Tribunal administratif de Toulon, 4ème chambre, 26 décembre 2022, n° 2002449

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Toulon, 4e ch., 26 déc. 2022, n° 2002449
Juridiction : Tribunal administratif de Toulon
Numéro : 2002449
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Lyon, 24 juin 2020, N° 416727
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 septembre 2020 et 22 avril 2021, la société civile immobilière (SCI) Les Rives De La Croisette, représentée par Me Mendes Constante, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de surseoir à statuer dans l’attente de la réponse de la Cour de justice de l’Union européenne aux questions préjudicielles posées par le Conseil d’Etat dans sa décision n° 416727 du 25 juin 2020 et par la cour administrative d’appel de Lyon dans son arrêt avant dire droit du 18 mars 2021 n°s 19LY00501, 19LY00541 et 19LY01240 ;

2°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— la réponse qui sera donnée aux questions préjudicielles posées à la Cour de justice de l’Union européenne par le Conseil d’Etat dans sa décision n° 416727 du 25 juin 2020 et par la cour administrative d’appel de Lyon dans son arrêt du 18 mars 2021 n°s 19LY00501, 19LY00541 et 19LY01240 est déterminante pour la solution du litige ; dès lors, il y a lieu de surseoir à statuer dans l’attente de la réponse à ces questions préjudicielles ;

— elle a acheté deux parcelles de terrain avec un permis d’aménager six lots de terrains à bâtir, et une autre parcelle sur laquelle était édifiée une maison, puis elle a revendu les six lots de terrains à bâtir, après avoir procédé à la division des deux parcelles précitées, et la maison ; dès lors, les biens revendus n’ont pas fait l’objet de destructions ou transformations, notamment juridiques, entre leur achat et leur vente mais ils ont été l’objet d’une simple opération d’achat-revente ; par ailleurs, elle n’a pas déduit de taxe sur la valeur ajoutée lors de l’acquisition de ces biens ; dès lors, en application de l’article 268 du code général des impôts, le régime dérogatoire de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge était applicable à la vente des six terrains à bâtir et de la maison.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 mars 2021 et 28 avril 2021, la directrice du contrôle fiscal Sud-Est conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. B,

— les conclusions de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure publique,

— et les observations de Me Mendes Constante, pour la SCI Les Rives De La Croisette.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Les Rives De La Croisette, qui exerce une activité de marchand de biens, de rénovation, agrandissement, construction de biens immobiliers et de réalisation de lotissements, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au terme de laquelle, par une proposition de rectification en date du 26 juillet 2019, l’administration a partiellement remis en cause le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge dont avait entendu bénéficier la société au titre de la cession de six terrains à bâtir, réalisée le 5 juillet 2018. Par la présente requête, la société Les Rives De La Croisette demande, dans le dernier état de ses écritures, au tribunal, à titre principal, de surseoir à statuer dans l’attente de la réponse de la Cour de justice de l’Union européenne à des questions préjudicielles posées par le Conseil d’Etat et par la cour administrative d’appel de Lyon et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont ainsi été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2018.

Sur les conclusions à fin de décharge :

2. D’une part, le I de l’article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable, issu initialement de l’article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du b du 2 de l’article 266 du même code, l’assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.

3. D’autre part, aux termes de l’article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : « Les Etats membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition, la base d’imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d’achat ». L’article 268 du code général des impôts dispose en outre que : " S’agissant de la livraison d’un terrain à bâtir, ou d’une opération mentionnée au 2° du 5 de l’article 261 pour laquelle a été formulée l’option prévue au 5° bis de l’article 260, si l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d’imposition est constituée par la différence entre : 1° D’une part, le prix exprimé et les charges qui s’y ajoutent ; 2° D’autre part, selon le cas : a) soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l’acquisition du terrain ou de l’immeuble () ".

4. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l’objet d’une division parcellaire en vue d’en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d’assiette du bâtiment.

5. Par un unique acte notarié du 25 juillet 2017, la société requérante a acquis, au prix de 650 000 euros, auprès d’un particulier et de sa SCI, deux parcelles de terrain situées sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime, cadastrées section F n°s 2214 et 2520, de respectivement 2 437 m² et 4 681 m² et, au prix de 1 950 000 euros, une maison à usage d’habitation édifiée sur un terrain de 5 747 m² cadastré section F n° 2354. Par un premier acte du 30 juillet 2018, la société requérante a vendu, au prix de quatre millions d’euros, six terrains à bâtir, cadastrés section F n°s 3589 à 3594, d’une contenance totale de 7 665 m², provenant, in fine, pour partie de la division de la parcelle cadastrée F n° 2354, sur laquelle était édifié un bien à usage d’habitation, et, pour partie, des parcelles qui étaient initialement cadastrées section F n°s 2214 et 2520, après réalisation de diverses opérations intermédiaires de divisions et fusions de parcelles. Ces lots disposent d’un permis d’aménager permettant la création de six lots de terrains à bâtir qui avait été délivré le 3 avril 2017. Par un second acte du 30 juillet 2018, la société requérante a vendu, au prix de 1 400 000 euros, la maison à usage d’habitation précitée, située sur une nouvelle parcelle cadastrée section F n° 3588, d’une contenance ramenée à 1 886 m². Il résulte de ces éléments que les terrains à bâtir cédés par la société requérante constituaient, pour partie, lors de leur acquisition, un terrain à bâtir d’une superficie de 5 747 m² contenant un bien à usage d’habitation, la circonstance qu’un permis d’aménager avait été délivré le 3 avril 2017 ou que la maison n’aurait pas été détruite étant à ce titre sans influence. Par suite, c’est à bon droit que l’administration a remis en cause le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge pour la superficie des terrains à bâtir cédés le 30 juillet 2018, que l’administration évalue à 3 861 m², qui ont été détachés du terrain d’assiette du bien à usage d’habitation.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de surseoir à statuer dans l’attente de la réponse de la Cour de justice de l’Union européenne aux questions préjudicielles posées par le Conseil d’Etat dans sa décision n° 416727 du 25 juin 2020 et par la cour administrative d’appel de Lyon dans son arrêt du 18 mars 2021 n°s 19LY00501, 19LY00541 et 19LY01240, laquelle est au demeurant intervenue à la date à laquelle le tribunal statue, par l’ordonnance C-191/21 du 10 février 2022, que la société requérante n’est pas fondée à demander la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2018.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Les Rives De La Croisette est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la société civile immobilière Les Rives De La Croisette et à la directrice du contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l’audience du 5 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Bernabeu, présidente,

M. Hamon, premier conseiller,

M. Sportelli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 décembre 2022.

Le rapporteur,

Signé

T. B

La présidente,

Signé

M. A

La greffière,

Signé

E. PERROUDON

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour le greffier en chef,

Et par délégation,

La greffière.

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Tribunal administratif de Toulon, 4ème chambre, 26 décembre 2022, n° 2002449