14 novembre ;

— la requête au fond contre les décisions des 7 novembre et 14 novembre 2022 ayant été déposée, la présente instance est recevable;

— la condition d’urgence est satisfaite dès lors, d’une part, qu’il a engagé la présente action dans les quarante-huit heures suivant la notification de la décision du 14 novembre 2022, d’autre part, que la suspension de la licence pendant la période du 1er décembre au 15 décembre 2022, période primordiale pour la pêche à la civelle, affectera de manière très significative son chiffre d’affaires annuel, qui est constitué pour un tiers par cette pêche très rémunératrice avant les périodes de fêtes ;

— la décision du 7 novembre 2022 ne peut être regardée comme motivée, en violation de l’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration, faute d’indiquer le mode de calcul de l’amende de 1 500 euros et de permettre de déterminer à quelle infraction cette sanction se rapporte ;

— la décision du 7 novembre 2022 est entachée du vice de l’incompétence de son auteur, faute de comporter en annexe délégation de signature à ce dernier de la part de la préfète de la région ;

— tant l’amende et la suspension de la licence de pêche que les points de pénalités sont illégaux, au regard de l’article 8 de la Déclaration du 26 août 1789 et des articles 89, 90 et 92 du règlement n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009, applicable en vertu de l’article L. 946-1 du code rural et de la pêche maritime, pour être disproportionnés dès lors que la brève incursion qu’il a effectuée dans la zone interdite sur environ 500 mètres était justifiée par des motifs de sécurité, en vue d’éviter tout risque de collision, six navires pêchant ce jour-là en bordure de cette zone, que le fruit de la pêche en cause était limité à 1,5 kg et a été remis à l’eau, que la valeur de cette pêche était de seulement 600 euros, que l’interdiction d’exercer son activité pendant les 15 premiers jours du mois de décembre lui fait perdre le tiers de son chiffre d’affaires et que les points de pénalité ont pour effet une perte de valeur de son navire, qu’il envisage de céder le 31 mars 2023 ;

— s’il s’est opposé à la saisie de ses filets, c’est pour pouvoir continuer à exercer son activité, notamment la pêche à la civelle qui est ouverte jusqu’au 30 avril 2023 mais qui est particulièrement rentable dans la période précédant les fêtes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code rural et de la pêche maritime ;

— le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné M. Bayle, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.

Considérant ce qui suit :

1. Par la présente requête, M. B A, qui exerce une activité de pêche maritime, demande au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution, d’une part, de la décision du 7 novembre 2022 par laquelle la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine a prononcé à son encontre les sanctions d’une amende administrative de 1 500 euros et de suspension de la licence pour la pêche en milieux estuariens et des poissons amphihalins (CMEA) – droit de pêche spécifique (DPS) « civelle », en sa qualité de capitaine du navire « HELENA », ainsi que la sanction de sept points de pénalité au titre de l’infraction d’obstacle à saisie, d’autre part, de la décision du 14 novembre 2022 de cette autorité fixant la période de suspension de la licence du 1er décembre au 15 décembre 2022.

2. Selon l’article L. 522-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés statue au terme d’une procédure contradictoire écrite ou orale ». L’article L. 522-3 dispose cependant que « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d’urgence ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu’il y ait lieu d’appliquer les deux premiers alinéas de l’article L. 522-1 ».

3. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. () ». Aux termes de l’article R. 522-1 de ce code : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit contenir l’exposé au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l’urgence de l’affaire. / () ».

4. Pour l’application des dispositions précitées, l’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte en litige sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue.

5. Pour justifier de la condition d’urgence, M. A soutient que la suspension de la licence en cause pendant la période fixée par la décision du 14 novembre 2022, qui serait la plus rémunératrice, va entraîner une perte d’un tiers de son chiffre d’affaires annuel. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la pêche à la civelle est ouverte du 1er décembre 2022 au 30 avril 2023 et que, par suite, elle durera encore trois mois et demi après l’exécution de la sanction de suspension de la licence. Si M. A produit une attestation de son comptable, datée du 14 septembre 2022, selon laquelle les recettes issues de la vente de civelles ont représenté environ un tiers des chiffres d’affaires des exercices 2020 et 2021, ce document ne démontre pas que l’essentiel des recettes a résulté des ventes pendant la première quinzaine de décembre. Ainsi, en l’état de l’instruction, M. A ne démontre pas que la sanction de la suspension lui causerait un préjudice économique susceptible de mettre en péril la pérennité de son entreprise et créerait, de ce fait, une situation d’urgence. Par ailleurs, s’il fait valoir que la sanction des points de pénalité aurait pour effet une perte de valeur vénale de son navire, qu’il envisagerait de céder au 31 mars 2023, il n’assortit cette allégation d’aucun justificatif. Dès lors, la condition d’urgence ne peut être regardée comme satisfaite.

6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le bien-fondé des moyens de fond, les conclusions de M. A aux fins de suspension doivent être rejetées, selon la procédure prévue par les dispositions précitées de l’article L. 521-3 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B A.

Copie sera adressée pour information à la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine.

Fait à Bordeaux, le 23 novembre 2022.

Le juge des référés,

J-M. Bayle

La République mande et ordonne à la préfète de la région Nouvelle-Aquitaine en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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