Tribunal administratif de Nîmes, 31 décembre 2010, n° 0900157

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nîmes, 31 déc. 2010, n° 0900157
Juridiction : Tribunal administratif de Nîmes
Numéro : 0900157

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE NÎMES

N° 0900157 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

SOCIETE GRANULATS GONTERO

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


M. X

Président Rapporteur

___________ Le Tribunal administratif de Nîmes

(2ème chambre) M. Peretti Rapporteur public

___________

Audience du 21 décembre 2010 Lecture du 31 décembre 2010 ___________

Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2009, présentée pour la SOCIETE GRANULATS GONTERO, dont le siège est […], par Maître Y ; La SOCIETE GRANULATS GONTERO demande au tribunal :

- d’annuler l’arrêté du préfet du Gard de mise en demeure du 25 novembre 2008 relatif à l’exploitation de la carrière de Saint Geniès de Comolas et Roquemaure, concernant l’impact visuel et l’éboulement sur le parement extérieur nord à la suite du tir de mines du 28 mai 2008 ;

- de condamner l’Etat à lui verser la somme de 5000 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- de condamner l’Etat aux dépens ; La SOCIETE GRANULATS GONTERO soutient que :

- deux éléments font obstacle à ce que le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire soit considéré comme inopérant :

o lorsqu’une règle de compétence ou de procédure a été édictée afin de constituer une garantie pour le destinataire de l’acte, ce qui est le cas en matière d’installations classées où le préfet n’est en situation de compétence liée que lorsque l’inspecteur des installations classées a constaté l’inobservation de conditions légalement imposées à l’exploitant selon la procédure requise par le code de l’environnement ; or force est de constater que l’administration a manifestement violé la procédure contradictoire et a , sans attendre la réception des observations ni même l’expiration du délai fixé pour présenter ses observations pris l’arrêté de mise en demeure ;

o lorsque l’administration, comme en l’espèce, se soumet volontairement à la procédure contradictoire préalablement à la prise d’un arrêté de mise en demeure sur le fondement de l’article L. 514-1 du code de l’environnement, elle doit néanmoins se conformer à cette procédure ;



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- la décision est entachée d’une erreur de droit en ce qu’elle est prise sur le fondement de l’article L. 514-1 du code de l’environnement ; ce n’est qu’en cas de constatation d’une inobservation par l’inspection que le préfet a compétence liée, alors qu’en l’espèce l’inspection a procédé à une appréciation ; l’existence d’une appréciation résulte de la motivation de l’arrêté et de la nature des dispositions prétendument méconnues ; en l’espèce l’existence d’un impact visuel notable procède d’une appréciation ; en l’espèce les dispositions prétendument violées – article 3.11 et 3.6 de l’arrêté d’autorisation – ne présentent pas le caractère de disposition d’une simplicité telle qu’elle ne peut donner lieu qu’à constatation matérielle ;

- l’inspecteur en l’espèce n’a pas constaté l’inobservation de conditions d’exploitation de la carrière ; les articles visés en tant que conditions d’exploitation par l’arrêté de mise en demeure n’ont aucun lien avec le constat de la DRIRE, et à aucun moment la DRIRE ne prétend que l’exploitant violerait ces dispositions, le constat ne portant que sur les conséquences d’un incident du 28 mai 2008 ayant eu pour conséquence un éboulement ; ces articles n’ont aucun lien avec les mises en demeures, n’ayant pas pour objet de prévoir les conditions d’exploitation à la suite d’un tir de mines ;

- l’arrêté est mal fondé ; il s’agit en réalité d’un arrêté de prescriptions complémentaires, qui ne sont d’ailleurs pas justifiées puisqu’à la suite du tir de mines du 28 mai 2008 l’exploitante a pris toutes les dispositions utiles pour remédier à l’incident ; l’administration a été informée par lettre du 2 décembre 2008 que dans le cadre du plan d’exploitation une étude technique et paysagère et de travaux pour le traitement de la falaise nord serait réalisé ; les mesures prescrites portent sur les flancs de barrière qui sont situés hors du périmètre d’exploitation ;

- les délais fixés ne sont pas en rapport avec les mesures à prendre ;

- l’arrêté est entaché de détournement de pouvoir ; l’exploitant est harcelé par la DRIRE et le préfet, et la préfecture ne cache pas son souhait de retirer l’autorisation d’exploitation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2009, présenté par le préfet du Gard , qui conclut au rejet de la requête ; Le préfet fait valoir que :

- le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire est inopérant, le préfet étant en situation de compétence liée ; le délai de huit jours donné dans le courrier du 24 novembre 2008 pour faire part des observations au préfet ne concerne que le rapport de l’inspection ;

- les dispositions de l’article L. 514-1 ont été respectées, l’arrêté constituant un simple rappel des obligations établies par l’arrêté d’autorisation ; le tir de mines du 28 mai 2008 a eu un impact visuel sur le parement extérieur nord de la carrière constaté par l’inspection ; l’article 3.6 de l’arrêté d’autorisation prévoit que toutes dispositions seront prises pour limiter dans toute la mesure du possible l’impact visuel, notamment : les fronts résiduels visibles de l’extérieur de la carrière seront traités dès que possible (vieillissement artificiel) ; en quatre mois aucun traitement n’a été entrepris par l’exploitant pour limiter puis supprimer cet impact ; l’exploitant n’a rien transmis en ce qui concerne l’impact visuel ;

- s’agissant du vieillissement il s’agit de projeter un colorant pulvérisé sur la roche ; un délai de trois mois pour réaliser les travaux était suffisant ;



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- l’administration n’a recherché que l’intérêt général et la sécurité ;

Vu l’ordonnance en date du 23 septembre 2010 fixant la clôture d’instruction au 15 octobre 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 13 octobre 2010, le mémoire présenté pour la SOCIETE GRANULATS GONTERO tendant aux mêmes fins que la requête et à titre subsidiaire à l’abrogation de l’arrêté du 25 novembre 2008 ; La SOCIETE GRANULATS GONTERO soutient que :

- la procédure contradictoire particulière résultant des articles L. 514-1 et L. 514-5 du code de l’environnement n’a pas été respectée, de l’aveu même de l’administration ; en l’espèce le rapport d’inspection du 10 septembre 2008 et deux projets d’arrêté ont été communiqués par courrier du 24 novembre 2008, indiquant un délai de 8 jours pour faire valoir des observations ; le préfet n’a pas attendu l’expiration de délai et a pris son arrêté le 25 novembre 2008, malgré une demande de délai supplémentaire présentée par courrier du 1er décembre et de premières observations datées du 2 décembre ; contrairement aux mentions de l’arrêté attaqué l’exploitant n’a pas été entendu ;

- le préfet reconnaît implicitement que l’article 3.11 de l’arrêté d’autorisation et le premier tiret de l’arrêté de mise en demeure n’ont aucun rapport ; la formulation de l’article 3-6 doit obligatoirement faire l’objet d’une appréciation et non d’un simple constat ; en outre cet article porte sur une obligation de moyen et non de résultat ; les conditions d’exploitation de la carrière n’ont pas été méconnues ; l’arrêté est antérieur à la loi du 17 février 2009 qui a modifié l’article L. 511-1 du code de l’environnement pour viser la protection des paysages ;

- l’arrêté attaqué fixe bien des prescriptions complémentaires puisque la première mise en demeure ne peut être en réalité jamais levée et que la seconde concerne le traitement ponctuel de l’impact visuel à la suite d’un incident ;

- le préfet ne démontre pas que les délais prescrits seraient suffisants ;

- l’expertise ordonnée par le tribunal de céans atteste de la mise en sécurité de la carrière ; le détournement de pouvoir est avéré ;

- à titre subsidiaire, les prescriptions sont respectées et l’arrêté ne peut être qu’abrogé ; l’exploitation reste confinée à l’intérieur de la barrière rocheuse ; afin de réaliser les travaux concernant l’impact visuel, qui font l’objet de la mise en demeure attaquée, il convient de réaliser des travaux dans la zone éboulée des fronts ouest lesquels sont interdits par les arrêtés pris par le préfet le 20 mars 2009 ;

Vu, enregistré le 21 décembre 2010, la note en délibéré présentée pour la SOCIETE GRANULATS GONTERO ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code de justice administrative ;



N°0900157 4

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 décembre 2010 ;

- le rapport de M. X,

- les conclusions de M. Peretti, rapporteur public,

- les observations de Maître AARON, pour la SOCIETE GRANULATS GONTERO,

- et les observations de MM. Z et A, pour le préfet du Gard ;

Considérant qu’à la suite d’un tir de mines effectué le 28 août 2008 l’inspection des installations a constaté, lors de sa visite sur place du 10 septembre 2008, que la SOCIETE GRANULATS GONTERO n’avait pas observé les prescriptions des articles 3. 11 et 3.6 de l’arrêté préfectoral du 4 août 1994, autorisant cette société à exploiter à ciel ouvert une carrière de calcaire et de sables sur le territoire des communes de Saint Geniès de Comolas et de Roquemaure ; que l’article 3.1 Dispositions générales de l’arrêté d’autorisation dispose que « 3.11 l’exploitation se déroulera comme proposé dans l’étude d’impact. La méthode et le phasage d’exploitation prévus dans cette étude seront respectés » et que l’article 3. 6 Dispositions concernant l’impact visuel dispose « Toutes dispositions seront prises pour limiter dans toute la mesure du possible l’impact visuel notamment : les fonts résiduels visibles de l’extérieur de la carrière seront traités dès que possible (vieillissement artificiel), le respect de la limitation de l’exploitation à la cote 130 NGF au Sud et à la cote 115 NGF au Nord prévue dans l’étude d’impact sera suivi avec une attention particulière » ; que par arrêté en date du 25 novembre 2008, qui est la décision attaquée, le préfet du Gard a mis en demeure la SOCIETE GRANULATS GONTERO de respecter ces prescriptions ;

Sur les conclusions présentées à titre principal tendant à l’annulation de l’arrêté attaqué :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 514-1 du code de l’environnement : « I. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu’un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l’inobservation des conditions imposées à l’exploitant d’une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. » et qu’aux termes de l’article L. 514-5 : « Les personnes chargées de l’inspection des installations classées ou d’expertises sont assermentées et astreintes au secret professionnel dans les conditions et sous les sanctions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal et, éventuellement, aux articles 411-1 et suivants du même code. Elles peuvent visiter à tout moment les installations soumises à leur surveillance. Sauf contrôle inopiné, les inspecteurs des installations classées doivent informer l’exploitant quarante-huit heures avant la visite. Lors de la visite, l’exploitant peut se faire assister d’une tierce personne. L’agent de contrôle ne peut emporter des documents qu’après établissement d’une liste contresignée par l’exploitant. La liste précise la nature des documents, leur nombre et s’il s’agit de copies ou d’originaux. Les documents originaux devront être restitués à l’éleveur dans un délai d’un mois après le contrôle. L’exploitant est informé par l’inspecteur des installations classées des suites du contrôle. L’inspecteur des installations classées transmet son rapport de contrôle au préfet et en fait copie simultanément à l’exploitant. Celui-ci peut faire part au préfet de ses observations. Les dispositions des trois précédents alinéas ne sont applicables qu’aux contrôles exercés en application de la présente section. » ;



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Considérant que l’inspection des installations classées a accordé dans le courrier adressé le 24 novembre 2008 à l’exploitant en application de l’article L. 514-5, un délai de huit jours à réception de cette lettre pour faire valoir ses observations auprès du préfet ; que l’arrêté préfectoral attaqué a été pris le lendemain 25 novembre 2008 sans que la SOCIETE GRANULATS GONTERO ait pu faire valoir ses observations ; que la SOCIETE GRANULATS GONTERO est dès lors fondée à soutenir que l’arrêté de mise en demeure du 25 novembre 2008 a été pris sans que soit respectée la procédure contradictoire prévue à l’article L. 514-5 et que l’arrêté encourt dès lors l’annulation ,

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner sur le fondement de ces dispositions l’Etat à verser une somme à la SOCIETE GRANULATS GONTERO ;

Sur les conclusions tendant à l’allocation des dépens :

Considérant que la présente instance n’ayant pas donné lieu à dépens au sens de l’article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions de la SOCIETE GRANULATS GONTERO tendant à ce que l’Etat supporte les dépens ne peuvent qu’être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêté du 25 novembre 2008 mettant en demeure la SOCIETE GRANULATS GONTERO de respecter les articles 3.11 et 3. 6 de l’arrêté d’autorisation du 4 août 1994 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SOCIETE GRANULATS GONTERO sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées, ainsi que ses conclusions relatives aux dépens.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la SOCIETE GRANULATS GONTERO, au ministre de l’écologie, du développement durable , des transports et du logement. Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l’audience du 21 décembre 2010, à laquelle siégeaient : M. X , président, Mme Hogedez, premier conseiller, M. Lafay, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 décembre 2010.

Le président, rapporteur,

L’assesseur le plus ancien dans

l’ordre du tableau ,

signé signé

F. X I. HOGEDEZ



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La greffière,

signé

E. NIVARD

La République mande et ordonne au ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

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