Tribunal administratif de Pau, 2ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100883

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Sur la décision

Référence :
TA Pau, 2e ch., 30 déc. 2022, n° 2100883
Juridiction : Tribunal administratif de Pau
Numéro : 2100883
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

I- Par une requête, enregistrée le 9 avril 2021, sous le n° 2100883, Mme D A, représentée par Me David, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la préfète des Landes sur sa réclamation du 5 janvier 2021 présentée sur le fondement de l’article R.181-52 du code de l’environnement en vue d’obtenir qu’elle fixe des prescriptions complémentaires à l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 concernant les conditions d’exploitation de l’usine Celsa France ;

2°) d’ordonner la réformation du chapitre 6.2 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif aux « niveaux acoustiques » afin :

— d’y intégrer des horaires de fonctionnement et de mise à l’arrêt de l’usine Celsa France durant la nuit, le samedi, le dimanche et les jours fériés ;

— d’interdire à Celsa France toute nuisance sonore durant ces périodes ;

— d’imposer une isolation phonique des hangars de l’usine Celsa France ;

— de limiter plus strictement le bruit lors de la journée, notamment de prévoir un aménagement des lâchés de ferrailles lors des déchargements de bateaux et de camions ainsi que sur les tapis roulants à l’intérieur de l’usine ;

— de contrôler l’émergence spectrale pour réduire les nuisances provoquées par les bruits gênants ;

— d’imposer un contrôle permanent et indépendant des nuisances sonores sur le site et de mettre en place un système automatisé d’alerte ;

3°) d’ordonner la réformation du chapitre 4 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif à la « protection des ressources en eau et des milieux aquatiques » afin :

— d’interdire tout rejet dans les milieux aquatiques de cadmium, de HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques), de mercure et de ses composés ;

— de diminuer les concentrations maximales de plomb et d’arsenic dans les rejets à 7 microgrammes par litre ;

— de retirer l’autorisation de rejets dans le milieu extérieur (aquatique et infiltration dans les sols) en cas de « fortes pluies » et limiter les rejets à 4 par an uniquement après contrôle et lorsque les concentrations en polluants sont inférieures aux seuils de l’arrêté modifié ;

— d’instaurer un système d’alerte en cas de dépassement des valeurs maximales de rejets ou en cas de rejet de substances non autorisées ;

— de prévoir un arrêt total et automatique de l’exploitation en cas de dépassement des valeurs maximales de rejets ou en cas de rejet de substances non autorisées jusqu’à la mise en place de mesures de correction ;

— d’ordonner la mise en place de prélèvements continus de contrôle des pollutions industrielles dans l’Adour et sur les plages d’Anglet, de Tarnos et de Biarritz ;

4°) d’ordonner la réformation du chapitre 3.2 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif aux « Conditions de rejet » afin :

— de limiter les émissions autorisées de NOx, (oxyde d’azote) aux valeurs limites préconisées soit 100 mg/Nm3 pour l’ensemble des conduits d’évacuation ;

— d’imposer dès à présent une limite de 100 mg/Nm3 pour les émissions de CO (monoxyde de carbone) dans tous les conduits de sorties à compter du 1er janvier 2025 ;

— d’établir des limites pour les rejets de particules fines (Pm10, Pm 2.5, Pm 1.0, Pm0.1) ;

— de modifier les limites maximales d’émission de l’article 3.2.5 et d’ordonner la mise en place de mesures concrètes de ces limites ;

— d’interdire les rejets atmosphériques de métaux lourds dont l’arsenic, le mercure, le plomb et le titane ainsi que les émissions de dioxines et de furannes (PCDD-F) ;

5°) d’ordonner la réformation du chapitre 2 de l’arrêté n° 2018-450 du 30 juillet 2018 relatif aux « Conditions de rejet » afin :

— d’intégrer une obligation de dépollution permanente du site à l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016, notamment par excavation des terres polluées au plomb sur tout le site, y compris à l’intérieur des bâtiments existants et à l’extérieur, autour des zones historiques de stockages ;

— d’ordonner la réalisation d’une étude d’impact indépendante des valorisations déjà effectuées des réfractaires pollués au plomb ;

— d’ordonner la réalisation d’une étude de pollution des sols par carottages sur l’ensemble du site afin de déterminer l’étendue et la profondeur des pollutions aux plomb, chrome et zinc, par un prestataire indépendant non choisi par l’industriel ;

— d’ordonner la mise en place d’un plan de dépollution en filière d’enfouissement/retraitement hors site ;

6°) d’ordonner, sur le fondement de l’article R. 181-45 alinéa 1 du code de l’environnement, la saisine, pour inspection de l’ensemble du site, de l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), de l’agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), de l’agence de sûreté nucléaire (ASN), et de l’agence de transition écologique (ADEME) ;

7°) d’ordonner la réformation de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 ainsi que les arrêtés modificatifs n° 2018-450 du 30 juillet 2018 et n° 2019-62 du 25 janvier 2019 afin d’instaurer un contrôle continu par les autorités préfectorales des alertes émises par les portiques de détection radioactive ainsi qu’un contrôle du matériel de détection radioactive lui-même par la mise en place d’un suivi des allumages/extinction des portiques de détection ;

8°) d’ordonner la réformation du titre 5 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 afin :

— d’introduire un contrôle des filières de déchets industriels et non industriels, dangereux et non-dangereux, contrôle devant faire l’objet d’un rapport mensuel mentionnant les volumes de déchets traités, les filières utilisées et le taux de recyclage obtenu pour chaque type de déchet et transmis à l’Inspection des installations classées, à la sous-préfecture de Bayonne, à la sous-préfecture de Dax et au SPPPI (Secrétariat Permanent pour la Prévention des Pollutions Industrielles) – Estuaire de l’Adour, pour publication sur son site internet ;

— d’interdire l’épandage des boues au profit d’un retraitement par une filière spécialisée en dehors de l’enceinte de l’entreprise ;

9°) d’enjoindre à la préfète des Landes de prendre les mesures mettant en œuvre les réformations réclamées, sous astreinte de 100 000 euros par jour de retard, passé un délai de 6 mois à compter du jugement à intervenir ;

10°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— elle a intérêt à agir dès lors qu’elle subit quotidiennement les pollutions et nuisances provoquées par l’usine ;

— s’agissant des pollutions acoustiques :

* des signalements démontrent des dépassements des seuils limites fixés par l’arrêté sans que l’usine n’apporte de justification satisfaisante ;

* des mesures des niveaux sonores révèlent des dépassements des seuils limites fixés par l’arrêté ;

* aucune mesure concrète n’a été prise pour réduire le bruit ;

— s’agissant des pollutions aquatiques :

* le chapitre 4 de l’arrêté du 24 mai 2016 est imprécis dès lors qu’il autorise des rejets d’eaux usées dans l’Adour « lors d’épisodes de fortes pluies », justifiant ainsi la suppression de cette mention ;

* les prescriptions de l’arrêté du 24 mai 2016 sont insuffisantes au regard des objectifs de la note technique de 2015 du ministère de l’environnement de réduction et de suppression d’émissions des matières dangereuses ;

* la périodicité des contrôles des rejets des eaux est trop étendue ;

— s’agissant des pollutions atmosphériques :

* les limites d’émission en matière d’oxyde d’azote sont trop élevées au regard de l’arrêté du 3 août 2018 transposant la directive européenne du 25 novembre 2015 ;

* des valeurs limites d’émission de monoxyde de carbone devraient être intégrées dans l’autorisation environnementale de l’usine ;

* les limites maximales d’émission d’autres polluants tels que les particules fines et les métaux lourds admises par l’arrêté du 24 mai 2016 autorisées sont trop élevées, de sorte que les émissions devraient être mieux contrôlées ;

— s’agissant de la pollution des sols, l’arrêté n° 2018-450 du 30 juillet 2018 ne prévoit aucun plan satisfaisant de dépollution des sols à l’intérieur et à l’extérieur de l’usine alors que des métaux lourds tels que le plomb les contaminent régulièrement ;

— s’agissant des risques de radioactivité :

* le site présente un risque important lié à la radioactivité qui n’est pas suffisamment surveillée ;

* aucun contrôle n’est effectué quant à l’arrêt des portiques détectant la radioactivité, ni sur la fonctionnalité de ces détecteurs ;

— s’agissant des déchets :

* l’arrêté du 24 mai 2016 ne prévoit pas de suivi de la filière des déchets après évacuation ;

* les conditions d’épandages ne sont pas envisagées par l’autorisation environnementale, et les boues traitant les eaux souillées sont évacuées sans contrôle.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 août 2021, la préfète des Landes et le préfet des Pyrénées-Atlantiques concluent, à titre principal, à l’irrecevabilité de la requête et à titre subsidiaire à son rejet au fond.

Ils font valoir que :

— la requête est tardive, dès lors que les arrêtés attaqués sont devenus définitifs avant l’introduction du recours gracieux ;

— les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2021, la société par actions simplifiée (SAS) Celsa France, représentée par Me Hourcade, conclut, à titre principal, à l’irrecevabilité de la requête, à titre subsidiaire à son rejet au fond, et en toute hypothèse à ce que soit mise à la charge de Mme A une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la requérante n’a pas d’intérêt lui donnant qualité pour agir ;

— la requête est tardive, dès lors que la requérante demande la réformation des arrêtés du 24 mai 2016, du 30 juillet 2018 et du 25 janvier 2019, qui sont devenus définitifs ;

— les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 23 octobre 2022 Mme A conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et demande en outre au tribunal, de juger de la date d’entrée en service du laminoir, et à titre subsidiaire, d’ordonner avant dire droit, une mesure d’expertise portant sur l’évaluation des pollutions engendrées par le fonctionnement de l’usine Celsa.

Par un mémoire enregistré le 21 octobre 2022 la société Celsa France conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

Par une ordonnance du 6 octobre 2022 la clôture de l’instruction a été fixée au 28 octobre 2022.

II- Par une requête, enregistrée le 9 avril 2021, sous le n° 2100884 Mme D A, représentée par Me David, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet des Pyrénées-Atlantiques sur sa réclamation du 5 janvier 2021 présentée sur le fondement de l’article R.181-52 du code de l’environnement en vue d’obtenir qu’il fixe des prescriptions complémentaires à l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 concernant les conditions d’exploitation de l’usine Celsa France ;

2°) d’ordonner la réformation du chapitre 6.2 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif aux « niveaux acoustiques » afin :

— d’y intégrer des horaires de fonctionnement et de mise à l’arrêt de l’usine Celsa France durant la nuit, le samedi, le dimanche et les jours fériés ;

— d’interdire à Celsa France toute nuisance sonore durant ces périodes ;

— d’imposer une isolation phonique des hangars de l’usine Celsa France ;

— de limiter plus strictement le bruit lors de la journée, notamment de prévoir un aménagement des lâchés de ferrailles lors des déchargements de bateaux et de camions ainsi que sur les tapis roulants à l’intérieur de l’usine ;

— de contrôler l’émergence spectrale pour réduire les nuisances provoquées par les bruits gênants ;

— d’imposer un contrôle permanent et indépendant des nuisances sonores sur le site et de mettre en place un système automatisé d’alerte ;

3°) d’ordonner la réformation du chapitre 4 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif à la « protection des ressources en eau et des milieux aquatiques » afin :

— d’interdire tout rejet dans les milieux aquatiques de cadmium, de HAP, de mercure et de ses composés ;

— de diminuer les concentrations maximales de plomb et d’arsenic dans les rejets à 7 microgrammes par litres ;

— de retirer l’autorisation de rejets dans le milieu extérieur (aquatique et infiltration dans les sols) en cas de « fortes pluies » et limiter les rejets à 4 par an uniquement après contrôle et lorsque les concentrations en polluants sont inférieures aux seuils de l’arrêté modifié ;

— d’instaurer un système d’alertes en cas de dépassement des valeurs maximales de rejets ou en cas de rejet de substances non autorisées ;

— de prévoir un arrêt total et automatique de l’exploitation en cas de dépassement des valeurs maximales de rejets ou en cas de rejet de substances non autorisées jusqu’à mise en place de mesures de correction ;

— d’ordonner la mise en place de prélèvements continus de contrôle des pollutions industrielles dans l’Adour et sur les plages d’Anglet, de Tarnos et de Biarritz.

4°) d’ordonner la réformation du chapitre 3.2 de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 relatif aux « Conditions de rejet » afin :

— de limiter les émissions autorisées de NOx, aux valeurs limites préconisées soit 100 mg/Nm3 pour l’ensemble des conduits d’évacuation ;

— d’imposer dès à présent une limite de 100 mg/Nm3 pour les émissions de CO dans tous les conduits de sorties à compter du 1er janvier 2025 ;

— d’établir des limites pour les rejets de particules fines (Pm10, Pm 2.5, Pm 1.0, Pm0.1) ;

— de modifier les limites maximales d’émission de l’article 3.2.5 et ordonner la mise en place de mesures concrètes de ces limites ;

— d’interdire les rejets atmosphériques de métaux lourds dont l’arsenic, le mercure, le plomb et le titane ainsi que les émissions de dioxines et de furannes (PCDD-F) ;

5°) d’ordonner la réformation du chapitre 2 de l’arrêté n°2018-450 du 30 juillet 2018 relatif aux « Conditions de rejet » afin :

— d’intégrer une obligation de dépollution permanente du site à l’arrêté du 24 mai 2016, notamment par excavation des terres polluées au plomb sur tout le site, y compris à l’intérieur des bâtiments existants et à l’extérieur, notamment autour des zones historiques de stockages ;

— d’ordonner la réalisation d’une étude d’impact indépendante des valorisations déjà effectuées des réfractaires pollués au plomb ;

— d’ordonner la réalisation d’une étude de pollution des sols par carottages sur l’ensemble du site afin de déterminer l’étendue et la profondeur des pollutions aux plomb, chrome et zinc, par un prestataire indépendant non choisi par l’industriel ;

— d’ordonner la mise en place d’un plan de dépollution en filière d’enfouissement/retraitement hors site ;

6°) d’ordonner, sur le fondement de l’article R. 181-45 alinéa 1 du code de l’environnement, la saisine, pour inspection de l’ensemble du site, de l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), de l’agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), de l’agence de sûreté nucléaire (ASN), et de l’agence de transition écologique (ADEME) ;

7°) d’ordonner la réformation de l’arrêté n° 2016-227 du 24 mai 2016 ainsi que les arrêtés modificatifs n° 2018-450 du 30 juillet 2018 et n° 2019-62 du 25 janvier 2019 afin d’instaurer un contrôle continu par les autorités préfectorales des alertes émises par les portiques de détection radioactive ainsi qu’un contrôle du matériel de détection radioactive lui-même par la mise en place d’un suivi des allumages/extinction des portiques de détection ;

8°) d’ordonner la réformation du titre 5 de l’arrêté n°2016-227 du 24 mai 2016 afin :

— d’introduire un contrôle des filières de déchets industrielles et non industrielles, dangereux et non-dangereux, contrôle devant faire l’objet d’un rapport mensuel mentionnant les volumes de déchets traités, les filières utilisées et le taux de recyclage obtenu pour chaque type de déchet et transmis à l’Inspection des installations classées, à la sous-préfecture de Bayonne, à la sous-préfecture de Dax et au SPPPI (Secrétariat Permanent pour la Prévention des Pollutions Industrielles) – Estuaire de l’Adour, pour publication sur son site internet ;

— d’interdire l’épandage des boues au profit d’un retraitement par une filière spécialisée en dehors de l’enceinte de l’entreprise ;

9°) d’enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de prendre les mesures mettant en œuvre les réformations réclamées, sous astreinte de 100 000 euros par jour de retard, passé un délai de 6 mois à compter du jugement à intervenir ;

10°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— elle a intérêt à agir dès lors qu’elle subit quotidiennement les pollutions et nuisances provoquées par l’usine ;

— s’agissant des pollutions acoustiques :

* des signalements démontrent des dépassements des seuils limites fixés par l’arrêté sans que l’usine n’apporte de justification satisfaisante ;

* des mesures des niveaux sonores révèlent des dépassements des seuils limites fixés par l’arrêté ;

* aucune mesure concrète n’a été prise pour réduire le bruit ;

— s’agissant des pollutions aquatiques :

* le chapitre 4 de l’arrêté du 24 mai 2016 est imprécis dès lors qu’il autorise des rejets d’eaux usées dans l’Adour « lors d’épisodes de fortes pluies », justifiant ainsi la suppression de cette mention ;

* les prescriptions de l’arrêté du 24 mai 2016 sont insuffisantes au regard des objectifs de la note technique de 2015 du ministère de l’environnement de réduction et de suppression d’émissions des matières dangereuses ;

* la périodicité des contrôles des rejets des eaux est trop étendue ;

— s’agissant des pollutions atmosphériques :

* les limites d’émission en matière d’oxyde d’azote sont trop élevées au regard de l’arrêté du 3 août 2018 transposant la directive européenne du 25 novembre 2015 ;

* des valeurs limites d’émission de monoxyde de carbone devraient être intégrées dans l’autorisation environnementale de l’usine ;

* les limites maximales d’émission d’autres polluants tels que les particules fines et les métaux lourds admises par l’arrêté du 24 mai 2016 autorisées sont trop élevées, de sorte que les émissions devraient être mieux contrôlées ;

— s’agissant de la pollution des sols, l’arrêté n° 2018-450 du 30 juillet 2018 ne prévoit aucun plan satisfaisant de dépollution des sols à l’intérieur et à l’extérieur de l’usine alors que des métaux lourds tels que le plomb les contaminent régulièrement ;

— s’agissant des risques de radioactivité :

* le site présente un risque important lié à la radioactivité qui n’est pas suffisamment surveillé ;

* aucun contrôle n’est effectué quant à l’arrêt des portiques détectant la radioactivité, ni sur la fonctionnalité de ces détecteurs ;

— s’agissant des déchets :

* l’arrêté du 24 mai 2016 ne prévoit pas de suivi de la filière des déchets après évacuation ;

* les conditions d’épandages ne sont pas envisagées par l’autorisation environnementale, et les boues traitant les eaux souillées sont évacuées sans contrôle.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 août 2021, la préfète des Landes et le préfet des Pyrénées-Atlantiques concluent, à titre principal, à l’irrecevabilité de la requête, et à titre subsidiaire à son rejet au fond.

Ils font valoir que :

— la requête est tardive, dès lors que les arrêtés attaqués sont devenus définitifs avant l’introduction du recours gracieux ;

— les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2021, la société par actions simplifiée (SAS) Celsa France, représentée par Me Hourcade, conclut, à titre principal, à l’irrecevabilité de la requête et, à titre subsidiaire à son rejet au fond, et en toute hypothèse à ce que soit mise à la charge de Mme A une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la requérante n’a pas d’intérêt lui donnant qualité pour agir ;

— la requête est tardive, dès lors que la requérante demande la réformation des arrêtés du 24 mai 2016, du 30 juillet 2018 et du 25 janvier 2019, qui sont devenus définitifs ;

— les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 23 octobre 2022 Mme A conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et demande en outre au tribunal, de juger de la date d’entrée en service du laminoir, et à titre subsidiaire, d’ordonner avant dire droit, une mesure d’expertise portant sur l’évaluation des pollutions engendrées par le fonctionnement de l’usine Celsa.

Par un mémoire enregistré le 21 octobre 2022 la société Celsa France conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

Par une ordonnance du 6 octobre 2022 la clôture de l’instruction a été fixée au 28 octobre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

— la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau ;

— la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe ;

— la directive (UE) 2015/2193 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l’atmosphère en provenance des installations de combustion moyennes ;

— le code de l’environnement ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de Mme Réaut, rapporteur public,

— et les observations de Me Bergue et de Me David représentant Mme A, de Mme B, représentant le préfet des Pyrénées-Atlantiques et la préfète des Landes et de Me Hourcade, représentant la société Celsa France.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté inter-préfectoral du 24 mai 2016 les préfets des Pyrénées-Atlantiques et des Landes ont autorisé l’aciérie installée sur les territoires des communes de Tarnos (40) et de Boucau (64), à poursuivre son activité, autorisée depuis 1995, au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement, et reprise en 2008 par la société Celsa France et à l’étendre par la création d’un laminoir à chaud. Par des arrêtés du 30 juillet 2018 et du 25 janvier 2019, les mêmes autorités ont assorti cette autorisation de prescriptions complémentaires. Par une réclamation du 5 janvier 2021, Mme A a respectivement saisi le préfet des Pyrénées-Atlantiques et la préfète des Landes, d’une réclamation fondée sur les dispositions de l’article R.181-52 du code de l’environnement. Par les présentes requêtes, Mme A demande au tribunal, outre l’annulation des décisions implicites de rejet, nées du silence gardé sur sa réclamation, qu’il fasse usage de ses pouvoirs de juge de plein contentieux en réformant l’arrêté d’autorisation du 24 mai 2016 et les arrêtés subséquents.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées enregistrées sous les n° 2100883 et n° 2100884 présentées par Mme A en vue d’obtenir l’annulation de deux décisions ayant le même objet et la réformation des mêmes arrêtés préfectoraux présentent à juger les mêmes questions et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article R.181-52 du code de l’environnement :

3. Aux termes de l’article L. 181-3 du code de l’environnement : « I. – L’autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu’elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. () ». Aux termes de l’article L. 511-1 de ce code : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour l’utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l’utilisation rationnelle de l’énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. () ». Aux termes de l’article R. 181-52 du même code : « Les tiers intéressés peuvent déposer une réclamation auprès du préfet, à compter de la mise en service du projet autorisé, aux seules fins de contester l’insuffisance ou l’inadaptation des prescriptions définies dans l’autorisation, en raison des inconvénients ou des dangers que le projet autorisé présente pour le respect des intérêts mentionnés à l’article L. 181-3. Le préfet dispose d’un délai de deux mois, à compter de la réception de la réclamation, pour y répondre de manière motivée. A défaut, la réponse est réputée négative. S’il estime la réclamation fondée, le préfet fixe des prescriptions complémentaires dans les formes prévues à l’article R. 181-45 ».

4. Il résulte de ces dispositions que les tiers intéressés peuvent agir auprès du préfet s’ils estiment que les prescriptions définies dans l’autorisation d’une installation classée pour la protection de l’environnement mise en service sont insuffisantes ou inadaptées en raison des inconvénients ou des dangers qu’elle présente pour le respect des intérêts mentionnés à l’article L.511-1. Ils peuvent contester devant le juge administratif l’éventuel refus du préfet de fixer des prescriptions complémentaires à l’autorisation initiale. Il appartient alors au juge administratif d’apprécier si le demandeur justifie d’un intérêt suffisamment direct lui donnant qualité pour déposer cette réclamation compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour lui l’installation en cause, appréciés notamment en fonction de sa situation et de la configuration des lieux, et pour demander l’annulation du rejet de cette réclamation.

5. Il résulte de l’instruction que Mme A est domiciliée 10 avenue de la Bécasse sur le territoire de la commune d’Anglet, soit à une distance d’environ 1,5 km du terrain d’assiette de l’usine exploitée par la société Celsa France, sur le territoire des communes de Tarnos et de Boucau, et dont elle est séparée par l’Adour et la forêt du Pignada. Il s’ensuit qu’elle ne peut être regardée, compte tenu de cette localisation, comme ayant la qualité de riveraine de cette exploitation. Elle se prévaut néanmoins, au soutien de son recours, de sa qualité de victime potentielle des nuisances engendrées par le fonctionnement de cette installation. Toutefois, alors que la charge de la preuve lui incombe, et que son intérêt à agir est combattu en défense, elle n’apporte aucun élément permettant de tenir pour établi qu’en raison de la topographie des lieux, de la direction des courants ou des vents dominants, elle se trouverait personnellement exposée aux nuisances sonores, ni de considérer qu’elle serait potentiellement exposée aux pollutions aquatiques ou atmosphériques susceptibles de provenir du fonctionnement de l’usine.

6. Dans ces conditions, Mme A ne justifie pas être un tiers intéressé au sens de l’article R. 181-52 du code de l’environnement et ne dispose pas d’un intérêt à agir suffisamment direct pour former une réclamation au titre de cet article, ni par suite, d’un intérêt à contester le rejet de cette réclamation. Il s’ensuit que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’autre fin de non-recevoir opposée en défense, les conclusions aux fins d’annulation et de réformation des requêtes de Mme A doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Mme A, ayant dans les présentes instances, la qualité de partie perdante, les conclusions qu’elle présente au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu’être rejetées. Par ailleurs, il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce même titre par la société Celsa France à l’encontre de Mme A.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 2100883 et n° 2100884 de Mme A sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Celsa France au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme D A, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société par actions simplifiée (SAS) Celsa France.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Pyrénées-Atlantiques et à la préfète des Landes.

Délibéré après l’audience du 19 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Quemener, présidente,

Mme Genty, première conseillère,

Mme Beneteau, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La présidente-rapporteure,

Signé : V. C

L’assesseure,

Signé : F. GENTYLa greffière,

Signé : A. STRZALKOWSKA

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition :

La greffière,

Signé : A. STRZALKOWSKA

N°2100883

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Tribunal administratif de Pau, 2ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100883