Tribunal administratif de Nancy, 4 novembre 2020, n° 2002618

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blog.landot-avocats.net · 17 novembre 2022

La CJUE pose que le droit de l'Union européenne s'oppose à une législation nationale imposant une transmission généralisée de toute information communiquée par des soumissionnaires à la seule exception des secrets d'affaires… Le droit de l'Union protège donc potentiellement que soit conservées secrètes d'autres données que celles correspondant au seul secret des affaires. Profitons en pour refaire un point un peu large sur ce sujet : I. UN RÉGIME MULTIFORME QUI AVAIT PU SEMBLER (à tort) SE CRISTALLISER AUTOUR DU SECRET DES AFFAIRES ET DES USAGES QUI EN SONT FAITS EN RÉFÉRÉ Un secret à …

 

association-idpa.com · 27 avril 2022

Extrait de la Gazette n°48- Mars 2022 Par une décision en date du 10 février 2022 [1], le Conseil d'État a jugé que l'obligation de confidentialité imposée aux maîtres d'ouvrage et à leurs assistants devait être prise en compte dans l'appréciation du risque d'une atteinte imminente au secret des affaires. Dans le présent dossier, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre / Abymes a conclu un contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) avec la société ACAOP pour la passation des marchés d'assurance du groupement hospitalier territorial de la Guadeloupe. Le 10 mai …

 

association-idpa.com · 27 avril 2022

Extrait de la Gazette n°48- Mars 2022 Par une décision en date du 10 février 2022 [1], le Conseil d'État a jugé que l'obligation de confidentialité imposée aux maîtres d'ouvrage et à leurs assistants devait être prise en compte dans l'appréciation du risque d'une atteinte imminente au secret des affaires. Dans le présent dossier, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre / Abymes a conclu un contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) avec la société ACAOP pour la passation des marchés d'assurance du groupement hospitalier territorial de la Guadeloupe. Le 10 mai …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Nancy, 4 nov. 2020, n° 2002618
Juridiction : Tribunal administratif de Nancy
Numéro : 2002618

Texte intégral

DE NANCY COPIE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE N° 2002618

Société Hospitalière d’Assurances Mutuelles (SHAM) AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. A… C…

Juge des référés

Le juge des référés

Ordonnance du 4 novembre 2020

39-08-015-01

с

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 21 octobre et 2 novembre 2020, la société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM), représentée par Me D…, demande au juge des référés:

1°) d’annuler la procédure de passation lancée par le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy ayant pour objet des prestations d’assurance pour les 11 établissements membres du groupement hospitalier territorial Sud-Lorraine, de l’EHPAD « Sœur B… » G… et le groupement de coopération sanitaire Sud Lorraine, en ce qui concerne les lots 1 à

10, à l’exception des lots 5, 6 et 10;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Nancy la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

en confiant à M. E…, dirigeant de la société ACAOP, une mission d’assistance à la W

maîtrise d’ouvrage dans la procédure de passation attaquée, alors que ce dernier est en situation de conflit d’intérêts, le CHRU a méconnu le principe d’impartialité et les dispositions de l’article L. 2141-10 du code de la commande publique ;

-la participation à la consultation litigieuse de M. E… méconnaît le principe d’égalité de traitement à son détriment.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2020, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy, représenté par Me F…, demande au juge des référés:


2 N° 2002618

1°) de rejeter la requête de la SHAM, ou, subsidiairement, de limiter sa décision à une injonction d’écarter l’assistant à maîtrise d’ouvrage du CHRU de Nancy de cette phase et des phases postérieures ;

2°) de mettre à la charge de la société requérante une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que la SHAM ne démontre pas l’existence actuelle

d’un intérêt lésé ;

- il a mis en œuvre toutes les garanties visant à prévenir tout risque de conflit d’intérêts ;

- il a respecté entre les candidats un strict principe d’égalité en garantissant à tous les soumissionnaires l’accès à la même information et en procédant à des réponses circonstanciées ;

- le CHRU n’a pas souhaité la présence de l’AMO lors de la consultation par les soumissionnaires des documents dans la dataroom, ceux-ci n’ayant été reçus que par le personnel de l’établissement ; rien ne permet de soutenir que le CHRU aurait fait preuve d’une quelconque partialité dans le cadre de cette procédure; si le juge des référés devait considérer que la procédure conduite risquerait d’être

-

entachée d’irrégularité en cas de participation de la société ACAOP à l’analyse des offres, il lui sera demandé de n’enjoindre au CHRU d’écarter la société ACAOP de cette phase, sans remettre en cause l’intégralité de la procédure.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu:

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné M. A… C…, vice-président, en application de l’article

L. 511-2 du code de justice administrative pour statuer sur les demandes de référés.

Les parties ont été convoquées à une audience publique le 3 novembre 2020 à 11h00.

Ont été entendus, au cours de cette audience :

- le rapport de M. A… C…, juge des référés,

- les observations de Me D…, représentant la SHAM,

- et les observations de Me F…, représentant le CHRU de Nancy.

La clôture d’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience à 11h45.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy a lancé une consultation en qualité d’établissement support du groupement hospitalier territorial Sud

Lorraine dont l’objet portait sur des prestations d’assurance pour les onze établissements membres du groupement, ainsi que pour l’EHPAD < Sœur B… » G… et pour le groupement de



N° 2002618 3

coopération sanitaire « Blanchisserie Sud Lorraine ». Par la présente requête, la société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM) demande au juge des référés d’annuler la procédure de passation ainsi lancée.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. L’article L. 551-1 du code de justice administrative dispose que : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation (…). Le juge est saisi avant la conclusion du contrat »>. Aux termes de l’article L. 551-2 du même code : « I.- Le juge peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l’exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l’emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations (…)». Il appartient au juge administratif, saisi en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l’administration. En vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d’être lésées par de tels manquements. Il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente.

3. Aux termes de l’article L. 2141-10 du code de la commande publique : « L’acheteur peut exclure de la procédure de passation du marché les personnes qui, par leur candidature, créent une situation de conflit d’intérêts, lorsqu’il ne peut y être remédié par d’autres moyens. /

Constitue une telle situation toute situation dans laquelle une personne qui participe au déroulement de la procédure de passation du marché ou est susceptible d’en influencer l’issue a, directement ou indirectement, un intérêt financier, économique ou tout autre intérêt personnel qui pourrait compromettre son impartialité ou son indépendance dans le cadre de la procédure de passation du marché ». Le principe d’impartialité, principe général du droit, s’impose au pouvoir adjudicateur comme à toute autorité administrative. Sa méconnaissance est constitutive

d’un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence.

4. La société requérante soutient qu’en confiant à M. E…, dirigeant de la société

ACAOP, une mission d’assistance à la maîtrise d’ouvrage dans la procédure de passation en litige, alors que celui-ci se trouve en situation de conflit d’intérêts, le CHRU de Nancy a méconnu les dispositions de l’article L. 2141-10 du code de la commande publique et le principe

d’impartialité.

5. La société requérante, qui justifie à la fois de l’intensité et du caractère récent des liens qui unissent M. E… et la société BEAH, fréquemment en concurrence avec la SHAM pour l’attribution de marchés publics d’assurance de centres hospitaliers, et de l’animosité particulière avec laquelle M. E… s’exprime à l’égard de la SHAM, établit avec un degré de vraisemblance



N° 2002618

suffisant que la collaboration de M. E… comme assistant à la maîtrise d’ouvrage pour l’analyse des offres des candidats présente un risque d’atteinte au principe d’impartialité et de méconnaissance des dispositions précitées à l’article L. 2141-10 du code de la commande publique.

6. Toutefois, un tel manquement n’est pas encore constitué à la date de la présente ordonnance dès lors que, par une ordonnance n° 2002619 du 26 octobre 2020, le juge des référés du tribunal a, d’une part, suspendu l’analyse des candidatures et des offres de la SHAM sur l’ensemble des lots auxquels elle a candidaté, d’autre part enjoint au CHRU de Nancy d’interdire l’accès, par tout moyen, à M. E… ou à toute personne travaillant au sein de la société ACAOP, à

l’ensemble des documents déposés par la SHAM jusqu’à la notification de la présente ordonnance.

7. Par ailleurs, il ne résulte pas de l’instruction que la mission de M. E… ait pu, avant le stade de l’analyse des offres, exercer une quelconque influence sur l’issue de la consultation. En particulier, si la SHAM fait valoir qu’une visite technique des sites a été organisée sous la forme de « data room » la veille de la date limite de réception des offres, une fois l’offre de la SHAM déposée, il n’est pas contesté que la date limite de dépôt des offres a ensuite été reportée et qu’il était loisible à la SHAM, si elle le jugeait utile, d’ajuster son offre en fonction des éléments présentés au cours de ces data room, auxquelles elle a pu participer. Enfin, la circonstance que ces data room » n’aient porté que sur des sinistres gérés par la SHAM n’est pas de nature à démontrer que le CHRU aurait manqué au principe d’impartialité dès lors que l’analyse des sinistres a nécessairement porté sur les dossiers qu’elle gérait, celle-ci étant attributaire du marché analogue sur la période comprise entre 2012 et 2018.

8. Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu de considérer, eu égard au stade de la procédure auquel se rapporte le risque allégué, que la société requérante ne se prévaut d’aucun manquement constitué, mais simplement d’un risque que le CHRU, désormais alerté, reprenne la procédure de passation au stade de l’analyse des offres en y associant M. E…. Dès lors, la SHAM ne peut être regardée comme se prévalant d’un manquement susceptible de l’avoir lésée ou risquant de la léser. Ses conclusions à fin d’annulation doivent, en conséquence, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHRU, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la SHAM demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de la SHAM la somme demandée par le CHRU de Nancy au même titre.

ORDONNE:

Article 1 : La requête de la SHAM est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du CHRU de Nancy présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


5 N° 2002618

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société hospitalière d’assurances mutuelles et au centre hospitalier régional universitaire de Nancy.

Fait à Nancy le 4 novembre 2020.

Le juge des référés,

O. Di C…

La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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