Tribunal administratif de Lyon, 6 mars 2015, n° 1501232

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 6 mars 2015, n° 1501232
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 1501232

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE LYON

N° 1501232

___________

SOCIETE CHAZELLE

___________

Mme Verley-Cheynel

Juge des référés

___________

Audience du 2 mars 2015

Ordonnance du 6 mars 2015

__________

39-08-015-01

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés,

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 16 février 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 27 février 2015, la société Chazelle, représentée par la Selarl CJA Public, demande au juge des référés statuant en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler, sur le fondement des dispositions de l’article L. 551- 2 du code de justice administrative, à titre principal, au stade de l’analyse des offres, la procédure de passation par la commune de Saint-Etienne des lots 11 à 16, du marché public ayant pour objet des travaux de maintenance dans les bâtiments ou subsidiairement d’annuler l’ensemble de la procédure ;

2°) d’enjoindre à la commune de Saint-Etienne de réexaminer la régularité de son offre, de reprendre la procédure au stade de l’examen de la recevabilité des offres et des candidatures, et de lui communiquer les caractéristiques et avantages des offres des sociétés retenues ;

3°) de mettre à la charge de commune de Saint-Etienne une somme de 4 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— l’imprécision du BPU remis par la ville l’a induite en erreur : elle n’a pas renseigné sept rubriques du BPU parce que le BPU transmis par la ville dans le dossier de consultation ne comportait aucune unité de valeur pour lesdites rubriques et elle a ainsi légitimement cru qu’elles ne devaient pas être complétées ;

— son analyse est confortée par le fait que le DQE, outre qu’il ne comporte pas non plus d’unité de valeur, ne mentionne aucune quantité ;

— elle n’est toujours pas en mesure de dire si l’unité de valeur des sept rubriques non renseignées doit être U, m2, m3, kg ou tout autre unité ;

— elle ne pouvait elle-même renseigner l’unité de valeur sans modifier les besoins du pouvoir adjudicateur, qui n’a pas défini précisément ses besoins en contradiction avec les principes régissant la commande publique ;

— la ville a manqué à ses obligations en acceptant que certains candidats complètent le BPU compte tenu de son imprécision/ambiguïté ;

— n’ayant pu être classée, elle a été lésée, d’autant plus qu’elle était moins disante et titulaire de ce marché depuis 15 ans ;

— contrairement à elle-même, la société attributaire ne dispose d’aucune qualification dans la matière objet du marché.

Par un mémoire enregistré le 26 février2015, la commune de Saint-Etienne, représentée par la Selarl Nathalie Nguyen Avocats & Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Chazelle en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— l’offre de la société Chazelle était irrégulière dès lors qu’elle n’a pas renseigné certains prix unitaires, alors que les documents de la consultation ne laissaient aucun choix aux candidats entre plusieurs options techniques pour réaliser les prestations demandées et que les sept rubriques litigieuses concernaient des prestations à évaluer à l’unité ;

— la déduction de l’unité de valeur était évidente compte tenu des intitulés des rubriques discutées ;

— une majorité de candidats ont remis des offres régulières, les irrégularités des autres n’étant pas les mêmes pour tous les candidats ;

— ayant remis une offre irrégulière de son propre et unique fait, la société Chazelle est irrecevable pour défaut d’intérêt à agir ;

— la société attributaire dispose des capacités techniques requises pour exécuter le marché ;

— la requérante a reçu notification du rejet de ses offres conformément à l’article 80 du code des marchés publics, eu égard à l’irrégularité de son offre la ville n’était pas tenue de lui communiquer le montant des offres retenues qu’elle n’a au demeurant pas demandé.

Par un mémoire enregistré le 27 février 2015 le groupement Coiro Forez – Coiro TP, représenté par Me Monod, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Chazelle en application des dispositions de l’article L. 761­1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— la requête est irrecevable, l’offre de la requérante ayant été écartée comme irrégulière ;

— il a justifié qu’il possédait les qualifications requises et la procédure ayant été régulièrement conduite, la société Chazelle n’avait pas un droit acquis à conserver ce marché.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

le code des marchés publics ;

le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Verley­Cheynel, vice­président, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties de l’audience publique du 2 mars 2015 à 11 heures 30, au cours de laquelle, après rapport de l’affaire, ont été entendus :

— Me Cavrois, de la Selarl CJA Public, représentant la société Chazelle, qui a indiqué abandonner son moyen relatif aux capacités techniques de l’attributaire.

— Me Nguyen, représentant la commune de Saint-Etienne,

— Me Monod, représentant le groupement Coiro Forez et Coiro TP.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 551-1 et suivants du code de justice administrative :

Aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, ou la délégation d’un service public./ Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ». Aux termes de l’article L. 551-2 du même code : « I.-Le juge peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l’exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l’emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. » ; que, selon l’article L. 551-10 du même code : « Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L. 551-1 et L. 551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par le manquement invoqué (…) ». En vertu des dispositions précitées, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles susceptibles d’être lésées par de tels manquements. Il appartient dès lors au juge des référés précontractuels de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente. Un candidat dont l’offre est irrégulière et doit être rejetée pour ce motif, n’est pas susceptible d’être lésé par les manquements qu’il invoque, sauf si cette irrégularité est le résultat de l’un de ces manquements.

La ville de Saint-Etienne a lancé une consultation en vue de l’attribution d’un marché à bons de commandes ayant pour objet les travaux de maintenance dans les bâtiments de la ville. S’agissant des lots n°11 à 16, concernant les prestations de maçonnerie pour les secteurs 1 à 6, la société Chazelle, qui avait déposé une offre pour chacun, a été informée par courrier du 3 février 2015 que ses offres avaient été écartées comme irrégulières et non classées .

En premier lieu, aux termes du I de l’article 35 du code des marchés publics : « 1° (…) Une offre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation (…) ». Aux termes du III de l’article 53 du code des marchés publics : « Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. (…) ». Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables. Est notamment irrégulière une offre qui, à défaut de contenir toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation, est incomplète.

Il est constant que le règlement de la consultation imposait la fourniture d’un bordereau de prix unitaires, comportant plusieurs centaines de rubriques et que les candidats n’avaient pas à choisir entre plusieurs options techniques pour élaborer leur offre. La société requérante, qui s’est abstenue de remplir sept de ces rubriques, fait valoir que le pouvoir adjudicateur ayant omis pour celles-ci de préciser l’unité de valeur, elle aurait été empêchée d’en indiquer le prix, faute d’être en capacité de dire si l’unité de valeur devait être « U, m2, m3, Kg. ou tout autre unité ». Il résulte toutefois de l’instruction que, alors que les rubriques litigieuses étaient respectivement les suivantes : « 15.6.1.3 couvercle béton pour regard 500x500 » , « 15.6.1.7 couvercle béton pour regard 600x600 », « 15.6.2.3 couvercle pvc pour regard 300x300 », « 15.6.2.4 grille pour regard 300x300 » , « 15.6.2.7 couvercle pvc pour regard 400x400 », « 17.3.2.1 [percement ] pour porte 1 vantail » et « 17.3.4.3 [dans mur de 20 cm d’épaisseur] Ouverture de 1,00x2,00 m ht », la société requérante ne peut sérieusement soutenir qu’elle n’était pas en mesure de déterminer une unité de valeur utile. Dans ces conditions, si le pouvoir adjudicateur n’aurait pu reprocher à la société Chazelle d’avoir adopté l’unité de valeur qu’elle aurait d’elle-même précisée, les documents de la consultation n’étaient pas entachés d’une imprécision de nature à l’induire en erreur sur l’obligation de renseigner l’intégralité des prix du BPU. Ainsi la requérante n’est pas fondée à soutenir qu’elle pouvait pour ce seul motif se dispenser de renseigner dans le bordereau des prix unitaires les prix qu’elle proposait pour ces sept rubriques dans le cadre de son offre. La ville de Saint-Etienne qui n’était pas tenue d’inviter la société Chazelle à compléter son offre a pu, à bon droit, regarder celle-ci comme incomplète et donc irrecevable.

Il résulte de ce qui précède que la société requérante, qui ne peut demander au pouvoir adjudicateur de lui communiquer , sur le fondement de l’article 83 du code des marchés publics, les caractéristiques et avantages de l’offre retenue, n’est pas fondée à soutenir qu’en rejetant son offre, la ville de Saint-Etienne a manqué aux obligations de publicité et de mise en concurrence qui étaient les siennes. Elle n’est en conséquence pas fondée à demander l’annulation de la procédure de passation du marché.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Etienne, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la société Chazelle au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Etienne et par le groupement Coiro Forez – Coiro TP tendant au bénéfice des mêmes dispositions.

ORDONNE

Article 1er : La requête de la société Chazelle est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Etienne et du groupement Coiro Forez – Coiro TP tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 La présente ordonnance sera notifiée à la société Chazelle, à la commune de Saint-Etienne, à la société Brtech, au groupement Coiro Forez – Coiro TP et à la société Lana.

Fait à Lyon, le 6 mars 2015

Le juge des référés, Le greffier,

G.Verley-Cheynel S. Méthé

La République mande et ordonne au préfet de la Loire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier

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