Tribunal administratif de Pau, 2ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2000511

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Sur la décision

Référence :
TA Pau, 2e ch., 30 déc. 2022, n° 2000511
Juridiction : Tribunal administratif de Pau
Numéro : 2000511
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 mars 2020 et le 3 septembre 2020, M. B A, représenté par Me Kediri-Bonny, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 2 octobre 2019 par laquelle la présidente de la communauté d’agglomération du grand Dax a confirmé le refus de reconnaissance d’imputabilité au service de la pathologie dont il souffre ;

2°) d’enjoindre à la communauté d’agglomération du grand Dax de lui verser un plein traitement à compter du premier arrêt de travail au titre du congé pour invalidité temporaire imputable au service, et de lui rembourser les frais de santé, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir ;

3°) de condamner la communauté d’agglomération du grand Dax à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et de troubles dans les conditions d’existence ;

4°) de mettre à la charge de la communauté d’agglomération du grand Dax une somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation en fait et en droit;

— elle est entachée d’erreur manifeste d’appréciation quant à l’imputabilité au service des lésions dont il souffre ;

— l’illégalité de la décision attaquée ayant conduit au versement d’une rémunération réduite de 50%, il a subi un trouble dans les conditions d’existence et un préjudice moral.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 août 2020 et le 15 décembre 2020, la communauté d’agglomération du grand Dax, représentée par Me Palmier, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A une somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— les conclusions indemnitaires du requérant sont irrecevables, en l’absence de réclamation préalable ;

— les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour M. A a été enregistré le 13 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la sécurité sociale ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

— la loi n° du 26 janvier 1986 ;

— l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ;

— le décret n° du 30 juillet 1987 ;

— le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019.

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de Mme Réaut, rapporteure publique,

— et les observations de Me Kediri-Bonny, représentant M. A, et de Me Thomas, représentant la communauté d’agglomération du Grand Dax.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 10 janvier 2019, la présidente de la communauté d’agglomération du grand Dax a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de la pathologie dont souffrait M. A, agent d’entretien employé par la communauté d’agglomération du grand Dax. M. A a formé le 18 février 2019 un recours gracieux contre cet arrêté. Par décision du 2 octobre 2019, la présidente de la communauté d’agglomération du grand Dax a confirmé le refus de reconnaissance de cette imputabilité. M. A demande l’annulation de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 6° Refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir ; () « . Aux termes de l’article L. 211-5 du même code : » La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. Pour refuser de reconnaître la pathologie de M. A comme imputable au service, la décision du 2 octobre 2019 se réfère à l’avis de la commission de réforme dans sa séance du 20 septembre 2019, dont elle précise le caractère défavorable, cet avis étant par ailleurs joint à la décision, et indique que la collectivité confirme la décision de ne pas reconnaître la pathologie dont souffre M. A comme maladie professionnelle. Cette décision constitue en outre le rejet d’un recours gracieux qui n’est pas un recours administratif préalable obligatoire. Il suffit alors que la décision en cause rejetant le recours gracieux s’approprie la première décision pour qu’elle soit suffisamment motivée à condition que la première décision soit elle-même suffisamment motivée. Or l’arrêté du 10 janvier 2019 vise notamment l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, l’article 16 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l’organisation des comités médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, et se fonde sur ce qu’au vu des avis médicaux, et de l’avis défavorable de la commission de réforme du 2 août 2018, il ne peut être reconnu la pathologie dont souffre l’intéressé comme maladie professionnelle. Dans ces conditions, les décisions en litige exposent de manière suffisante les considérations de droit et de fait propres à la situation de M. A qui les fondent et, par suite, satisfont à l’exigence de motivation prescrite par les dispositions précitées des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration.

4. En deuxième lieu, aux termes de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : () 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l’intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. () / Toutefois, si la maladie provient de l’une des causes exceptionnelles prévues à l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit en état de reprendre son service ou jusqu’à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l’alinéa précédent, l’imputation au service de l’accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales () « . Aux termes de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, résultant de l’ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique : » I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l’incapacité permanente du fonctionnaire. () IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. « . Aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : » Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ".

5. D’une part, l’application des dispositions précitées de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 est manifestement impossible en l’absence d’un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l’octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Cet article n’est donc entré en vigueur, en tant qu’il s’applique à la fonction publique territoriale, qu’à la date d’entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l’intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d’Etat, par le VI de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l’article 10 de l’ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de l’ordonnance du 19 janvier 2017, est demeuré applicable jusqu’à l’entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019. D’autre part, avant l’entrée en vigueur de ces dispositions, aucune disposition ne rendait applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale qui demandent le bénéfice des dispositions du 2° de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984, les dispositions précitées de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d’origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau. En cet état du droit, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduise à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service. Par ailleurs, les droits des agents publics en matière d’accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l’accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée.

6. M. A ne peut utilement soutenir que les comptes-rendus médicaux, en date du 27 juin 2017, 11 juillet 2017, 14 novembre 2017 et 2 juillet 2018 relatifs aux pathologies dont il souffre, pour lesquelles il se prévaut de la présomption d’imputabilité en application de l’ordonnance du 19 janvier 2017, sont postérieurs à cette ordonnance, dès lors, d’une part, qu’ils font état de pathologies diagnostiquées antérieurement et, d’autre part, qu’ils sont, en tout état de cause, antérieurs à l’entrée en vigueur des dispositions du décret du 10 avril 2019. Par suite, M. A n’est pas fondé à invoquer l’application de la présomption d’imputabilité découlant de l’entrée en vigueur de ces dernières dispositions.

7. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A souffrait de lombalgies chroniques anciennes liées à un canal lombaire étroit, tandis qu’une hernie discale a été diagnostiquée postérieurement à son arrêt de travail du 6 août 2015. Si les rapports médicaux des docteurs Tondeur et Péan, rendus respectivement le 19 juillet 2017 et le 19 novembre 2019, ne s’accordent pas sur l’existence ou non d’une hernie discale à l’étage L4-L5 à la lecture de l’imagerie de recherche médicale pratiquée en 2015, le lien direct d’une telle hernie avec les fonctions exercées par M. A, comportant certes de la manutention, n’est pas établi, dès lors que les médecins relèvent par ailleurs une déformation diffuse des corps vertébraux en rapport avec des séquelles d’ostéochondrose de croissance et la présence d’une arthrose disco-somatique associée au canal lombaire étroit. M. A ne peut par ailleurs utilement invoquer l’aggravation des lésions constatées par son médecin traitant dans son certificat du 9 juillet 2018, par rapport à son état médical constaté au mois de juillet 2017, ce constat concernant une période postérieure à la cessation des fonctions résultant du congé de maladie accordé à l’intéressé à compter du 6 août 2015. Par suite, sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise, eu égard aux pathologies propres de l’intéressé, évoluant pour leur propre compte, en l’état des pièces versées au débat, et ainsi que l’a relevé la commission de réforme dans son avis du 20 septembre 2019, la présidente de la communauté d’agglomération du grand Dax n’a pas fait une inexacte application de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en ne reconnaissant pas la pathologie dont souffre M. A au titre de la maladie professionnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d’annulation de la requête de M. A doivent être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

9. La présente décision, qui rejette les conclusions aux fins d’annulation de la requête de M. A, n’implique aucune mesure d’exécution. Les conclusions à fin d’injonction de cette même requête ne peuvent, par suite, qu’être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d’indemnité :

10. Aux termes de l’article R. 421-1 du code de justice administrative : « La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d’une somme d’argent, elle n’est recevable qu’après l’intervention de la décision prise par l’administration sur une demande préalablement formée devant elle. () ».

11. M. A n’établit, ni même n’allègue avoir présenté, préalablement à l’introduction de sa requête, une réclamation indemnitaire à la communauté d’agglomération du grand Dax. Le contentieux n’est donc pas lié. La fin de non-recevoir opposée à ce titre par cette dernière doit ainsi être accueillie. Par suite, les conclusions aux fins d’indemnité de la requête de M. A doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent et le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. ».

13. En vertu des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent dès lors être rejetées. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. A la somme demandée par la communauté d’agglomération du Grand Dax au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d’agglomération du Grand Dax au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B A et à la communauté d’agglomération du Grand Dax.

Délibéré après l’audience du 8 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. de Saint-Exupéry de Castillon, président,

Mme Genty, première conseillère,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé

V. C

Le président,

Signé

F. DE SAINT-EXUPERY DE CASTILLONLa greffière,

Signé

A. STRZALKOWSKA

La République mande et ordonne au préfet des Landes en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition :

La greffière,

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