Tribunal administratif de Paris, 5e section - 3e chambre, 26 octobre 2022, n° 2124207

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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 5e sect. - 3e ch., 26 oct. 2022, n° 2124207
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 2124207
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Satisfaction totale
Date de dernière mise à jour : 2 août 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2021, M. A, représenté par Me Cessieux, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 17 mars 2021 par laquelle le préfet de police lui a retiré le bénéfice de la prime « OPJ » et l’a informé de retenues sur traitement visant à rembourser le trop-perçu, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux en date

du 19 octobre 2021 ;

2°) d’enjoindre au préfet de police à lui rembourser le trop-perçu retiré de son traitement à compter du mois de septembre 2020, soit la somme de 240 euros, ainsi que toutes les retenues ultérieures ;

3°) d’enjoindre au préfet de police à le rétablir dans ses droits ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;

— la décision du 17 mars 2021 est entachée d’une erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête est tardive.

Par ordonnance du 29 mars 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 2 mai 2022, 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— le décret n° 2016-1261 du 27 septembre 2016 ;

— le décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique, tenue en présence de Mme Sueur, greffière d’audience :

— le rapport de Mme C,

— et les conclusions de M. Lamy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A, fonctionnaire de police au grade de brigadier-chef et affecté depuis le 2 mai 2007 à la brigade de répression du banditisme de la préfecture de police de Paris, a été habilité, par arrêté de la cour d’appel de Paris en date du 24 février 2010, à exercer les attributions attachées à la qualité d’officier de police judiciaire. A ce titre, il a bénéficié de la prime liée à l’exercice de celles-ci aux fonctionnaires du corps d’encadrement et d’application de la police nationale, dite prime « OPJ », versée trimestriellement. Par ailleurs, au titre de

l’année 2020, il a bénéficié d’une décharge d’activité de service pour mandat syndical de 70 %. Par un courrier du 17 mars 2021, la cheffe du bureau des rémunérations et pensions de la direction des ressources humaines de la préfecture de police l’a informé que, à compter du

1er juillet 2020, il ne pouvait plus bénéficier de la prime « OPJ », qu’il devait percevoir à la place une prime trimestrielle de 150 euros brut appliquée aux fonctionnaires ayant exercé effectivement les attributions d’officier de police judiciaire mais ne remplissant plus les conditions pour continuer à les exercer, et que des retenues seraient opérées pour rembourser le trop-perçu sur les traitements des mois de septembre et décembre 2020, pour un montant de

240 euros. Par un courrier en date du 19 juillet 2021, M. A a formé un recours gracieux auprès du préfet de police. Du silence gardé par l’administration pendant deux mois est née une décision implicite de rejet le 19 octobre 2021. Par la présente requête, M. A doit être regardé comme demandant au tribunal d’annuler la décision du 17 mars 2021, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de police :

2. Aux termes de l’article R. 421-5 du code de justice administrative : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. »

3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l’obligation d’informer l’intéressé sur les voies et délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance.

4. Il ressort des pièces du dossier que le courrier du 17 mars 2021 informant M. A qu’il ne pourrait plus bénéficier de la prime « OPJ » et que des retenues sur traitement seraient opérées ne mentionnait pas les délais et voies de recours applicables. Par suite, la fin de

non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête opposée par le préfet de police ne peut être accueillie.

Sur les conclusions à fins d’annulation :

5. D’une part, aux termes de l’article 8 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, en vigueur à la date de la décision attaquée, le droit syndical est garanti aux fonctionnaires qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. Aux termes de l’article 23 bis de la même loi : " I.- Sous réserve des nécessités du service, le fonctionnaire en position d’activité ou de détachement qui, pour l’exercice d’une activité syndicale, bénéficie d’une décharge d’activité de services ou est mis à la disposition d’une organisation syndicale, est réputé conserver sa position statutaire. [] « . Aux termes de l’article 20 de la même loi : » Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. [] ".

6. D’autre part, aux termes de l’article 12 du décret du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale : « L’agent qui consacre une quotité de temps de travail au moins égale à 70 % et inférieure à 100 % d’un service à temps plein à une activité syndicale a droit au versement de l’ensemble des primes et indemnités attachées à son grade ou aux fonctions qu’il continue d’exercer. / Le taux appliqué à ces primes et indemnités est celui correspondant à l’exercice effectif de fonctions à temps plein. »

7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fonctionnaire de l’Etat qui bénéficie d’une décharge partielle de service pour l’exercice d’un mandat syndical a droit, durant l’exercice de ce mandat, au versement de l’ensemble des primes et indemnités qui lui sont attribuées au titre des fonctions qu’il continue d’exercer, au taux déterminé pour les fonctions effectivement exercées appliqué sur la base d’un temps plein, à l’exception des indemnités représentatives de frais et des indemnités destinées à compenser des charges et contraintes particulières, tenant notamment à l’horaire, à la durée du travail ou au lieu d’exercice des fonctions, auxquelles le fonctionnaire n’est plus exposé du fait de la décharge de service.

8. Aux termes de l’article 1 du décret du 27 septembre 2016 relatif à l’attribution d’une prime liée à l’exercice des attributions d’officier de police judiciaire aux fonctionnaires du corps d’encadrement et d’application de la police nationale : " Une prime forfaitaire liée aux attributions d’officier de police judiciaire peut être attribuée aux personnels suivants : / 1° Les fonctionnaires relevant du corps d’encadrement et d’application de la police nationale habilités dans les conditions prévues à l’article 16 du code de procédure pénale et affectés sur un poste identifié au sein d’une liste fixée par arrêté du ministre de l’intérieur ; [] ".

9. Il est constant que M. A est habilité depuis le 24 février 2014 à exercer les attributions attachées à la qualité d’officier de police judiciaire, qu’il est affecté, depuis

le 2 mai 2007, à la brigade de répression du banditisme de la préfecture de police de Paris et qu’il bénéficie, au titre de l’année 2020, d’une décharge partielle de service pour l’exercice d’un mandat syndical de 70 %. Par suite, en retirant à M. A le bénéfice de la prime dite « OPJ » à compter du 1er juillet 2020 et en opérant des retenues sur traitement sur les mois de septembre et décembre 2020 correspondant au trop-perçu, le préfet de police a méconnu les dispositions des textes précités.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à demander l’annulation de la décision du 17 mars 2021, ensemble la décision implicite en date du 19 octobre 2021 rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

11. D’une part, l’exécution du présent jugement implique nécessairement que le préfet de police rétablisse le bénéfice de la prime liée à l’exercice des attributions d’officier de police judiciaire aux fonctionnaires du corps d’encadrement et d’application de la police nationale à M. A, à compter du 1er juillet 2020, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

12. D’autre part, elle implique nécessairement que le préfet de police rembourse M. A des retenues opérées sur les traitements des mois de septembre et décembre 2020, après déduction de la prime trimestrielle de 150 euros brut appliquée aux fonctionnaires ayant exercé effectivement les attributions d’officier de police judiciaire mais ne remplissant plus les conditions pour continuer à les exercer éventuellement déjà versée, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent jugement.

Sur les frais liés au litige :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à M. A de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 17 mars 2021 du préfet de police est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de rétablir le bénéfice de la prime liée à l’exercice des attributions d’officier de police judiciaire aux fonctionnaires du corps d’encadrement et d’application de la police nationale à M. A, à compter du 1er juillet 2020, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police rembourse M. A des retenues opérées sur les traitements des mois de septembre et décembre 2020, après déduction de la prime trimestrielle de 150 euros brut appliquée aux fonctionnaires ayant exercé effectivement les attributions d’officier de police judiciaire mais ne remplissant plus les conditions pour continuer à les exercer éventuellement déjà versée, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent jugement.

Article 4 : L’Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B A, au préfet de police et à

Me Cessieux.

Délibéré après l’audience du 12 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Ladreyt, président,

M. Gandolfi, premier conseiller,

Mme Leravat, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022.

La rapporteure,

C. C

Le président,

J-P. LADREYT

La greffière,

L. SUEUR

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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