Tribunal administratif de Nantes, 6ème chambre, 29 décembre 2022, n° 1807007

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 6e ch., 29 déc. 2022, n° 1807007
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 1807007
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 juillet 2018, 16 mai 2019 et 4 mai 2021, Mme A B, représentée par Me Rineau, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de condamner le service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de Loire-Atlantique à lui verser la somme de 83 966,98 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2018 et de leur capitalisation, au titre de l’indemnisation des préjudices résultant de sa maladie professionnelle ;

2°) de mettre à la charge du SDIS de Loire-Atlantique la somme de 1 500 euros au titre des dépens ;

3°) de mettre à la charge du SDIS de Loire-Atlantique la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

— compte tenu de la maladie professionnelle constatée le 1er février 2004 reconnue par le SDIS de Loire-Atlantique et confirmée par l’expert désigné par ce tribunal, elle est en droit de demander l’indemnisation de l’ensemble des préjudices en résultant sur le fondement de la responsabilité sans faute ;

— ses souffrances endurées, que l’expert désigné par le tribunal a estimé assez importantes, doivent être indemnisées à hauteur de 20 000 euros ;

— son déficit fonctionnel temporaire pendant cent quarante-huit mois doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ;

— son déficit fonctionnel permanent, évalué à 12 % par l’expert désigné par le tribunal qui a écarté l’existence d’autres pathologies expliquant sa maladie professionnelle, doit être indemnisé à hauteur de 15 000 euros ;

— l’expert désigné par le tribunal ayant évalué à 3 heures par semaine la nécessité de disposer de l’assistance d’une tierce personne, ce préjudice sera évalué à 35 966,98 euros ;

— son préjudice d’agrément, résultant de la nécessité compte tenu de son état de santé de mettre un terme à ses fonctions électives et à son parcours d’élu local, évalué à 20 % par l’expert désigné par le tribunal, doit être indemnisé à hauteur de 3 000 euros ;

— le rapport de l’expert désigné par le tribunal ayant permis d’évaluer les préjudices, l’expertise présente un lien avec sa demande indemnitaire.

Par des mémoires en défense enregistrés les 5 mars 2019, 4 novembre 2019 et 3 juin 2021, le service départemental d’incendie et de secours de Loire-Atlantique, représentée par Me Bernot, conclut à ce que l’indemnisation de Mme B au titre de la responsabilité sans faute n’excède pas 9 750 euros, à ce que les conclusions tendant au remboursement des dépens soient rejetées et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme B sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

— l’indemnisation due au titre de la responsabilité sans faute ne saurait concerner que la seule pathologie affectant le coude, pour laquelle Mme B a obtenu la reconnaissance d’une maladie professionnelle, et qui n’a entraîné aucun besoin de l’assistance d’une tierce personne ni préjudice d’agrément ;

— l’expertise dont le remboursement des frais est demandé ne présente pas de lien avec la demande indemnitaire de Mme B, qui l’a sollicitée aux seules fin de faire valoir ses droits à une allocation temporaire d’invalidité.

Vu :

— l’ordonnance n° 1701468 du 6 avril 2017 ;

— l’ordonnance du 14 novembre 2017 de taxation des frais d’expertise ;

— les pièces du dossier.

Vu :

— le code de la sécurité sociale ;

— le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

— le décret n° 68-756 du 13 août 1968 ;

— le décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de Mme Diniz, rapporteure publique,

— et les observations de Me Lefebvre, substituant Me Rineau, représentant Mme B, et de Me William, substituant Me Bernot, représentant le SDIS de Loire-Atlantique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 août 2006, Mme B, agent administratif territorial du SDIS 44 depuis le 1er février 2001, a été reconnue comme affectée d’une maladie professionnelle imputable au service constatée le 1er février 2004. Ses arrêts de travail du 31 mars au 1er avril 2004, du 7 au 19 avril 2004, du 1er juin 2004 au 1er novembre 2005 et, après une rechute, du 15 septembre au 15 octobre 2006, ont été reconnus imputables à cette maladie professionnelle. A la suite d’une rechute constatée le 16 juillet 2014, le SDIS a, par un arrêté du 15 décembre 2014, reconnu imputables à cette même maladie professionnelle les arrêts de travail subséquents. Mme B a ensuite été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 27 janvier 2016 à la suite de l’expertise médicale réalisée le 26 janvier 2016 par l’expert désigné par le SDIS. Elle a ensuite repris une activité à compter du 5 septembre 2016 dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique. A la suite du rapport établi le 12 octobre 2017 par l’expert désigné par ce tribunal par une ordonnance n° 1701468 du 6 avril 2017, qui a fixé à 12 % son incapacité permanente partielle, Mme B a, par un courrier du 15 décembre 2017, sollicité l’attribution d’une allocation temporaire d’invalidité qui lui a été refusée. Par un courrier du 18 mai 2018, Mme B a sollicité l’indemnisation du préjudice résultant de sa maladie professionnelle au titre de la responsabilité sans faute à hauteur de 80 966,98 euros. Le SDIS a implicitement rejeté cette demande.

Sur les conclusions à fin d’indemnisation :

En ce qui concerne la responsabilité :

2. Les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d’accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d’invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d’invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l’incidence professionnelle résultant de l’incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l’obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l’invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d’une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l’emploie, même en l’absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu’une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l’ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l’accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l’état d’un ouvrage public dont l’entretien lui incombait.

3. La circonstance que le fonctionnaire victime d’un accident de service ou d’une maladie professionnelle ne remplit pas les conditions auxquelles les dispositions de l’article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 subordonnent l’obtention de l’allocation temporaire d’invalidité, fait obstacle à ce qu’il prétende, au titre de l’obligation de la collectivité qui l’emploie de le garantir contre les risques courus dans l’exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle. En revanche, elle ne saurait le priver de la possibilité d’obtenir de cette collectivité la réparation de préjudices d’une autre nature, dès lors qu’ils sont directement liés à l’accident ou à la maladie.

4. Aux termes de l’article 2 du décret du 2 mai 2005 relatif à l’attribution de l’allocation temporaire d’invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " L’allocation est attribuée aux fonctionnaires maintenus en activité qui justifient d’une invalidité permanente résultant : () b) Soit de l’une des maladies d’origine professionnelle énumérées par les tableaux mentionnés à l’article L. 461-2 du code de la sécurité sociale ; c) Soit d’une maladie reconnue d’origine professionnelle dans les conditions mentionnées aux alinéas 3 et 4 de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, sous réserve des dispositions de l’article 6 du présent décret. Les fonctionnaires justifiant se trouver dans les cas prévus aux b et c ne peuvent bénéficier de cette allocation que dans la mesure où l’affection contractée serait susceptible, s’ils relevaient du régime général de sécurité sociale, de leur ouvrir droit à une rente en application des dispositions du livre IV dudit code et de ses textes d’application « . Aux termes de l’article 5 de ce décret : » Le taux d’invalidité est déterminé compte tenu du barème indicatif prévu à l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. () « Aux termes de l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale : » () Lorsque l’incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum, la victime a droit à une rente égale au salaire annuel multiplié par le taux d’incapacité qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci. () « . Aux termes de l’article R. 434-1 de ce code : » Le taux d’incapacité prévu aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 434-1 et au deuxième alinéa de l’article L. 434-2 est fixé à 10 % « . Aux termes de l’article L. 461-1 du même code : » () Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé. () « . Aux termes de l’article R. 461-8 de ce code : » Le taux d’incapacité mentionné au septième alinéa de l’article L. 461-1 est fixé à 25 % ".

5. Aux termes de l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa version applicable : « () Le taux d’invalidité est déterminé compte tenu d’un barème indicatif fixé par décret. () » Aux termes de l’annexe du décret du 13 août 1968 pris en application de l’article L. 28 (3e alinéa) de la loi n° 64-1339 du 26 décembre 1964 portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraite : « Aux termes mêmes de l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite le présent barème est un barème indicatif. II comporte, par suite, pour toute lésion ou manifestation pathologique qu’il énumère, sauf en certains cas précis et exceptionnels, un taux minimum et un taux maximum d’invalidité, l’un et l’autre de ces taux déterminant strictement la marge dans laquelle les commissions de réforme compétentes fixent le pourcentage d’invalidité applicable. Toutefois, dans le cas où des lésions présenteraient un caractère particulier, de même que dans celui où il existe des manifestations pathologiques non prévues dans le barème, ce dernier pourra servir de guide pour la fixation du taux d’invalidité. () IV Tendinopathies Atteinte des insertions tendineuses au niveau des jonctions articulaires et de la capsule (origine professionnelle possible pour certaines d’entre elles). () – tendinite de la région du coude (épicondylite – épitrochléite) : ces douleurs rebelles sont favorisées par la répétition des gestes. Noter que les douleurs sont quelquefois très vives, mais n’entraînent jamais de raideur. Caractère souvent chronique et persistant : 0 à 8 %. () ».

6. D’une part, si la commission de réforme, dans ses avis des 13 juillet 2006 et 12 avril 2007, a retenu que la pathologie de Mme B relative à un trouble musculo-squelettique du membre supérieur droit constituait une maladie à caractère professionnel, tant l’expert désigné par le SDIS, qui a qualifié à plusieurs reprises l’épitrochléite affectant le coude droit de Mme B de maladie professionnelle au titre du tableau n° 57-B, que l’expert désigné par le tribunal ont estimé que devait être constatée depuis le 1er février 2004 une maladie professionnelle affectant la requérante.

7. D’autre part, il résulte des compte rendus des examens dont il est fait état dans les rapport d’expertise des 20 octobre 2005, 31 octobre 2014 et 11 février 2016 ainsi que des certificats établis le 3 mars 2004 par son médecin généraliste et le 2 janvier 2017 par sa kinésithérapeute, que Mme B souffre d’une épitrochléite affectant le coude droit mais également d’autres douleurs, notamment au niveau de l’épaule, compatibles avec un syndrome douloureux régional complexe (SDRC). L’expert désigné par le SDIS a estimé de manière constante que la pathologie du coude droit de Mme B résultant d’une épitrochléite relevait d’une maladie professionnelle mais que les autres symptômes, et notamment les douleurs au niveau de l’épaule, résultaient d’une algoneurodystrophie (ancienne dénomination du SDRC), affection non-professionnelle. L’expert désigné par le tribunal ne peut être regardé comme ayant exclu l’existence d’une algoneurodystrophie afin d’expliquer le reste du tableau clinique de Mme B, ayant seulement exclu qu’un tel syndrome puisse expliquer, même en partie, la pathologie affectant son coude. Alors que ce dernier n’a aucunement distingué entre les différentes pathologies affectant le membre supérieur droit de Mme B en fixant notamment un taux d’incapacité permanente partielle de 12 %, les pièces du dossier médical de la requérante mentionnées ci-dessus tendent à confirmer les conclusions cohérentes et réitérées de l’expert désigné par le SDIS selon lesquelles la pathologie affectant l’épaule de Mme B résulte d’une algoneurodystrophie et ne relève pas d’un tableau de maladie professionnelle ni ne présente une origine professionnelle et que le taux d’incapacité permanente partielle s’élève à 5 % au titre de la seule épitrochléite du coude droit. Dans ces conditions, seule la pathologie affectant le coude de Mme B constatée le 1er février 2004 relève d’une maladie professionnelle.

8. Alors même que le SDIS de Loire-Atlantique a opposé un refus à la demande de la requérante tendant au versement de l’allocation temporaire d’invalidité, dont le tribunal prononce ce jour l’annulation par un jugement n° 1807006, Mme B peut prétendre à l’indemnisation des préjudices d’une autre nature que ceux liés aux pertes de revenus et à l’incidence professionnelle directement liés à la maladie professionnelle constatée le 1er février 2004 affectant uniquement son coude droit.

En ce qui concerne les préjudices temporaires :

9. Compte tenu de ce qui a été dit au point 7, la date de consolidation fixée par l’expert désigné par le tribunal concerne l’ensemble des pathologies affectant le membre supérieur droit de Mme B. Dans ces conditions, et conformément au certificat médical du médecin généraliste de Mme B et aux rapports du médecin désigné par le SDIS, la date de consolidation de la pathologie affectant le coude droit, seule à avoir été reconnue maladie professionnelle, doit être fixée au 26 janvier 2016.

S’agissant du déficit fonctionnel temporaire :

10. Il résulte de l’instruction que les gênes entraînées par les douleurs au coude droit n’ont pas cessé depuis 2004 et ont été prises en charge médicalement. Le déficit fonctionnel temporaire de Mme B peut être évalué à 10 % lors des périodes pendant lesquelles elle n’a pas été en arrêt de travail lié à la maladie professionnelle, soit d’avril 2008 au 15 juillet 2014, date de sa rechute, et à 25 % lors de ses arrêts de travail liés à cette maladie, soit du 1er février 2004 à mars 2008 et du 16 juillet 2014 au 26 janvier 2016. Il sera fait une juste appréciation de son préjudice en allouant à Mme B la somme totale de 7 350 euros.

S’agissant des souffrances endurées :

11. Il résulte du rapport de l’expert désigné par le tribunal, qui a noté qu’existaient des points douloureux épicondyliens latéraux et médiaux à droite, que les douleurs induites par la pathologie affectant le coude de Mme B sont évaluées à 2/4. Il résulte de l’instruction que Mme B a subi pendant plusieurs mois ce type de douleurs, notamment lors de sa rechute, et a dû se voir prescrire des anti-inflammatoires et de nombreuses séances de kinésithérapie. Il sera fait une juste appréciation de son préjudice en allouant à Mme B la somme de 5 000 euros.

En ce qui concerne les préjudices permanents :

S’agissant du déficit fonctionnel permanent :

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le taux d’incapacité permanente de 12 % fixé par l’expert désigné par le tribunal ne concerne pas uniquement la pathologie affectant le coude droit de Mme B. A supposer même qu’il puisse être regardé comme ne concernant que la pathologie affectant le coude de la requérante, ce taux excède dans des proportions importantes celui fixé par le barème indicatif du décret du 13 août 1968 sans que ne soit justifié un tel dépassement, notamment par l’existence de lésions présentant un caractère particulier ou de manifestations pathologiques non prévues dans le barème, qui mentionne des douleurs rebelles, quelque fois très vives, favorisées par la répétition des gestes, n’entraînant pas de raideur et présentant un caractère chronique et persistant, Mme B présentant précisément ce type de symptômes. Dans ces conditions, le taux d’incapacité permanente partielle subie par Mme B en raison de la seule maladie professionnelle constatée le 1er février 2004 doit être fixé à 5 %. Il sera fait une juste appréciation du déficit fonctionnel permanent de Mme B, âgée de près de 57 ans à la date de la consolidation, en lui allouant à ce titre une somme de 5 400 euros.

S’agissant de l’assistance à tierce personne :

13. Mme B ne sollicite au titre de l’indemnisation de son besoin d’assistance d’une tierce personne que le versement d’un capital. Il résulte de l’instruction que Mme B emploie une aide à domicile pour le ménage et le repassage trois heures par semaine. Si l’expert désigné par le tribunal a retenu un tel besoin au titre de l’assistance à tierce personne, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que l’évaluation de ce préjudice ne porte pas uniquement sur la pathologie affectant le coude droit. Il sera fait une juste appréciation du préjudice de Mme B en lien avec la maladie professionnelle affectant son seul coude droit en évaluant ce besoin à 1 heure par semaine et le montant annuel à 767 euros, calculé sur la base d’un taux horaire de 13 euros de l’heure compte tenu du salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut augmenté des charges sociales et de l’indemnité légale de congés payés. Pour déterminer le préjudice subi par Mme B, il sera pris en compte le coefficient de rente viagère, pour une femme de 63 ans à la date du présent jugement, de 24,038 selon le barème de capitalisation reposant sur la table de mortalité 2017-2019 pour les femmes avec un taux d’intérêt à 1 %. Par suite, la requérante peut prétendre à ce titre à l’allocation de la somme de 18 437 euros.

S’agissant du préjudice d’agrément :

14. Si Mme B soutient qu’elle subit un préjudice d’agrément dans la mesure où elle a dû renoncer à se présenter aux élections municipales en 2020 alors qu’elle était adjointe au maire de la commune de Fay-de-Bretagne depuis 2014, ce préjudice, à le supposer même établi, est au nombre de ceux pris en compte au titre du déficit fonctionnel temporaire.

15. Il résulte de ce qui vient d’être dit que Mme B est fondée à demander le versement par le SDIS de Loire-Atlantique de la somme de 36 187 euros augmentée des intérêts à compter du 22 mai 2018, date de réception de sa réclamation préalable, en réparation des préjudices subis en raison de sa maladie professionnelle.

16. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d’une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu’à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois le 26 juillet 2017 dans la requête n° 1807007. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 22 mai 2019, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d’intérêts, ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les dépens :

17. Aux termes de l’article R. 761-1 du code de justice administrative : « Les dépens comprennent les frais d’expertise () ». Aux termes de l’article R. 621-13 du même code : « () Dans le cas où les frais d’expertise mentionnés à l’alinéa précédent sont compris dans les dépens d’une instance principale, la formation de jugement statuant sur cette instance peut décider que la charge définitive de ces frais incombe à une partie autre que celle qui a été désignée par l’ordonnance mentionnée à l’alinéa précédent ou par le jugement rendu sur un recours dirigé contre cette ordonnance. () ».

18. Contrairement à ce que fait valoir le SDIS de la Loire-Atlantique, l’expertise ordonnée par le tribunal le 6 avril 2017 a été jugée utile dans la perspective d’un éventuel recours en annulation et/ou d’un recours indemnitaire qui serait engagée par Mme B à l’encontre de son employeur. Les frais et honoraires de l’expert ont été taxés et liquidés à la somme de 1 500 euros par une ordonnance du 14 novembre 2017 du premier vice-président de ce tribunal. Il y a lieu de mettre cette somme à la charge définitive du SDIS de Loire-Atlantique en application des dispositions de l’article R. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le SDIS de Loire-Atlantique au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du SDIS de Loire-Atlantique une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le SDIS de Loire-Atlantique est condamné à verser à Mme B la somme de 36 187 euros (trente-six mille cent quatre-vingt-sept euros) augmentée des intérêts à compter du 22 mai 2018 et de la capitalisation des intérêts à compter du 22 mai 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : Les frais d’expertise liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros sont définitivement mis à la charge du SDIS de Loire-Atlantique.

Article 3 : Le SDIS de Loire-Atlantique versera à Mme B une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme A B et au service départemental d’incendie et de secours de Loire-Atlantique.

Délibéré après l’audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mlle Wunderlich, présidente,

Mme Le Lay, première conseillère,

Mme Sainquain-Rigollé, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2022.

La rapporteure,

H. CLa présidente,

A.-C. WUNDERLICHLa greffière,

L. BILLAUD

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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