Tribunal administratif de Montreuil, 19 mai 2011, n° 1009245

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Montreuil, 19 mai 2011, n° 1009245
Juridiction : Tribunal administratif de Montreuil
Numéro : 1009245
Décision précédente : Tribunal administratif de Montreuil, 6 janvier 2010, N° 0812787

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MONTREUIL

N° 1009245

___________

PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS

c. / commune de Stains

__________

Mme Dibie

Rapporteur

___________

M. Lamy

Rapporteur public

___________

Audience du 5 mai 2011

Lecture du 19 mai 2011

___________

135-01-015-02-01

135-02

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Montreuil

(2e chambre)

Vu la requête, enregistrée le 3 septembre 2010, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au tribunal d’annuler la décision par laquelle le maire de Stains a refusé de mettre en œuvre le service d’accueil institué pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire par la loi n° 2008-790 du 20 août 2008, lors de la grève du 7 septembre 2010 ;

Il soutient que le refus, par le maire de Stains, de mettre en place le service d’accueil des élèves pour la grève du 7 septembre 2010 méconnaît les articles 2, 5, 7 et suivants de la loi n° 2008-790 du 20 août 2008 ;

Vu le jugement n° 0812787 rendu le 7 janvier 2010 par le Tribunal administratif de Montreuil ;

Vu les jugements n°s 1000428, 1002193, 1002672, 1006673 et 1006746 rendus le 7 octobre 2010 par le Tribunal administratif de Montreuil ;

Vu l’ordonnance n° 1009244, en date du 6 septembre 2010, par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Montreuil a suspendu l’exécution de la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2010, présenté pour la commune de Stains, par Me Porcheron, qui conclut, à titre principal, à l’irrecevabilité du déféré formé par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle oppose les fins de non-recevoir tirées de l’irrecevabilité de la requête en raison de l’absence de décision de refus opposée par son maire, puisqu’il se propose, dans sa réponse du 3 septembre 2010 au courrier de l’inspecteur d’académie, d’établir une liste de personnes susceptibles d’assurer le service minimum d’accueil et fait part de l’impossibilité de transmettre une liste préparatoire opérationnelle pour le 7 septembre 2020, le préfet ne pouvant se prévaloir d’un « refus de principe », de l’absence de justification par le préfet que les conditions de mise en place du service minimum d’accueil sont réunies, la loi n’ayant pas imposé aux maires de mettre en place un dispositif permanent constituant une intrusion de l’administration dans le fonctionnement syndical et portant atteinte au droit de grève, et du fait que le déféré est dirigé uniquement contre le maire et non contre la commune qui n’est pas partie à l’instance ; elle fait valoir que la requête est mal fondée, les conditions de l’article L. 1333-4 du code de l’éducation n’étant pas remplies ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et en particulier ses articles 61-1 et 72 ;

Vu la loi n° 2008-790 du 20 août 2008 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l’éducation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu, au cours de l’audience publique du 5 mai 2011 :

— le rapport de Mme Dibie, rapporteur ;

— les conclusions de M. Lamy, rapporteur public ;

— et les observations de Me Toullet substituant Me Porcheron, pour la commune de Stains ;

Considérant que la loi n° 2008-790 du 20 août 2008 a inséré dans le titre III du livre Ier du code de l’éducation un chapitre 3 intitulé : « L’accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires «, applicable à compter du 1er septembre 2008 ; qu’aux termes du nouvel article L. 133-3 du code de l’éducation : « En cas de grève des enseignants d’une école maternelle ou élémentaire publique, les enfants scolarisés dans cette école bénéficient gratuitement, pendant le temps scolaire, d’un service d’accueil qui est organisé par l’Etat, sauf lorsque la commune en est chargée en application du quatrième alinéa de l’article L. 133-4 » ; qu’aux termes des quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 133-4 du même code : « La commune met en place le service d’accueil à destination des élèves d’une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa est égal ou supérieur à 25 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d’enseignement dans cette école. / Les familles sont informées des modalités d’organisation du service d’accueil par la commune et, le cas échéant, par les maires d’arrondissement. (…) » ; que l’article L. 133-7 dudit code prévoit que « Le maire établit une liste des personnes susceptibles d’assurer le service d’accueil prévu à l’article L. 133-4 en veillant à ce qu’elles possèdent les qualités nécessaires pour accueillir et encadrer des enfants. / Cette liste est transmise à l’autorité académique (…) » ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Stains :

Considérant que le préfet tient des dispositions de l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, et, plus généralement, du dernier alinéa de l’article 72 de la Constitution lui donnant « dans les collectivités territoriales de la République, (…) la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois », la faculté de former un recours pour excès de pouvoir, en invoquant tout moyen, de légalité interne aussi bien que de légalité externe, à l’encontre de tous les actes des collectivités territoriales ;

Considérant que la commune de Stains fait valoir que le déféré formé par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est irrecevable, dès lors qu’elle n’a pas pris de décision ;

Considérant qu’aux termes de son déféré, le préfet demande l’annulation de la décision par laquelle le maire de Stains aurait refusé de mettre en œuvre le service d’accueil, institué pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire par la loi susvisée du 20 août 2008, en vue du mouvement de grève du 7 septembre 2010 ;

Considérant, en premier lieu, qu’il est constant que le maire de Stains n’a pris aucune décision expresse de refus de mettre en œuvre le service minimum d’accueil des élèves lors du mouvement de grève du 7 septembre 2010 ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour caractériser l’existence d’une telle décision de refus, le préfet de la Seine-Saint-Denis fait valoir que le maire n’a pas répondu à deux lettres circulaires en date du 20 août 2010, par lesquelles l’inspecteur d’académie lui demandait de lui « confirmer [son] intention [en ce qui concerne la mise en œuvre du service minimum d’accueil], pour la prochaine mobilisation affectant l’Education nationale qui est prévue le 7 septembre 2010 » ; que le préfet invoque, également, la circonstance que la commune de Stains n’aurait pas justifié des dépenses engagées au titre du service minimum d’accueil lors des précédentes journées de grève ;qu’il ressort toutefois des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le préfet de la Seine-Denis, le maire de Sains a répondu auxdites lettres circulaires par un courrier en date du 3 septembre 2010, en informant l’inspecteur d’académie que les informations relatives aux taux d’enseignants grévistes ne lui avaient pas été communiquées, et proposant d’établir une « liste préparatoire des personnes susceptibles d’accueillir et d’encadrer les enfants des écoles de la ville dans l’hypothèse où la totalité des enseignants seraient en grève » ; que ces circonstances ne révèlent ni l’existence d’une décision de principe du maire de Stains de refus d’organiser le service d’accueil prévu par la loi du 20 août 2008 précitée, ni l’existence d’une décision de cette commune de ne pas mettre en place ledit service d’accueil lors de la grève du 7 septembre 2010 ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte des dispositions de l’article L. 133-4 du code de l’éducation qu’il appartient à l’autorité administrative de communiquer sans délai au maire, pour chaque école, le nombre de personnes ayant déclaré, au moins quarante-huit heures auparavant, leur intention de participer à la grève ; qu’en effet, en vertu des termes précités du même article, la commune n’est compétente pour mettre en place le service d’accueil à destination des élèves d’une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire que « lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève (…) est égal ou supérieur à 25 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d’enseignement dans cette école » ; qu’en l’espèce, le préfet n’établit ni que le nombre des personnes se déclarant grévistes, relevé pour chaque école, ait atteint le seuil au-delà duquel la commune est compétente pour mettre en œuvre le service d’accueil, ni qu’il ait averti le maire de la commune, sans délai, qu’il lui appartenait de mettre en œuvre ledit service ; qu’ainsi, à la date du déféré du préfet, la commune ne disposait pas des éléments permettant de savoir si les prescriptions de la loi lui étaient ou non applicables pour la journée de grève prévue le 7 septembre 2010 ; que, faute de disposer de ces informations, la commune n’était donc pas en mesure de se prononcer utilement sur la mise en place du service d’accueil ; qu’elle n’a donc pas pris davantage de décision à ce titre ;

Considérant, enfin, que le préfet soutient que le maire n’a pas transmis à l’autorité administrative, comme lui en fait obligation l’article L. 133-7 précité du code de l’éducation, la liste des personnes susceptibles d’assurer le service minimum d’accueil, liste qu’aux termes du même article il est tenu d’établir ;

Considérant que l’établissement et la transmission de cette liste, alors même qu’ils s’insèrent dans la procédure conduisant à la mise en place du service d’accueil, constituent des mesures auxquelles le législateur a entendu conférer le caractère d’une obligation légale ; que leur absence présente le caractère d’une décision susceptible d’être déférée au juge par le représentant de l’Etat dans le cadre du contrôle de légalité ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’affaire, de regarder le déféré du préfet comme également dirigé contre la décision par laquelle le maire de Stains a refusé d’établir et de transmettre la liste des personnes susceptibles d’assurer le service minimum d’accueil ; qu’en ce qui concerne ces dernières conclusions, la fin de non-recevoir opposée en défense ne peut qu’être écartée ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu’il résulte de la combinaison des dispositions précitées du code de l’éducation issues de la loi susvisée du 20 août 2008 qu’en cas de grève d’au moins un quart du personnel exerçant des fonctions d’enseignement, il appartient aux communes de mettre en place un service d’accueil des élèves scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires publiques situées sur leur territoire ; que, dans cette perspective, il incombe aux maires d’établir préalablement une liste des personnes susceptibles d’assurer ce service d’accueil, en veillant à ce que ces personnes possèdent les qualités nécessaires pour accueillir et encadrer des enfants sans que ne soient toutefois exigées des conditions spécifiques de compétence ou de diplôme ;

Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Stains aurait transmis la liste susmentionnée ; que la décision du maire de transmettre une liste préparatoire non opérationnelle pour le jour de la grève du 7 septembre 2010 ne satisfait pas aux exigences imposées par les dispositions précitées de l’article L. 133-7 précité du code de l’éducation ; que cette décision a, dès lors, directement méconnu les dispositions législatives précitées ; qu’elle ne peut qu’être annulée ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Stains demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision par laquelle le maire de Stains a refusé d’établir et de transmettre la liste des personnes susceptibles d’assurer le service minimum d’accueil est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Stains au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS et à la commune de Stains.

Copie en sera adressée au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Délibéré après l’audience du 5 mai 2011, à laquelle siégeaient :

M. Formery, président,

Mme Dibie, premier conseiller,

M. Fuchs, conseiller,

Lu en audience publique le 19 mai 2011.

Le rapporteur, Le président,

Signé Signé

A. Dibie S-L. Formery

Le greffier,

Signé

B. Bichaoui

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Tribunal administratif de Montreuil, 19 mai 2011, n° 1009245