Tribunal administratif de Dijon, 1ère chambre, 15 juillet 2022, n° 2102113

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Sur la décision

Référence :
TA Dijon, 1re ch., 15 juill. 2022, n° 2102113
Juridiction : Tribunal administratif de Dijon
Numéro : 2102113
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 16 juin 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 11 août 2021, Mme E C, M. A C, Mme F D, M. B D, représentés par Me Noirot, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la délibération, en date du 10 juin 2021, par laquelle le conseil municipal d’Etais-la-Sauvin a autorisé le maire de cette commune, d’une part, à signer une promesse de bail emphytéotique au bénéfice de la société d’économie mixte (SEM) Yonne Energie sur les parcelles cadastrées YE 7, YE 10, YE 12, YE 38, YE 44 et BC 40 et, d’autre part, à signer tous les documents nécessaires à la réalisation du projet de centrale photovoltaïque porté par cette société ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 300 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— leur requête est recevable ;

— la décision attaquée leur fait grief eu égard à la covisibilité entre leurs parcelles et le projet de construction ;

— elle est entachée d’une insuffisance de motivation ;

— elle méconnaît l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques dès lors qu’aucune procédure de sélection préalable n’a été organisée ;

—  aucune étude d’impact n’a été réalisée ;

— la délibération attaquée ne précise pas suffisamment la délégation de signature accordée au maire, notamment sur la construction envisagée de la centrale photovoltaïque.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2022, la Commune d’Etais-la-Sauvin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 mai 2022, la clôture de l’instruction a été fixée au 7 juin 2022.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le jugement était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office, tiré de l’irrecevabilité de la requête, dès lors que la légalité de la délibération attaquée, qui constitue un acte détachable du contrat dont elle approuve la conclusion, ne peut être discutée que par la voie du recours en contestation de la validité du contrat, postérieurement à la signature de ce dernier.

M. A C a été désigné représentant unique des requérants en application de l’article R. 411-5 du code de justice administrative, pris en son deuxième alinéa.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’énergie

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code général des propriétés des personnes publiques ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Zupan, président-rapporteur,

— les conclusions de Mme Ach, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération en date du 10 juin 2022, le conseil municipal d’Etais-la-Sauvin a autorisé le maire de cette commune, d’une part, à signer une promesse de bail emphytéotique au bénéfice de la SEM Yonne Energie concernant les parcelles YE 7, YE10, YE 12, YE 38, YE 44 et BC 40 et, d’autre part, à signer tous les documents nécessaires à la réalisation du projet de centrale photovoltaïque porté par cette société. M. et Mme C et M. et Mme D, propriétaires des terrains avoisinants, demandent l’annulation de cette délibération.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. D’une part, aux termes de l''article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques : « Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : () 5° Aux baux emphytéotiques passés par les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, conformément au 4° de l’article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales ». L’article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales, auquel il est ainsi renvoyé, dispose : « Les baux passés en application de l’article L. 1311-2 satisfont aux conditions particulières suivantes : () 4° Les litiges relatifs à ces baux sont de la compétence des tribunaux administratifs ». Enfin, selon l’article L. 1311-2 du même code : « Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l’objet d’un bail emphytéotique () en vue de la réalisation d’une opération d’intérêt général relevant de sa compétence ou en vue de l’affectation à une association cultuelle d’un édifice du culte ouvert au public. Ce bail emphytéotique est dénommé bail emphytéotique administratif ». Ainsi, les baux emphytéotiques conclus par une collectivité locale sur une dépendance de son domaine privé en vue de l’une des opérations prévues par l’article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales constituent des baux emphytéotiques administratifs dont le contentieux relève de la compétence du juge administratif.

3. D’autre part, aux termes de l’article L. 2224-32 du code général des collectivités territoriales : « Sous réserve de l’autorisation prévue à l’article 7 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 (), les communes, sur leur territoire, et les établissements publics de coopération, sur le territoire des communes qui en sont membres, peuvent, outre les possibilités ouvertes par les douzième et treizième alinéas de l’article 8 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée, aménager, exploiter, faire aménager et faire exploiter dans les conditions prévues par le présent code toute nouvelle installation hydroélectrique, toute nouvelle installation utilisant les autres énergies renouvelables définies notamment à l’article L. 211-2 du code de l’énergie, toute nouvelle installation de valorisation énergétique des déchets ménagers ou assimilés mentionnés aux articles L. 2224-13 et L. 2224-14 du présent code, ou toute nouvelle installation de production d’hydrogène renouvelable ou bas-carbone définis à l’article L. 811-1 du code de l’énergie, de cogénération ou de récupération d’énergie provenant d’installations visant l’alimentation d’un réseau de chaleur dans les conditions fixées par le dixième alinéa (6°) de l’article 8 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée lorsque ces nouvelles installations se traduisent par une économie d’énergie et une réduction des pollutions atmosphériques. () Selon l’article L. 211-2 du code de l’énergie : » L’énergie produite à partir de sources renouvelables, ou « énergie renouvelable », est une énergie produite à partir de sources non fossiles renouvelables, à savoir l’énergie éolienne, l’énergie solaire thermique ou photovoltaïque, l’énergie géothermique, l’énergie ambiante, l’énergie marémotrice, houlomotrice et les autres énergies marines, l’énergie hydroélectrique, la biomasse, les gaz de décharge, les gaz des stations d’épuration d’eaux usées et le biogaz. ".

4. Il est constant que les parcelles litigieuses appartiennent au domaine privé de la commune d’Etais-la-Sauvin et que la délibération attaquée entend les asservir à la construction d’une centrale photovoltaïque, installation que la commune, en vertu des dispositions précitées, a compétence pour faire réaliser et exploiter par la SEM Yonne Energie.

5. En conséquence, le bail emphytéotique dont la délibération attaquée approuve la conclusion constitue un bail emphytéotique administratif.

6. Or, indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité ; que la légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini.

7. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la délibération du conseil municipal d’Etais-la-Sauvin du 10 juin 2022 autorisant la signature d’une promesse de bail emphytéotique avec la SEM Yonne Energie ne peut être contestée que par la voie du recours en contestation de la validité du contrat, postérieurement à la signature de ce dernier. Par conséquent, le recours pour excès de pouvoir engagé à son encontre par M. C et autres est irrecevable.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une quelconque somme soit mise à la charge de la commune d’Etais-la-Sauvin, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, en remboursement des frais de procès exposés par les requérants.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A C, représentant unique des requérants, et à la Commune d’Etais-la-Sauvin.

Délibéré après l’audience du 30 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. David Zupan, président,

Mme Marie-Eve Laurent, première conseillère,

Mme Océane Viotti, conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2022.

Le président-rapporteur,

D. ZUPAN

La conseillère premier assesseur,

M.-E. LAURENT

La greffière,

C. CHAPIRON

La République mande et ordonne au préfet de l’Yonne en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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